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HAL Id: halshs-00835535 https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00835535 Submitted on 18 Jun 2013 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. L’architecture de Ricardo Bofill : D’une conception archétypale de l’espace à une conception normative de l’habiter André-Frédéric Hoyaux To cite this version: André-Frédéric Hoyaux. L’architecture de Ricardo Bofill : D’une conception archétypale de l’espace à une conception normative de l’habiter. 2000. ￿halshs-00835535￿ 1 Hoyaux André-Frédéric Enseignant-chercheur CNRS UMR 5185 ADESS Université Michel de Montaigne Bordeaux3 L’architecture de Ricardo Bofill : D’une conception archétypale de l’espace à une conception normative de l’habiter Résumé : A partir d’une réflexion critique sur l’ouvrage Espaces d’une vie de Ricardo Bofill, cet article tente d’éclairer les oppositions pratiques et philosophiques entre les conceptions normatives et génératives des sciences de l’habitation. Il montre comment l’enfermement théorique et conceptuel de la création de l’objet architectural pour lui- même se trouve très souvent décalé avec les attentes des habitants. Au-delà, cet article montre comment ces conceptions normatives tentent d’impulser en chaque être humain une généralisation de leurs façons d’être, de faire et de ressentir l’espace, et cela à partir des seules injonctions artistiques de l’architecte. Injonctions qui proviennent trop souvent d’une généalogie contrariée de ce dernier, comme c’est le cas notamment chez R. Bofill! Mots-Clés : Ricardo Bofill, archétypes, habiter, référentiel habitant, conception générative de l’espace. 2 En ces temps où la question du logement devient problématique, il nous paraissait intéressant d’inclure l’analyse du livre autobiographique de Ricardo Bofill Espaces d'une vie 1 dans le cours d’une réflexion plus globale sur l’habiter. Cette réflexion s’inscrit en effet dans la mise en perspective, certes caricaturale, de l’opposition entre des conceptions normatives et génératives de l’architecture contemporaine 2. Si la conception générative interpelle le vécu des habitants et fonde son architecture dans un partenariat de plus en plus poussé entre l’architecte et son client ; la conception normative quant à elle délimite un tant soi peu des prérequis artistiques et philosophiques qui bien qu’ils puissent être épris de vérité, font fi des préoccupations et des attentes des habitants eux- mêmes. L’utilisation d’un ouvrage, certes déjà ancien, de Ricardo Bofill est à ce point de vue édifiant et permet justement de lire ce hiatus entre l’objet de vertu (créé par l’artiste- architecte) et les vertus de l’objet (vécu par les habitants dans leurs pratiques quotidiennes) dans la construction architecturale et urbaine. De comprendre alors comment l’architecte navigue entre la figuration de son objet, l’écriture spatial qu’il lui assigne au sein de la ville et le sens qu’il veut lui donner pour lui-même et pour ceux qui en ont demandé l’édification. Réfléchir plus particulièrement sur l’architecture de Ricardo Bofill au travers de cet ouvrage, c’est justement entrevoir cet amalgame entre figuration, écriture et sens : — Premièrement, parce que cet ouvrage expose clairement les pensées spatiales d’un des architectes les plus en vogue dans le monde depuis les années 1960-70. Concepteur de nombre d’ensembles architecturaux, entre autres, en Espagne (Walden 7 et l’aéroport à Barcelone), en France (Antigone à Montpellier, le Palacio d’Abraxas à Marne-la-Vallée) et aux Etats-Unis (tour 77 West Wacker à Chicago), il transparaît dans son « style » une monumentalité empreinte de classicisme qui a défrayé la chronique dans le milieu des architectes. Classicisme qui révèle un désir profond de retour à l’essence des choses, à une mimésis avec la Nature, mais qui ne prend sa véritable raison d’être architecturale que dans la mesure où tout élément peut être intégré dans un paysage plus vaste. En effet, pour Bofill, le but premier de l’architecte, c’est « organiser l’espace ». « Définir l’architecture par l’organisation de l’espace, c’est […] la distinguer de la construction. Souvent confondues, les deux activités traduisent en réalité des rapports diamétralement opposés de l’homme à la nature. Lorsqu’il éprouve le besoin de se construire un abri, l’homme le fait sous une menace extérieure : il se protège du froid, de la pluie, des bêtes sauvages. Il est le faible qui se défend. Au contraire, lorsqu’il trace un temple pour y placer des dieux au visage humain, il n’entretient plus avec la nature un rapport de conflit, mais l’observe pour mieux la transformer, la modeler à son image et lui imposer les signes de sa transcendance. On comprend alors l’importance que revêt, pour un architecte, l’étude des éléments et des lois 1 Ecrit en 1989 avec la collaboration de Jean-Louis André, collaborateur au Monde. Les indications entre parenthèses sans indication du nom du ou des auteurs réfèrent exclusivement aux pages de cet ouvrage. 