© 2011, Journal MalaCo (ISSN 1778-3941), http://www.journal-malaco.fr 383 MalaC

© 2011, Journal MalaCo (ISSN 1778-3941), http://www.journal-malaco.fr 383 MalaCo (2011) 7, 383-390 Diversité spécifique et écologie des mollusques continentaux de la basse vallée du Ferlo (Sénégal) Specific diversity and ecology of continental molluscs from the Lower Ferlo Valley (Senegal) Alassane SARR1, Ragnar KINZELBACH2 & Malick DIOUF3 1 Institut Universitaire de Pêche et d’Aquaculture (IUPA), Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD), BP: 15 938 Dakar-Fann, Sénégal 2 Institut für Biowissenschaften, Allgemeine & Spezielle Zoologie, Universität Rostock, Universitätsplatz 2, 18055 Rostock 3 Département de Biologie animale, Faculté des Sciences, Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD) , BP: 15 938 Dakar-Fann, Sénégal Correspondance : alassanesarr@hotmail.com Résumé — La remise en eau en 1988 de la basse vallée du Ferlo, après 32 années d’assèchement, a créé des conditions favorables au développement des mollusques aquatiques. Des inventaires ont été réalisés afin de déterminer les espèces de mollusques présentes dans la basse vallée du Ferlo. Au total neuf espèces réparties dans huit genres et sept familles ont été recensées. Il s’agit de : Bellamya unicolor Olivier, 1804, Coelatura aegyptiaca (Cailliaud, 1827), Corbicula fluminalis (Müller 1774), Heleobia sp., Melanoides tuberculata Müller, 1774, Biomphalaria pfeifferi (Krauss, 1848), Bulinus forskalii (Ehrenberg, 1831), Bulinus truncatus (Audouin, 1827) et Lymnaea natalensis Krauss, 1848. Melanoides tuberculata prédomine sur les fonds alors que Biomphalaria pfeifferi, Lymnaea natalensis et Bulinus truncatus sont les espèces dominantes sur les plantes aquatiques. La salinité et la végétation aquatique semblent jouer un rôle important dans la présence et la distribution des mollusques. Parmi les neuf espèces identifiées, quatre interviennent dans la transmission de trématodoses humaines et animales : Biomphalaria pfeifferi (bilharziose humaine intestinale à Schistosoma mansoni), Bulinus truncatus (bilharziose humaine urinaire à Schistosoma heamatobium et paramphistomose animale à Paramphistomum microbothrium), Bulinus forskalii (shistosomose animale à Schistosoma bovis et paramphistomose animale à Paramphistomum phillerouxi) et Lymnaea natalensis (fasciolose animale à Fasciola gigantica). Mots clés — Vallée fossile, Ferlo, Remise en eau, Bulinus, Biomphalaria, Trématodoses Abstract — The reflooding of the Lower Ferlo Valley since 1988 after 32 years of drying up has caused an increase in the number of aquatic molluscs. Inventories of the Lower Ferlo Valley mollusks were carried out. Nine species representing eight genera and seven families were recorded: Bellamya unicolor Olivier, 1804; Coelatura aegyptiaca (Cailliaud, 1827); Corbicula fluminalis (Müller 1774); Heleobia sp, Melanoides tuberculata Müller, 1774; Biomphalaria pfeifferi (Krauss, 1848); Bulinus forskalii (Ehrenberg, 1831); Bulinus truncatus (Audouin, 1827) and Lymnaea natalensis Krauss, 1848. Melanoides tuberculata is dominant on bottom deposits, while Biomphalaria pfeifferi, Lymnaea natalensis and Bulinus truncatus predominates on aquatic plants. Salinity and aquatic vegetation appear to play an important role in mollusc occurrences. Among identified species, four are involved in the transmission of human and animal trematodosis: Biomphalaria pfeifferi (human intestinal schistosomiasis with Schistosoma mansoni), Bulinus truncatus (human urinary schistosomiasis with Schistosoma heamatobium and animal paramphistomosis with Paramphistomum microbothrium), Bulinus forskalii (animal schistosomiasis with Schistosoma bovis and animal paramphistomosis with Paramphistomum phillerouxi) and Lymnaea natalensis (animal fasciolasis with Fasciola gigantica). Keywords — Fossil Valley, Ferlo, Reflooding, Bulinus, Biomphalaria, Trematodosis Introduction Pour maintenir en permanence de l’eau douce dans le fleuve Sénégal afin de satisfaire les besoins en eau des populations et des cultures, le gouvernement du Sénégal a mis en œuvre de nombreux aménagements hydro-agricoles. L’achèvement des barrages de Diama et de Manantali, respectivement en 1985 et en 1988, sur le fleuve Sénégal a permis la mobilisation d’un important volume d’eau douce en amont du barrage de Diama et la remise en eau partielle de la basse vallée du Ferlo via le lac de Guiers. La vallée du Ferlo est en effet un fleuve fossile qui prenait sa source aux environs de Bakel pendant le post-nouachotien entre -5 000 et -2 000 ans. Elle constitue une vaste dépression située au sud du Lac de Guiers qui assure sa liaison avec le fleuve 384 A. SARR et al. © 2011 MalaCo, 7, 383-390 Sénégal. Son bassin versant s’étend de 14°30' à 16°00’ de latitude Nord et 12°45' à 16°00’ de longitude Ouest. La pluviométrie, très irrégulière dans le temps et l’espace, est souvent inférieure à 200 mm par an. Les températures sont élevées toute l’année et varient entre 22°C et 