LES MODALIT& ET LE CONTENU DE LA CROISSANCE INDUSTRIELLE DE LA CÔTE D’IVOIRE Je
LES MODALIT& ET LE CONTENU DE LA CROISSANCE INDUSTRIELLE DE LA CÔTE D’IVOIRE Jean CHEVASSU* et Alain VALETTE** Économistes O.R.S.T.O.M. ‘AIinistPre du Plan - Rabat - Maroc * ‘O.R.S.T.O.M. Petit-Rassam, B.P. 4293, Abidjan, Cdte d’looire RÉSUMÉ Le secteur industriel moderne a connu, en Côte d’ivoire, une croissance forte et soutenue en termes réels depuis 1960. Cette croissance, fondée d’une part sur un apport extérieur massif de facteurs de production (capital, technologie, main-d’awvre), d’autre part sur une progression réguli&e de la demande interne, s’est traduite par d’importantes modifications des structures de production. Basée dans un premier temps sur la substitution des importations, l’industrialisation s’est poursuivie au profit principal de la valorisation des produits locaux. Bien que l’intégration de l’appareil productif en ait été considera- blement renforcée, il ne semble pas que le seuil d’un développement auto-entretenu ait étè atteint, du fait d’une toujours grande sensibilité ù l’extérieur. ABSTRACT The gromth of the modem industrial sector of the Ivory Coast has been considerable and sustained in real terms since 1960. The effects of this growth, based partly on large-.scale transfers of the means of production (capital, technology, and man-porver) from the exterior, and partly on a steady increase in interna1 demand, cari Le seen in tha important changes carried out in the structures of the systems of production. Based in its first stage on the substitution of imports, the industrialisation has been carried out mainly in aid of the valorisation of local products. While this fact has considerably intensified fhe integration of the production machinery, it does not appear that the threshold of self-suff iciency has been attained, in SO far as development goes, as il is still to a large extent influenced by ouiside forces. Le présent article est un travail d’équipe qui se sit.uc dans le prolongement d’une serie de rapports ayant porte sur l’analyse du systeme induetrie de la Cote d’ivoire. Ces études fines s’inseraient dans le cadre du protocole d’accord conclu entre la République de Cote d’ivoire et 1’Offico de la Recherche ScienMlque et Technique Outre-Mer et dont l’objet était une rocherchc globale sur le dynamisme du secteur industriel ivoirien. La premiere série de documents a été publi& par le Centre O.R.S.T.O.M. de Petit-Bassam. Ces travaux etaient stricte- ment limites à l’analyse des mécanismes de croissance et d’organisation du secteur des industries manufact.uriéres. Ils se basaient sur les résultats d’une enquete par interview des dirigeants d’entreprises et par axploit,ation de documents comptables portant sur environ 200 soci8tés. Ces resultats concernant. les structures industrielles ivoiriennes ne seront, repris qu’e.xceptionnellen~~nt. dans le presrnt article. Ce travail s’insere dans notre synthtkse en cours sur les Cah. O.R.S.T.O. IV., s&. Sci. hum., vol. XIT’, no 1, 1977: 27-57. 28 SI. CHEVASSU ET A. VALETTE problèmes do la croissance, du coùt et. des effets de I’induslria- lisntion dansle cadre 1111 motl~lr ivoirien ti’ouvrrture er;tirieure. La seule prktention de la partie actuelle est de donwr des C?léments de réponse à l’un ticxs problPmrs majours que pose l’industrialisat.ion drs pays d’Afrique noire : compte terni des conditions hérittes de 1~ p~riotlt: coloni:rle, une strategie industrielle basee sur In spécialisation internat.ionale du travail conduit.-elle, à terme, au blocage de la croissance OU, au contraire, est-elle un gage de croissance rapide S INTRODUCTION Quand ils prirent, en mains la destinée de leur pays, au début de c.ett.e deuxième moitié du xxe sifkle, les dirigeants des nouveaux Ét-ats afri- c.ains avaient A affronter une double réalité. En premier lieu, les pays dits (< développés 0 étaient, -I»uS des paye indust.riali&s . , alors que les pays dits a SOUS- développks o ktaient tous non induP;t,riali&s. Les premiers qui groupaient 10 04, seulement- de la population mondiale avaient. le quasi-monopole de la produc.tion industrielle avec 90 ($0 de celle-ci. En second lieu, la majorit.6 des auteur; s’accordaient, A reconnaître que If5 (( riches 8 devenaient toujours plus riches et les <( pauvres )) t.oujours plus pauvres. Il n’est donc. pas ékmnant que la fin du Pac.te Colonial, réservant. A la Rlétropole I’approvisionne- ment des colonies en produits industriels, ait coïncidk, chez toutes les nat.inns indkpendant,es, avec la recher- che, parfois effrénke, du meilleur moyen d’accroît.re la produc+ion de biens manufac.t.urés. Une autre analogie que l’on retrouve dans tous les plans de développement. élaborés au lendemain des Indépendances est. la recherche d’une croissance rapide. Les plans de la Ct’ke d’ivoire, du Ghana, du Cameroun OLI du Sénégal, par exemple, retiennent tous des t.aux de croissance de la prodwtion int.