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9 rue de Valois 75001 Paris - Tél.: 33 (0)1 42 92 20 00 - hautcomite@hcjp.fr - www.hcjp.fr RAPPORT SUR L’INTRODUCTION DE RÈGLES SPÉCIFIQUES AUX PERSONNES MORALES DANS LE DROIT DE LA RESPONSABILITÉ EXTRACONTRACTUELLE du Haut Comité Juridique de la Place Financière de Paris Le 1er octobre 2018 HCJP - 9 rue de Valois 75001 Paris - Tél.: 33 (0)1 42 92 20 00 - hautcomite@hcjp.fr - www.hcjp.fr 2 RAPPORT SUR L’INTRODUCTION DE RÈGLES SPÉCIFIQUES AUX PERSONNES MORALES DANS LE DROIT DE LA RESPONSABILITÉ EXTRACONTRACTUELLE1 1. Le Code civil, qui ignorait à l’origine la notion de personne morale, ne prévoit, en dépit de la reconnaissance de celle-ci en droit positif, aucune disposition spécifique à la responsabilité pour faute de ces entités juridiques. Ainsi, l’article 1382, devenu 1240 depuis l’ordonnance du 10 février 20162, est resté sans changement depuis 1804, de sorte que la jurisprudence interprétative de ces textes n’opère aucune distinction de principe entre la responsabilité des personnes physiques et celle des personnes morales. Le projet de réforme de la responsabilité civile rendu public par le Ministère de la justice le 13 mars 2017 (ci-après « le Projet »), propose toutefois d’introduire, sous un futur article 1242-1 du Code civil, une disposition propre aux personnes morales, ainsi rédigée « [La faute de la personne morale résulte de celle de ses organes ou d’un défaut d’organisation ou de fonctionnement] » (ci-après le « Projet d’article 1242-1 »)3. Cette disposition est, au sein d’un §1 consacré à « La faute », précédée d’un projet d’article 1241 qui, reprenant tout en le modifiant l’actuel article 1240 (ancien article 13824), dispose qu’« On est responsable du dommage causé par sa faute », et suivie d’un article 1242 ainsi rédigé : « Constitue une faute la violation d’une prescription légale ou le manquement à un devoir général de prudence ou de diligence », qui reprend et modifie l’actuel article 1241 (ancien article 1383)5. 2. Dans le Projet, le texte de cette proposition d’article 1242-1 du Code civil est placé entre crochets pour signifier que le Ministère de la justice reste hésitant sur l’opportunité d’insérer dans le Code civil une telle précision relative à la faute de la personne morale. À la demande de la Direction générale du Trésor du Ministère de l’économie et des finances, le HCJP a constitué un groupe de travail, auquel le Ministère de la justice a été associé6, afin d’étudier la portée et les conséquences d’une telle disposition sur la responsabilité des sociétés. 1 Ce rapport a été rédigé avec le concours de Diane Galbois, docteur en droit, chargée d’enseignement à l’université Panthéon-Assas. 2 Ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations. 3 Ce texte est compris dans le §1 : La faute, de la sous-section 1 : Le fait générateur de responsabilité extracontractuelle de la section 2 : Disposition propres à la responsabilité contractuelle, du chapitre II : les conditions de la responsabilité du Sous- Titre II : La responsabilité civile du titre III : Des sources d’obligations, du livre III du Code civil : Des différentes manières dont on acquiert la propriété. 4 « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». 5 « Chacun est responsable du dommage qu’il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence ». 6 La composition de ce groupe de travail figure en Annexe n° 1 au présent « Rapport ». HCJP - 9 rue de Valois 75001 Paris - Tél.: 33 (0)1 42 92 20 00 - hautcomite@hcjp.fr - www.hcjp.fr 3 3. La disposition projetée est inspirée d’une succession de rapports doctrinaux publiés à partir de 20047. Le premier, établi par un groupe de professeurs réunis autour du Professeur Pierre Catala qui, le 22 septembre 2005, a présenté au ministre de la justice une proposition de réforme générale du droit des obligations et du droit de la prescription8 (ci-après « Projet Catala »), comprenait, dans un projet d’article 1353 du Code civil, une règle ainsi libellée : « La faute de la personne morale s’entend non seulement de celle qui est commise par un représentant, mais aussi de celle qui résulte d’un défaut d’organisation ou de fonctionnement ». La proposition fut reprise, en 2011, par un autre travail collectif, réunissant, sous l’égide de l’Académie des sciences morales et politiques, des professeurs de droit, des magistrats, des juristes et professionnels du monde économique, sous la direction de M. le Professeur François Terré, dans le cadre d’une proposition visant à réformer la responsabilité civile (ci-après « l’avant-projet Terré »)9. Sous son article 7, cette proposition contient deux dispositions relatives à la responsabilité de la personne morale : l’alinéa 1 prévoit que « La faute de la personne morale résulte de l’acte fautif de ses organes ou d’un défaut d’organisation ou de fonctionnement », à quoi l’alinéa 2 ajoute qu’« Une personne morale ne répond du dommage causé par une autre personne morale qu’elle contrôle ou sur laquelle elle exerce une influence notable que si, par une participation à un organe de cette personne morale, une instruction, une immixtion ou une abstention dans sa gestion, elle a contribué de manière significative à la réalisation du dommage. Il en va de même lorsqu’une personne morale crée ou utilise une autre personne morale dans son seul intérêt ou au détriment d’autrui ». 