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www.comptoirlitteraire.com André Durand présente Vladimir NABOKOV (Russie—États-Unis) (1899-1977) Au fil de sa biographie s’inscrivent ses œuvres qui sont résumées et commentées (surtout ‘’Lolita’’). Bonne lecture ! 1 Né à Saint-Pétersbourg dans une famille de la vieille noblesse russe, aisée et anglophile, qui y vivait dans une vaste demeure et passaient les étés dans sa propriété de Vyra, à cinquante kilomètres plus au sud, il était l’aîné de cinq enfants. Son père bien-aimé, Vladimir Dimitriévitch Nabokov, fils d'un ancien ministre de la Justice, était un éminent juriste et un homme politique libéral, fondateur du parti constitutionnel-démocrate, élu, à la suite des premières élections parlementaires où le parti obtint la majorité, à la première Douma de 1906 où il se montra un opposant déterminé au despotisme du tsar, connaissant d’ailleurs la prison en 1908. Sa mère lui assura une enfance heureuse où ses gouvernantes et ses précepteurs lui apprirent trois langues étrangères, l’anglais, le français et l’allemand. À l'âge de cinq ans, il savait déjà lire et écrire en anglais, avant même de pouvoir le faire en russe. Il voyagea au tout début du siècle en Europe avec ses parents. Jouissant du bonheur de vivre à proximité d'une «bibliothèque de dix mille ouvrages» qui lui permit de dévorer, dès son plus jeune âge, la grande littérature, il se découvrit ainsi une passion qui s’ajouta à celle des papillons (il les aimait plus que les êtres humains et constitua sa première collection à l´âge de seize ans) et à celle des échecs (qu’il préférait aux rencontres, y étant un joueur émérite). Ce n'est que quelques années plus tard qu'il étudia à l'Institut Tenichev, lycée d'avant-garde. Sa première oeuvre, un recueil de poèmes imprimé à cinq cents exemplaires, parut à titre privé en 1916 sous le pseudonyme de Sirine. Au début de 1917, Vladimir Dimitriévitch Nabokov fit partie du gouvernement provisoire de Kérenski et de la nouvelle Assemblée constituante. La révolution d'Octobre et la prise de pouvoir par les bolcheviks le chassèrent du pouvoir, contraignirent la famille à se réfugier d'abord en Crimée, puis à quitter la Russie pour l'Ouest. Pour Vladimir, cela mit un terme à une adolescence dorée, à une vie de dandy esthète, grand séducteur à la silhouette mince, au visage délicat et au grand front d’intellectuel, à la carrière de meilleur écrivain de l'avant-guerre. Tandis que le reste de la famille s’établit à Berlin, dans une communauté vibrante et cultivée d’un demi-million de compatriotes, les deux fils aînés partirent à Cambridge, où ils firent des études de lettres à Trinity College. Vladimir s’intéressa surtout aux littératures russe et française, car il voulait, même en exil, devenir un écrivain russe et désirait conserver tout ce qui lui restait de son pays, la langue. À Berlin, son père, étant resté politiquement actif, dirigea avec Hessen le principal journal de l’émigration, “Roul” (“Le gouvernail” où Vladimir publiait des poèmes nourris de ses liaisons amoureuses, et des problèmes d’échecs), et, en 1922, lors d’une assemblée politique d’émigrés russes démocrates, alors qu'il voulait protéger par son propre corps un de ses amis, fut atteint par les balles de deux membres d’un parti d’extrême droite. Sa femme, qui pouvait prétendre à une pension du gouvernement tchèque, se réfugia alors, avec ses filles et son fils cadet, à Prague où elle mourut. En 1922, sa licence obtenue, Vladimir Nabokov s'installa à Berlin où il se maria à Vera Evséievna Slónim, fille d´un entrepreneur de Saint-Pétersbourg devenu éditeur à Berlin, et elle-même écrivaine et traductrice. Elle fut une compagne de tous les instants et une collaboratrice précieuse. Marginal sans ressources, il vécut, comme de nombreux immigrés russes, de traductions et de petites activités, entre autres celle de professeur de tennis. Il écrivit en russe et dispersa dans les revues de l’émigration des traductions du français ou de l'anglais (“Alice au pays des merveilles”), des articles de critique littéraire, des poèmes, des nouvelles et neuf romans : _________________________________________________________________________________ “La Vénitienne” (1928) Recueil de quinze nouvelles --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- 2 “La Vénitienne” Nouvelle Lorsque Simpson, jeune étudiant de Cambridge amateur de peinture, voit, dans un château anglais, “La jeune Romaire dite Dorothée”, portrait d’une Vénitienne peint par Sebastiano del Piombo, il est fasciné et tombe éperdument amoureux d’elle. Il ne peut s'empêcher de revenir le contempler jour après jour, jusqu'à ce qu'il pénètre dans la toile et y est retrouvé endormi. Commentaire Cette nouvelle, habilement construite, raconte une étrange histoire qui est le reflet d’une tradtion fantastique assez classique, wildienne. Elle abonde en personnages pusillanimes et timorés, fats et prétentieux. Nabokov installa déjà les trompe-l'oeil et les pièges de son oeuvre future. --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- “La