1 Notes sur : Rousseau, Du contrat social, [1762], III, 15, « Sitôt que la serv

1 Notes sur : Rousseau, Du contrat social, [1762], III, 15, « Sitôt que la service public cesse…l’État est perdu ». Remarques introductives Regarder le début et la fin du texte, puisque la première et la dernière phrase se font écho : « Sitôt que le service public cesse d’être … l’État est déjà près de sa ruine » / : « Sitôt que quelqu’un dit des affaires de l’État, que m’importe ? on doit compter que l’État est perdu » : dans la première phrase, l’État était au bord du gouffre, proche de la ruine, là est définitivement perdu. Donc : qu’est-ce qui se passe entre les deux ? Au fond, l’explication doit prendre la mesure de prendre de l’écart qui sépare ces deux formules. Objet Critique de la représentation et promotion d’une citoyenneté active, dans l’esprit de laquelle prévaut le service public. Rousseau l’oppose à la passivité de l’homme occupé par son seul gain financier individuel. Le texte se construit sur la distinction entre l’intérêt public, pour le service de l’État, et l’intérêt privé, polarisé par l’accumulation d’argent. Il s’agit d’opposer deux modalités d’action dans la vie publique : l’engagement personnel d’un côté, le fait de payer un tiers pour accomplir ses devoirs politiques de l’autre. La logique de l’accumulation du gain va ainsi de pair avec l’institution de représentants, qui scindent la souveraineté du peuple. On retrouve la critique du commerce, du luxe et de l’oisiveté déjà formulée dans le Discours sur les sciences et les arts (1751). Problème Penser la relation l’articulation entre la survie de l’État et l’intérêt pour le service public dans l’esprit des citoyens. Rousseau montre que la dimension morale du rapport à l’État et aux devoirs citoyens n’est pas secondaire mais centrale car elle engage directement l’existence de l’État. Déléguer à un tiers, grâce à l’argent, le service public que l’on devrait accomplir soi-même, n’est pas une manière de se libérer mais, au contraire, un moyen de s’asservir. Mais justement, comment comprendre que la finance soit un « mot d’esclave » ? En quoi la recherche de l’intérêt privé conduit à une forme d’asservissement politique qui menace l’existence même de l’État ? Comment, à partir d’une critique de l’intérêt financier individuel, Rousseau parvient à une redéfinition de la volonté générale comme activité de la personne en vue du commun ? Plan 1e § = Rousseau critique la délégation des devoirs du citoyen à des tiers, grâce à l’usage de l’argent. Sous quelle forme se manifeste la substitution de la dépense financière privée à la participation au service public ? 2e § : Rousseau s’intéresse aux causes morales de cet abandon du service public (ou de la minoration du sens civique), qui, loin de libérer le citoyen, l’asservit au contraire. Qu’est-ce qui, dans la finance, selon R, est vecteur d’asservissement ? 3e § : Rousseau en vient aux causes plus proprement politiques de cette désaffection et pose le problème de la bonne constitution. Comment l’opposition entre une cité bien conduite et un mauvais gouvernement permet de montrer que c’est bien dans l’attachement moral des citoyens au service public que se joue la survie de l’État. 2 Développement I (« sitôt que…pour la vendre ») Dans le premier moment du texte, Rousseau commence par formuler la condition principale d’une destruction imminente de l’État. Qu’est-ce qui menace l’existence de l’État ? Deux causes sont avancées : la diminution de l’intérêt des citoyens pour le « service public » et la substitution d’une forme de service à une autre. Le terme de service public n’est pas explicitement défini, mais on peut raisonnablement supposer qu’il s’agit de l’ensemble des actions accomplies ayant pour finalité le bien commun des citoyens d’un même État. (service pour le public). Ces actions qui permettent de servir le « public » peuvent donc être opposées aux actions que chaque citoyen accomplirait en vue de servir seulement son intérêt privé ou particulier. La deuxième cause ne concerne plus la finalité de l’action mais ses moyens. Elle consiste dans le fait que le citoyen préfère servir les affaires publiques par son argent (sa « bourse ») que par sa personne. On peut donc affirmer pour l’instant que les deux causes de la ruine prochaine de l’État sont donc : une hiérarchie des objets d’intérêt et la préférence d’une modalité de service à une autre. Le constat est nuancé : avant même un désintérêt complet, il suffit que le service public ne soit plus la « principale affaire », c’est-à-dire, l’occupation première, la priorité de l’activité des individus et qu’ils