Des compétences changeantes Brigitte D'HAINAUT-ZVENY Introduction Brigitte D'HA

Des compétences changeantes Brigitte D'HAINAUT-ZVENY Introduction Brigitte D'HAINAUT-ZVENY est une chercheuse et historienne de l’art, Belge ; enseignante à l’ULB (Université libre de Bruxelles). Elle s'intéresse à l’art Occidental de la première modernité (XVe-XVIIIe siècles) et plus spécifiquement aux images religieuses. Elle a écrit Des Retables et des hommes, Origine et spécificités des retables gothiques mais aussi le texte dont nous allons parler aujourd’hui : Des compétences changeantes. Le Moyen Âge fut une période de développement pour le christianisme, notamment en Europe. Du XIIe au XIVe siècle, elle a connu différents modes de représentations religieuses comme le retable. Le retable est un panneau situé à l’arrière de l’autel où l’on posait les objets sacrés. Il connaît une évolution des supports pour objectiver la présence du sacré. Le retable est composé de trois parties : la prédelle, la huche et les volets, pouvant être mobiles. Dans l'essai que nous avons étudié, l’auteure explique avec précision que le sens d’une image est déterminé en fonction d'une époque et d'un milieu particulier et que les retables se voient attribuer des usages multiples au cours du temps. => Comment l’usage de l’image dans le retable a-t-il évolué depuis le Moyen Âge ? Ainsi Brigitte D'HAINAUT-ZVENY choisit de séparer (l’ère des retables d’autels) en trois différents “Temps” : I. Le Temps des reliques (retable reliquaire) II. Le Temps des Images (retable polyptyque) III. Le Temps du Saint Sacrement (retable baroque) I. Le Temps des reliques Les premiers retables apparaissent pendant le XIIe siècle et étaient souvent constitués en bois. A l’origine, le retable est un simple support où sont présentés des reliques ou d’objets liturgiques. Ils pouvaient être imposants ou bien modestes comme on peut le voir avec l’Annonciation et la Visitation encadrant la Vierge en Majesté tenant l’Enfant réalisé dans le courant du XIIIe siècle qui témoigne d’ailleurs de l’apparition naissante des volets. Ce type de retable se fiait au système fondé par les Carolingiens –une dynastie de rois francs–, qui refusaient que l’image ait un statut d’emblème à la vénération des fidèles. De ce fait, les images présentes sur les retables étaient seulement qu’accessoires afin de faciliter à transporter le fidèle. Ces représentations imagées pouvaient être peintes ou sculptées. Dans son essai, l’auteure illustre cette catégorie de retable avec le retable de Saint Remacle réalisé au XIIe siècle et commandité par l’abbé Wibald de Stavelot. Au centre de ce retable, on y retrouve un coffre où l’on gardait les reliques à l’ordre du saint Remacle entouré d’une série de reliefs retraçant la vie de saint Remacle ainsi que d’autres prophètes. Cet exemple illustre très bien la volonté, au XIIe siècle, de valoriser les objets liturgiques.Les images apportaient un support visuel afin de plonger le fidèle dans le récit du saint à qui il faisait offrande de reliques et par la même occasion, d’en établir le prestige. On situe le coffre au milieu du retable, premièrement, pour attirer le regard mais surtout pour lui donner ce rôle de transitus, dont les images ne bénéficient pas, afin d’assurer l’efficacité du retable. Les reliques étaient d’une grande importante étant donné qu’il s’agissait de restes de personnes saintes ce qui les attribuait des vertus miraculeuses. II. Le Temps des images A partir du XIVe siècle, le retable connaît une évolution fulgurante qui permet l’émancipation de l’image. Cette évolution est d’ailleurs permise par l’Eglise au Concile de Trente qui impose l’alliance de cette discipline et l’instruction afin d’éduquer les fidèles illettrés grâce aux images. En effet, la production de retable se développe vers des commanditaires qui en voient un usage privé. Ces commandes permettent de développer le processus de la réalisation de l’image en y ajoutant des détails, se concentrant sur la couleur du fait de l’aspect promotionnel dont ils font l’objet. Le développement de l’image religieuse, par ce biais, permet de se substituer des reliques étant donné que l’image avait atteint le pouvoir d’établir un contact avec le sacré. En revanche, l’apparition des images ne fut pas soudaine. Effectivement, le rapport aux images a, une première fois, évolué avec des reliques anthropomorphes comme la statue reliquaire de Sainte Foy qui donne progressivement le pouvoir de transitus à l’image.Cette nouvelle ère du retable a donné cours à des transformations des supports laissant place à des polyptyques permettant de raconter une histoire plus longue qui envahit alors l’espace. Les polyptyques gothiques des Pays-Bas ont permis de