Le vocabulaire de Paul Ricœur Olivier Abel Professeur de philosophie à la Facul

Le vocabulaire de Paul Ricœur Olivier Abel Professeur de philosophie à la Faculté de théologie protestante de Paris Jérôme Porée Docteur en philosophie Professeur des Universités Dans la collection Vocabulaire de ... Arendt, par A. Amiel • Aristote, par P Pellegrin • Bachelard, par J.-Cl. Pariente· Bacon, par Th. Gontier· Bentham, par J.-P. Cléro et Ch. Laval· Bergson, par F. Wonns • Berkeley, par Ph. Hamou • Bourdieu, par Ch. Chauviré et O. Fontaine· Comte, par J. Grange· Condillac, par A. Bertrand· Deleuze, par F. Zourabichvilli • Derrida, par Ch. Ramond· Descartes, par F. de Buzon et D. Kambouchner· Diderot, par A. Ibrahim· Duns Scot, par Ch. Cervellon • Épicure, par J.-F. Balaudé • Fichte, par B. Bourgeois· Foucault, par J. Revel • Frege, par A. Benmakhlouf· Freud, par P.-L. Assoun· Girard, par Ch. Ramond • Goodman, par P.-A. Huglo • Habermas, par Ch. Bouchindhomme • Hayek, par L. Francatel-Prost· Hegel, par B. Bourgeois· Heidegger, par J.-M. Vaysse· Hobbes, par J. Terrel • Hume, par Ph. Saltel • Husserl, par J. English • Jung, par A. Agnel (coord.) • Kant, par J.-M. Vaysse· Kierkegaard, par H. Politis· Lacan, par J.-P. Cléro • Leibniz, par M. de Gaudemar • L'école de Francfort, par Y. Cusset et S. Haber· Lévinas, par R. Calin et F.-D. Sebbah • Lévi-Strauss, par P. Maniglier· Locke, par M. Parmentier· Machiavel, par Th. Ménissier· Maine de Biran, par P. Montebello· MaÎtre Eckhart, par G. Jarczyk et P.-J. Labarrière • Malebranche, par Ph. Desoche • Malraux, par J.-P. Zarader • Marx, par E. Renault· Merleau- Pont y, par P. Dupond· Montaigne, par P. Magnard· Montesquieu, par c. Spector • Nietzsche, par P. Wotling • Ockham, par Ch. Grellard et K. S. Ong-Van-Cung • Pascal, par P Magnard· Plotan, par L. Brisson et J.-F. Pradeau • Plotin, par A. Pigler • Présocratiques, par 1.-F. Balaudé • Quine, par J. G. Rossi· Ravaisson, par J.-M. Le Lannou· Rousseau, par A. Charrak • Russell, par A. Benmakhlouf • Saint Augustin, par Ch. Nadeau • Saint Simon, par P. Musso· Saint Thomas d'Aquin, par M. Nodé-Langlois • Sartre, par Ph. Cabestan et A. Tomes· Sceptiques, par E. Naya • Schelling, par P. David· Schopenhauer, par A. Roger· Spinoza, par Ch. Ramond· Stoïciens, par V Laurand· Suarez, par J.-P Coujou· Tocqueville, par A. Amiel· Valéry, par M. Philippon • Vico, par P. Girard· Voltaire, par G. Waterlot· Wittgenstein, par Ch. Chauviré et 1. Sackur Bouddhisme, par S. Arguillère· La sociologie de l'action, par A. Ogien et L. Queré ISBN 978-2-7298-3247-6 © Ellipses Édition Marketing S.A., 2007 - www.editions-ellipses.fr 32, rue Bargue 75740 Paris cedex 15 Le Code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L.122-S.2° et 3°a), d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective », et d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, «toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite» (Art. L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit constituerait une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. Rarement auteur s'est autant appuyé sur la langue telle qu'elle est. Ricœur ne s'est pas créé une langue propre, et il a peu forgé de mots nouveaux. Pourquoi forcer les mots à jouer? Quand on les laisse ils jouent tellement plus, et tellement mieux! Mais Ricœur a observé et discerné des usages déjà là, qu'il a soigneusement cherché à mettre en ordre. Ces trésors du langage ordinaire font pour lui partie de notre pré- compréhension des questions, et plutôt que croire pouvoir en faire table rase en commençant par des définitions pures, il vaut toujours mieux partir de ces sources non-philosophiques de la philosophie. La réflexion est seconde. Comme Ricœur dit, « nous survenons au beau milieu d'une conversation qui est déjà commencée et dans laquelle nous essayons de nous orienter afin de pouvoir à notre tour y apporter notre contri- bution ». Quelle est donc cette contribution? Interpréter, n'est-ce que démêler la polysémie des notions? On trouve des chapitres entiers consacrés à ce démêlage, sur la représentance, ou sur la ressemblance par exemple, et un livre explore le seul champ sémantique du mot reconnaissance. Et lire, n'est-ce qu'adopter le vocabulaire d'autrui et lui faire crédit au point de plier notre discours à épouser le sien, à le reconstruire de l'intérieur ? Certains des livres de Ricœur sont comme une mise en dialogue de fiches de lectures successives, alors où se tient Ricœur? C'est qu'en défaisant et en refaisant patiemment le champ conceptuel d'un terme ou la syntaxe d'un discours, il ne cesse