La propriété intellectuelle & la transformation numérique de l’économie Regards

La propriété intellectuelle & la transformation numérique de l’économie Regards d’experts INPI – La propriété intellectuelle et la transformation numérique de l’économie – 175 mots clés : cession d’actifs e-commerce | cession de e-business | cession de fonds de commerce | enjeux | modalités | e-clientèle | droits d’auteur | marques | noms de domaines L’auteur Avocate au barreau de Paris. Titulaire d’un master en droit des affaires option distribution et consommation. Titulaire d’un certificat de droit européen. Gérante du cabinet Bootherstone Avocat, intervenant en droit des affaires et droit de la propriété intellectuelle. Synthèse Lorsqu’un rachat de tout ou plusieurs éléments d’un site e-commerce est envisagé, l’opération peut, sous certaines conditions, s’analyser comme une véritable cession de fonds de commerce, entraînant des conséquences juridiques lourdes et pas toujours anticipées par les parties. D’où l’intérêt de connaître ces règles et les conditions dans lesquelles elles s’appliquent, pour sécuriser la transaction et en tirer profit. 3.2 Cessions de tout ou partie de e-business Sécuriser les transactions par la notion de e-fonds de commerce par Tamara Bootherstone 3.2  Cessions de tout ou partie de e-business Introduction La créativité en matière d’économie numérique et les exploitations qui en découlent sont vertigineuses et protéiformes. Elles sont parfois organisées, mises en valeur et valorisées, notamment par la mise en place d’une stratégie de propriété intellectuelle. Elles sont, le plus souvent, des électrons libres et répondent aux impératifs et aux opportunités de l’instant. Il en va de même des opérations de cession portant sur ce nouvel « or noir », les parties faisant preuve, là aussi, d’une créativité pragmatique centrée sur le rachat d’éléments ciblés qu’elles pressentent porteurs d’innovations, de potentiels et, à terme, d’emplois et de bénéfices. Il peut s’agir de reprendre une activité entière, un site internet, ou bien seulement un ou plusieurs éléments tels que nom de domaine, les droits de propriété intellectuelle (droits sur une charte graphique, marque, brevet, base de données), ou encore le fichier clients. Les entreprises intéressées concluent alors différents contrats, pas toujours nommés ou parfois mal nommés, souvent sans prendre la mesure des conséquences ou des enjeux de ce qu’elles signent. Or : — —  si la cession d’un seul élément d’actif bien précis ne pose en général pas de problème (à condition toutefois de respecter les exigences juridiques requises en matière de contrats de vente, avec les spécificités propres à l’élément acquis) ; — —  la question se complique lorsque plusieurs éléments sont cédés en même temps, ce qui sera le plus souvent le cas dans une transaction portant sur la cession d’un site de e-business. En pareil cas, les entreprises doivent veiller à identifier s’il s’agit effectivement d’une véritable cession de fonds de commerce, sous peine de s’exposer à certains risques allant du redressement fiscal à la nullité de l’opération, l’acte de cession de fonds de commerce devant respecter des exigences particulières (I). Les juges reconnaissant désormais l’existence juridique d’un e-fonds de commerce, il est important pour les entreprises de connaître les critères retenus en la matière (II). Le critère essentiel étant l’existence d’une clientèle propre, les droits de propriété intellectuelle peuvent jouer un rôle tout à fait essentiel car ils constituent précisément des éléments de ralliement de la clientèle (III). Une fois admis que les règles propres à la cession de fonds de commerce s’appliquent à la cession de e-fonds de commerce, on peut se poser la question de la protection ainsi accordée, notamment au regard des spécificités du e-fonds de commerce, afin de faire évoluer les règles en la matière et d’organiser une meilleure protection des transactions (IV). INPI – La propriété intellectuelle et la transformation numérique de l’économie – 177 En conclusion nous évoquerons le caractère français des règles exposées et la possibilité de choisir la loi applicable à la transaction, afin d’écarter, le cas échéant, leur application (conclusion). I - Quelques règles propres à la cession de fonds de commerce L’objet du présent chapitre n’est pas de passer en revue toutes les règles applicables à la cession de fonds de commerce mais simplement de signaler celles qui doivent être prises en considération dans les opérations de ventes de tout ou partie de e-business. A. Enregistrement de la promesse unilatérale de cession La première règle est que, en vertu de l’article 1840 A du Code général des impôts, une promesse unilatérale de cession de fonds de commerce doit être enregistrée dans les dix