4. Bien que le Projet de réforme de la responsabilité civile préparé par le Ministère de la justice soit inspiré des propositions de l’avant-projet Terré, dans un premier temps, aucune des deux dispositions précitées n’a figuré dans la version du texte soumis par la Chancellerie à consultation publique le 29 avril 201610, de sorte que l’opportunité d’introduire un régime de responsabilité civile propre aux personnes morales n’a pas été discutée à cette occasion11. La Cour de cassation12 et une partie de la doctrine ayant exprimé leur regret de voir ainsi manquée l’occasion de préciser les règles de la 7 Dossier de presse du Ministère de la justice sur le projet de réforme du droit de la responsabilité, 13 mars 2017, http://www.presse.justice.gouv.fr/dossiers-de-presse-10097/archives-des-dossiers-de-presse-de-2017-12860/projet-de- reforme-du-droit-de-la-responsabilite-civile-29826.html. 8 Avant-projet de réforme du droit des obligations (articles 1101 à 1386 du Code civil) et du droit de la prescription (articles 2234 à 2281 du Code civil). 9 F. Terré (dir.), Pour une réforme du droit de la responsabilité civile, Dalloz, coll. Thèmes & Commentaires, 2011. À cette étude ont contribué : Cyril Bloch, Jean-Sébastien Borghetti, Clothilde Grare-Didier, Denis Mazeaud, Soraya Messaï-Bahri, Anne Outin-Adam, Philippe Remy, Pauline Remy-Corlay, Myriam Roussille, Philippe Stoffel-Munck, François Terré. Ce rapport a fait l’objet d’une consultation publique entre le mois d’octobre 2011 et le mois de janvier 2012. 10 Avant-projet de loi de réforme de la responsabilité civile, soumis à consultation publique par le garde des Sceaux le vendredi 29 avril 2016. Le texte publié comprenait un projet d’article 1241 prévoyant que « Toute faute oblige son auteur à réparer le préjudice qu’elle a causé » et un projet d’article article 1242 aux termes duquel « Constitue une faute la violation d’une règle de conduite imposée par la loi ou le manquement au devoir général de prudence ou de diligence ». 11 Cette discussion avait toutefois pu avoir lieu auparavant, puisque le rapport Terré avait lui-même été soumis à discussion publique par le Ministère de la justice entre le mois d’octobre 2011 et le mois de janvier 2012. 12 Observations de la Cour de cassation sur l’avant-projet de loi sur la réforme de la responsabilité civile, novembre 2016. HCJP - 9 rue de Valois 75001 Paris - Tél.: 33 (0)1 42 92 20 00 - hautcomite@hcjp.fr - www.hcjp.fr 4 responsabilité spécifiquement applicables aux personnes morales13, la disposition de l’alinéa 1er de l’article 7 de l’avant-projet Terré fut finalement reprise dans le texte présenté par le Garde des Sceaux ministre de la justice à l’Académie des Sciences morales et politiques le 13 mars 2017. On relèvera qu’en tout état de cause, à ce stade, en dépit de l’insistance de certains auteurs14, le Ministère de la justice semble avoir renoncé à légiférer sur la responsabilité des groupes de sociétés. 5. Au cours de cette phase préalable, les raisons de la mesure examinée n’ont guère été explicitées. Elle n’est évoquée ni dans le discours du ministre de la justice à l’Académie des sciences morales et politiques15, ni dans l’appareil de communication du ministère de la justice. La nécessité de préciser les règles de la responsabilité civile des personnes morales n’est d’ailleurs évoquée, ni dans les rapports annuels de la Cour de cassation, ni dans les traités de droit civil, lesquels ne signalent pas de difficulté contentieuse particulière à ce sujet16. Un tel souhait n’est pas davantage exprimé par les milieux 13 Plusieurs auteurs, à commencer par Mme Viney, dénoncent l’absence de tout texte relatif à la faute de la personne morale (G. Viney, « L’espoir d’une recodification du droit de la responsabilité uploads/S4/ rapport-sur-l-x27-introduction-de-regles-specifiques-aux-personnes-morales-dans-le-droit-de-la-responsabilite-extracontractuelle.pdf

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  • Publié le Aoû 18, 2022
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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