Transport - Approvisionnement en GPL - Commentaire par Julien Tribout Document:
Transport - Approvisionnement en GPL - Commentaire par Julien Tribout Document: Europe n° 7, Juillet 2021, comm. 260 Europe n° 7, Juillet 2021, comm. 260 Approvisionnement en GPL Commentaire par Julien Tribout TRANSPORT Accès au sommaire Solution. – La Cour s'oppose à ce qu'une mesure nationale édictant des prescriptions relatives à la construction des véhicules-citernes soient plus sévères que celles figurant aux annexes de la directive relative au transport de marchandises dangereuses. Impact. – Dans son analyse de la mesure nationale, la Cour revient sur l'interprétation des dispositions de la directive en cause, mais également sur des dispositions procédurales nationales tendant à l'annulation d'un acte tel qu'en l'espèce. CJUE, 20 mai 2021, aff. C-120/19, X (Véhicules-citernes GPL) : JurisData n° 2021-010557 Note : L'arrêt concerne une réglementation nationale imposant des mesures particulières dans l'approvisionnement en gaz de pétrole liquéfié (« GPL »), où la Cour a l'occasion d'interpréter des dispositions de la directive relative au transport intérieur des marchandises dangereuses (PE et Cons. UE, dir. 2008/68/CE, 24 sept. 2008 : JOUE n° L 260, 30 sept. 2008), mais également d'apporter des précisions sur l'application du principe d'effectivité. Un riverain néerlandais, X, vivant à 125 mètres d'une station-service, souhaite que celle-ci cesse la vente de GPL, soucieux de la sécurité des habitations avoisinantes. Le collège des bourgmestres et échevins de la commune de Purmerend (« le collège »), rejette la demande d'X mais impose deux exigences supplémentaires pour les véhicules-citernes qui viennent livrer le GPL. Ils devront en effet être équipés d'un revêtement thermique particulier et d'un tuyau de remplissage amélioré, ce qui devrait réduire les risques d'accident selon le collège. X introduit un recours contre cette décision, estimant que les exigences imposées, particulièrement celle relative au revêtement, sont contraires aux dispositions de la directive 2008/68/CE. En appel, la juridiction de renvoi partage les doutes d'X quant à la compatibilité de l'exigence relative au revêtement thermique avec l'article 5, § 1, de la directive, qui permet aux États membres de prendre des dispositions plus sévères « concernant le transport national de marchandises dangereuses effectué par des véhicules, [...] exception faite des prescriptions relatives à la construction ». En Document consulté sur https://www.lexis360.fr Revues juridiques Téléchargé le 03/12/2021 Page 2 Copyright © 2021 LexisNexis. Tous droits réservés. considérant que le revêtement ferait partie de la construction du véhicule-citerne, le juge a quo se demande si la mesure en cause entrerait dans le cadre de cette disposition, dans la mesure où l'exigence n'est pas imposée à l'égard des propriétaires des véhicules mais de l'exploitant de la station-service. Se pose également la question de savoir si doit être prise en compte la circulaire néerlandaise, prise quelques temps après la décision en cause, mettant en place un « Safety Deal », circulaire qui constitue une convention non contraignante avec les opérateurs du secteur du GPL ayant pour but d'approvisionner le GPL uniquement par des véhicules-citernes équipés d'un revêtement thermique. Sur ces questions d'interprétation, la Cour note que la directive ne définit ni n'établit de standards pour les États membres en ce qui concerne les « prescriptions relatives à la construction » (pt 36). Tout au plus, elle peut se fonder sur les nombreuses conditions imposées par l'annexe A de cette directive. Il existe ainsi une prescription relative à la « construction du revêtement protecteur ou de l'isolation thermique du réservoir ou de la citerne », mais rien ne concernant particulièrement le revêtement thermique tel que celui imposé en l'espèce (pt 42). La mesure du collège semble donc contraire à l'article 5, § 1, de la directive 2008/68/CE(pt 43), bien qu'elle ait été adoptée dans un cas individuel et non dans le cadre d'une disposition contraignante à caractère général (pt 44). La Cour se cantonne ici en effet à la seule décision litigieuse, le Safety Deal conclu par le gouvernement néerlandais ne justifiant pas la mesure en cause et n'ayant donc aucune « influence sur la réponse à apporter » (pt 47). En réponse aux observations de la Commission, la Cour, suivant les conclusions de l'Avocat général, relève l'importance de la mise en balance entre l'article 5, § 1 et l'article 1er, § 5 de la directive 2008/68/CE(pt 50. – concl., pts 45 à 46). Ce dernier, qui dispose que les États membres peuvent réglementer ou interdire le transport de marchandises dangereuses « uniquement pour des raisons autres que la sécurité du transport » intéresse en effet l'affaire au principal, la prescription en cause ayant été prise dans le