4 9 LA BONNE FOI COMME CONDITION DE LA PROROGATION DU DROIT DE RENONCIATION EN
4 9 LA BONNE FOI COMME CONDITION DE LA PROROGATION DU DROIT DE RENONCIATION EN ASSURANCE-VIE ENTRE L’AMONT ET L’AVAL* David NOGUÉRO Professeur Université Paris Descartes, Sorbonne Paris Cité (IDS - UMR-INSERM 1145) Abstract : In life insurance, to exercise the right of withdrawal, which allows the purchaser to withdraw from the contract formed, the legislature introduced the classical requirement of good faith, to contradict the jurisprudence of the Court of cassation considered that the previously indifferent to the implementation of the extension of the period of this discretionary right under article L. 132-5-2 of the insurance code. The conditions of application of the new law of 30 december 2014, either in time or as to the contours of the concept of good faith, raises questions on the implementation of the right to cancel the subscriber recognized faculty since 1981 under french law. It is suggested, prospectively, to distinguish according to the recipient’s profile to sanction the breach of the duty to inform the insurer. Le droit de rétractation ou de repentir est une prérogative légale offerte à un contractant afin de revenir unilatéralement sur l’engagement qu’il a préa- lablement et régulièrement accepté1. En droit des assurances, le législateur use, à propos de cette technique, de l’expression droit de renonciation2. Sous certai- nes conditions à respecter, ce droit qui ne s’adresse pas à tous les assurés, mais à une certaine catégorie d’entre eux, existe désormais pour l’assurance à distan- * Avertissement. Lorsque cet article a été remis à l’éditeur, en décembre 2015, il a été conçu au regard du droit positif pour élaborer une analyse et forger des propositions prospectives. Avant sa publication, certaines des suggestions émises ont été rattrapées par l’actualité ! Le chercheur est partagé entre le regret de n’avoir pu diffuser en temps réel son intuition première et la satisfaction de voir sa réflexion confortée. Aussi, les nouvelles données ont été intégrée dans la version livrée dont la construction initiale a été maintenue. 1 F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit civil. Les obligations, Dalloz, coll. « Précis », 11e éd., 2013, n° 263 ; M.-S. Payet, Droit de la concurrence et droit de la consommation, Dalloz, coll. « Nouvelle bibliothèque de thèses », 2001, préf. M.-A. Frison-Roche, n° 210 s. (les références citées sur le droit de repentir). 2 M. Cannarsa, « Les facultés de rétractation en droit de la consommation et en droit des assu- rances : continuité en droit interne, changements en droit communautaire », RGDA 2009, p. 25 : l’auteur distingue le fondement de la protection contre la précipitation et celui de la préservation du consentement contre un manquement du professionnel, pour la prorogation du délai. 1426 RRJ 2015-4 ce (vie et non-vie)3, le démarchage4, ou les assurances affinitaires5. On peut y voir des occurrences du droit de l’assurance/consommation6. Au travers du droit de renonciation, l’épargnant est vu comme un consommateur. Une telle faculté de renoncer existait déjà en assurance-vie directe, ou, si l’on préfère, face à face, dans notre droit national précurseur, depuis la loi n° 81-5 du 7 janvier 1981, avec les articles L. 132-5-1 et L. 132-5-2 du code des assurances7, entrés en vigueur le 1er juillet 19818. À cette époque, en assurance- vie, le droit de renonciation est prévu comme une faculté autonome pour se retirer du contrat pour la personne physique9 qui a été sollicitée en divers lieux (7 jours) – le démarchage – ou qui a « signé une proposition d’assurance ou une police d’assurance » (30 jours). Mais, déjà, le droit de renonciation peut servir à sanctionner l’assureur qui n’a pas satisfait à son devoir légal d’information précontractuelle instauré selon un certain formalisme. En effet, l’article L. 132-5-1, alinéa 2 in fine, du code des assurances prévoyait : « Le défaut de remise des documents et informations énumérés au présent alinéa entraîne de plein droit la prorogation du délai prévu à l’alinéa ci-dessus pendant trente jours à compter de la date de la remise effective de ces documents ». 