vengeance” Nouvelle Un mari choisit de se venger de sa femme infidèle en glissant dans son lit les cliquetants ossements d'un squelette de nain mal remonté. Commentaire Ce vaudeville miniature est une de ces nouvelles acides où apparaît le cynisme et l’ironie mordante de Nabokov. Les personnages, habités par une haine froide, obstinée, cherchent à régler sadiquement des comptes avec leur passé ou avec un présent qui n’a plus d’intérêt. --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- “Le rasoir” Nouvelle Commentaire C’est une de ces nouvelles acides où apparaît le cynisme et l’ironie mordante de Nabokov. Les personnages, habités par une haine froide, obstinée, cherchent à régler sadiquement des comptes avec leur passé ou un présent qui n’a plus d’intérêt. --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- “Un coup d’aile” Nouvelle Dans une station de sports d’hiver suisse, Kern, un étudiant myope hanté par la mort, qui s’y est réfugié avec l’intention d’en finir («À midi, il se tirerait une balle, et un individu qui a décidé de se suicider est un dieu»), éprouve une passion impossible pour l'insaisissable Isabelle, diva photogénique, déesse sculpturale glissant sur des skis. D’un coup d'aile, il voit sa vie comme une suite mouvante de paravents multicolores. 3 Commentaire Rédigée en rassemblant les souvenirs d'un voyage à Zermatt en décembre 1921, la nouvelle est une histoire de passion romantique où un badinage fiévreux enveloppe le lecteur et l'enrobe à la manière d'un alcool doux et sucré qui brouille le paysage et ne laisse palpiter que les grands courants mystérieux du désir, du regret, du souvenir. Mais Nabokov évita le cliché par un zeste de fantastique, une touche de surréalisme (un ange jaloux traverse une baie vitrée et se glisse dans la chambre, mais il se prend les pieds dans un tapis) et par une fin d'un burlesque froid (la jeune femme s'envole en plein ciel, skis aux pieds pour s'écraser au loin dans les pins). Un sentiment d'enchantement enfantin traverse la nouvelle. --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- “Bonté” Nouvelle C’est une série de croquis animés des rues berlinoises. --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- “Les dieux” Nouvelle C’est une rafale d'images radieuses, où les platanes et les poules dansent comme dans un tableau de Chagall. --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- “Le lutin” Nouvelle Un lutin, un esprit des forêts russes, vient rendre visite au narrateur dans son pays d'adoption et remuer sa nostalgie. Commentaire La nouvelle s’inspire du folklore. --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- “On parle russe” Nouvelle Le propriétaire russe d’un débit de tabac à Berlin décide d’«emprisonner à vie», dans sa salle de bain, un agent du Guépéou. --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- “Bruits’’ (1923) Nouvelle En Russie, le jeune Kern vit une liaison. 4 Commentaire Cette nouvelle, la plus belle du recueil, est une histoire de passion romantique qui évite le cliché par l’expression d’un désir contrarié et ambivalent : «Il m’était doux de te perdre» annonce le narrateur qui, ailleurs, affirme : «J'ai été autrefois disloqué en milliers d'êtres et d'objets, maintenant je suis rassemblé en un tout, demain je me disloquerai de nouveau. Et tout dans le monde s'écroule ainsi.» Nabokov rendit toute sa relation sensuelle avec la nature et la Russie : un village au printemps, ses quelques maisons noyées de soleil, des odeurs de copeaux de pin, un menuisier instituteur qui rêvasse parmi ses planches de bois rabotées. Tout son lien secret avec son enfance revient par bouffées de mots, de sensations, d'une finesse de cristal. Cette nouvelle, longtemps restée inédite, fut retrouvée dans les archives de Nabokov à Montreux. Tout son univers était déjà en place, et son style, d'une grande précision, était déjà formé. --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Le pays perdu est immortalisé sur une carte bleuâtre et les pages d'un chapitre d'”Anna Karénine”. --------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Commentaire sur le recueil Il réunit les premiers textes de prose de Nabokov écrits en anglais mais également des nouvelles russes restées inédites ou bien n'ayant pas refait surface depuis leur publication au début des années vingt, dans différents journaux émigrés de Berlin. Dans ces nouvelles flotte un air de nostalgie et haute poésie, et comme la prémonition que le rire et le lyrisme désenchanté sont les grandes figures de style d'une littérature de l'exil. Les protagonistes sont pour la plupart des artistes et des jeunes expatriés, partagés entre plusieurs lieux de résidence, Berlin, l'Angleterre, Zermatt, un port du sud de la France ou bien les anciens domaines d'une enfance russe. Dans celles écrites à Cambridge et à Berlin au début des années vingt, l’exilé exprimait sa nostalgie de son pays. Nabokov partait en quête d’un trésor de sensations inépuisable mais qui était menacé et uploads/Litterature/ 219-nabokov 1 .pdf

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