F I C H E 1 Les pouvoirs adjudicateurs 127 F I C H E 1 Les pouvoirs adjudicateu
F I C H E 1 Les pouvoirs adjudicateurs 127 F I C H E 1 Les pouvoirs adjudicateurs 1. Droit communautaire 1.1. Définition extensive L’expression « pouvoir adjudicateur » désigne l’acheteur public dans la directive 2004/18/ CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services1. Cette notion a été complétée, à la lumière de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), par la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics. Le point 1 de l’article 2 de cette directive dispose : « Aux fins de la présente directive, on entend par : 1. « pouvoirs adjudicateurs », l’État, les autorités régionales ou locales, les organismes de droit public ou les associations formées par une ou plusieurs de ces autorités ou un ou plusieurs de ces organismes de droit public ; 2. « autorités publiques centrales », les pouvoirs adjudicateurs figurant à l’annexe I et, dans la mesure où des rectificatifs ou des modifications auraient été apportés au niveau national, les entités qui leur auraient succédé ; 3. « pouvoirs adjudicateurs sous-centraux », tous les pouvoirs adjudicateurs qui ne sont pas des autorités publiques centrales ; 4. « organisme de droit public », tout organisme présentant toutes les caractéristiques suivantes : a) il a été créé pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général ayant un ca ractère autre qu’industriel ou commercial; b) il est doté de la personnalité juridique ; et c) soit il est financé majoritairement par l’État, les autorités régionales ou locales ou par d’autres organismes de droit public, soit sa gestion est soumise à un contrôle de ces autorités ou organismes, soit son organe d’administration, de direction ou de surveillance est composé de membres dont plus de la moitié sont désignés par l’État, les autorités régionales ou locales ou d’autres organismes de droit public ». 1.2. Identification des organismes de droit public Le caractère cumulatif de ces trois critères fixé par les dispositions précitées est affirmé par la CJUE2. 1. La CJUE précise que l’annexe III de la directive 2004/18/CE du 31 mars 2004 qui fixe la liste des organismes de droit public au sens de l’article 1er de la directive présente un caractère indicatif (CJUE, 12 septembre 2013, IVD GmbH & Co. KG, aff. C-526/11). 2. CJUE, 15 janvier 1998, Mannesmann Anlagenbau Austria AG s.a, aff. C-44/96, cons. 21 et 39. Voir également CJUE, 10 novembre 1998, BFI Holding BV, aff. C-360/96, cons. 29 et CJUE, 10 mai 2001, Agora SRL, aff. C-223/99 et C-260/99, cons. 26. 128 Le statut de l’entité (publique ou privée) ’est indifférent pour la qualification d’organisme de droit public et donc de pouvoir adjudicateur au sens de la directive3. 1.2.1. Personnalité juridique Ce critère ne fait pas difficulté. 1.2.2. Objet social Le critère selon lequel l’organisme doit avoir été « créé pour satisfaire spécifiquement des besoins d’intérêt général ayant un caractère autre qu’industriel ou commercial » doit être interprété à la lumière de la jurisprudence de la CJUE qui en a retenu une acception large au regard du double objectif d’ouverture à la concurrence et de transparence. Pour apprécier si des activités poursuivent un but d’intérêt général dépourvu de caractère industriel et commercial, la CJUE fonde son analyse sur un faisceau d’indices liés aux circonstances ayant présidé à la création de l’entité et aux conditions dans lesquelles elle exerce son activité4. 1.2.2.1. S’agissant du terme « créé » La CJUE a précisé5 que « l’effet utile de la directive ne serait pas pleinement préservé si l’application du régime de la directive pouvait être exclue du seul fait que les tâches d’intérêt général ayant un caractère autre qu’industriel ou commercial que celle-ci ac complit en pratique ne lui ont pas été confiées dès sa création » (considérant 57) et qu’« une entité qui n’a pas été créée pour satisfaire spécifiquement des besoins d’inté rêt général ayant un caractère autre qu’industriel ou commercial, mais qui a par la suite pris en charge de tels besoins, dont elle assure depuis effectivement la satisfaction, remplit la condition pour pouvoir être qualifiée d’organisme de droit public, à condition que la prise en charge de la satisfaction de ces besoins puisse être constatée objecti vement » (considérant 63). Par conséquent, c’est l’activité effectivement exercée par l’organisme qu’il convient de prendre en compte pour le qualifier ou non d’organisme de droit public. Ainsi, en droit fran çais, la qualification d’établissement public industriel et commercial (EPIC) d’un organisme ne permet pas à elle seule de l’exclure a priori de sa qualité d’organisme de droit public soumis aux règles des marchés publics. 