3 Issu de l’ordonnance n° 2005-648 du 6 juin 2005, art. L. 112-2-1 C. assur. (transposition de la directive n° 2002-65/CE du 23 septembre 2002 concernant la commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs, et modifiant les directives 90/619/CEE du Conseil, 97/7/CE et 98/27/CE). En son IV, le texte décrit le contenu de l’information en renvoyant à l’art. L. 132-5-1, ce qui s’ajoute au III du texte, notamment le 5° pour le droit de renonciation. En son II, 2°, le texte prévoit le délai (30 jours) et le point de départ du droit de renonciation : « a) Soit à compter du jour où l’intéressé est informé que le contrat à distance a été conclu ; b) Soit à compter du jour où l’intéressé reçoit les conditions contractuelles et les informations, conformément à l’article L. 121-28, si cette dernière date est postérieure à celle mentionnée au a ». Pas de prorogation prévue, ni d’exigence de bonne foi pour la conditionner. Comp. le renvoi à l’art. L. 132-5-2 pour des opérations de prévoyance collective et d’assurance, à adhésion facultative, C. assur., art. L. 441-3, II. 4 Issu de la loi n° 2008-3 du 3 janv. 2008, art. L. 112-9 C. assur. 5 Issu de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, art. L. 112-10 C. assur. 6 D. Noguéro, Le consommateur d’assurance, Colloque de Niort, 2005, éd. Droit In Situ, 2006. 7 Pour des dispositions relativement équivalentes, art. L. 223-8 C. mutualité et art. L. 932-15 C. sécu. sociale. 8 Art. L. 132-5-2 C. assur. abrogé au 1er janv. 1986 par la loi n° 85-608 du 11 juin 1985. Réintro- duit à partir du 1er mars 2006. 9 Dispositif propre à la personne physique, pas morale. V. civ. 2e, 9 juill. 2009 : n° 08-16.280. Implic. : civ. 2e, 4 févr. 2010 : n°s 08-21.367 et 09-10.311 ; RGDA 2010, p. 409, 1re esp., note J. Bigot ; JCP G 2010, 428, obs. J. Kullmann (moyen unique ; souscriptions en sept. 1997 et avr. 2000). Civ. 2e, 19 mai 2016 : n° 15-12.768 (1er moyen). Droit privé et sciences criminelles - David NOGUÉRO 1427 En ce sens, également, l’alinéa 2 de l’article L. 132-5-2 du même code disposait : « Le défaut de remise contre récépissé des documents énumérés au deuxième alinéa de l’article L. 132-5-1 entraîne de plein droit la prorogation du délai prévu au premier alinéa ci-dessus pendant sept jours à compter de la date de la remise effective de ces documents ». Ces dispositions légales ont souvent évolué10 avec aussi l’intervention du droit communautaire11. Toutefois, la prorogation du délai de renonciation a toujours été maintenue en droit français. Au regard du contexte économique et financier, est apparu un contentieux fameux sur l’exercice de ce droit de renonciation à la charnière du nouveau millénaire. Dans le cadre imparti, on ne saurait s’étendre sur les nombreux contours de cette jurisprudence abondam- ment commentée, qui a suscité la critique virulente et permanente de nombreux auteurs12, et des assureurs, et inspiré des réactions législatives13. On s’attardera surtout ici sur la dernière évolution en date, qui conduit à une légère modification de l’article L. 132-5-2, par la suppression de quelques mots (« entraîne de plein droit ») et surtout l’ajout d’autres vocables importants, modification censée contrecarrer la jurisprudence de la Cour de cassation jusque-là indifférente à la bonne ou mauvaise foi du souscripteur afin d’exercer 10 Pour l’art. L. 132-5-1 C. assur. : loi n° 85-608 du 11 juin 1985 ; loi n° 92-655 du 16 juill. 1992 ; loi n° 94-5 du 4 janv. 1994 ; loi n° 2003-706 du 1er août 2003 ; loi n° 2003-775 du 21 août 2003 ; décret n° 2004-346 du 21 avr. 2004 ; loi n° 2005-1564 du 15 déc. 2005 dite DDAC. Pour l’art. L.7132-5-2 C. assur. : loi n° 85-608 du 11 juin 1985 ; loi n° 2005-1564 du 15 déc. 2005 dite DDAC ; ordonnance n° 2010-76 du 21 janv. 2010 ; loi n° 2013-672 du 26 juill. 2013 ; ordon- nance n° 2014-696 du 26 juin 2014 ; loi n° 2014-1662 du 30 déc. 2014. 11 Directive n° 79-267 du 5 mars 1979, 1re directive, portant coordination des dispositions législa- tives, réglementaires et administratives concernant l’accès à l’activité de l’assurance directe sur la vie et son exercice. Directive n° 90-619 du 8 nov. 1990, 2e directive, portant coordination des dis- positions législatives, réglementaires et administratives concernant l’assurance directe sur la vie, fixant les dispositions destinées à faciliter l’exercice effectif de la libre prestation de services et modifiant la directive 79-267 CEE (art. 15). Directive n° 92-96 du 10 nov. 1992, 3e directive, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l’assurance directe sur la vie, et modifiant les directives 79-267 CEE et 90-619 CEE (annexe III, A, a.13). Directive n° 2002-65/CE du 23 sept. 2002 concernant la commercialisation à distance de services financiers auprès des consommateurs (harmonisation maximale). Directive n° 2002/ 83/CE du 5 nov. 2002 du Parlement européen et du Conseil concernant l’assurance uploads/S4/ vie-bonne-foi-rrj-16.pdf
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- Publié le Jan 13, 2021
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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