Introduction Au début de l’année 2009, l’économie mondiale était profondément d
Introduction Au début de l’année 2009, l’économie mondiale était profondément déprimée. Ce qui semblait être la pire crise financière depuis la Grande Dépression avait éclaté avec une rare violence. Les bourses des Etats-Unis et d’Europe, bientôt suivies par celles de la plupart des marchés en développement et émergents, s’étaient effondrées, et les marchés étaient extrêmement instables; le commerce mondial a chuté; la volatilité des flux de capitaux a encore aggravé la situation, même dans les pays en développement qui avaient fait preuve de «rigueur» fiscale et maîtrisé leurs échanges extérieurs, et qui ont été touchés par une crise dont ils n’étaient aucunement responsables. A peine un an plus tard, cette situation semble s’être inversée. Les pays en développement (notamment en Asie) ont été les premiers à sortir de la crise: en réalité, beaucoup d’entre eux ont seulement subi un ralentissement de croissance, celle-ci restant néanmoins positive plutôt que négative. La production maintenant recommencé à croître – dans l’économie mondiale et plusieurs de ses composantes majeures – après les seuils extrêmes atteints à la fin de l’année 2008 et au début de l’année 2009 (figure 1). Il a été récemment déclaré que les EtatsUnis, le Royaume-Uni et la zone euro étaient sortis de la récession, puisque les niveaux de revenus s’y sont rétablis, notamment durant le deuxième trimestre 2009. Les marchés boursiers ont retrouvé leur optimisme, et l’on a assisté à une reprise des mouvements de capitaux privés vers certains pays en développement (pas tous, cependant). On note un regain d’optimisme, le sentiment général étant que l’économie mondiale retrouvera la croissance en 2010, la reprise devant être particulièrement rapide dans les pays en développement. Ce phénomène était en grande partie lié aux plans de relance, apparemment désordonnés, mais néanmoins synchronisés, qui ont été adoptés dans le sillage de la crise. Les gouvernements du monde entier ont réagi non seulement en adoptant de gigantesques plans de sauvetage des institutions financières en difficulté, mais aussi d’importants programmes de relance budgétaire, qui ont efficacement conjuré la dépression. De nombreux observateurs ont été tentés de considérer la récession mondiale de 2008-09 comme un simple phénomène temporaire dans un processus de croissance économique mondiale continue et dynamique. Toutefois, cette déduction par trop évidente n’a jamais été vraiment fondée, comme l’ont récemment montré les crises des dettes souveraines qui ont frappé des pays comme Doubaï et la Grèce. Ces crises s’inscrivent dans un ensemble plus vaste. De ce fait, ce processus de croissance ne pourra pas se poursuivre de façon stable et soutenue, et ce pour deux séries de raisons, la première structurelle et la seconde conjoncturelle. I. Causes et conséquences Au niveau structurel, les trois déséquilibres fondamentaux qui ont provoqué la dernière crise du capitalisme international n’ont toujours pas été résolus: le déséquilibre entre la finance et l’économie réelle; les déséquilibres macroéconomiques entre les principaux acteurs de l’économie internationale; et le déséquilibre écologique qui deviendra nécessairement une contrainte pour la croissance future, non seulement en raison du changement climatique, mais aussi d’autres problèmes environnementaux et de la demande d’énergie. Ces problèmes structurels – qui pâtissent de plusieurs restrictions, faiblesses et paradoxes inhérents – reflètent les tendances passées et actuelles de la croissance économique, dans les pays développés comme dans les pays en développement. Nous approfondirons ces thèmes dans la section suivante, mais il importe de noter qu’une croissance soutenue de l’économie mondiale ne sera plus possible si ces difficultés ne sont pas résolues et, même si elles le sont, on ne peut exclure que des crises, sérieuses et prolongées, se produisent dans des pays et régions spécifiques. Ces problèmes structurels se doublent de plusieurs problèmes conjoncturels, de telle sorte qu’il subsiste plusieurs «facteurs de risque» pour la croissance future, notamment en ce qui concerne l’amélioration du bien-être d’une grande partie de la population mondiale, en particulier les personnes déjà parmi les plus démunies sur le plan matériel. Premièrement, les problèmes de la finance n’ont été traités que superficiellement. L’effet dissuasif des comportements dits «efficaces», ainsi que les mécanismes qui incitent les opérateurs à prendre des risques excessifs sur les marchés financiers aggravent le problème sous-jacent de la stagnation ou du déclin des marchés immobiliers, ainsi que les préoccupations relatives aux dettes souveraines (que ce soit à Doubaï ou en Grèce). L’aléa moral est en fait plus présent que jamais, car les plans de renflouement des institutions financières ne se sont pas accompagnés d’une réglementation adéquate (Stiglitz, 2009; Kregel, 2010). Au début de 2010, les marchés des emprunts d’Etat de certains pays développés d’Europe ont été le lieu d’attaques