Distr. RESTREINTE E/CN.4/Sub.2/AC.5/2004/WP. 8 5 janvier 2004 Original: FRANÇAI
Distr. RESTREINTE E/CN.4/Sub.2/AC.5/2004/WP. 8 5 janvier 2004 Original: FRANÇAIS COMMISSION DES DROITS DE L’HOMME Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l’homme Groupe de travail sur les minorités Dixième session 1-5 mars 2004 INTÉGRATION ET AUTONOMIE DES MINORITÉS EN CÔTE D’IVOIRE Document de travail préparé par Adrienne Blay Botau, Université d’Abidjan Les vues exprimées dans ce document sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles du Groupe de travail sur les minorités. E/CN.4/Sub.2/AC.5/2004/WP.8 page 2 TABLE DES MATIÈRES Paragraphes Pages Introduction........................................................................................................ 1-3 3 I. RÉPARTITION ETHNIQUE ET GÉOGRAPHIQUE............................ 4-12 3 A. Répartition ethnique........................................................................ 4-7 3 B. Répartition territoriale..................................................................... 8-12 4 II. GARANTIES CONSTITUTIONNELLES ET LÉGALES RELATIVES À L’EXERCICE DES DROITS CIVILS ET POLITIQUES 13-28 6 A. La Constitution............................................................................... 13-25 6 B. La législation................................................................................... 26-28 8 III. DISPARITÉS RÉGIONALES ET POLITIQUE DE DÉVELOPPEMENT 29-48 8 A. Disparités ethno-régionales........................................................... 29-36 8 B. Disparités ethno-régionales et crises politiques............................. 37-48 11 IV. RÉFORMES POLITIQUES, ÉCONOMIQUES ET SOCIALES EN VUE D’UNE MEILLEURE GOUVERNANCE 49-62 14 A. La réconciliation nationale 50-54 14 B. La refondation politique, économique et sociale 55-62 16 V. DÉCENTRALISATION ET AUTONOMIE DES DIFFÉRENTS GROUPES ETHNIQUES 63-70 17 E/CN.4/Sub.2/AC.5/2004/WP.8 page 3 Introduction 1. Comme la plupart des pays africains, la Côte d’Ivoire est constituée d’une mosaïque de groupes ethniques qui coexistent au sein de l’État-nation hérité de la colonisation française. Après 42 ans d’existence, l’État ivoirien reste une formation politique, économique et sociale en devenir. Sa dynamique interne est soumise aux stratégies de positionnement au sein du pouvoir étatique ou de sa conquête par ses différentes composantes, qu’elles soient ethniques, religieuses, économiques ou sociales. Sa cohésion ou dislocation tient aux lois, aux institutions, aux diverses structures administratives et politiques mises en place par l’État, ainsi qu’aux différents modes de coexistence pacifique et de gestion des conflits inventés par les populations. 2. Depuis le 19 septembre 2001, la Côte d’Ivoire est confrontée à une violente rébellion armée présentée comme le point culminant d’un enchaînement de crises politiques ayant commencé en 1993. Ce processus aurait pour toile de fond la lutte entre les principaux leaders politiques pour la succession du premier président du pays, Félix Houphouët-Boigny, et la contestation de l’hégémonie de son parti, le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), qui avait gouverné le pays pendant plus de 30 ans. Ce processus serait également nourri par les rivalités ethno-régionalistes entretenues par des leaders politiques pour nourrir leurs ambitions personnelles1. 