L'ARGOT MUSICAL L'ARGOT MUSICAL CURIOSITÉS ANECDOTIQUES ET PHILOLOGIQUES PAR .É
L'ARGOT MUSICAL L'ARGOT MUSICAL CURIOSITÉS ANECDOTIQUES ET PHILOLOGIQUES PAR .ÉMîLE GOUGE T AVEC UNE INTRODUCTION DE 'LOUIS GALLET PARIS LIBRA'lR,lE, FISCHBACHER L BRAI RIE F S CHBACHER (~CCtËTtAXOKTtU!) 33,)tCEDCS!:tNE,33 1892 Tons droits réserves. :c) INTRODUCTION Victor Hugo, en son langage pittoresque, si puissant en ses images, a dit de l'argot: « C'est toute une langue dans la langue, une sorte d'excroissance maladive, une greffe malsaine qui a produit une végétation, un pa- rasite qui a ses racines dans -le vieux tronc gaulois. Selon qu'on y creuse plus ou moins avant on trouve dans l'argot, au-dessous du vieux français populaire, le provcnçal,<.l'espa- gnol, l'italien, l'anglais~ l'allemand, du roman, du latin, enfin du basque et du celte. Forma- tion profonde et bizarre, édifice souterrain bâti en commun par tous les misérables. Cet argot, dont parle ainsi le grand poèté, était celui des gueux et des pauvres et aussi des poètes gueusards comme Villon. Du XIV~ siècle, il est venu jusqu'à nous, se trans- INTRODUCTION VI formant, se repétrissant, empruntantdes mots nouveaux aux époques qu'il traversait, en abandonnant, le long du chemin, d'autres qu'on ne connaît plus ou qui, du moins, restent profondément mystérieux, comme lui-même l'est resté, car, malgré les définitions subtiles et les dérivés ingénieux, on ne sait encore rien de précis sur son origine. Mais ne suffit-il pas qu'on l'ait défini, et ce mystère originel ne convient-il pas aux choses destinées à se fixer sans raison démonstrative dans l'esprit des peuples? Comme j'interro. geais, un jour, le poète Frédéric Mistral sur l'étymologie du mot félibre, dans lequel les uns, analystes naïfs, voient « faiseur délivres et les autres, plus compliqués, <: homme de foi libre, libre penseur, indépendant, il me répondit fort simplement: <&~ est un mot de pure convention, sans attache certaine avec aucun autre, un signe de reconnaissance pour un groupe. B est bon qu'il y ait ainsi à l'origine des institutions des vocables obs- curs d'où émane pour certains une idée lu- mineuse. » Je m'imagine que l'argot, ou pour mieux INTRODUCTION VII dire les argots, car il y en a aujourd'hui au- tant que de professions ou de groupes hu. mains, sont nés ainsi d'un simple désir de par- ticularisation, d'un parti pris. de créer des formules comprises d'une seule collection d'êtres et faites, comme un habit d'Arlequin, de pièces empruntées aux technologies profes- sionnelles ou simplement aux mots usuels dé- tournés de leur sens. C'est en somme une langue caricaturale, et si nous la considérons telle qu'il la faut entendre aujourd'hui, ce n'est plus qu'un jargon. On ne retrouve, en effet, que très rarement aujourd'hui l'argot, tel qu'il se parlait à l'époque, par exemple, où Eugène Sue en re- cueillait dans les Mystères de Paris de curieux échantillons. Une des dernières traces que j'en aie vues est encore apparente, je crois, sur la porte battante du grand atelier où l'Opéra fait peindre ses immenses décors. Là,. un pinceau sans façon, pour inviter le visi- teur à fermer la porte, a écrit: Bouclez la lourde! Cela est pittoresque et les profanes le comprennent tout de suite. INTRODUCTION vin Cet argot, utilisé par Eugène Sue de la