spéculatives et, une fois encore, des renflouements massifs ont été organisés. Ces derniers n’avaient pas pour seul objet de protéger ces pays de la spéculation, mais aussi les banques qui avaient prêté inconsidérément. Les résistances à une restructuration des dettes qui forcerait les banques à assumer leur part de responsabilité dans la crise reflètent une incapacité plus large de discipliner la finance, associée à une tendance à permettre aux acteurs de persister dans leurs activités déstabilisatrices. Il s’ensuit que les problèmes de la finance mondiale sont loin d’être terminés, et qu’ils se poseront à nouveau, en pire, dans un avenir prévisible. Les conséquences se font sentir dans certaines économies capitalistes, comme celles de la Grèce ou de l’Irlande, ou émergentes, comme en Lettonie ou en Estonie, où de sévères plans d’austérité, aux effets déflationnistes ravageurs, sont imposés aux populations à cause des pressions exercées par des capitaux très mobiles. Cela vaut plus encore pour les pays en développement, dont beaucoup sont encouragés à déréglementer leurs marchés financiers, en dépit de toutes les preuves démontrant la fragilité financière induite par cette déréglementation. Deuxièmement, ces déséquilibres ont un impact immédiat sur certains marchés mondiaux qui touchent directement la vie quotidienne des gens, notamment la nourriture et le carburant. Il est maintenant avéré que l’extrême volatilité des prix alimentaires et pétroliers qui a causé des ravages, notamment dans les pays en développement, n’était pas liée à de véritables forces économiques, mais résultait plutôt d’une intervention des acteurs financiers sur ces marchés (CNUCED, 2009; Wahl, 2009; Ghosh, 2010). Ces mouvements désordonnés des marchés sont notamment dus à l’utilisation des contrats à terme, qui ont favorisé l’émergence «d’investisseurs sur fonds indiciels», qui se contentaient de spéculer sur l’évolution des cours et les ont ainsi fait monter bien audelà des niveaux résultant des fluctuations réelles de l’offre et de la demande. Les matières premières sont devenues un support d’investissement attrayant pour les investisseurs financiers vers 2006, lorsque le marché immobilier aux Etats-Unis a montré les premiers signes d’essoufflement, avant de s’effondrer. Ce mouvement a été facilité par la déréglementation financière, qui a permis à des intervenants purement financiers d’entrer sur ces marchés, sans être tenus de détenir des contreparties physiques sous forme de matières premières; ainsi, la Commodité Futures Modernisation Act, adoptée en 2000, a effectivement permis de libéraliser le commerce des matières premières aux Etats-Unis, en soustrayant les échanges sur le marché libre de ces matières (à l’exception des marchés réglementés) à la supervision de la Commodités Futures Train Commission (CFTC). Cette dérégulation a permis à tous les investisseurs, y compris les fonds spéculatifs, les fonds de pensions et les banques d’investissement, de négocier des contrats à terme de matières premières sans aucune limite de couverture, et sans obligation de divulgation ni surveillance réglementaire. Selon la Banque des règlements internationaux (BRI), la valeur des encours sur le marché libre des produits dérivés liés aux matières premières autres que l’or et les métaux précieux est passée de 5,85 milliards de dollars des Etats-Unis en juin 2006 à 7,05 milliards de dollars EU en juin 2007, puis à 12,39 milliards de dollars EU en juin 2008 (BRI, 2009, tableau 22A, p. A106). Cette augmentation a généré une bulle financière, qui s’est propagée des marchés à terme aux marchés au comptant. A partir de la moitié de l’année 2008, les cours des matières premières ont baissé lorsque les investisseurs sur fonds indiciels ont commencé à se retirer du marché, et la récession mondiale a accentué ce recul. Mais la chute a été de courte durée, les prix ayant repris leur ascension à partir du début de l’année 2009, avant même qu’on n’ait pu réellement constater une reprise de la production mondiale. Entre avril 2009 et janvier 2010, l’indice des prix alimentaires de la FAO a augmenté de 22 pour cent 1. Là encore, cette augmentation ne reflétait pas les forces de l’économie réelle, la demande et l’offre globales de la plupart des produits restant à peu près en équilibre. Comme auparavant, l’augmentation récente des prix reflète l’accroissement des opérations spéculatives sur les marchés à terme de matières premières. Ces forces sont à nouveau à l’œuvre, alors que la reprise économique se précise. Etant donné qu’aucune réglementation des marchés à terme n’a été adoptée, et que la grande majorité des contrats dits «OTC» («over-the-counter») continue d’être négociée sur le marché libre plutôt que dans le cadre d’échanges réglementés exigeant des marges de couverture suffisantes, les risques de volatilité restent intacts. La spéculation sur les matières premières est uploads/Finance/ recherche-crise-eco-mond 1 .pdf
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- Publié le Fev 28, 2022
- Catégorie Business / Finance
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