3. C’est donc dans un contexte de crise que l’autonomie et l’intégration des minorités ethniques en Côte d’Ivoire sera abordé, en recherchant les articulations et les interactions entre les différents groupes ethniques qui composent le pays, en examinant les processus de participation de ces groupes dans la gestion du pays et les processus qui garantissent leur autonomie. Dans la perspective des droits de l’homme, il s’agit d’examiner, à la lumière des principes des droits de l’homme ainsi que de la législation interne et des pratiques économiques, sociales et politiques, comment chacune de ses composantes ethniques est partie prenante dans le fonctionnement de l’État ivoirien. I. RÉPARTITION ETHNIQUE ET GÉOGRAPHIQUE A. Répartition ethnique 4. La Côte d’Ivoire est un État d’Afrique occidentale qui s’étend sur 322 462 km22. Elle est bordée au sud par l’océan Atlantique, limitée au nord par le Mali et le Burkina Faso, à l’ouest par la Guinée et le Libéria et à l’est par le Ghana. Selon le dernier recensement (1998), la population ivoirienne s’élevait à 15 366 672 habitants. Compte tenu d’un taux de croissance estimé à 3,3 % par an, elle était de 16 549 342 habitants au 31 décembre 2001. Elle comprend 51 % d’hommes et 49 % de femmes, vivant en zone rurale dans une proportion de 57 %, contre 43 % en zone urbaine3. 5. La Côte d’Ivoire est un État multiethnique et de forte immigration, dont la population autochtone (74 %) se répartit en quatre grands groupes sociolinguistiques subdivisés en 66 ethnies4: Les Akans (6 967 272, soit 42,1 % de la population) occupent le sud, le sud- est et le centre-est du pays. Ils comportent les groupes Abron, Agni, Alladjan, Attié, Abbey, Abidji, Abouré, Adjoukrou, Ahizi, Appollo, Attié, Avikam, Baoulé, Ébrié, Essouma, Éhotilé, Éga, Mbato; Les Mandés (4 385 575, soit 26,5 % de la population) sont installés dans le nord et l’ouest. Certains ethnologues ivoiriens établissent une distinction entre E/CN.4/Sub.2/AC.5/2004/WP.8 page 4 Mandés du nord (Bambara, Dioula, Djimini, Gbin, Kamara, Koyaka, Malinké, Nigbi, Siaka) et Mandés du sud (Bêrê, Gagou, Gouin, Gouro, Mahou, Moua, N’Gain, Ouan, Toonie, Toura, Yacouba, Yaouré); Les Gur ou Voltaïques (2 912 684, soit 17,6 % de la population) sont présents principalement au nord et comprennent les groupes Birifor, Béré, Dégha, Samogho, Siti, Sénoufo, Tagbana, Djimini, Lobi, Lohron, Komona, Koulango et Nafana; Les Krou (1 820 427, soit 11 % de la population) se répartissent dans le sud- ouest et l’ouest et sont notamment constitués des groupes Ahizi, Bakwé, Bété, Dida, Gnaboua, Godié, Gouja, Guéré, Kodia, Krabou, Kouya, Kouzié, Kroumen, Néyo, Nianbwa, Niébiboua, Nigbi, Oubi, Wané, Wobbé. 6. Ces données proviennent du recensement de 1998, dans lequel les personnes ont elles-mêmes choisi leur appartenance ethnique. Les chiffres sont plus précis pour les ethnies numériquement plus importantes et sont rares pour les autres: Baoulé: 26 %; Dioula: 15 %; Agni: 12 %; Bété: 15 %; Guéré: 12 %; Ébrié: 8 %; Yacouba: 7 %; Appollo: 5 %. 7. La Côte d’Ivoire présente une grande diversité religieuse, caractérisée par la présence de musulmans (38,6 %), de catholiques (19,4 %), de protestants (6,6 %) et d’animistes (11,9 %). D’autres mouvements spirituels, syncrétiques ou non, tels que Harrisme, Papa Nouveau, Assemblée de Dieu, rosicruciens, eckistes, coexistent avec ces religions dominantes. Bien que les adeptes de ces confessions religieuses et traditions spirituelles se retrouvent sur l’ensemble du territoire ivoirien, le nord du pays est en majorité islamisé et le sud est christianisé. Cela tient à des raisons historiques, d’une part la diffusion de l’islam à