Revue française de pédagogie L'étude des intéractions en classe de français lan

Revue française de pédagogie L'étude des intéractions en classe de français langue étrangère et langue maternelle : deux « didactiques » au banc d'essai ? Sandra Canelas-Trevisi, Thérèse Thévenaz-Christen Citer ce document / Cite this document : Canelas-Trevisi Sandra, Thévenaz-Christen Thérèse. L'étude des intéractions en classe de français langue étrangère et langue maternelle : deux « didactiques » au banc d'essai ?. In: Revue française de pédagogie, volume 141, 2002. Vers une didactique comparée. pp. 17-25; doi : https://doi.org/10.3406/rfp.2002.2911 https://www.persee.fr/doc/rfp_0556-7807_2002_num_141_1_2911 Fichier pdf généré le 24/12/2018 Résumé La notion d'interaction est utilisée aussi bien en didactique du français langue étrangère qu'en didactique du français langue maternelle. En adoptant la perspective de la didactique comparée, nous avons analysé l'emploi de cette notion dans un corpus de recherches récentes. Trois questions guident notre analyse : 1. Quelle est la définition de l'interaction adoptée par les différents chercheurs ? 2. Comment les dimensions de l'acquisition ou de renseignement/apprentissage sont-elles conçues ? Comment le contenu à apprendre est-il identifié ? 3. Comment le recueil des données est-il théorisé ? Notre parcours exploratoire montre que les frontières entre les deux didactiques sont marquées essentiellement par la modélisation de l'acquisition d'une part, de renseignement/apprentissage d'autre part, ainsi que par des conceptualisations différentes de l'objet enseigné. Abstract The notion of interaction is both used in French foreign language didactics and in French mother tongue didactics. Based on a comparative didactics perspective, we analysed this notion in the scope of some recent research. Three questions guided our analysis: 1 . What definition of interaction is adopted by different researchers? 2. How do they conceive the dimension of acquisition or of teaching/learning? How do they identify the taught contents? 3. How do they theorise their data collection method? Our exploration shows that the bounds between both didactics are established by the acquisition's model on the one hand, and the teaching/learning's model on the other, as well as by the different conceptualisations of the taught object. L'étude des interactions en classe de français langue étrangère et langue maternelle : deux « didactiques » au banc d'essai ? Sandra Canelas-Trevisi Thérèse Thévenaz-Christen La notion d'interaction est utilisée aussi bien en didactique du français langue étrangère qu'en didactique du français langue maternelle. En adoptant la perspective de la didactique comparée, nous avons analysé l'emploi de cette notion dans un corpus de recherches récentes. Trois questions guident notre analyse : 1. Quelle est la définition de l'interaction adoptée par les différents chercheurs ? 2. Comment les dimensions de l'acquisition ou de renseignement/apprentissage sont-elles conçues ? Comment le contenu à apprendre est-il identifié ? 3. Comment le recueil des données est-il théorisé ? Notre parcours exploratoire montre que les frontières entre les deux didactiques sont marquées essentiellement par la modélisation de l'acquisition d'une part, de renseignement/apprentissage d'autre part, ainsi que par des conceptualisations différentes de l'objet enseigné. Mots-clés : didactique du français « langue maternelle », didactique du français « langue étrangère », interactions en classe, enseignement/apprentissage, acquisition, oral. Le processus de renouvellement, commencé il y a une trentaine d'années, qui a placé la communication, orale et écrite, en tête des objectifs d'enseignement, a touché aussi bien le français langue maternelle (ci-après FLM), que le français langue étrangère (ci-après FLE). Les deux didactiques ont été amenées à effectuer des emprunts à différents domaines des sciences du langage et plus largement des sciences humaines pour conceptualiser des objets d'enseignement et des procédures susceptibles de favoriser la maîtrise de capacités de communication chez les apprenants. La notion d'interaction se situe à la croisée de ces domaines. Dès lors, il y a lieu de se demander si les recherches qui s'intéressent aux enjeux de la construction (1) du langage (ce qui les rapproche du champ didactique) adoptent un traitement des interactions révélateur de la spécificité du projet scientifique des deux didactiques. Cette interrogation concerne une didactique comparée, si l'on admet que son objet est de questionner les frontières de la spécificité constitutive des didac- Revue Française de Pédagogie, n° 141, octobre-novembre-décembre 2002, 17 '-25 17 tiques des disciplines. Elle s'inscrit également dans une controverse présente au sein de la didactique du français langue maternelle depuis de nombreuses années (Chartrand et Paret, 1995). QUESTIONS DE RECHERCHE ET CHOIX DU CORPUS Pour interroger les frontières des deux didactiques, nous avons choisi de nous restreindre aux études qui portent sur la communication ou expression, voire production orales. Etant donné que les significations de ces termes, qui diffèrent notamment en fonction des traditions disciplinaires et des institutions, demeurent