façon vivante que l'on sait, l'auteur des Mys- tères de Paris l'avait, détail peu connu, em- prunté au Vocabulaire des langues bigornes, recueilli par F. V. Raspail dans les prisons et publié dans son Réformateur, en i835. En se raffinant, l'argot est devenu assez inintelligible. Celui de nos jours ne sert qu'aux aimables drôles qui vont de temps en temps faire figure sur les bancs du Palais de justice; il n'a rien à voir avec celui de ce petit livre, que son auteur, M. Émile Gouget, a bien voulu me prier de présenter au public. En vérité, il n'avait que faire de cette pré- sentation, se présentant lui-même assez clai- rement, pourvu qu'on l'ouvre au hasard et qu'on en lise deux ou trois pages. On voit tout de suite ce qu'il est: non point un vocabulaire d'argot pur, mais une curieuse et amùsante collection de mots appliqués arbitrairement, de tournures conventionnelles, de termes techniques plaisamment détournés de leur objet et surtout un chapelet d'anecdotes et de réflexions drôles, telles qu'il s'en échange, à l'orchestre, entre musiciens en belle humeur. INTRODUCTION IX La plupart de ces termes, de ces formules sont lettre morte pour le curieux qui vit hors du monde de ces grands enfants, qui sont les artistes. M. Émile Gouget a entrepris de par- faire sur ce point notre éducation, tout en récréant légèrement notre esprit. Il nous a, dans cette bonne pensée, donné son Argot musical, dont la préface dira mieux que ces quelques lignes, le véritable caractère. LOUISGrAU,ET, PRÉLUDE Tu le vois, amilecteur, c~M~o~MM~sc~, c~MM simple prélude, une façon d'accorder nos flûtes, dont certainement tu daigneras tolérer lepas- s(~~ charivari dans f~o~ que notre orchestre ne t'écorchera pas les o~-<M7&s en~~M&)' Symphonie Argotique. Ne toffusque pas du titre dec~i~MM vocale et instrumentale. 7?/o!M~NO~o~ se mettre au diapason et entrer dans &mouvement de son époque. L'argot M'a-~7~Mses titres denoblesse ? ~o- ~OMs étymologistes, détenteurs deces ~'<~<~ papiers <& Argot, dit l'un, ~cc~ droite ligne o~Argos. Argot, dit un autre, a pour <!Me~~ Argus. Erreur, ajoute un troisième, Argot est fant naturel de Ragot. Voici la vraie généalogie, s'écrie un quatrième ~Mo/6j§-M~Argot est né ~MM père français appelé Jargon, dune Italienne PRÉLUDE XII Mo~~c Lingua gerga, issue d'une mère ~c~M~ du nom de Hiera ~M~a~ sacrée. Ergo~ donc d'argot est une langue MC~ nous ~<M impossible de trouver à got quelque ancêtre musical, ~c~l'Angot, champêtre sur laquelle les oiseleurs imitaient te jargon inintelligible des oiseaux chantés par nos ~M~~06~. (tZfM'ya bêleni oiseau Qu'enson jargon ne chanteou c~. n CHARLES D'ORLÉANS. c connaisquand pipeur jargonne. s FR.VILLON. Il nefaudrait pas croire que -d'argot ait été créé par une bande d'escarpes et ~MC~N. Cette~~M~ fut primitivement par la corporation des merciers duPoitou, CO~O~M~~o~j~ < c «7?arriva queplusieurs ~~CM~S mangèrent leurs = balles, néanmoins ne laissèrent pas que aux susdites foires où ils trouvèrent quantité de pauvres gueux desquels ~S s'accostèrent et leur apprirent leur langage et C~MOM~. Les gueux, proquement, leur enseignèrent charitablement à mendier. » (Le Jargon ou langage de l'argot réformé.~<?)