cadre de la délivrance d'un permis d'environnement à la station-service. Toutefois, les deux dispositions doivent être interprétées de manière stricte (pt 50), l'utilisation de l'adverbe « uniquement » dans l'article 1er montrant bien que, pour que les États puissent réglementer dans ce domaine, il faut que les motifs n'aient « aucun lien avec la sécurité du transport » (pt 51). Cela est conforté par l'objectif de la directive qui vise l'harmonisation de ces règles de sécurité dans toute l'Union et la garantie d'un « bon fonctionnement du marché commun des transports » (pt 52). Ces constatations mènent la Cour à considérer comme étant incompatibles avec la directive 2008/68/CE des dispositions nationales qui, sous couvert de la protection de l'environnement, édictent des prescriptions relatives à la construction, allant au-delà des annexes (pts 54 à 55). La juridiction de renvoi était également confrontée à une autre difficulté, cette fois-ci par rapport à des dispositions procédurales de son droit national. En effet, en vertu du droit néerlandais, « le juge administratif ne pourrait pas annuler une décision qui viole une règle de droit ne visant manifestement pas à protéger l'intérêt du requérant en cause » : or, ici, l'article 5, § 1 de la directive 2008/68/CE n'aurait pas pour but de protéger les intérêts du requérant qui demande à obtenir une protection matérielle des habitations de son quartier (pt 28) et la mesure en cause serait Document consulté sur https://www.lexis360.fr Revues juridiques Téléchargé le 03/12/2021 Page 3 Copyright © 2021 LexisNexis. Tous droits réservés. inattaquable par X, car destinée à produire ses effets à l'égard de la station-service. Outre ces considérations, le juge a quo relève que le collège ne peut imposer une mesure dont il ne pourra assurer le respect. Dès lors, en se fondant sur une spécificité du droit national, le juge national pourrait, à la demande d'un requérant dans la situation d'X, annuler l'exigence relative au revêtement, « à condition toutefois qu'il soit évident, sur la base d'un examen sommaire ne laissant place à aucun doute » (pt 29) que la mesure ne pouvait être imposée car contraire à la directive 2008/68/CE (le critère de l'évidence). La juridiction de renvoi se demande si ce critère de l'évidence ne serait pas contraire au principe d'effectivité du droit de l'Union. Ce critère, qui imposerait un seuil élevé au justiciable et qui ne serait rempli que quand des cas exceptionnels, pourrait rendre très difficile l'application du principe d'effectivité (pt 30), et pourrait porter atteinte au principe de sécurité juridique (pt 31). La Cour traite d'abord de la recevabilité de cette question, le collège estimant notamment qu'elle était purement théorique et n'avait aucun lien avec le litige (pt 59). La Cour se borne d'abord à rappeler la présomption de pertinence qui existe sur les questions préjudicielles, dont il appartient au seul juge national d'apprécier la nécessité au regard des circonstances de l'affaire (pts 60 à 61. – CJUE, 7 févr. 2018, aff. C-304/16, American Express : Europe 2018, comm. 141, obs. S. Cazet). Puis elle soulève toutefois le besoin inhérent que doit revêtir la question à la solution effective du litige (pt 62. – CJUE, 28 mars 2017, aff. C-72/15, Rosneft : Europe 2017, comm. 169, obs. D. Simon). Ici, bien que la question soit posée dans des termes généraux ne faisant pas référence à l'affaire, force est de constater, pour la Cour, que la situation au principal correspond bel et bien au problème soulevé par cette seconde question. Dès lors elle ne revêt pas un caractère hypothétique et la Cour se doit d'y répondre (pt 66). Sur le fond, la Cour avance tout d'abord que si le principe de l'autonomie procédurale des États membres doit être respecté en l'absence de réglementation de l'Union en la matière, il n'en reste pas moins que les principes d'équivalence et d'effectivité doivent être respectés (pt 69. – CJUE, 18 déc. 2014, aff. C-449/13, CA Consumer Finance : Europe 2015, comm. 84, obs. S. Cazet), ce dernier étant la source des doutes de la juridiction de renvoi (pt 71). Pour analyser une disposition procédurale nationale, la méthode d'analyse de la Cour consiste à l'examiner « dans l'ensemble de la procédure » (pt 72) et de prendre en considération l'ensemble des « principes qui sont à la base du système juridictionnel national » (pt 72. – CJUE, 16 juill. 2020, aff. jtes C-224/19 et C-259/19, Caixabank : Europe 2020, comm. 311, obs. V. Bassani). Le critère de l'évidence doit être analysé en prenant compte le principe de sécurité juridique, qu'il vise à préserver. Dans certaines circonstances, uploads/S4/ transport-approvisionnement-en-gpl-commentaire.pdf
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- Publié le Mai 22, 2021
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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