renforcer la distance qu’on a longtemps voulu entreprendre avec le sacré en ajoutant des volets amovibles pouvant fermer le retable ou au contraire, l’ouvrir pour le contempler. L’exemple parfait pour illustrer cette idée révolutionnaire pour l’époque est L’adoration de l’Agneau mystique finalisé en 1432 par Jan Van Eyck, peintre flamand, commandé par Joost Vijdt pour la chapelle privée de sa femme ayant la particularité d’avoir 24 panneaux. Pour sacraliser le retable davantage, on met l’accent sur la dorure comme on peut le voir dans l’exemple donné par l’auteure, le retable de la Passion de Claudio Villa et Gentina Solaro réalisé entre 1470 et 1480. Cette dorure en relation avec la lumière donnait un éclat au retable qui subjuguent le fidèle, qui, ressent alors la forte connotation émotive provoquée par la représentation. Cette nouvelle forme de retable est d’autant plus efficace par son réalisme apporté aux vêtements, armes, armures notamment en ayant recours au relief dans le retable de Claudio Villa. Sa structure narrative lui permet de projeter le spectateur dans l’image lui offrant une scène semblable à ceux que l’on retrouverait au théâtre. De plus, on donne au retable un réalisme au niveau des expressions corporelles et faciales qui renforce l’empathie du spectateur. III. Le Temps du Saint Sacrement C’est au XVIe siècle que le retable baroque se propage. Contrairement à ces prédécesseurs, il préfère une représentation plus réaliste des figures, beaucoup moins idéalisées et plus épurées, influencée par la Renaissance italienne. Ce type de retable est considéré comme une scène d’action, on cherche à figer un instant symbolique. Le polyptyque est complètement laissé de côté pour privilégier une seule représentation narrative, souvent sur plusieurs étages pour figurer une sorte d’Ascension vers le Paradis. La notion de relique est remise au goût du jour, grâce à la mise en évidence du Tabernacle, compartiment où sont conservés les hosties (corps du Christ). Le retable redevient un véritable “objet de vénération fondant l’essor d’un véritable culte eucharistique”. Brigitte D'HAINAUT-ZVENY choisit de citer le Le retable des Sept Sacrements de Jehan Mone, 1533 comme exemple, visible à la Basilique Saint Martin de Halle (Allemagne). C’est un retable, “en albâtre rehaussé d'or”, symétrique et équilibré, représentant les Sept Sacrements : baptême, confirmation, eucharistie, pénitence, onction des malades, ordre, mariage. Ils sont représentés sur les 2 premiers étages. Le souci du détail est présent, les personnages représentés sont figés dans des poses qui leur est propre, permettant l’identification de certains Saints. Aussi, comme évoqué plus tôt, le Tabernacle est dominant. Il surplombe la statue de Saint Martin, le titulaire de l'Église. De plus, la présence des colonnes montre vraiment l’inspiration italienne et donne du prestige à l'œuvre. Tous ces éléments donnent l’effet d’une véritable mise en scène. Ce style fut très apprécié par les iconographes de l’époque. Nous retrouvons ces mêmes critères dans le Retable Majeur de l'Église de la Trinité de Peisey-Nancroix. Réalisé plus tard, au XVIIe siècle, ce retable imposant raconte certains grands événements de la Bible tels que : La Crucifixion. Il y aussi une Piéta (quand la Vierge reçoit le corps du Christ après la descente de croix). Encore une fois tout est sculpté et symétrique, le doré est presque omniprésent. La position des personnages renseigne qui sur la scène biblique représentée, les colonnes, les différents étages, la présence du Tabernacle au centre pour qu’il soit encore plus visible. Le retable baroque révolutionne le genre en apportant de la sculpture avec de vraies statues, au lieu des bas reliefs que l’on pouvait trouver avant. Conclusion Pour conclure, Brigitte D'HAINAUT-ZVENY nous expose l’évolution fulgurante que subit le retable dès le début de la Renaissance en Italie laissant court à une succession de genres de retables qui mettaient en scène l’image religieuse de sorte à lui accorder de plus en plus d’importance. Bien qu’à ces débuts, le retable n’était qu’un support sur lequel reposait des objets liturgiques qu’on devait valoriser, le XIVe siècle s’est montré novateur sur le rôle qu’elle exerçait en temps qu’oeuvre indépendante par l’émancipation de l’image. L’évolution du retable a conduit à une quasi-disparition des reliques et objets liturgiques et a ouvert la voie au réalisme anthropomorphique des figures religieuses longtemps refusé par l'Église. uploads/Histoire/ expose-sur-brigitte-d-x27-hainaut-zveny.pdf

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  • Publié le Sep 07, 2022
  • Catégorie History / Histoire
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