COMPTABILITÉ DE COUVERTURE ET ENGAGEMENT FERME EN DEVISES : MÉTHODES FRANCAISES
COMPTABILITÉ DE COUVERTURE ET ENGAGEMENT FERME EN DEVISES : MÉTHODES FRANCAISES ET RÈGLES IFRS (II) L a première partie de cet article était consacrée aux solutions admises en France pour la comptabilisation de la couverture des engagements fermes en devises. Alors que sur le plan national, on observe une absence de dispositions spécifiques dans le domaine de la couverture de change, il n’en est pas de même sur le plan international. La norme IAS 39, consacrée à l’évaluation et à la comptabilisation des instruments financiers, prévoit une exception à l’évaluation à la juste valeur des produits dérivés. En effet, elle a instauré le principe de la comptabilité de couverture. De ce point de vue, cette norme envisage non seulement la couverture des créances et dettes existant au bilan, mais aussi la couverture des opérations futures. Parmi celles-ci, les engagements fermes sont explicitement mentionnés et ont fait l’objet d’une révision de la position de l’IASB. L’ancienne norme IAS 39 (1998) excluait ceux-ci de la Réflexion R.F .C. 389 Juin 2006 28 Résumé de l’article L’IASB prévoit un système spécifique de comptabilité de couverture com- portant deux formes possibles s pour les engagements fermes en devises. Le premier (couverture de juste valeur) implique un rattach hement des diffé- rences de change de l’élément couvert et de l’instrument de couverture au compte de e résultat, alors que le second (couverture de flux de trésorerie) ne dégage pas les écarts sur l’élé ément couvert et impute ceux correspondant à l’instrument de couverture aux capi- taux propres. Pierre SCHEVIN Professeur à l’Université Robert Schuman de Strasbourg et à l’IECS Diplômé d’expertise comptable “couverture de juste valeur”, et ne laissait que la possibilité d’appliquer la “couverture de flux de trésorerie”. Par contre, la norme révisée (2003) actuellement en vigueur autorise leur insertion dans ces deux types de comptabilité de couverture (1). Dans un premier temps, nous procéde- rons à une analyse des règles prévues pour la comptabilisation de la couverture des créances et dettes, actuelles et futures, en devises. L’article montrera ensuite, à partir d’un exemple, com- ment les mettre en pratique dans le cas d’une commande, et quelles sont les incidences du choix de la formule de comptabilité de couverture retenue. Il comporte un cadre complet pour le traitement des opérations en devises (2) et leur couverture (3). Principe de l’inscription au bilan Il s’agit d’une différence essentielle entre la réglementation française et la réglementation internationale. La norme IAS 39 impose l’inscription sys- tématique au bilan des instruments déri- vés à leur juste valeur (4). Les règles fran- çaises exigent seulement une information en annexe, au titre des engagements qui découlent de ces “produits” finan- ciers. De plus, la norme IAS 39 s’attache à donner une définition précise d’un ins- trument dérivé (5). Il s’agit d’un instru- ment financier présentant trois caracté- ristiques : • fluctuation de la valeur en fonction d’un sous-jacent (par exemple d’un cours de change), • nécessité d’un versement initial nul (cas d’un contrat à terme) ou faible (cas d’une option), • règlement à une date future (exécu- tion du contrat à l’échéance). Fractionnement de la valeur En principe, l’instrument de couverture est appréhendé dans son intégralité. Il existe normalement une évaluation unique de la juste valeur et les facteurs à l’origine des variations de juste valeur sont interdépendants. Par suite, lors- qu’une entreprise désigne une relation 1. IAS 39, § 87. 2. IASB, IAS 21, Effets des variations des cours des monnaies étrangères. 3. IASB, IAS 39. 4. IAS 39 § 14 Comptabilisation initiale. 5. IAS 39 § 9. I. LE RÉFÉRENTIEL IFRS 1. Traitement des dérivés de couverture, l’instrument de couver- ture est retenu dans sa globalité. Cependant, deux exceptions concer- nant la couverture du risque de change sont admises (6) : • la séparation de la valeur intrinsèque et de la valeur-temps d’un contrat d’op- tion et la désignation comme instru- ment de couverture de la seule varia- tion de valeur intrinsèque d’une option, en excluant la variation de sa valeur- temps ; • la séparation de l’élément lié au diffé- rentiel d’intérêt sur les deux monnaies (c’est-à-dire le report ou le déport) et le cours de change au comptant dans le cas d’un contrat de change à terme de gré à gré (forward). Cette séparation est destinée à permettre une meilleure appréciation de l’efficaci- té de la couverture par comparaison des variations de valeur du produit dérivé et de l’élément couvert. Par suite, deux approches sont concevables pour appré- hender la couverture du risque de chan- ge : • la première