préfèrent faire usage de leur argent que de le personne pour que l’État soit, « déjà » gravement menacé. L’adverbe « déjà » insiste sur cette suffisance : il n’en faut pas davantage pour que l’État soit sur le point de disparaître (il est en effet « près » de sa ruine, mais pas encore ruiné). On apprend donc dans cette première phrase que de l’orientation de l’intérêt des citoyens et de la manière de le servir le public dépend finalement rien de moins que la survie même de l’État. Deux questions restent néanmoins en suspens : quelles sont exactement ces autres affaires qui ont relégué le service public à une occupation secondaire des citoyens, et en quoi consiste l’opposition entre le service de la bourse et celui de la personne ? Le second moment du texte permet de fournir des éléments de réponse. Rousseau propose deux exemples qui témoignent de la désaffection du service public, sous la forme d’une double suite de questions et réponses. Les deux questions se ressemblent dans leur énoncé = des expressions d’un certain devoir (« faut-il ? »). On comprend ainsi que le service public se présente désormais comme le devoir du citoyen. Or, Rousseau montre qu’il y a des manières détournées de s’acquitter de son devoir civique. Exemples de 2 types de services du citoyen, le devoir militaire et le devoir législatif. Le premier concerne le citoyen en tant que défenseur de la patrie, et engage la vie extérieure de l’État, dans sa relation à d’autres États qui risqueraient de lui nuire. Le devoir consiste alors à « marcher au combat ». Le second concerne le citoyen en tant que membre du souverain, c’est-à-dire du peuple uni en corps et producteur des lois. Il concerne donc le fonctionnement interne de l’État, qui impose « d’aller au conseil », lieu de discussion public où sont élaborées les lois. À la lecture de ces devoirs, on peut remarquer un second niveau de parallélisme, qui concerne les verbes employés par Rousseau : il s’agit bien de « marcher » et d’« aller », ce qui suppose une action physique, un déplacement du corps dans l’espace. Le « combat » et le « conseil » sont donc les lieux communs vers lesquels le déplacement du citoyen doit être orienté. Or, une même réponse est fournie à ces deux injonctions d’agir une même réponse : les citoyens préfèrent « rester chez eux ». Au lieu de se déplacer activement dans des lieux communs, les hommes 3 préfèrent demeurer passivement dans leur résidence privée. Le désintérêt du service public provient donc d’un repli sur soi qui se manifeste déjà par les lieux fréquentés. C’est donc ce repli passif sur le privé qui menace en premier lieu l’existence de l’État. Pour pouvoir justement rester « chez eux » au lieu d’aller au combat ou au conseil, les citoyens vont alors faire accomplir leur services par d’autres individus. L’action directe ou immédiate est donc remplacée par une action indirecte ou médiate, qui n’est plus effectuée par le citoyen lui-même, mais par des tiers (troupes de soldats pour le combat, députés ou représentants pour le conseil). Dans le premier cas, on peut penser au fait de payer des mercenaires qui combattront à leur place, dans le second, au fait de déléguer le pouvoir de faire les lois. Or Rousseau estime qu’on peut déléguer à certains le pouvoir d’exécuter les lois – c’est la fonction de ce qu’il appelle le gouvernement – mais pas celui de participer à l’élaboration des lois qui est la fonction propre du souverain. Rousseau oppose une conception active de la citoyenneté, soucieuse d’accomplir elle-même, par sa « personne », le service public, et une conception passive de la citoyenneté qui se contente d’agir indirectement, en payant ou en nommant d’autres hommes pour accomplir à sa place le service public qui a cessé d’être son principal intérêt. Cette citoyenneté passive : même pas vraiment une citoyenneté. On comprend alors que quand Rousseau parlait de service de la « personne », il s’agissait d’insister sur l’importance de l’engagement moral (intérêt) et physique (aller, marcher). Or, dans la situation menaçante décrite par Rousseau, les citoyens ont transféré leur force aux soldats, et leur volonté aux députés. paresse et argent = les deux causes principales de la situation périlleuse dans laquelle se trouve l’État. Différence de nature des causes : paresse = une tendance individuelle à l’inaction, l’argent = une valeur socialement instituée en vue de rendre uploads/Finance/ notes-sur-explication-rousseau-contrat-social-iii-15.pdf

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  • Publié le Jul 18, 2022
  • Catégorie Business / Finance
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