La chronique de Kenji Tokitsu Etude sur les maîtres du sabre japonais - 1 A par

La chronique de Kenji Tokitsu Etude sur les maîtres du sabre japonais - 1 A partir de ce numéro, Me Kenji Tokitsu écrira chaque mois un article sur les maîtres de sabre japonais car, pour lui, c'est autour de l'art du sabre que s'est constituée la conception classique des arts martiaux japonais. Dans cette série d'articles, il exposera une analyse et une interprétation des ouvrages des maîtres de sabres qui ont marqué l'histoire du sabre japonais. Les arts martiaux japonais tels que nous les connaissons aujourd'hui se rattachent à une conception globale qui s'est formée principalement autour de la pratique du sabre. La réflexion sur l'art du sabre que j'entreprends ici n'est donc pas circonscrite à cet art, son propos est le Budo, c'est à dire l'ensemble des arts martiaux japonais. Précisons tout d'abord que par « sabre japonais », il ne faut pas entendre seulement le kendo. Certes, le kendo moderne ne pourrait pas exister sans la pratique de l'art de sabre des samouraïs. Mais, si vous êtes rigoureux dans le choix des mots, vous ne pouvez pas parler du « kendo » de l'époque des samouraïs car ceux-ci n'utilisaient pas le terme kendo et, ce qui est bien plus important, leur pratique du sabre différait sensiblement du kendo moderne. Au cours de cette série d'articles, je pense pouvoir montrer les différences et les similitudes entre l'art du sabre ancien et le kendo. J e voudrais tout d'abord présenter un schéma simple de l'évolution de l'art du sabre afin de bien situer, les uns par rapport aux autres, les maîtres de sabre que nous allons étudier. Les grandes périodes de l'histoire du sabre japonais. J e distingue quatre grandes périodes dans l'histoire du sabre japonais. 1- La période de formation. Elle va du milieu de XVe jusqu'au milieu de XVIIe siècle. C'est un moment crucial de la formation et de l'évolution de la voie du sabre. Par la suite, les adeptes de sabre s'y référeront sans cesse. C'est à partir de cette époque que la filiation des principales écoles de sabre traditionnel peut être retracée avec certitude. Et, bien que la plupart d'entre elles se plaisent à rappeler que leurs racines remontent à l'époque Kamakura, ou encore plus loin, la plupart du temps les documents fiables ne vont pas plus loin que le XVe siècle. Portrait présumé de Miyamoto Musashi Du dernier tiers de XVe jusqu'à la fin de XVIe siècle, le J apon a vécu des guerres continuelles entre les féodaux. C'est dans l'expérience des champs de bataille que les adeptes de cette époque ont forgé les techniques et attitudes de base du sabre. Les techniques de sabre étaient alors relativement simples mais puissantes. Elles étaient utilisées avec une recherche personnelle des techniques les plus efficaces qui s'appuyait sur l'expérience des champs de bataille et des affrontements entre adeptes. L'histoire de Miyamoto Musashi par laquelle nous allons commencer cette chronique en est un exemple. 2- La période « classique » . Selon mon analyse, la période de fermentation de l'art de sabre s'étend de la deuxième moitié de XVIe siècle jusqu'au début de XIXe siècle. Cette période est pour nous la matrice du Budo et c'est là que nous devons chercher des indications sur le niveau qu'il est possible d'atteindre. Les Shoguns de la famille Tokugawa ont établi et stabilisé leur pouvoir sur l'ensemble du J apon entre 1600 et 1640. Ils imposèrent un gouvernement fort et assurèrent une longue période de paix qui se prolongea jusqu'au milieu du XIXe siècle. Les samouraïs durent donc s'accoutumer progressivement à leur situation de guerriers en temps de paix. Au temps des guerres féodales, on pouvait résumer le but de sabre par la formule : « Combien de têtes peut-on trancher ? ». Avec la paix, ce pragmatisme simple va se transformer en une recherche de progression dans l'art de sabre. La voie de l'action leur étant fermée, les adeptes de sabre vont intérioriser leur art avec la recherche de la voie, « do ». L'investissement dans cette recherche sera d'autant plus profond que le « do » trouve une partie de son sens dans les rapports entre le seigneur et ses vassaux. L'objectif est maintenant : « Comment peut-on avancer dans la voie de sabre sans tuer réellement son adversaire ? ». L'art du sabre atteint son sommet vers la fin de cette période. 