jours de son acceptation par le bénéficiaire, et ce, sous peine de nullité. La question appliquée à notre problématique présente un intérêt évident puisqu’elle peut permettre, le cas échéant, de sortir d’un engagement contractuel qu’on ne souhaite plus honorer et créant ainsi un facteur d’insécurité juridique. Bien que les juges n’aient pas eu finalement à se prononcer, cet argument a déjà été soulevé. Une entreprise avait promis de vendre à une autre entreprise un certain nombre d’éléments d’un site internet parmi lesquels les marques et codes d’accès, la clientèle attachée aux marques et les logiciels permettant le fonctionnement du service offert aux internautes. L’acte n’avait pas été enregistré, les parties ne pensant pas, à l’origine, effectuer une cession de fonds de commerce. L’entreprise bénéficiaire de la promesse avait levé l’option d’achat dans les délais, mais son promettant ne souhaitait plus vendre – ou plus aux conditions convenues. Assignée en exécution de la promesse, le promettant a soulevé la nullité de cette dernière au motif qu’il s’agissait en réalité d’une cession de fonds de commerce et que l’acte, qui n’avait pas été enregistré, était donc nul. On imagine aisément la déconvenue et la perte sèche des frais engagés par l’entreprise bénéficiaire (et accessoirement par ses investisseurs), et, à l’inverse, la satisfaction de l’entreprise promettant de pouvoir sortir ainsi d’une promesse de vente, ayant par exemple trouvé entre- temps un acheteur au double du prix initialement convenu (TGI Paris, 1re chambre, 1re section, 10 mai 2000, Société Clarisse c/Société J. Coulon et associés). B. Information des salariés Dans le même ordre d’idée, et avec la même sanction, à savoir la nullité de l’acte de cession, la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire imposera désormais (à compter du 2 novembre 2014) de consulter les salariés en cas de projet de cession d’un fonds de commerce (comme en cas de cession de la majorité des parts sociales de la société). Cette nouvelle disposition s’applique non seulement aux sociétés dans lesquelles existe un comité 3.2  Cessions de tout ou partie de e-business d’entreprise, mais également à celles ayant moins de 50 salariés. Elle peut donc trouver à s’appliquer dans le cas qui nous occupe et crée ici encore un risque d’insécurité juridique dont il faut tenir compte. C. Mentions obligatoires de l’acte Par application de l’article L 141–1 du Code de commerce : I. Dans tout acte constatant une cession amiable de fonds de commerce, consentie même sous condition et sous la forme d’un autre contrat ou l’apport en société d’un fonds de commerce, le vendeur est tenu d’énoncer : 1/  le nom du précédent vendeur, la date et la nature de son acte d’acquisition et le prix de cette acquisition pour les éléments incorporels, les marchandises et le matériel ; 2/ l’état des privilèges et nantissements grevant le fonds ; 3/  le chiffre d’affaires qu’il a réalisé durant les trois exercices comptables précédant celui de la vente, ce nombre étant réduit à la durée de la possession du fonds si elle a été inférieure à trois ans ; 4/ les résultats d’exploitation réalisés pendant le même temps ; 5/ le bail, sa date, sa durée, le nom et l’adresse du bailleur et du cédant, s’il y a lieu. II. L’omission des énonciations ci–dessus prescrites peut, sur la demande de l’acquéreur formée dans l’année, entraîner la nullité de l’acte de vente. Le texte est on ne peut plus clair. Il est pourtant assez rare de voir ces informations portées dans un acte de cession ou d’acquisition de site internet ou de tout ou partie d’éléments d’actifs d’un e-business, et particulièrement les comptes sociaux des trois derniers exercices. En effet, en cette matière, les éléments retenus pour la fixation du prix ne portent pas tant – ou pas seulement – sur le chiffre d’affaires que sur d’autres critères comme le taux de fréquentation, le nombre d’abonnés, les revenus publicitaires, le fichier clients ou bien encore le nom de domaine. À cet égard, on rappellera à l’acheteur l’importance de faire mentionner dans l’acte les éléments ayant servi à déterminer son consentement pour le prix convenu, sous peine de ne pouvoir faire annuler la vente en cas de modification de l’un de ces critères. Pour mémoire, on citera cet arrêt de la cour d’appel de Paris du 20 mars 2003 (CA Paris, 5e ch. B, 20 nov. 2003, SARL CD Édition c/ SA Creanet) qui a refusé d’annuler la vente d’un site internet acheté à l’époque 1 798 000 francs (environ 350 000 euros) et dont la fréquentation avait très largement chuté après la vente, uploads/Finance/ extrait-pi.pdf

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  • Publié le Jui 20, 2021
  • Catégorie Business / Finance
  • Langue French
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