Le régime juridique des actes uniformes de l’OHADA Par Ismaël Mayéla, Conseille

Le régime juridique des actes uniformes de l’OHADA Par Ismaël Mayéla, Conseiller juridique. [Résumé : Les actes uniformes sont des actes pris pour l’adoption de règles commune à tous les Etats-Parties au traité relatif à l’harmonisation en Afrique du droit des affaires. Ils tirent leur valeur juridique du Traité qui lui-même tire sa valeur juridique des constitutions des Etats- Parties et doivent de ce fait être en tout point conforme à ces textes. Notre étude a pour objet la détermination des règles applicables aux actes uniformes afin d’éviter leur méconnaissance.] Le 17 octobre 1993 a été signé à Port-Louis le Traité relatif à l’Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique. Ce traité avait pour objet l'harmonisation du droit des affaires des Etats africains par l'élaboration et l'adoption de règles communes simples, modernes et adaptées à la situation de leurs économies. Pour l’adoption de ces règles, des actes qualifiés d’actes uniformes devaient être pris. Depuis l’entrée en vigueur du Traité, ont été adopté l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général du 17 avril 1997 abrogé et remplacé par l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général (AUDCG) du 15 décembre 2010, l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique du 17 avril 1997 abrogé et remplacé par l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique (AUSCGIE) du 30 janvier 2014, l’Acte uniforme portant organisation des sûretés du 17 avril 1997 abrogé et remplacé par l’Acte uniforme portant organisation des sûretés (AUS) du 15 décembre 2010, l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif du 10 avril 1998 abrogé et remplacé par l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif (AUPC) du 10 septembre 2015, l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage du 11 mars 1999 abrogé et remplacé par l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage (AUA) du 23 novembre 2017, l’Acte uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises du 24 mars 2000 abrogé et remplacé par l’Acte uniforme relatif au droit comptable et à l’information financière (AUDCIF) 26 janvier 2017, l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution (AUVE) du 10 juillet 1998, l’Acte uniforme relatif aux contrats de transport de marchandises par route (AUDTMR) du 22 mars 2003, l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés coopératives (AUSCOOP) du 15 décembre 2010 et l’Acte uniforme relatif à la médiation (AUM) du 23 février 2018. Ces actes uniformes sont régis par les dispositions des articles 5 à 20 du traité relatif à l’Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique tel que révisé le 17 octobre 2008 à Québec. Ces dispositions traitent de l’adoption, de la révision et de l’application des actes uniformes. La révision des actes uniformes étant en partie soumise aux dispositions du traité relatives à leur adoption, nous traiterons de ces deux questions ensemble. De ce fait, nous verrons premièrement l’adoption et la révision des actes uniformes (I) et deuxièmement l’application des actes uniformes (II). I. L’adoption et la révision des actes uniformes L’article 12 du Traité soumet la révision des actes uniformes non seulement aux conditions qu’il contient mais aussi aux conditions prévues aux articles 6 à 9. Bien que ces dernières conditions soient celles prévues pour l’adoption des actes uniformes, l’adoption d’un nouvel acte uniforme (A) ne doit pas être confondue avec la révision d’un ancien acte uniforme (B). A. L’adoption des actes uniformes Les actes uniformes sont adoptés à la fin d’une procédure décrite aux articles 6 et 7 du Traité. Au-delà des conditions de forme posée dans ces articles, l’adoption des actes uniformes est soumise à des conditions de fond. L’existence de conditions pour l’adoption des actes uniformes n’a de sens que si leurs méconnaissances sont sanctionnées, ce qui n’est pas le cas au regard des actes uniformes irréguliers existants. Nous verrons par conséquent dans un premier temps les conditions d’adoption des actes uniformes (1) et dans un second temps que ces conditions ne sont pas toujours respectées (2). 