d'en chercher à chaque fois les articulations in- ternes, les limites ou les impasses. Où l'éthique cède-t-elle la place à la - 3 morale? Comment l'histoire et la mémoire interfèrent-elles? Ces questions prosaïques de mots, de sens des mots que nous employons, sont les grandes questions de la philosophie de Ricœur, sa manière de reconstruire autrement les champs notionnels. Or en creusant certaines apories, en approfondissant certains paradoxes, il arrive qu'il opère des retournements ou des déplacements de sens, qui rapprochent des concepts éloignés, au point d'en faire des « métaphores vives». Celles-ci font sentir et comprendre les choses autrement. Mais ce ne sont pas des échappées ou des saillies sans règle: c'est au contraire la rigueur des règles discernées qui fait ressortir et mesurer ces paradoxes et ces écarts avec le sens ordinaire des termes. Ricœur nous offre alors des formules qui sont de véritables trouvailles, qui montrent là où il se tient, et expriment son engagement bien plus qu'une quelconque synthèse. Il invente des concepts inachevés mais astucieux, qui font bien voir ce qu'ils laissent, leurs résidus de perplexité. Si l'on peut ainsi résumer en trois alinéas la démarche de Ricœur, heu- reusement ou malheureusement, un vocabulaire de Ricœur doit quand même tenir compte de la complexité et de la difficulté de ses textes, d'autant plus sensible ici que nous avons tenté chaque fois que possible de les laisser parler par eux-mêmes. Leur complexité réside dans le fait qu'il tient scrupuleusement compte des lexiques spécialisés de chacun des thèmes qu'il traite, comme s'il s'adressait chaque fois à ceux qui ont le plus fait progresser la recherche. En outre les mêmes thèmes peuvent avoir été abordés diversement par la philosophie analytique anglo-saxonne et par l'analyse structurale, par exemple, ce qui le conduit à des montages conceptuels délicats. Lui- même d'ailleurs a varié les méthodes, et donc les vocabulaires il a greffé une démarche herméneutique sur la phénoménologie, et largement in- fléchi ensuite l'herméneutique vers la poétique de la métaphore ou du récit. Tout cela donne un résultat complexe, même si chaque élément pris isolément est assez facile. Cependant Ricœur est par ailleurs souvent difficile, même là où il est le plus simple. C'est qu'il va chercher des chemins ardus et inusités, y engage quelque chose d'existentiel, à la limite du témoignage en première personne, honore des conflits insolubles, s'attarde dans ce que l'on croit des impasses, et oblige son lecteur à soutenir la tension de rappro- chements ou de distanciations inhabituels. À tout cela le lecteur parfois rechigne. Mais c'est dans ces parages justement qu'il trouve parfois des formules qui « donnent à penser» et placent «le langage en état d'émergence ». Et c'est là que l'on prend pleinement la mesure de l'ampleur éthique, au sens spinoziste, de l'ensemble de la démarche de Ricœur. Cette respectueuse docilité à la complexité des vocabulaires et à leurs interférences, d'une part, ce courage difficile de confronter des mondes de langage que tout éloigne, d'autre part, nous font entrevoir ici ce que peut être la langue si vivante de Ricœur - sur un échantillon arbitraire mais que nous espérons néanmoins représentatif. Cette double qualité explique son importance pour la mémoire philosophique. On se souviendra longtemps de l'ordre et du désordre qu'il a mis dans les mots. Affirmation « L'être a-t-il la priorité sur le néant au cœur de l'homme? » C'est ce dont fait douter parfois celui-ci par son singulier « pouvoir de négation» (RY, poche 378). Mais la négation, sous ses multiples aspects - refus, recul, limitation, doute, crainte, angoisse - « n'est jamais que l'envers d'une affirmation plus originaire» (ibid., 394) qu'expriment en chacun la transitivité du désir et la continuité de l'effort pour exister. D'une telle affirmation, il n'existe, certes, nulle preuve objective. Mais elle est attestée par notre capacité d'affronter les situations les plus désespérées. Et elle est ressentie dans toutes les autres comme la simple « joie d'exister» (HF, 153) - une joie qu'il faut donc dire elle-même « plus originaire que toute angoisse qui se croirait originaire» CRY, poche 358) et plus riche de promesses que celle-ci ne l'est d'assurances relatives à notre finitude. Le primat de l'affirmation - d'une affirmation tenue pour l'être même de l'homme - est reçu explicitement de Nabert, qui prend soin d'ailleurs, uploads/Litterature/ abel-olivier-le-vocabulaire-de-paul-ricoeur.pdf

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