est basée sur le cours de change au comptant, • la seconde repose sur le cours de chan- ge à terme. On peut ajouter que cette possibilité de segmentation autorise aussi la recon- naissance d’une relation de couverture en cas de gestion dynamique, par exemple un montant nominal de l’ins- trument de couverture inférieur au mon- tant couvert, ou encore en cas de déca- lage d’échéance du flux couvert. Enfin, on peut préciser qu’un frac- tionnement de l’instrument de cou- 29 Comptabilité R.F .C. 389 Juin 2006 verture est possible en ce qui concer- ne le montant affecté à la relation de couverture. Ainsi, 50 % du montant notionnel peut être désigné en tant qu’instrument de couverture (7). Par contre, le découpage de la durée de vie de l’instrument n’est pas admis. Ainsi, une relation de couverture ne peut pas être désignée pour une pério- de plus courte que l’échéance. Différents types de couverture La comptabilité de couverture met en œuvre le principe de symétrie. Celui-ci implique de comptabiliser de la même manière les écarts d’évaluation sur l’élé- ment couvert et sur l’instrument de cou- verture. En ce qui concerne les instru- ments de gestion du risque de change, au niveau des transactions en devises, deux catégories de couverture sont envi- sageables. Couverture de juste valeur Elle a d’abord pour objectif de se pro- téger contre une exposition aux varia- tions de la juste valeur d’un actif ou d’un passif comptabilisé au bilan. La version révisée de l’IAS 39 y ajoute le cas d’un engagement ferme non encore comp- tabilisé (8). Cette exposition doit présenter deux caractéristiques : • elle est attribuable à un risque spéci- fique (tel que le risque de variation des cours des monnaies), • elle affectera le résultat de l’entrepri- se (par le biais des différences de chan- ge). L’impact sur le compte de résultat peut être immédiat (cas d’une créance ou d’une dette en devises convertie au cours de clôture) ou différé (cas d’une créan- ce ou dette future). Le choix de la couverture de juste valeur pour des créances et dettes non enco- re comptabilisées implique que les varia- tions de valeur des engagements et celles des instruments de couverture soient comptabilisées en résultat avant la concrétisation de l’opération future. Couverture de flux de trésorerie Cette seconde catégorie de comptabi- lité de couverture vise à se prémunir contre une exposition à la variabilité de flux de trésorerie ultérieurs, qui pourrait également affecter le résultat. Cette varia- bilité est liée à un risque particulier, asso- cié : • soit à un actif ou à un passif enregis- tré au bilan (tels que les paiements d’in- térêt à venir sur une dette à taux variable), • soit à une transaction future, certaine (dans le cas d’une commande) ou pré- vue et hautement probable (dans le cas des prévisions budgétaires). Initialement, seul ce type de couvertu- re était possible pour les engagements fermes en devises. La révision de l’IAS 39 sur ce plan va dans le sens d’un rap- prochement avec la norme américaine FAS 133 (9). Conditions de mise en œuvre Documentation Selon les règles françaises et internatio- nales, une opération de couverture doit être traitée comme telle dès l’origine, et doit garder cette qualification jusqu’à son dénouement. Les exigences inter- nationales sont plus fortes, étant donné que l’IAS 39 impose l’établissement d’une documentation formelle. Elle doit comprendre, pour chaque relation de couverture, les éléments suivants (10) : • la stratégie de couverture de l’entre- prise, Abstract The IASB provides for a specific system of cover accounting including two pos- sible forms for firm commitments in foreign currency. The first (cover of fair value) implies joining the differences of exchange of the covered item and of the cover instrument to the income account, whereas the second (cover of cash flow) does not bring out the deviations on the covered item and charges those corres- ponding to the cover instrument to stockholders' equity. 6. IAS 39 § 74. 7. IAS 39 § 75. 8. IAS 39 § 86a. 9. FASB, FAS 133, Accounting for derivative instruments and hedging activities, 1998. 10. IAS 39, § 88a. La réglementation de l’IASB autorise deux approches pour la mise en évi- dence de la relation de couverture. L’approche globale par le cours à terme correspond à celle adoptée implicitement par les solutions fran- çaises. L’approche analytique par le cours au comptant est voisine de la réglementation américaine (FAS 52). 2. Principes de la comptabilité de couverture uploads/Finance/ comptabilite-de-couverture-et-engagement-ferme-en-devises-methodes-francaises-et-regles-ifrs-ii.pdf
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- Publié le Sep 10, 2022
- Catégorie Business / Finance
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