?o.) PRÉLUDE XIII Z.'o~o~a~cM/~ que les Anglais nomment cant ne s~o<~7~<M une <~o~oM~'aM~ par des colporteurs habitués à vendre leur marchandise o la criée, à l'encan (in cantus)? L'argot n'était-il pas c~M Angleterre, le français des colporteurs (pedlars trench)?' 1 Autrefois /0~ était la langue des gueux et des voleurs. ~4~'OM~<f~K<' chaque classe de la ~OC<~ possède MM argot qui lui estpropre. C'~ ainsi qu'on distingue f argot des ~A~, d'argot des coulisses, /<~ du demi-monde, /'a~0~ des joueurs, t'argot des' faubourgs, l'argot des prisons, /0~ des collèges,l'argot du palais, /'< des peintres, l'ar- got des musiciens, /0~ des poètes, rargot des savants, etc. Et chacun de ces O~O~S divise et se subdivise en autant d'idiomes que chaque classe sociale comporte de variétés. Ainsi d'argot musical ~a~ /*o~~ de notre étude spéciale,CO~~M~~&~M~ CO~O~N.' /*<0~ des chanteurs, d'argot des instrumentistes, d'argot des compositeurs, Pargot des théoriciens, l'argot des luthiers, etc. Demandes au professeur de musique ~(W~M<M Les cris desmarchandsambulants sont unesorted'ar- got musicalintelligibleseulement pour les ménagères.Si l'on encroit d'Ortigue,cesC~ se transmettentdepère fM~ invariablement sur le même mode,la même intonation, le même accent,la mêmecadencetonale,seraient ~<~ des modes ~Kplain-chant. PRÉLUDE xrv Il se sert des mots diatonique et chromatique, <7 vous répondra que ces mots 0~ tirés du grec et que, ~H y~~s n'expriment nullement f<o~ Grecs attachaient à ces vocables, !7croit néanmoins devoir les employer, parce ~~S sont dans le <~MMMa~C officiel et que les savants ne leur CM~~O)!~ trouve d'équivalents. D~MaM<~8 au chanteur pourquoi il use de ces ex- ~~SMOMS: accoucher de sa note, la donner, se l'ex- traire, se gargariser, jouer du larynx, accorder ses badigoinces, remuer la commode, il vous rdpondra que ces a~O~M~S expriment des nuances ~M'OMCMM lexique officiel ne mentionne et que, <fo!<X~ le mot chanter est mal porté depuis ~o~ /'a détourné de son sens propre pour en baptiser MM actecriminel. On voit par ces deux exemples la erdation des a~O&~M~ une conséquence de la pauvreté de la langue officielle. C~Mt~M~~M~ « Si la musique est une langue universelle, son vocabulaire est une véritable tour de ~0~ /a~t~ le ~~c, & latin, f~S~e~ &chinois coudoient par o~~ alphabdique. <7a cet~<ïttt nombredemot~<Mp<:M <to!yeat leuro~Me à l'argot~M~eMpte n)MM!M quit~OMM ~!M)!Mf<KCBMp~, d'ap~~Mef à f<! tête(caput) m~<!p&ofc <fe ~of<MMe (testa) et fMttMtM (mtestioum) surnomde ~OM~ta (boteUas), Mot d'oùsont~!f~nosboyaux. PRÉLUDE XV Que /*<M à ternaiaaodogie era fappliquant sans en < sens, rien deM~.c/ c'est MM Ao~~<~g~ rendu au berceau de /*< musical. Mais que dire de ces sept barbares syllabes tirées dune ~)W~ avait, assure-t-on, ~~O~~ë~' de guérir <OM~~gM~~ Ut ~MMH~&MCM Resonare fibris Mi~a ~es/o~K~M Famuli ttiorum, Solve podluti La&K ~S/M~M, S<!HC~lo~MCS. Nest-cepas véritablement ~o~~ argot que o~e~- ployer ces sept COC~~OM~ qualifier non S~M~~e~ les sept degrés de Péchelle musicale, mais encore les échelons <M~-M~Mt<~ &~ dièses que ~~o& ? Que dire ~o~M~ de ces mots empruntés aux Grecs et employés à contre-sens, tels que diapason, orchestre, coryphée, rythme, uploads/Geographie/ argot-musical.pdf
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- Publié le Jui 01, 2022
- Catégorie Geography / Geogra...
- Langue French
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