Cas de Stratégie : Ethiquable Équipe pédagogique Mr HELMI DRISS et Mme SANA QAR
Cas de Stratégie : Ethiquable Équipe pédagogique Mr HELMI DRISS et Mme SANA QARROUTE Problématique Quelle performance pour une entreprise de l'économie sociale et solidaire dans un secteur ultra-concurrentiel ? Résumé Le cas traite de l'entreprise coopérative Ethiquable, entreprise de petite taille spécialisée dans la commercialisation de produits alimentaires de commerce équitable. Objectif L'objectif est de montrer comment une entreprise peut concilier les trois piliers du développement durable en défendant des valeurs fortes sur un marché concurren-tiel, en croissance, mais ralenti par la crise de 2008. Outils mobilisés Les outils classiques de l'analyse stratégique pourront être mobilisés, mais les problématiques stratégiques de la RSE et leur mise en œuvre seront également abor-dées, notamment à travers la prise en compte des attentes des parties prenantes. L'entreprise Ethiquable, créée en 2003, a accompagné les débuts du commerce équitable en France, et, malgré quelques difficultés, a su s'adapter à l'évolution du marché et de la concurrence. FOCUS : le commerce éthiquable En 2001, les principaux réseaux internatio-naux du commerce équitable ont proposé la définition suivante : « Le commerce équitable est un partenariat commercial, fondé sur le dialogue, la transparence et le respect, dont l'objectif est de parvenir à une plus grande équité dans le commerce mondial. Il contribue au développement durable en offrant de meilleures conditions commerciales et en garantissant les droits des producteurs et des travailleurs margi-nalisés, tout particulièrement au Sud de la planète. Les organisations du commerce équitable, soutenues par les consomma-teurs, s'engagent activement à soutenir les producteurs, à sensibiliser l'opinion et à mener campagne en faveur de change-ments dans les règles et pratiques du com-merce international conventionnel. » Il a été reconnu officiellement en France dans la loi du 2 août 2005 sur les petites et moyennes entreprises (PME), et par la mise en place d'une Commission natio-nale pour le commerce équitable (CNCE), tandis qu'un « Plan national en faveur du commerce équitable » destiné à soutenir le secteur a été lancé en 201 3. Le com-merce équitable Nord-Nord a été reconnu dans la loi relative à l'économie sociale et solidaire de 201 4. Selon la PFCE (Plate-forme du commerce équitable), la mise en place d'une filière de commerce équi-table se traduit par un partenariat entre une entreprise acheteuse et une organisa-tion de producteurs, articulé autour d'en-gagements réciproques. En particulier, l'acheteur doit s'engager à : - payer un prix juste aux producteurs, couvrant tous les coûts de production et leur assurant un niveau de vie décent ; - garantir une relation commerciale inscrite dans la durée ; - garantir des conditions et des délais de paiement avantageux, à travers notam-ment le préfinancement des récoltes ; - financer des projets de développement collectifs visant au développement des capacités et à l'autonomisation des orga-nisations ; - soutenir les organisations de produc-teurs ; - informer et sensibiliser les consommateurs et citoyens. Afin de garantir le respect de ces engage-ments, les organisations du commerce équitable ont mis en place des labels. Les principaux labels sont « Fairtrade Max Havelaar », « Ecocert Equitable », « World Fairtrade Organization » (WFTO), « Bio Equitable », et plus récemment, « Sym-bole Producteurs Paysans » (SPP). Actuellement, une polémique existe autour du souhait de Max Havelaar d'étendre sa certification à l'agriculture de contrat1 et aux plantations. 1. Dans le commerce équitable, l'agriculture de contrat consiste à certifier des entreprises exportatrices qui se fournissent non pas auprès de coopératives, mais auprès de producteurs individuels, avec lesquels elles ont signé des contrats. 1.Historique et Stratégie L'histoire d'Ethiquable débute par la rencontre, dans les années 1980, entre deux étudiants d'école de commerce, alors âgés d'une vingtaine d'années, Rémi Roux et Stéphane Comar, et Christophe Eberhart, un ingénieur agronome impliqué dans l'appui aux organisations paysannes, dans le cadre d'une ONG. Une quinzaine d'années plus tard, en 2003, après des expériences professionnelles diverses qui ont amené Rémi Roux à bien connaître les méandres de la négociation avec la grande distribution, Stéphane Comar l'organisation et la gestion de filières agro- tropicales, et Christophe Eberhart les organisations paysannes du Sud, tous trois décident de s'associer afin d'accompagner les débuts du commerce équitable en France, et de donner ainsi du sens à leur activité. Le commerce équitable s'efforce de garantir aux producteurs du Sud un prix juste pour leurs produits (cf. focus ci- dessus). Les fon-dateurs choisissent de créer une entreprise à Fleurance, petite ville située dans le Gers, en zone rurale défavorisée, et adoptent