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Fac • UNIVERSITÉS à jour de tous les textes et des dernières actualités constitutionnelles 4e édition EXoS lmd pauline tüRk • Isabelle thumeReL • Gilles touLemonde 18 exercices corrigés Les institutions de La Ve RépubLique Proposition de corrigé 1) Pourquoi le Conseil constitutionnel est-il amené à se prononcer trois fois sur le même sujet du « mariage pour tous » ? Selon quelles procédures y est-il invité et avec quels résultats ? (4 points) Le Conseil constitutionnel a été saisi à trois reprises de dispositions législatives relatives au mariage. Dans la première décision, no 2010-92 QPC, le Conseil constitutionnel avait été saisi le 16 novembre 2010 par la première chambre civile de la Cour de cassation sur le fonde- ment de l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par Mmes Corinne C. et Sophie H., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des articles 75 et 144 du Code civil. Le mariage y étant réservé à un couple composé d’un homme et une femme, les requérantes considéraient en être inconstitutionnellement exclues. Le Conseil constitutionnel a cependant considéré qu’aucune disposition constitutionnelle n’était violée par l’état du droit, et a rejeté la question prioritaire de constitutionnalité comme infondée. Il considère en effet que « le dernier alinéa de l’article 75 et l’article 144 du code civil [contestés] sont conformes à la Constitution ». Il s’agit là d’un contrôle de constitutionnalité opéré a posteriori à l’égard de dispositions législatives entrées en vigueur, en l’occurrence très anciennes. Le Conseil constitutionnel intervenait ainsi dans le cadre des attributions à lui nouvellement octroyées par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 et par la loi organique du 10 décembre 2009, permettant à un justiciable, au cours d’un procès, de soulever une question incidente de constitutionnalité. Filtrée par la juridiction suprême de l’ordre, en l’occurrence judiciaire, la QPC fut ici renvoyée par la Cour de cassation au Conseil constitutionnel, dont la position juridique fut, en réalité, une base de réflexion pour une future réforme législative. En effet, après l’élection du Président Hollande, en mai 2012, son gouvernement mettait en chantier une réforme du Code civil, portée par Mme Taubira, garde des Sceaux, tendant à ouvrir le mariage aux couples de même sexe, dont la discussion parlementaire devait être ponctuée de manifestations d’une partie de l’opinion conservatrice sur ce sujet. C’est dans ce contexte qu’intervient la deuxième décision, no 2013-669 DC, en mai 2013, par laquelle le Conseil constitutionnel est appelé à contrôler la constitutionna- lité de la loi finalement adoptée par les assemblées, mais non encore promulguée, dans le cadre – cette fois – d’un contrôle classique a priori (décision « DC »), pratiqué par le Conseil constitutionnel depuis le 16 juillet 1971 (décision fondatrice dite « Liberté d’association »). Le Conseil constitutionnel avait été saisi le 23 avril 2013, dans les condi- tions prévues à l’article 61, deuxième alinéa, de la Constitution, de la loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, à la fois par 60 députés et par 60 sénateurs. Ceux-ci mettaient ainsi parallèlement en œuvre un pouvoir de saisine qui THÈME 13 – La hiérarchie des normes 151 leur fut reconnu en 1974 (cf. la « réformette » – qui n’en fut pas une – de Valéry Giscard d’Estaing). Il s’agit ici pour les parlementaires de l’opposition, qui n’ont pas été entendus sur le terrain politique au cours de la procédure législative, d’obtenir un « dernier round », sur le terrain juridique, devant le Conseil constitutionnel. Faute d’avoir pu convaincre la majorité de l’inopportunité de la réforme tendant à ouvrir le mariage aux couples de même sexe, ils tentent de faire déclarer cette loi contraire à certaines dispo- sitions du bloc de constitutionnalité. Cependant, le Conseil constitutionnel est amené ici à rejeter le recours, en constatant après analyse que les dispositions nouvelles « ne méconnaissent pas les exigences constitutionnelles » dont il est le gardien. La loi pouvait donc être promulguée (loi du 17 mai 2013) et entrer en vigueur. C’est alors que le Conseil constitutionnel devait être saisi une troisième fois du sujet, et pour la deuxième fois dans le cadre d’une QPC, non plus cette fois par la Cour de cassa- tion mais par le Conseil d’État (décision no 369834 du 18 septembre 2013). Celui-ci décida en effet de renvoyer au juge constitutionnel du Palais Royal, dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, une question prioritaire de constitutionnalité posée par plusieurs requérants à l’occasion d’une instance en cours devant l’ordre de juridiction administratif. Était cette fois mise en cause, a