&- rieure brut.e supérieurs a 5 % par an (8 y{, pour la Côte d’ Ivoire). Ces taux paraissent relativement. élevés pour des pays dont la populat-ion varie entre 3 et 6 millions d’habitants, qui sont. dépourvus de ressources naturelles abondantes, et. dont les st,ruc- tures de production sont peu productives. Ils corkas- teni, en tout cas avec la quasi-stagnation économique qui caraçt-érise les soci6tks traditionnelles. Cependant-, les dirigeants afric.ains n’ont. pu voir aucune alternative aut.llenticIuemenl:lt, africaine aux modèles de production rt. de consommation de l’ancien c.olonisateur. Mais, tout en reconnaissant. un besoin objectif de di~pendanw, ils ont eu un comportement fliffkent vis-k-vis de l’agent étranger. Cert.ains ont, cherché 4 dégager rapidement. leur pays de la subordination pohtlque ou économique B laquelle ils t%aient soumis, (:‘est. le cas du Président, Nkrumah de la R6publi~lue du Ghana. D’autres rétorquaient que, sans ctapit.am et. sans main- d’cwvre nationale disponibles, il P;t.ait utopique de c:hercher A exercer un cont,t%le national véritable sur les leviers économiques. La CXtr d’ivoire est. rkputée pour ètre l’un des pays (si ce n’est. le pays) d’+4frique noire qui a choisi la plus grande ouverture extérieure et qui awepte aussi Ie plus voInnCiers Ie conLr6Ie ét,ranger sur ses moyens de production. Blalgré des divergences profondes sur les voies et, moyens du di!veloppemrnt., les objectifs ultimes restent. les mknes. Il s’agit de parvenir A (( l’indk- penc1anc.e Pcrmornique sans laquelle l’indépendance politique n’est pas compl$t.e (4 Perspectives décen- nales de développement, économique et. social de la Cot<e d’ivoire 0 1960-1970). Ce but sera atteint. lorsque l’on aura créé un dt%4oppenient, intkgré, auto-entretenu, a l’image des économies intlusl.ria- lis6es. Aux yeux des dirigeant:5 africains c.ett,e ind& pendance économique serait. le meilleur moyen de garant.ir l’amé;liorat.ion du niveau de vie matérirl de leur population. Une quinzaine d’années aprés le cl6but de ces esp6riences de développement, indust.riel, la contro- verse sur les résu1tat.s obtenus par l’une ou l’autre de ces politiques con.Linue à suscker de vives dis- cussions. Cependant, plus que t.oute autre en Afrique noire la voie ivoirienne est, au rentre d’une p~.~léinique qui engendre admiraCon ou dtkiigrenient selon les idkologies prufewk par leurs auteurs. Dans un premier paragraphe nous allons effwtuf:r un bref bilan de la croissance konomique ivoiriennr! depuis l’indépendance, en insist.ant sur le r6le moteur e?rercé par l’industrialisation. Ensuite nous nous demanderons si la vive croissance quant.it;;rt.ive s’est, t.raduit.e par une modification drs principales caract.é- ristiques st,ruc.turelles au niveau du secteur industriel. Enfin nous analyserons les voies du tlévelo~~yament. industriel qui ont été; privil@i&s par la stratégie du gouvernementS ivoirien. 1. Bilan général de la croissance La croissance ivoirienne be caractérise par trois grands trait.s. D’une part., elle est, esc~el~tionnellement. forte pour un pay5 en voie de d&eloppement.. D’autre part, elle se poursuitF malgré le rattrapage du retard économique de la COt,e cl’lvnire par rapport. H ses \:»isins. Enfin, le poids de l’inclwkrie clans la production intérieure brut.e a tendanc*e A se st.abilisrr. 1.1. LA CHOISBANCF: ~~CONOMI~JUE EST ESCEPTION- NELLEMENT RAPIDE De 1%X Q 1972, l’éc.onomie ivoirienne a progressé U un rythme impressionnant, : en prix courants, le TABLEAD 1 ~volzzfion du prodzzif inf&iew brzzf sn Cdfc d’ivoire rf nzz Ghana (III~ pri:r consftrnts de 1900 (1) ~wleur m milliards tif F. CFA) 19GO . . . . . 142,O ~Xl,0 100 100 - - - - 1966.. . . CU&0 267,1) 116 Il6 x,0 ';& Y,0 y/0 - - 19GO......... 22‘1,O 267,0 157 116 7.9 s 271 9;) 7,s 0; 0 98 1967......... 2‘2 5 0 ctin 2752,CJ 158 11K G,8 y;, $1 y& 0,B 18 f,!i 00 1968.. . . . *U 276,O li3.i 1 VIJ 8,O T/” 291 Y, 11,T 9; 1,s 0:) 1!16R.. . . . ?SI,0 PX6,O 197 lC4 7,9 Y; 2,4 ?A B,O ?ij 3.6 T,, 1970......... 30.40 301,(1 21.3 130 7,9 y; ?,Ï 9; 8,3 90 5 -2 y, 1971......... :329,0 'SU?,0 2.11 127 7,9 y; 1;2 T& 8,s x 3:u yo 197o - . . . . . . 352,o ?,4Ï 7,x "0 8,8 T,; 1078......... 3îG,O 26-i 74 % 7,O 0.; (1) Sources : Comptes de ra Nation. Stot.ist.iques O.N.U. (?j Taux dc croissance annuels nmycns relalifs ti la pi’kxir allant de 1960 à l’ami+ consitiért’v. taux de croissance de la production int,érieure brute (PIB) a étk de l’ordre de 11,2 y,o en moyenne, c.e qui correspond k une multiplication par quat.re. RIérne um fois défalquée la hausse des prix, qui esl; estimée of’ficiellement h 3 ${, par an, la PIB est, encore ruultzi- pliée par prés de t.rois, c’est-&-dire que l’on a une croissance d’environ S oh par an (Tahl. 1). uploads/Industriel/ cote-d.pdf
Documents similaires










-
51
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Jan 16, 2021
- Catégorie Industry / Industr...
- Langue French
- Taille du fichier 3.6764MB