1.2.2.2. S’agissant du terme « spécifiquement » La condition selon laquelle l’organisme doit avoir été créé pour satisfaire « spécifique ment » des besoins d’intérêt général ayant un caractère autre qu’industriel ou commercial, n’implique pas qu’il soit « uniquement » chargé de satisfaire de tels besoins. Le fait que la satisfaction des besoins d’intérêt général ne constitue qu’une partie relativement peu importante des activités réellement entreprises par l’organisme est sans pertinence dès lors qu’une telle entité continue à se charger des besoins qu’elle est spécifiquement obli gée de satisfaire6. 3. CJUE, 15 mai 2003, Commission c / royaume d’Espagne, aff. C-214/00, cons. 55 à 57 et CJUE, 13 janvier 2005, Commission c/ royaume d’Espagne, aff. C-84/03, cons. 27 et 28. 4. CJUE, 16 octobre 2003, Commission c/ Royaume d’Espagne, aff. C-283/00, cons. 81. 5. CJUE, 12 décembre 2002, Universale-Bau AG, aff. C-470/99. 6. CJUE, 15 janvier 1998, Mannesmann, aff. C-44/96, cons. 25 et 26. Sur la conséquence de la présence d’entreprises ayant des activités commerciales au sein du même groupe que l’organisme de droit public : CJUE, 10 novembre 1998, Gemeente Arnhem, Gemeente Rheden / BFI Holding BV, aff. C-360/96, cons. 56 et 57. F I C H E 1 Les pouvoirs adjudicateurs 129 1.2.2.3. S’agissant des termes « besoin d’intérêt général autre qu’indus triel et commercial » • La première question consiste à s’interroger sur le caractère d’intérêt général du besoin satisfait. La notion de « besoin d’intérêt général » est une notion autonome interprétée par la CJUE afin d’en assurer une application uniforme dans l’ensemble des États membres de l’Union européenne. Ainsi, la Cour examine chaque cas afin de le qualifier ou non de besoin d’in térêt général. La législation nationale ne peut discrétionnairement décider que tel ou tel besoin est ou n’est pas d’intérêt général. À cet égard, la Cour juge qu’une activité répond à un besoin d’intérêt général lorsqu’elle profite à la collectivité et qu’une personne publique pourrait, à ce titre, la prendre en charge. Exemple n° 1 : La production de documents administratifs dont certains sont soumis au secret ou au respect de normes de sécurité est étroitement liée à l’ordre public et au fonctionnement institutionnel de l’État exigeant une garantie d’approvisionnement et le respect de normes de confidentialité et de sécurité7. Exemple n° 2 : La Cour a reconnu que « les activités visant à l’organisation de foires, d’expositions et d’autres initiatives semblables satisfont à des besoins d’intérêt général. L’organisateur de telles manifestations n’agit pas seulement dans l’intérêt particulier de ces derniers mais il procure également aux consommateurs qui fréquentent ces manifestations une information permettant à ceux-ci d’effectuer leurs choix dans des conditions optimales. L’impulsion pour les échanges qui en résulte peut être considérée comme relevant de l’intérêt général »8. Exemple n° 3 : Des activités mortuaires et de pompes funèbres sont considérées comme des activités ré pondant effectivement à un besoin d’intérêt général. De telles activités sont liées à l’ordre public dans la mesure où l’État a un intérêt manifeste à exercer un contrôle étroit sur l’établissement de certificats tels que les certificats de naissance ou de décès. S’ajoutent à cela des motifs évidents d’hygiène et de santé publique. La Cour précise en outre que « la circonstance qu’une collectivité territoriale a l’obligation légale de prendre en charge les funérailles et, le cas échéant, d’en assumer les frais, (…) constitue un indice de l’existence d’un tel besoin d’intérêt général »9. Exemple n° 4 : Une activité qui consiste à acquérir des services de planification et de construction dans le cadre d’un projet immobilier portant sur la construction de plusieurs immeubles de bureaux et d’un immeuble de stationnement couvert, faisant suite à une décision de la ville de créer sur son territoire un pôle de développement technologique, est susceptible de répondre effectivement à un besoin d’intérêt général. En effet, la Cour a reconnu dans cette affaire que la défenderesse n’agissait pas seulement dans l’intérêt particulier des entreprises directement concernées par ledit projet, mais également dans celui de la ville qui souhaite se développer du point de vue économique et social. En outre, la Cour a 7. CJUE, 15 janvier 1998, Mannesmann, aff. C-44/96, cons. 22 à 24. 8. CJUE, 10 mai 2001, Agorà Srl, aff. C-223/99 et C-260/99 (aff. jointes), cons. 33 et 34. 9. CJUE, 27 uploads/Finance/fiche-01.pdf
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- Publié le Fev 13, 2022
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