TOPOGRAPHIES DE LA GUERRE 17 SEPT - 18 DÉC 2011 PAPER © Collateral murder - Wik
TOPOGRAPHIES DE LA GUERRE 17 SEPT - 18 DÉC 2011 PAPER © Collateral murder - WikiLeaks - 2010 SEPT-DÉC 2011 BAL CAFÉ BAL BOOKS ÉDITION FABRIQUE DU REGARD CYCLE CINÉMA BAL LAB EXPOSITION « Nombreux sont ceux qui m’ont reproché de ne pas montrer les cadavres. Mon but n’était absolument pas d’impressionner le spectateur jusqu’à ce qu’il soit incapable de voir ». Abbas Kiarostami Comment dire la guerre ? Comment montrer la guerre ? Poser ces questions au moment où LE BAL a un an d’existence, n’est pas fortuit. Notre civilisation contemporaine est guerrière et notre civilisation contemporaine de l’image est traversée d’images de guerre. Questionner les formes de représentation, c’est aussi interroger le discours de l’image de guerre et les conditions dans lesquelles ce discours s’élabore, se construit, se propage. L’exposition Topographies de la guerre propose d’envisager le territoire ( territoires géographiques, territoires mentaux ) comme table de dissection des mécanismes de guerre. Des mécanismes complexes, contradictoires, paradoxaux. Pour les mettre à nu, nous avons retenu des appro- ches visuelles «froides» qui, loin des représentations stéréotypées, évitent les paroxysmes où tout se ressemble. L’homme est absent de ces images et pourtant, partout, il est là. Un monde en guerre, déserté à la fois par les combattants et les victimes, mais, indéniablement, habité. Dans le catalogue qui accompagne l’exposition, Jean-Yves Jouannais replace les travaux présentés dans une perspective historique et leur offre ainsi un éclairage inédit. La belle programmation La géographie ça sert, d’abord, à faire la guerre ( 14 séances ) de Kantuta Quir s et Aliocha Imhoff (Le Peuple qui manque) propose, tous les samedis matins au Cinéma des Cinéastes, la découverte de films documentaires expérimentaux, rares ou inédits en France. De nombreuses Rencontres au BAL de septembre à décembre ainsi qu’un séminaire autour des Images manquantes à l’EHESS fin octobre, modéré par Dork Zabunyan, prolongent la réflexion engagée au sein de l’exposition. Diane Dufour Comment imaginer qu’autre chose que la bataille puisse représenter la guerre ? Les œuvres photographiques ou vidéo réunies dans cette exposition laissent délibérément hors cadre l’affrontement, le corps, la chute, la blessure, la mort. Toutes réalisées depuis 2000, elles ont en commun une ambition documentaire déclarée, manifeste : le parti pris d’une totale désincarnation de la guerre et, de ce fait, une focalisation sur les sites, les positions, les espaces géologiques ou construits. Des essais topographiques, en quel- que sorte, qui, loin de renier le coût humain des combats, privilégient une lecture de la guerre par sa géographie. Ces options iconographiques coïn- cident, dans le domaine stratégique, avec l’usage de techniques de simulation, la propagation d’armes agissant à très longue distance, mais également avec la censure médiatique exercée par les états-majors, et la quasi-impossibilité pour les photographes et vidéastes d’opérer librement sur le terrain. Le territoire de la guerre est-il en train de devenir une donnée abstraite, une construction idéologi- que, une donnée irreprésentable ? Jean-Yves Jouannais EXPOSITION TOPOGRAPHIES DE LA GUERRE commissaires Jean-Yves Jouannais et Diane Dufour © Paola De Pietri - Forte Verle - série To Face - 2010 © Jananne Al-Ani - Aerial IV, Shadow Sites II - 2011 Jo Ractliffe As Terras Do Fim Do Mundo et Terreno Ocupado La photographe sud-africaine Jo Ractliffe (née en 1961) a découvert le drame angolais en lisant D’une guerre l’autre de Ryszard Kapuscinski. La guerre d’hier, dont la photographe cherche les traces dans le paysage qui lui est contemporain, a ravagé le pays entre la proclamation de l’indé- pendance en 1975 et la mort de Jonas Savimbi, leader de la faction rebelle de l’Unita, en 2002. Trente ans de massacres qui coûtèrent la vie à 1,5 million de personnes. Que peut-on voir de ce qui a disparu ? Que reste-t-il à prélever sur ces champs de bataille abandonnés par l’action, livrés au « rien » ? Il y a, cachés dans ce vide, un certain nombre d’indices estompés mais incontestables du désastre : de discrets cercles de pierre à même le sol, des abris creusés, à moitié recouverts, des forêts minées, de mystérieux tracés. « Ces cartes sont comme une langue dispa- rue : des endroits encore identifiés par leur nom colonial portugais, recouverts par de nombreuses annotations, les scénarios occultes de la guerre. Je lutte pour trouver dans la réalité ce qui est représenté sur la carte. Parfois, je ne suis même pas sûre de ce que je vois. Je suis là, sans paroles. Les signes ne se laissent pas lire. » Jo Ractliffe Ces photographies de la série As Terras Do Fim Do Mundo (2009-2010) témoignent d’une tradition de l’artiste comme documentariste topographe selon laquelle il n’existerait pas de différence entre la chambre noire de Roger Fenton photographiant The Valley of the Shadow of Death pendant la guerre de Crimée en 1855 et un géomètre docu- mentant un paysage à l’aide de son théodolite. Non plus qu’entre l’étude menée par Jo Ractliffe en Angola et un topographe visant derrière son tachéomètre. Tous instruments de vision et de captation rendant compte d’une aspiration à un degré zéro de l’image, cette fameuse « image pure » à l’histoire bien plus complexe que sa seule définition. Paola De Pietri To Face Avec To Face (2010), Paola De Pietri (née en 1960 ) a photographié dans les Alpes, les Préalpes, et dans le Carso, les stigmates discrets de la Première Guerre mondiale : murs de pierre, casemates, tombes, tranchées. Les infrastructu- res sont atténuées par l’érosion, gagnées par la végétation, comme si la nature avait voulu les assimiler à son propre patrimoine. « J’ai exploré les lieux témoins de cette his- toire, à la recherche du fil fragile de la mémoire, dernière résistance d’un passé émergeant de la sphère privée avant de tomber dans l’oubli. Sur les montagnes, où le temps humain s’est arrêté et où seul le rythme de la nature a imprimé sa trace, les paysages qui semblent naturels sont en fait le résultat de batailles livrées et de vies vécues tous les jours pendant des années par des centaines de milliers de soldats ». Paola De Pietri Ces vues esquissent un paysage du type Désert des Tartares. La contrée mystérieuse que garde le fort Bastiani dans le roman de Dino Buzati, cette perspective désolée, à la contemplation de laquelle le lieutenant Drogo consacre sa vie, est la guerre elle-même. Elle n’en est pas le théâtre, puisque rien n’advient jamais sur cette scène, elle n’en est pas même la métaphore, elle en est l’incarnation. Jananne Al-Ani Shadow Sites II L’artiste d’origine irakienne Jananne Al-Ani (née en 1966 ) a réalisé Shadow Sites II (2011, 8’38), à partir d’une série de clichés pris d’avion au-dessus du désert jordanien. Des sites sont survolés, dont la nature nous échappe. Le caractère militaire semble s’imposer dans le cas des ruines d’un fort romain du IIe siècle. D’autres installations offrent des silhouettes moins explicites. Se succèdent ainsi des énig- mes. Lorsque le site est cadré, la caméra zoome sur l’objectif. Le terme « objectif » doit s’entendre dans son sens stratégique. Car ce que mime ce mouvement de caméra, c’est celui du bombarde- ment. Il est important que la notion de guerre soit suggérée en premier lieu par ce dispositif visuel et non par la nature des panoramas. Le caractère militaire des sites demeure hypothétique. Lire la guerre dans le paysage s’apparente là à un pari. BAL CAFÉ BAL BOOKS ÉDITION FABRIQUE DU REGARD CYCLE CINEMA BAL-LAB EXPOSITION © Jo Ractliffe - On the road to Cuito Canavale IV - 2010 Harun Farocki Serious Games 4, a Sun with no Shadow Depuis son film Images du monde et inscrip- tion de la guerre (1988 ), l’œuvre d’Harun Farocki (né en 1944 en République tchèque ) a progressé sensiblement d’une expertise de ce qui était tenu pour invisible sans avoir jamais été caché à la question d’un visible dont le référent demeure hors champ. Avec Serious Games 4, A Sun with no Shadow (2010, 7’57), Harun Farocki évolue au cœur de cette nouvelle topographie désincarnée de la guerre. Au début, des jeux vidéo préparent les soldats à l’expérience du combat, mettant à leur disposition un catalogue de scénarios. À la fin, des jeux vidéo tentent d’atténuer les traumatismes du combat. Dans les jeux à visée thérapeutique, réalisés avec moins de moyens, les objets et les hommes ne projettent pas d’ombre. « A-t-on besoin des ombres pour se souvenir ? Y a-t-il dans les rêves des ombres projetées ? » Harun Farocki filme ici l’acmé d’un mouvement déjà ancien qui a fini par extirper le vivant de la guerre comme expérience et comme spectacle. An-My Lê 29 Palms An-My Lê, photographe américaine d’origine vietnamienne (née en 1960 ), a documenté 29 Palms (2003-2004), camp d’entraînement de l’armée américaine, en Californie, où sont formés les Marines destinés à combattre en Irak. Les militaires, secondés par des techniciens d’Hollywood, font en sorte que les lieux d’entraînement soient identiques, par le climat, l’environnement naturel, les éléments factices de décor urbain, aux sites de combat au Moyen- Orient. Ils mettent dans cette activité uploads/Geographie/ topographies-de-la-guerre-pdf.pdf
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- Publié le Sep 29, 2022
- Catégorie Geography / Geogra...
- Langue French
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