2 Voir les travaux de Pascal Amphoux et Lorenza Mondada sur l’idée de » chez-soi », 1989. 3 naturelles. Un peu comme s’il lui fallait inlassablement travailler sur les formes qui l’entourent pour renouer avec l’essence de son art » (131). En cela, et sans entrer dans les polémiques théoriques des disciplines traitant de l’espace et des définitions qu’elles se donnent, on peut admettre que R. Bofill fait une géographie, de « l’organisation de l’espace ». A ceci près, comme le signale R. Bofill lui- même, que l’architecte l’organise en artiste, alors que le géographe l’analyse en intellectuel. Car même si R. Bofill ne définit pas ainsi le géographe, on peut le supposer tel à partir de « la distinction traditionnelle entre l’artiste et l’intellectuel » qu’il émet. Ainsi, pour lui, l’intellectuel « part du réel, de la société, pour l'analyser, la disséquer et la critiquer. L'artiste, au contraire, part du réel pour le dépasser, pour inventer, à partir de ce qui lui est donné, un autre monde » (107-108). Il était dès lors intéressant de confronter ces deux approches. — Deuxièmement, parce que R. Bofill tente d’exposer ce que l’on pourrait appeler une sémiolinguistique des formes architecturales (signe géométrique) qui serait intégrée dans une sémiologie de l’espace (signe paysager). En ce sens, il explicite tout d’abord les formes architecturales (pilastres, fronton, etc.) comme constitutives d’un « langage » qui se décline avec « les mots, la syntaxe qui les ordonne, les styles et les actualisations personnelles » (153), et se mettent en forme à partir d’un « vocabulaire » et d’une « grammaire » spécifiques. Cependant, pour R. Bofill, ce langage n’est rien pour lui- même, car il est avant tout constitutif d’espaces plus vastes, d’ensembles paysagers qui permettent alors une étude sémiologique d’ensemble. « Dans un discours, un nom, un verbe ou un adjectif ne prennent une signification qu'à partir du moment où ils sont intégrés dans une phrase complète ; de même, en architecture, un pilastre ou un fronton n'ont aucune raison d'être et ne “veulent” littéralement rien dire de l'espace, s'ils n'entretiennent pas un rapport avec l'ensemble » (156-157). Cette intégration des formes architecturales dans des ensembles spatiaux plus vastes est un véritable leitmotiv pour l’architecture de R. Bofill. Il tient en grande partie à sa volonté d’échapper à « l’étouffement », à sa « claustrophobie », corollaire de son passé en Catalogne perçu comme « étriqué » (30). De cette histoire personnelle, R. Bofill tire sa définition de l’architecture qui « repose sur une lecture des paysages ». Ces paysages peuvent donc être appréhendés en retour comme des textes dans lesquels on perçoit des mots, des signes laissés par les civilisations successives. Mais ils s’offrent également à l’introduction de signes réactualisés, principalement classiques, dont l’architecte a pour rôle uniquement de déterminer une nouvelle rythmie. Toutefois, l’analyse de R. Bofill se veut très particulière en ce qui concerne la définition qu’il donne de ces signes. Car ceux-ci ne permettent pas nécessairement à l’homme de signifier ces nouveaux signes architecturaux par ses propres représentations ; au contraire, ce sont les signes qui signifient l’homme quand il est en leur présence. Pour preuve, Bofill critique nombre d’architectes qui autour d’Umberto Eco ([1976] 1992) ont tenté de « tirer au clair, une fois pour toutes, ce rapport du signifiant au signifié qui ferait de l’architecture une langue comme les autres, simple médium d’un message qui sans cesse la dépasse, et donc l’abolit. Cette fièvre de la signification s’est traduite, comme 4 dans d’autres disciplines, par une inflation du discours, un développement métalinguistique. Il nous a fallu depuis reconquérir notre droit à la pratique ; réintroduire, dans les écoles, l'apprentissage du dessin, puis de l'espace, et nous satisfaire d'une seule certitude : l'interprétation sociale, politique ou religieuse de l'architecture n'est pas de son domaine propre, mais celui de la sémiologie. Chaque époque, chaque civilisation investit les signes, les enrichit d'une nouvelle signification. Si langue il y a, elle ne se situe pas à ce niveau, mais à l'intérieur même de la discipline : les mots ne renvoient ici qu'au vide de l'espace » (156). A uploads/Ingenierie_Lourd/ l-architecture-de-ricardo-bofill-d-une-conception-archa-typale-de-l-espace-a-une-conception-normative-de-l-habiter 1 .pdf

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