posteriori, la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de plusieurs dispositions législatives tirées du Code civil (articles 34-1, 74 et 165) ainsi que de l’article L. 2122-18 du Code général des collectivités territoriales. La question posée au Conseil constitutionnel était de savoir si, en imposant aux officiers d’état civil de procéder au mariage de couples de même sexe, la loi du 17 mai 2013 avait violé des dispositions constitutionnelles, notamment en ne prévoyant pas le respect d’une « clause de conscience » des maires et adjoints aux maires concernés, heurtés, pour certains, dans leurs convictions personnelles par cette évolution. Pour la troisième fois, le Conseil constitutionnel rejette le recours, « considérant les articles 34-1, 74 et 165 du code civil ainsi que l’article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales conformes à la Constitution » (dispositif de la troisième décision). Le Conseil constitutionnel aura donc rejeté les trois recours en inconstitutionnalité présentés devant lui sur le sujet, refusant d’abroger les dispositions du Code civil dans leur version initiale (QPC no 1, décision no 2010-92 QPC), comme dans leur version nouvelle (QPC no 2, décision no 2013-353), et refusant, entre les deux, de faire échec à la loi opérant la réforme (décision no 2013-669 DC). 2) Peut-on déceler une contradiction dans le raisonnement du Conseil constitu- tionnel, entre les décisions no 1 et 2 ? Expliquez votre point de vue. (4 points) Il ressort de ces décisions que le Conseil constitutionnel a jugé conforme à la Constitu- tion aussi bien le dispositif législatif antérieur, qui interdisait le mariage aux homo- sexuels, que le dispositif issu de la loi du 17 mai 2013, qui le leur ouvrait. Le Conseil constitutionnel a-t-il changé d’avis ? Comment deux versions radicalement opposées de la même loi peuvent-elles être toutes deux constitutionnelles ? Le principe constitu- tionnel d’égalité s’accommode-t-il aussi bien d’une interdiction du mariage entre homo- sexuels que d’une ouverture au mariage pour tous ? Cette comparaison met bien en évidence les fondements de l’appréciation portée par le Conseil constitutionnel et les limites de son rôle, lorsqu’il opère un contrôle de 152 LES INSTITUTIONS DE LA V E RÉPUBLIQUE constitutionnalité de la loi, a priori ou a posteriori. En effet, il ne lui revient que de confronter les dispositions contestées aux normes de valeur constitutionnelle Dans la première décision proposée, le Conseil constitutionnel constate que le Code civil, dans sa version initiale réservant le mariage à un couple formé d’un homme et d’une femme, n’est contraire à aucune des dispositions constitutionnelles invoquées : ni au droit de mener une vie familiale normale, puisque la législation française permet aux couples homosexuels de vivre en concubinage ou de bénéficier du cadre juridique du pacte civil de solidarité, et que le droit à la vie familiale normale n’implique pas néces- sairement le droit de se marier ; ni à l’égalité devant la loi, principe qui permet de traiter différemment des personnes en situation différente ; ni à la liberté du mariage, puisque celle-ci ne « restreint pas la compétence que le législateur tient de l’article 34 de la Constitution pour fixer les conditions du mariage », tant qu’il ne « prive pas de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel », ce qui n’est pas le cas en l’occur- rence (voir considérant 7). Il délivre donc une décision de conformité. Dans la deuxième décision, bien qu’intervenant cette fois pour le contrôle d’une loi non encore promulguée, le raisonnement est comparable : le Conseil constitutionnel cons- tate que les nouvelles dispositions du Code civil qui autorisent le mariage des couples de même sexe ne sont pas davantage contraires à la Constitution. Elles ne heurtent aucun principe fondamental qui réserverait le mariage aux couples homme-femme, pas plus qu’elle ne porte atteinte « aux droits acquis nés de mariages antérieurs », rendant ainsi inopérant « le grief tiré de l’atteinte à la liberté du mariage, composante de la liberté personnelle protégée par les articles 2 et 4 de la Déclaration de 1789, et au droit au maintien des conventions légalement conclues, qui résulte de son article 4 ». Le Conseil constitutionnel ne retient ainsi aucun des motifs invoqués par les requérants (pas plus que d’autres non reproduits dans les extraits proposés), ce qui le conduit à valider la loi, autorisant sa promulgation. Il apparait bien, ici, que le Conseil constitutionnel est un « législateur négatif » au sens d’Hans Kelsen, c’est-à-dire un gardien uploads/S4/ lextenso-etudiant-histoire-du-droit-et-des-institutions-corrige-detaille.pdf
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- Publié le Aoû 02, 2022
- Catégorie Law / Droit
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