un statut de Société coopérative et participative (SCOP). Il s'agit d'une entreprise commerciale de type SA ou SARL dont les salariés sont associés majoritaires au capital (cf. focus ci- dessous). Ethiquable est ainsi la première SCOP en France - mais pas la première entreprise - à importer, conditionner et commercialiser des produits alimentaires issus du com-merce équitable. Les fondateurs optent également pour une commercialisation en grande distribution, afin de bénéficier au plus grand nombre de petits producteurs possible, Ils imposent toutefois aux distributeurs un cahier des charges excluant les marges arrière1, et précisant le taux de marge acceptable. Selon les fondateurs, ces conditions ont été acceptées d'une part parce que les entreprises de commerce équi-table étaient peu nombreuses, d'autre part parce que les produits n'étaient ainsi pas trop chers, et contribuaient à améliorer l'image des points de distribution. LA SCOP Dans une SCOP, les salariés doivent déte-nir au moins 51 % du capital, et 65 % des droits de vote, tandis qu'inversement, les associés extérieurs ne peuvent pas détenir plus de 49 % du capital et 35 % des droits de vote. Les salariés deviennent obligatoi-rement actionnaires de l'entreprise au bout de deux ans. Ils disposent d'un droit de vote par salarié. Les dirigeants sont élus par les associés salariés, pour une durée maximale de 4 à 6 ans selon le statut, et sont rééligibles. Ils peuvent tou-tefois être révoqués à tout moment par l'assemblée des associés ou le conseil d'administration. Les résultats de l'entre-prise doivent être répartis en trois parties : - un prélèvement de 15 % minimum est affecté à la constitution des réserves égales, un autre de 1 % minimum à une réserve statutaire ou « fonds de développement ». En outre, une partie des réserves peut être transformée en provision pour investissement (PPI), à condition d'être investie en matériel dans les 4 ans, mais les réserves sont impartageables, et ne peuvent, par exemple, être distribuées à un sociétaire lors de son départ ; - un minimum de 25 % du résultat est attribué aux salariés, associés ou non. Cette somme peut être bloquée pendant 5 ans, ce qui évite le paiement de charges sociales et patronales ; - une part peut être versée aux associés sous forme d'intérêt aux parts sociales, à condition que cette part soit inférieure aux réserves et à la part distribuée aux salariés. Le statut de SCOP présente en outre un certain nombre de particularités fiscales. Ainsi, les réserves, la part distribuée aux salariés, et l'éventuelle provision pour investissement (PPI) sortent de l'assiette fiscale de l'impôt sur les sociétés, auquel la SCOP, comme toute entreprise, est assujettie. Les SCOP sont soumises tous les ans ou tous les cinq ans, selon qu'el les travaillent ou non avec un commissaire aux comptes, à un processus de révision, autrement dit à un audit externe destiné à s'assurer que les principes coopératifs et les règles sta-tutaires sont bien respectés. La principale difficulté, lors du démarrage de l'entreprise, fut le financement. 25 personnes, amis et famille, apportèrent près de la moitié du capital, mais durent se constituer en SAS (société par action simplifiée), comptant pour une voix dans la SCOP, afin de respecter le principe de la majorité des voix aux salariés. Le reste des fonds fut obtenu grâce à des emprunts contractés auprès de structures de financement de l'économie sociale et solidaire (Crédit coopératif, Nef, etc.). Selon les fondateurs, l'obtention d'un montant d'emprunts égal à deux fois et demi le capital n'a été pos-sible que grâce au statut de SCOP. En 2003, 14 produits labellisés Max Havelaar sont lancés dans 45 magasins, générant un chiffre d'affaires de 35 000 euros. L'entreprise poursuit régulièrement sa croissance en termes de produits vendus, de chiffre d'affaires et de salariés, atteignant en 2007 un chiffre d'affaires de 18,5 millions d'euros, avec 71 salariés, une gamme de plus de 1 OO produits distribués dans plus de 3 500 points de vente, et réalisés en partenariat avec plus de 20 coopératives partenaires. Toutefois, entre 2008 et 201 1, la croissance est stoppée par la crise, tandis que la concurrence s'est renforcée, et Ethiquable, déficitaire, est dans l'obligation de supprimer 9 postes. Durant cette période difficile, les salariés ne perçoivent pas d'augmentation, mais une part de 3 % des salaires continue à être bloquée pendant 5 ans pour ali-menter le capital social. En 2008, l'ensemble des produits Ethiquable est certifié « Bio », tandis que l'en-treprise obtient la certification ISO 9001. Sept nouvelles filières sont créées entre 2008 et 201 1 dans des pays en difficulté tels qu'Haïti et Madagascar. En 2009, la SCOP Ethiquable essaime en Belgique et en Allemagne, et uploads/Finance/ cas-de-strategie-ethiquable.pdf
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- Publié le Mar 11, 2021
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