ASSOCIATION INTERNATIONALE DES DÉMOGRAPHES DE LANGUE FRANÇAISE A I D E L F Croi

ASSOCIATION INTERNATIONALE DES DÉMOGRAPHES DE LANGUE FRANÇAISE A I D E L F Croissance démographique et urbanisation Politiques de peuplement et aménagement du territoire Séminaire international de Rabat (15-17 mai 1990) AI AIDELF. 1993. Croissance démographique et urbanisation - Actes du colloque de Rabat, mai 1990, Association internationale des démographes de langue française, ISBN : 2-7332-7012-5, 435 pages. Alger : évolution, révolution et permanence Anne-Marie SAHLI Université de Strasbourg, France Présentation générale Tout au long de l'histoire, Alger est restée la plus grande ville de la côte médi- terranéenne de l'Afrique du Nord. Il en est ainsi aujourd'hui encore. En cent cinquante ans (1830-1980), la population d'Alger est passée de trente mille habitants à près d'un million cinq cent mille, soit en moyenne, chaque année durant cette période, une crois- sance de 2,8%"*. L'augmentation de la population de la ville, et avec elle, l'extension de la zone urbanisée, ne sont pas réalisées de façon continue dans le temps. Si le mou- vement a été inégal tout au long de ce siècle et demi, il n'empêche que, quels qu'aient été les événements qui ont marqué son histoire, la population d'Alger a toujours continué à augmenter, et toujours plus vite que celle de l'ensemble de l'Algérie' 2'. A Alger, l'organisation actuelle de l'espace exprime une hiérarchie socio-démo- graphique de la population. L'analyse de la localisation actuelle de la population selon les divers critères sociaux montre une géo-démographie suffisamment homogène pour que des quartiers se délimitent d'eux-mêmes. Le clivage s'opère et se reconnaît selon l'organisation de la société algérienne. La vision actuelle de la composition de l'espace n'est pas une mosaïque sociale indifféremment éparpillée dans le périmètre urbain. Les catégories sociales favorisées résident le long des principales artères allant de la Grand'Poste jusqu'aux hauteurs d'El Biar, puis, de part et d'autre de cette dorsale, on trouve les quartiers populaires où habitent les ouvriers, les artisans et les petits commerçants. Dans les zones les moins accessibles, les plus excentrées, s'installent les nouveaux venus dans la ville; enfin, en bordure de l'agglomération, dans les cités nouvellement édifiées, ce sont les jeunes cadres et les étrangers. Le fait remarquable dans la géo-démographie de la ville est sa permanence en dépit des chocs subis au cours de l'histoire. Pourtant, par deux fois, en 1830 et en 1962, la structure spatiale d'Alger a été cassée. On pouvait en conséquence prévoir un puissant brassage dans la ville, surtout après l'indépendance de l'Algérie, en 1962. A cette période, trois cent mille Français installés à Alger sont partis en libérant quelque cent mille logements. ( ' ' Sauf mention explicite, les références chiffrées de cette communication sont extraites de : La population de la ville d'Alger. Analyse spatiale et projections démographiques, A.-M. Sahli, Thèse d'Etat, Paris 1,1989, 829 p. " ' Benchetrit M., Cabot J., Castevert M., Cote, Estorges P., Mahrour M., Prenant A., Géographie de l'Algérie, Manuel scolaire de 6 m année secondaire, Institut Pédagogique National, Alger, (non daté, vers 1970). Lespes R., Alger-Etude de Géographie et d'Histoire urbaines. Librairie Félix, Alcan, Paris, 1930. AI AIDELF. 1993. Croissance démographique et urbanisation - Actes du colloque de Rabat, mai 1990, Association internationale des démographes de langue française, ISBN : 2-7332-7012-5, 435 pages. 48 CROISSANCE DÉMOGRAPHIQUE ET URBANISATION En fait, seul un retour en arrière éclaire l'organisation actuelle de l'espace. Elle relève d'un héritage lointain, remontant au passé pré-colonial. La carte d'Alger en 1977 présente les lieux de résidence des cadres supérieurs et des professions libérales. Les zones cerclées sur la carte sont de nouvelles cités construites après 1962 : à l'Ouest, Baïnem, au centre, le plateau des Annassers, et à l'Est, la cité Lavigerie. La difficulté à se loger à Alger aujourd'hui fait que les nouvelles constructions de logements sont, prioritairement, réservées aux cadres qui en font la demande. L'intérêt de cette carte réside surtout dans la localisation très particulière des zones d'habitat de la bourgeoisie algérienne algéroise. Ces zones sont celles qui étaient occupées par les Français, résidant en Algérie avant l'indépendance, tout au moins, ceux des Fran- çais qui appartenaient aux catégories sociales favorisées. Il s'agit du quartier de la rue Didouche Mourad (ex-rue Michelet), les alentours de la «Villa Jolie» (musée du Bardot, environs de l'hôtel St George), et surtout les quartiers du Bois de Boulogne, de la Colonne Voirol, d' Hydra et du chemin de La Madeleine à El Biar. Alger jusqu'en 1830 Au Xe siècle, la dynastie berbère des Zirides, qui règne sur l'Est de l'Afrique