1) Les conditions d’adoption des actes uniformes Les actes uniformes sont adoptés au sein de l’organisation pour l’harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) qui comprend la Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement, le Conseil des Ministres, la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage (CCJA) et le Secrétariat Permanent. A l’exception de la Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement, toutes les institutions de l’OHADA interviennent dans la procédure d’adoption des actes uniformes. Les actes uniformes sont préparés par le Secrétariat Permanent en concertation avec les gouvernements des Etats Parties. Ils sont délibérés et adoptés par le Conseil des ministres après avis de la CCJA. L’initiative de la procédure d’adoption des actes uniforme est laissée au Secrétariat Permanent. Le Secrétariat Permanent rédige les projets d’actes uniformes et les communique aux Gouvernements des Etats parties qui disposent d'un délai de quatre-vingt-dix jours1 à compter de la date de la réception de cette communication pour lui faire parvenir leurs observations écrites. A l'expiration de ce délai, le projet d'Acte uniforme, accompagné des observations des Etats parties et d'un rapport du Secrétariat Permanent, est immédiatement transmis pour avis par ce dernier à la CCJA qui dispose d’un délai de soixante jours à compter de la date de la réception de la demande de consultation pour le donner. A l'expiration de ce nouveau délai, le Secrétariat Permanent met au point le texte définitif du projet d'Acte uniforme, dont il propose l'inscription à l'ordre du jour du prochain Conseil des Ministres. Le Secrétariat Permanent rédige le texte initial du projet d’acte uniforme ainsi que le texte définitif. Lors de la rédaction du texte définitif, il a en principe les observations des Gouvernements des Etats parties ainsi que l’avis de la CCJA. Ce fait appelle la question suivante : le Secrétariat Permanent doit-il intégrer dans le texte définitif les observations des Gouvernements des Etats parties et de la CCJA ? Les actes uniformes sont censés être préparés par le Secrétariat Permanent en concertation avec les gouvernements des Etats Parties. La concertation suppose qu’il y ait un accord à la suite d’échanges, or la procédure d’adoption des actes uniformes ne prévoie pas des échanges entre le Secrétariat Permanent et les gouvernements des Etats Parties. Le Secrétariat Permanent rédige les projets d’actes uniformes et les communique aux Gouvernements des Etats parties qui disposent en principe d'un délai de quatre-vingt-dix jours à compter de la date de la réception de cette communication pour lui faire parvenir leurs observations écrites. Cela ressemble plus à une consultation qu’à une concertation. S’il y a consultation et non concertation, le Secrétariat Permanent n’est pas tenu d’intégrer les observations des Gouvernements des Etats parties. Il en est de même pour les observations de la CCJA. Bien qu’il ne soit pas légalement tenu d’intégrer les observations des Gouvernements des Etats parties et de la CCJA, le Secrétariat Permanent les intégrera pour la bonne et simple raison que la décision d’adoption des actes uniformes est prise par les représentants des Etats Parties en considération de ces observations. 1 Ce délai peut être prorogé d'une durée équivalente en fonction des circonstances et de la nature du texte à adopter, à la diligence du Secrétariat Permanent. En plus de ces conditions tenant à la forme, l’adoption des actes uniformes est soumise à des conditions de fond qui découlent des dispositions des articles 2, 5 et 8 du Traité. Les actes uniformes sont des actes pris pour l’adoption de règles communes à tous les Etats Parties au Traité relatif à l’Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique. Ils ne peuvent régir que les matières entrant dans le domaine du droit des affaires qui a été délimité à l’article 2 du traité. Selon cet article, entre dans le domaine du droit des affaires l'ensemble des règles relatives au droit des sociétés et au statut juridique des commerçants, au recouvrement des créances, aux sûretés et aux voies d'exécution, au régime du redressement des entreprises et de la liquidation judiciaire, au droit de l'arbitrage, au droit du travail, au droit comptable, au droit de la vente et des transports, et toute autre matière que le Conseil des Ministres déciderait, à l'unanimité, d'y inclure , conformément à l'objet du traité. Le domaine du droit des affaires défini à l’article 2 du traité est instable du fait de la possibilité laissée au Conseil des Ministres de l’étendre, prérogative dont il a notamment usé dans la Décision n°002/2001/CM relative au programme d’harmonisation du droit des affaires en Afrique du 23 mars 2001. L’extension du domaine du droit des affaires étant issue d’une de ses décisions, le Conseil des Ministres a pu le réduire par une décision contraire (Règlement n°01/2010/CM relatif au programme d’harmonisation en Afrique du droit des affaires du 15 décembre 2010). Le Conseil des Ministres pouvant élargir mais aussi réduire le domaine du droit des affaires, jusqu’à quel point peut-il l’élargir et jusqu’à quel point peut-il le réduire ? Le Conseil des Ministres peut inclure des matières dans le domaine du droit des affaires et uploads/S4/ pdf-le-re-gime-juridique-des-actes-uniformes 1 .pdf

  • 34
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Nov 15, 2021
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
  • Taille du fichier 0.6925MB