partir du Sahel, notamment sous la houlette du résistant Samori Touré, et d’autre part la pénétration des colons et missionnaires français par le sud. B. Répartition territoriale 8. Les 19 régions du pays ne présentent pas d’homogénéité ethnique, mais dans la plupart des régions il existe une ethnie majoritaire avec laquelle les autres ethnies ont plus ou moins d’affinités. Par ailleurs, la Côte d’Ivoire connaît une forte urbanisation (43 % d’urbains) avec un taux de croissance de 6 % par an. La ville d’Abidjan, avec ses 2 877 948 habitants, est la plus importante d’entre elles. Elle est désormais une métropole multiethnique où les premiers autochtones, les Ébriés, sont minoritaires. Bouaké, deuxième ville du pays, marque l’articulation entre le sud et le nord; elle compte aujourd’hui 461 618 habitants. Tableau 1. Répartition des ethnies par régions Régions Ethnies 1. Agnébi Abbey, Abidji, Attié E/CN.4/Sub.2/AC.5/2004/WP.8 page 5 2. Bafing Yacouba, Moua, Ngain, Ouan, Mahou 3. Bas-Sassandra Baoulé, Bakoué, Kroumen, Néyo 4. Denguélé Malinké, Gbin, Kamara, Koyaka, Nigbi, Siaka 5. Fromagers Bété, Bakoué, Gouro, Dioula 6. Haut-Sassandra Dida, Bété, Gouro, Gagou, Godié 7. Lacs Baoulé, Yaouré 8. Lagunes Ébrié, Alladjan, Adjoukou, Abidji, Ahizi, Attié, Appollo, Avikam, Essouma, Mbato, Nzima 9. Marahoué Gouro, Dida 10. Montagnes Guéré, Oubi, Wané, Wobbé 11. Moyen-Cavaly Guéré, Wobbé 12. Moyen-Comoé Agni, Éga 13. Nzi-Comoé Baoulé, Dioula 14. Savanes Dioula, Sénoufo 15. Sud-Bandama Dida, Godié 16. Sud-Comoé Agni, Appollo, Abouré, Éhotilé 17.Vallée du Bandama Baoulé, Tagbanan, Dioula, Gouro 18. Zanzan Abron, Birifor, Bêré, Dégha, Komona, Koulango, Lobi, Lohron, Nafana, Samogho, Siti 19. Worodougou Malinké, Bambara, Djimini, Gbin, Nigbi, Yakouba Source: Commission nationale de coordination de Côte d’Ivoire, «Les ethnies de Côte d’Ivoire», enquête entreprise sur le terrain, 1992-1997. 9. La population ivoirienne est en majorité jeune. Les moins de 15 ans représentent près de la moitié de la population (48,2 % en 1993); les moins de 20 ans représentent 56 % de la population. Cette importante proportion de jeunes entraîne une forte pression sur les demandes d’éducation et de santé. 10. Les Akans constituent le groupe ethnique majoritaire en Côte d’Ivoire et, pour des raisons historiques et politiques qui seront examinées plus loin, ils occupent une position économique et sociale dominante dans le pays. Mais il convient de nuancer cette assertion: au E/CN.4/Sub.2/AC.5/2004/WP.8 page 6 sein du groupe akan, ce sont les Baoulés qui, par leur nombre et le leadership politique et économique qu’ils ont exercé pendant plus de 30 ans par l’intermédiaire de feu Félix Houphouët-Boigny (1960-1993), le premier président de la Côte d’ivoire, et Henri Konan Bédié, le deuxième président (1993-1999), occupent une position prépondérante. Par ailleurs, les Attiés et les Abbeys, bien que faisant partie du groupe akan, ne témoignent pas toujours d’une solidarité avec ce groupe au plan politique. 11. En outre, il ne faut pas considérer les ethnies ivoiriennes comme des entités fermées, car il existe des affinités entre elles ainsi que des alliances interethniques en dehors des limites de chaque groupe. Ces alliances sont des pactes traditionnels remontant au XIIIe siècle, qui ont été conclus pour éviter des guerres. Ces pactes reposent uploads/Geographie/ 2004-wp8fr.pdf
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- Publié le Nov 23, 2021
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