du Nord, fonde El Djezaïr. El Djezaïr en langue berbère signifie «l'îlot». Cet îlot existe bien, il est situé face à la Kasbah (en arabe «Qaçaba» signifie citadelle). fl est actuel- lement indiscernable car entièrement enchevêtré et relié aux constructions portuaires de la darse. En 1830, la ville d'Alger s'étend en triangle depuis l'éperon de la Kasbah jusqu'à la Marine. Le centre vital est constitué par le «Souk-El-Khébir». Les faubourgs sont inexistants et la campagne environnante occupée par des jardins et de riches résidences. La ville coloniale s'implante sur la ville turque 1830-1840, c'est l'éventrement de la ville turque La lente croissance de la partie intra-muros au début de l'occupation française s'explique d'abord par le départ des Turcs de la ville. Vaincus par la France, ils sont expulsés d'Alger dès l'occupation française, dès 1830. Les Français nouvellement ins- tallés à Alger, mettent immédiatement un frein à la venue des musulmans dans la ville, le développement est assuré par l'émigration coloniale. «...La population (algérienne musulmane) ne dépassait son effectif de 1830 qu'à partir du recensement de 1911... »' 3). Durant les quinze années d'occupation militaire qui suivent l'arrivée des Français à Alger, les aménagements urbains se succèdent. Une enceinte est construite en 1840, la basse Kasbah est partiellement détruite pour la construction d'une place d'Armes, aujourd'hui la place des Martyrs; pour des motifs d'ordre stratégique, le reste est trans- formé par le percement d'artères joignant la place d'Armes à la porte «Bab Azoun», et la Marine à la porte «Bab El Oued»' 4). < 3 > Benchetrit M. et al., op. cit., p. 135. «Bab» en langue arabe signifie «porte». AI AIDELF. 1993. Croissance démographique et urbanisation - Actes du colloque de Rabat, mai 1990, Association internationale des démographes de langue française, ISBN : 2-7332-7012-5, 435 pages. I en !» 1 •8-1 lï u> fi. -2-.S §•8 11 -8 1 11 ' (2 îfi * * * > i-S I* -a =J — </> Ii 1 1 3 1 o <: i r? AI AIDELF. 1993. Croissance démographique et urbanisation - Actes du colloque de Rabat, mai 1990, Association internationale des démographes de langue française, ISBN : 2-7332-7012-5, 435 pages. 50 CROISSANCE DÉMOGRAPHIQUE ET URBANISATION ALGER 1848 limites de Ii Casbah diemin ru* en construction ou en projet enceinte de 1140 Source : lénéralmtior, du plan d Alger établi en 1S4I. 11 in realise par l'auteur à partir de I ouvrace de Rene LESPES, -ALGER • Etude de féotraphie el d histoire urbaines*, PARIS, 1930, p-î7J Figure 2 - Alger en 1848, l'enceinte de 1840 et la percée des voies Il s'agit là d'une double action d'investissement : c'est, à la fois, la construction d'un rempart de protection pour assurer la fonction militaire de la ville, et c'est aussi le démantèlement de la forteresse turque, avec des percées de voies, la ville basse est rasée, on y installe les instances décisionnelles, on fonde, à cet emplacement, le quartier de «La Marine». Deuxième modèle colonial 1840-1880 Cette période correspond à une phase active de réorganisation administrative. On assiste à l'extension linéaire de la ville liée à sa fonction portuaire. La ville est gênée dans son extension spatiale par les collines du Sahel avec le massif de la Bouzaréa, au AI AIDELF. 1993. Croissance démographique et urbanisation - Actes du colloque de Rabat, mai 1990, Association internationale des démographes de langue française, ISBN : 2-7332-7012-5, 435 pages. ALGER 51 Nord-Ouest, collines auxquelles la vieille ville est adossée et dont elle est redevable de son site fortifié. La ville se développe le long de la baie, vers le Sud, en façade sur la Méditerranée, préservant et développant sa fonction portuaire. Cette étape dans la consti- tution de la ville coloniale est ainsi d'abord marquée par l'intégration de l'ancien faubourg sud de Bab Azoun, et presque simultanément par l'extension nord de Bab-el-Oued où commence à s'installer la population européenne. Ces deux quartiers situés de part et d'autre de la Kasbah sont édifiés pour accueillir une population coloniale. D s'y dessine une ségrégation sociale, les quartiers populaires au Nord, les administrateurs dans la partie Ouest et Sud. La population algérienne musulmane est, elle, confinée dans l'espace restreint de l'ancienne cité : de la Haute Kasbah jusqu'à la Marine. Sur les hauteurs, de riches résidences européennes succèdent aux anciennes villas de l'aristocratie turque, c'est le développement de «Mustapha Supérieur», et du village d'El Biar. Aussi, très tôt, après l'occupation française et déjà bien avant 1880, on considère qu'Alger est composée non plus uniquement de la partie intra-muros à l'intérieur de l'enceinte de 1840, mais aussi des faubourgs, uploads/Geographie/ croissance-demographique-et-urbanisation-politiques-de-peuplement-et-amenagement-du-territoire.pdf

  • 46
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager