DU MÊME AUTEUR De Gaulle et les communistes, t. I : L’alliance (juin 1941-mai 1
DU MÊME AUTEUR De Gaulle et les communistes, t. I : L’alliance (juin 1941-mai 1943), t. II : Le piège (mai 1943- janvier 1946), Albin Michel, 1988 et 1989 ; réédition Perrin, 2020. Renaissance de Saint-Exupéry, sous la direction d’Alain Vircondelet, Écriture, 2016. 1914-1918. La Grande Guerre du général Giraud, Éditions du Rocher, 2014. Chronologie d’une tragédie gaullienne. Algérie : 13 mai 1958-5 juillet 1962, Michalon, 2012 (prix Algérianiste). Camus (collectif), Éditions Le Figaro, 2010. Vive Henri IV (collectif), Éditions Le Figaro, 2010. L’Accord secret de Baden-Baden, Éditions du Rocher, 2008 ; réédition 2018. Le Printemps en octobre. Une histoire de la révolution hongroise, Éditions du Rocher, 2006 ; réédition 2016. Réplique à l’amiral de Gaulle (dir.), Éditions du Rocher, 2004. Terres de Mafia, J.-C. Lattès, 1993. « Les relations de Gaulle-Staline pendant la guerre », in Stéphane Courtois et Marc Lazar (dir.), 50 ans d’une passion française. De Gaulle et les communistes, Balland, 1991. © Perrin, un département de Place des Éditeurs, 2022 92, avenue de France 75013 Paris Tél. : 01 44 16 08 00 Couverture : « Je vous ai compris. » Discours du général de Gaulle depuis le balcon du Gouvernement général, le 4 juin 1958, à Alger. © Rue des Archives/RDA EAN : 978-2-262-10063-6 « Cette œuvre est protégée par le droit d’auteur et strictement réservée à l’usage privé du client. Toute reproduction ou diffusion au profit de tiers, à titre gratuit ou onéreux, de tout ou partie de cette œuvre, est strictement interdite et constitue une contrefaçon prévue par les articles L 335-2 et suivants du Code de la Propriété Intellectuelle. L’éditeur se réserve le droit de poursuivre toute atteinte à ses droits de propriété intellectuelle devant les juridictions civiles ou pénales. » Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo. À Jacques Manuel qui, sans un mot, à soixante-seize ans, s’est mis à rebâtir. À Ali Chekkal, assassiné par le FLN à Colombes, le 26 mai 1957. « La tragédie n’est pas une solution. » Albert CAMUS SOMMAIRE Titre Du même auteur Copyright Dédicace Préface 1 - Un certain 30 juin 1955 2 - Un certain 10 octobre 1956 L'attitude de De Gaulle vis-à-vis de Moscou Le moment choisi par de Gaulle La portée du message gaulliste 3 - L'appel à Moscou 4 - Le rendez-vous fantôme 5 - L'art du flou 6 - Un coup à droite, un coup à gauche 7 - La grande confusion 8 - L'UNR au garde-à-vous 9 - Un terrible boulet 10 - L'opération Massu 11 - La « semaine des Barricades » 12 - L'affaire Si Salah 1) Quel contexte rend possible et crédible cette initiative de Si Salah et consorts ? 2) Dans quelle mesure peut-on faire fond sur Si Salah et les siens ? 3) En quoi le projet de Si Salah est-il de nature à mettre un terme au conflit ? 13 - Le coup de Melun 14 - Le procès de Challe 15 - En avant toute 16 - La partie difficile 17 - Le coup du référendum 18 - Premières capitulations 19 - Les coulisses du putsch 20 - Évian 1 21 - Le stratagème de la partition 22 - La course aux accords 23 - Des jours de folie et de sang 24 - Le coup de grâce 25 - La fausse paix Conclusion Bibliographie Index Préface Il y a quelques décennies paraissait la traduction française du célèbre livre de l’historien américain Irwin M. Wall, Les États-Unis et la guerre d’Algérie. Dans son introduction, Wall y affirme ceci : « Dans ma recherche, je crois que j’ai “découvert”, au sens précis du mot (si l’on veut bien admettre que le récit de l’historien doit relever de la science et non de l’élaboration d’une fiction), que de Gaulle, contrairement à ce qu’ont cru la plupart des historiens, voulait que l’Algérie reste française et qu’il n’avait pas eu l’intention de décevoir les espoirs de ceux qui l’avaient porté au pouvoir ; que la guerre d’Algérie a sous-tendu quasiment toutes les initiatives diplomatiques qu’il a prises de 1958 à 1962 avec cette idée en tête ; que la raison principale de l’échec de ses initiatives, pendant cette période, est qu’il n’est pas parvenu à convaincre les Américains de coopérer avec lui et que c’est seulement alors qu’il a commencé à penser à une “indépendance” diplomatique. » Donnant à voir la weltpolitik gaulliste comme l’articulation de trois cercles, ou, plus prosaïquement, comme une fusée à trois étages faisant de l’Algérie : 1) Le cœur de l’Eurafrique. 2) Le fondement de l’influence et du prestige de la France en Europe. 