difficiles à distinguer clairement, nous adopterons le terme générique de conduites langagières orales. Ce terme est volontairement utilisé au sens le plus large, car les recherches retenues prennent en compte à des degrés divers des aspects verbaux et non verbaux et, dans le domaine du verbal, des faits linguistiques ponctuels (lexique, grammaire) ou inversement des phénomènes conversationnels comme la régulation des tours de parole. L'hypothèse sous-jacente est double : 1. L'« objet » conduites langagières orales permet de discriminer deux grands sous-ensembles d'études : - celles qui thématisent un objet d'enseignement particulier prenant en compte le dispositif préalable censé permettre son enseignement/ apprentissage dans la classe ; - celles qui se centrent sur l'analyse de la communication orale à partir de critères conversationnels et ethnologiques, plaçant les actions inhérentes à l'enseignement et à l'apprentissage en arrière-plan. 2. Le statut de l'interactant, placé en face des locuteurs novices, l'enseignant, change selon le point de vue adopté : locuteur expert parmi d'autres ou, inversement, enseignant engagé dans un projet d'enseignement spécifique, portant sur un objet particulier inscrit dans une modélisation des conduites langagières orales, inévitablement partielle, variant en fonction des théories de référence. Étant donné que les interactions en classe sont étudiées par des chercheurs qui se situent dans le champ de la didactique aussi bien que dans celui de la linguistique (linguistique de l'acquisition, linguistique appliquée, pragmatique) et de la psychologie (psychologie sociale), voire à la frontière entre plusieurs champs de recherches, nous ne pouvons prétendre à l'exhaustivité. Nous avons sélectionné un ensemble de recherches exemplaires à double titre (bien entendu nous ne pouvons exclure des contre-exemples en l'état actuel de notre investigation) : elles sollicitent la notion d'interaction et portent sur la relation entre l'enseignant, locuteur expert, et l'apprenant, locuteur novice. Dans le domaine du FLE, ont été retenus les travaux de De Pietro, Matthey et Py (1989) ; Bange (1992) ; Matthey (1996) ; Mondada (1995 et 2000) ; Gajo et Mondada (1998) ; Pekarek (1999) (2). En FLM, en plus de nos propres travaux (3) (Canelas-Trevisi, 1997 et 2001 ; Canelas-Trevisi, Moro, Schneuwly etThévenaz, 1999 ; Cicurel, 2001 ; Haller et Thévenaz, sous presse), nous nous appuyons essentiellement sur un numéro de la revue Pratiques (1999) qui traite des interactions et des apprentissages (plus particulièrement les travaux de Brixhe et Specogna, 1999 ; Turco et Plane, 1999) ; et sur les travaux de Nonnon (1990 ; 1998 ; 2000). L'ensemble des travaux mentionnés ci-dessus recouvre un espace de problèmes très vaste. Nous l'abordons d'un point de vue didactique, mais la perméabilité des frontières entre les recherches ne nous autorise pas à établir d'emblée un questionnement à partir de concepts didactiques comme, par exemple, ceux de transposition ou de contrat didactiques. Ces concepts, que nous intégrons dans nos propres travaux et qui sont issus de la didactique des mathématiques, ont certes migré de manière ponctuelle dans les didactiques du français, mais leur réinvestissement demeure faible dans les travaux portant sur les conduites langagières orales en classe. En particulier, dans la majorité des textes retenus, les concepts en question sont peu explicités, voire tout bonnement ignorés. Il s'agit dès lors pour nous d'éviter d'établir a priori une grille d'analyse qui pourrait occulter certaines des caractéristiques de notre corpus de textes scientifiques. Ceci serait tout à fait en contradiction avec notre objectif : mettre en évidence, parmi les procédures et les objets mobilisés dans l'analyse des interactions en classe, largement utilisée, ceux qui sont propres à chacune des deux didactiques du français. 18 Revue Française de Pédagogie, n° 141, octobre-novembre-décembre 2002 Notre investigation se focalise sur trois questions : 1. Quelle est la définition de l'interaction adoptée par les différents chercheurs ? 2. Comment les dimensions de l'acquisition ou de renseignement/apprentissage sont-elles conçues ? Comment le contenu à apprendre est-il identifié ? 3. Comment le recueil des données est-il théorisé ? LA QUESTION DE L'INTERACTION Dans le cadre restreint de cet article, il est impossible de rendre compte des valeurs que prend le terme d'interaction dans les différents domaines de recherches qui l'investissent, mais il semble toutefois possible d'identifier au moins trois points de vue : sociologique, cognitif et discursif. Le point de vue sociologique réunit l'interaction- nisme symbolique de Mead (1934) et de Goffmann (1974), la sociologie de la vie quotidienne, l'ethno- méthodologie de Garfinkel (1967) et enfin les tenants de l'analyse conversationnelle qui s'inscrivent dans la droite ligne de l'ethnométhodologie. Pour ces derniers, les membres d'une société accomplissent des activités sociales selon une organisation méthodique qui génère des normes et, en conséquence, un uploads/Finance/ rfp-0556-7807-2002-num-141-1-2911.pdf

  • 23
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Sep 12, 2021
  • Catégorie Business / Finance
  • Langue French
  • Taille du fichier 1.0193MB