40°C. Jusqu’en 1956, l’alimentation en eau de la vallée du Ferlo était assurée de manière alternative par le fleuve Sénégal et la mer. En période des hautes eaux, l’onde de crue en provenance du fleuve Sénégal inondait le lit de la basse vallée du Ferlo après avoir traversé le lac de Guiers. Pendant la période des basses eaux, l’eau de mer qui remontait le fleuve Sénégal à partir de son cours inférieur se déversait dans la basse vallée du Ferlo (Trochain 1940). Celle-ci est bordée sur ses deux rives par un vaste plateau sablonneux surmonté de dunes rouges de l’Ogolien (18 000 BP, Dagassan 1967). Depuis plusieurs décennies déjà, à la faveur de l’assèchement et de l’érosion éolienne, la basse vallée du Ferlo a été progressivement comblée. En 1956, une digue a été construite à l’extrémité Sud du lac de Guiers en vue de relever son niveau d’eau en empêchant l’écoulement des eaux du fleuve Sénégal vers la vallée du Ferlo. Ainsi la basse vallée du Ferlo resta trois décennies pratiquement asséchée. Seules quelques mares temporaires occupaient son lit mineur pendant la saison des pluies. Celles-ci tarissaient très rapidement à cause de l’infiltration et de l’intense évaporation. Ce n’est qu’à partir de 1988 et plus particulièrement en 1992 que la remise en eau partielle de la vallée du Ferlo par le biais des eaux du fleuve Sénégal a été entreprise dans le cadre du programme de revitalisation des vallées fossiles. La partie déjà remise en eau s’étend sur plus de 30 km et a entraîné des changements écologiques favorables au développement des mollusques d’eau douce. A l’exception des mollusques vecteurs de bilharziose, de telles études sont très rares au Sénégal. L’objet de ce présent travail est donc d’établir un inventaire des espèces de mollusques dulcicoles actuellement présentes dans la basse vallée du Ferlo après sa remise en eau dans le cadre du programme national de revitalisation des vallées fossiles. Matériel et Méthodes Les inventaires ont été réalisés dans cinq stations en allant de la digue de Keur Momar Sarr vers la partie Sud de la vallée tous les 3 km au plus (Figure 1). Au sein de chaque station, la salinité de l’eau a été mesurée à l’aide d’un appareil de terrain de type LF330/LF340. Les groupements végétaux ont été étudiés en utilisant des transects dans chacune des stations. Chaque transect a été matérialisé par une corde graduée en mètre en partant de la zone exondée vers la zone inondée. Un quadra d’un mètre carré a été échantillonné à chaque point d’intersection avec la végétation ou tous les cinq mètres au plus lorsque Figure 1 — Carte de situation de la basse vallée du Ferlo et localisation des stations de prélèvements. Mollusques continentaux de la basse vallée du Ferlo (Sénégal) 385 © 2011 MalaCo, 7, 383-390 ces points étaient très éloignés. Dans chaque quadra ont été notées les espèces présentes, leur coefficient d’abondance-dominance selon l’échelle de Braun Blanquet (1952) et la profondeur de l’eau. Deux séries de prélèvements ont été réalisées en mars-avril 1999 et en novembre-décembre 1999. L’échantillonnage des mollusques benthiques a été réalisé à l’aide d’une drague métallique triangulaire (type Steinmann) de 40 cm de côté (Schwoerbel 1994). Les échantillons prélevés ont été passés sur un tamis de maille de un millimètre pour séparer les mollusques récoltés des sédiments. Les mollusques présents sur les plantes aquatiques et les débris végétaux ont été récoltés directement à la main avec une évaluation du temps de récolte (homme-temps). Sur chaque station, la collecte des mollusques présents sur les végétaux a été effectuée par deux personnes pendant une durée de 30 mn. Les mollusques récoltés ont été conservés dans de l’alcool à 70° et ramenés au laboratoire pour être déterminés, comptés et mesurés. Résultats Salinité Un gradient de salinité de l’eau est observé en allant de la digue de Keur Momar Sarr vers l’extrêmité Sud de la vallée. Le taux de salinité varie de nul à la station 1, située près de la digue de Keur Momar Sarr à 4,0 gr/l à la station 5 qui est située à l’extrêmité Sud de la partie inondée de la vallée. La salinité mesurée est de 0,2 gr/l à la station 2, 0,4 gr/l à la station 3 et 2,0 gr/l à la station 4. Végétation aquatique Dix sept espèces de plantes aquatiques et amphibies ont été identifiées dans le secteur d’étude (Tableau 1). La comparaison des relevés a permis de distinguer les six groupements végétaux aquatiques et amphibies suivants : (i) Typha domingensis Pers., (ii) Paspalidium geminatum Stapf, (iii) Potamogeton octandrus Poir., (iv) Scirpus littoralis Schrad., (v) Pistia stratiotes L. et (vi) Ludwigia adscendens (L.) H. Hara. Najas marina L. et Potamogeton schweinfürthii Benn sont également bien représentés. Typha domingensis est le macrophyte le plus abondant dans la basse vallée du Ferlo. Cette espèce a été observée sur les rives de la vallée aussi bien en milieu uploads/Geographie/ malaco-2011-07-sarr-et-al-383-390.pdf

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