3) Le pilier de son statut de grande puissance occidentale aux côtés des États-Unis et de la Grande-Bretagne, Wall n’hésite pas à affirmer que, sur le plan diplomatique, la victoire gaulliste aurait consisté à « obtenir que le monde reconnaisse l’Algérie française, celle-ci permettant à la France de prendre sa place parmi les nations dirigeantes du monde », et que ce ne fut qu’après l’échec de sa politique algérienne (« qu’il faut bien qualifier ainsi, c’est le point central », souligne Georges-Henri Soutou dans la préface) qu’il entama une autre phase de sa politique extérieure. Pour séduisante qu’était cette thèse, force est de constater qu’elle n’a, faute d’arguments vraiment probants, guère emporté la conviction des historiens qui, à l’instar de Charles-Robert Ageron, se sont posé et se posent toujours la question de savoir si de Gaulle avait une idée arrêtée sur ce qu’il voulait faire en arrivant au pouvoir. Au moins a-t-elle eu le mérite d’exciter les imaginations et de libérer la recherche de tout complexe. Disons-le d’emblée : c’est une voie en tout point opposée à celle de Wall qui est ici empruntée, et qui n’a peut-être de commun avec elle que sa radicalité. Fondé sur des archives inédites, notamment soviétiques, et des observations presque quotidiennes de deux témoins clés de ces événements, Jean Daniel et Jacques Soustelle, deux esprits éminents et fortement engagés d’un bord et de l’autre de l’échiquier politique au cours de cette période, le présent ouvrage sur le traitement gaulliste de l’affaire algérienne s’emploie : 1) À faire litière d’une éventuelle indécision du Général sur le but poursuivi lors de son arrivée au pouvoir. 2) À mettre en évidence un principe d’action gouvernemental gaullien selon lequel – à l’inverse de l’opinion de Camus – la tragédie est une solution. « Si de Gaulle, en un certain sens, “aimait” les crises, c’était bien parce qu’elles lui fournissaient l’occasion de donner sa pleine mesure, en orientant le cours des choses dans le sens qu’il souhaitait 1 », témoigne Léon Noël, l’ancien président du Conseil constitutionnel, confident et proche collaborateur dans l’affaire algérienne du fondateur de la Ve République. De Gaulle lui-même ne s’en est jamais caché : « Je m’ennuie à l’Élysée, je ne me sens bien que dans la tragédie 2 », a-t-il confié à son éditeur, Marcel Jullian. Dans la pratique, cette solution par la tragédie s’est traduite par l’élaboration d’un piège, dont la « montée aux extrêmes » fut le ressort principal. Pour y faire tomber sa proie, il suffisait ensuite au « grand ruminant » (dixit André Malraux) de parfaire une série de « coups montés », organisés au gré de circonstances relativement prévisibles par un État redevenu pleinement opérationnel grâce au jusqu’au-boutisme implacable de son chef. Exact contre-pied de celle défendue par l’historien américain, la thèse du présent ouvrage l’est aussi de celle qui soutient que de Gaulle avait pour seul et unique objectif de faire advenir l’indépendance de l’Algérie et, de surcroît, qu’il aurait pu parfois avancer à l’aveugle : elle s’inscrit au contraire dans la perspective d’un de Gaulle arrivé aux affaires avec un non- dit qu’il finira par déclamer et décliner sur tous les tons le moment venu : le dégagement. L’indépendance de l’Algérie faisant fonction en l’occurrence de moyen (efficace) et de paravent (gratifiant, car dans l’air du temps) pour un dégagement sans retenue. Cette interprétation explique de façon plus satisfaisante, par-delà l’incontestable aboutissement du projet gaulliste, la tragédie humaine finale (néantisation des harkis et des pieds-noirs) dont même les gaullistes les plus fervents ont encore aujourd’hui moralement du mal à concevoir la nécessité. Elle explique, aussi et surtout, que, si l’Algérie s’est installée tant bien que mal dans l’indépendance, la France, elle, se retrouve, soixante ans après, dans une situation de dépendance vis-à-vis de son ancienne colonie. 1. Léon Noël, Comprendre de Gaulle, Plon, 1972, p. 96-97. 2. Charles de Gaulle, Traits d’esprit, Cherche Midi, 2000, rééd. 2020, p. 216. 1 Un certain 30 juin 1955 « De tout temps, avant que je revienne au pouvoir, et lorsque j’y suis revenu, après avoir étudié le problème, j’ai toujours su et décidé qu’il faudrait donner à l’Algérie son indépendance. Mais imaginez qu’en 1958, quand je suis revenu au pouvoir et que je suis allé à Alger, que je dise sur le Forum qu’il fallait que les Algériens prennent eux-mêmes leur gouvernement, mais il n’y aurait plus eu de De Gaulle dans la uploads/Histoire/ algerie-le-piege-gaulliste-henri-ch-z-lib-org.pdf