3- La floraison de l'art du sabre. J e considère que la troisième période de l'histoire de l'art du sabre va du premier tiers de XIXe jusqu'à la fin de XIXe siècle. L'art du sabre s'épanouit en mettant fin à la période féodale japonaise, celle de sa domination, par la propre force de sabre. En effet, au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, le J apon va connaître une période de troubles consécutifs à la menace d'invasion que font peser les puissances occidentales. C'est le moment où les J aponais commencent à prendre conscience de la force des Occidentaux et à chercher les moyens les plus efficaces de s'y opposer. L'attitude et la conscience de la société globale se reflètent dans la manière de pratiquer le sabre. Il va atteindre sa plénitude produisant des étincelles d'acier entre les deux forces des samouraïs, dont l'une défend le Shogunat, l'autre cherche à évincer ce système. Le règne des Shogun a pris fin en 1867 et le nouveau régime, dans sa volonté d'instaurer une puissance militaire et industrielle moderne, a aboli les privilèges des samouraïs. Mais, malgré les difficultés, une partie des samouraïs qui ont survécu aux durs affrontements de la période de transition ont continué la tradition et la pratique du sabre. Ils ont d'abord dû s'habituer à l'interdiction du port de sabre et affronter la tendance alors dominante à la dépréciation de la culture traditionnelle qui supportait leur identité. Le sabre des samouraïs disparaît à la fin de XIXe siècle avec la mort de ceux qui avaient vécu les derniers combats de sabre. 4- Le kendo du début XXe siècle jusqu'à la fin de deuxième guerre mondiale. La conception et la pratique du kendo moderne ont été élaborées et déterminées vers la fin de l'ère Meiji (1868-1912). Ce que désigne le terme kendo aujourd'hui n'est donc pas exactement ce qu'avaient pratiqué les adeptes de sabre plus anciens. Le terme kendo date de l'ère Meiji, auparavant, divers termes avaient été utilisés pour désigner l'art de sabre, par exemple, Geki-ken, Ken-jutsu, Gei- jutsu, To-jutsu, Ken-po, etc. Bien que cette période soit courte, son importance est de servir d'intermédiaire entre le kendo pratiqué dans la continuité de l'attitude des samouraïs et le kendo moderne. 5- De 1945 jusqu'à aujourd'hui. En 1945, les destructions étaient très importantes au J apon et dans l'ébranlement de la défaite, c'est toute la société japonaise qui se trouvait remise en cause. Après la guerre, le J apon a été occupé, la pression des « alliés » était très forte et tous les arts martiaux traditionnels ont été interdits. Les adeptes de karaté ont été les premiers à obtenir l'autorisation de pratiquer leur discipline car ils l'ont alors présentée comme une forme de boxe, ce qui permettait de l'assimiler à un sport : la boxe anglaise. Il n'en allait pas de même pour le kendo, même pratiqué avec des sabres en bambou, il évoquait l'étrangeté barbare du J apon de la guerre. Lorsque le kendo a pu reprendre officiellement, c'est dans une société qui avait changé, et l'esprit de sa pratique a été modifié par l'intégration de l'idée moderne de sport de combat. Miyamoto Musashi. J e vais commencer l'étude de l'art des principaux maîtres de sabre en présentant Miyamoto Musashi car il est sans doute, parmi les grands adeptes de sabre, celui dont le nom est le plus familier aux Européens, grâce aux traductions de son traité de sabre « Gorin no sho » (Ecrits sur les cinq roues) et des romans de Eiji Yoshikawa : « La pierre et le sabre » et « La parfaite lumière ». Miyamoto Musashi était depuis longtemps renommé au J apon mais le roman dans lequel E. Yoshikawa raconte sa vie l'a rendu encore plus célèbre dans le grand public. L'auteur a accentué le versant introspectif du personnage, c'est pourquoi on dit parfois « Yoshikawa Musashi » pour qualifier l'image que le public japonais se fait aujourd'hui de Miyamoto Musashi. Le roman a été publié en feuilletons de 1935 à 1939. Il est, d'une certaine façon, la prise de position de Yoshikawa dans le débat sur les qualités réelles de Miyamoto Musashi qui se développa entre les écrivains japonais au début des années trente. C'est Naoki, célèbre auteur de romans sur les samouraïs, qui déclencha la polémique en écrivant que Musashi n'atteignit à l'excellence en sabre que quelques années avant sa mort. Il pense que Musashi dans sa jeunesse était seulement expert en auto publicité, et que sa force en sabre n'était pas extraordinaire. Il en prend comme preuve le combat contre Sasaki Kojiro où Musashi a utilisé un sabre de bois afin d'avoir un sabre uploads/Histoire/ chronique-tenji-tokitsu.pdf

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  • Publié le Dec 29, 2022
  • Catégorie History / Histoire
  • Langue French
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