Analyse linéaire d’un extrait du chap. 15 de Gargantua de François Rabelais. In

Analyse linéaire d’un extrait du chap. 15 de Gargantua de François Rabelais. Introduction : Après l’échec de l’éducation menée par les précepteurs sophistes qu’on appelle aussi sorbonnards (Tubal, Holophène et maître Jobelin Bridé). Gargantua va poursuivre ses études à Paris sous l’égit de Ponocratès. Confronté au harcèlement de la part des habitants de la capitale qui sont étonnés par son gigantisme le héros se réfugie sur les tours de Notre-Dame. -LECTURE-. Nous verrons en quoi cet épisode carnavalesque ridiculise les habitants de Paris ? Nous distinguerons 3 mouvements : 1er, l.1 à 7 : étonnement, curiosité des habitant s. 2ème, l.8 à 13 : « le cadeau de bienvenu », la farce du géant. 3ème, l.14 à 20 : étymologie fantaisiste. 1 er MOUVEMENT Le gigantisme du héros est d’emblée mis en relief à travers l’expression hyperbolique » tout le monde l’admira ». Gargantua attire les regards des badauds en raison de son apparence singulière. L’étonnement des parisiens est tournée en dérision à travers une énumération de termes dépréciatifs appuyés par la répartition de l’adverbe intensif « si », « si sot, si badaud, si inepte ». Ces termes redondants mettent en exergue (relief) la bêtise innée du peuple de Paris. L’usage du lexique du spectacle permet au narrateur de décrédibiliser la foule « un bateleur, un porteur de reliques, un mulet avec ses cymbales, un joueur de vielle. ». Tout ces plaisantins appartenant à l’univers de la foire s’opposent « au bon prêcheur évangélique ». Rabelais révèle également ici le conflit entre 2 conceptions religieuse : la 1ère, au centre de laquelle se trouve « le porteur de reliques », référence à la sorbonne et au superstitions religieuses ; la 2nd, faite de justes prédications. Après ce rapide commentaire introduit, le narrateur reprend son récit : à cause du harcèlement des sauts dont les effets néfastes sont soulignés par l’usage de l’intensif « si » « de façon si importune », Gargantua se réfugie sur les tours de Notre Dame. Par représailles, il prépare une farce pour réprimander les curieux qui s’agglutinent autour de lui. Le narrateur singularise le héros seul contre tous par l’opposition et du pluriel (« il », Gargantua « tout seul » oppose « tant de gens autour de lui »). L’introduction du discours direct ( : « », verbe de parole : dit ) dynamise le récit, tant à faire entendre la justification de la victime contre les poursuites incessantes des curieux dont la grossièreté est soulignée par le terme dépréciatif « maroufles ». Le mauvais accueil et l’humiliation entrainent la vengeance du héros. Si Gargantua semble se ranger du côté de la raison tournure impersonnelle « c’est juste ». La dernière phrase introduit la farce avec la mention faite au rire associé au motif du vin : « je vais leur donner un pourboire mais ce sera par ris » 2 ème MOUVEMENT : Au harcèlement des parisiens s’oppose le sourire du géant ce qui atténue la cruauté du « châtiment » imposé. C’est en effet en faisant une farce que le géant se libère du joug de ses oppresseurs ? Cet épisode traduit le goût Rabelaisiens pour la scatologie avec l’hyperbole « sa belle braguette », l’image du « membre » de Gargantua donc le sexe et le vocabulaire grossier de l’urine « compissa et pisse ». Il s’agit ici d’une parodie d’un épisode épique dans lequel le flot d’urine remplace le flot de sang propre au combat (roman chevalier). L’hyperbole est de mise avec la marque de l’intensif « si énergiquement » et l’exagération du nombre de victime : 260 418. A cette image relevant du burlesque se superpose la parodie d’un épisode biblique qui est l’épisode du déluge. L’intertextualité biblique « sans compter les femmes et les enfants » et sa reprise explicite d’une expression récurrente que l’on retrouve dans l’Evangile selon St Matthieu « excepté les femmes et les petits enfants ». Le narrateur oppose le nombre de victime à celui des rescapés dont il souligne la fuite par le biais d’une périphrase « grâce à la légèreté de leur pied. La scène se passant au sein du quartier latin les fuyards se réfugient à la Sorbonne comme le souligne le complément circonstanciel de lieu « au plus haut de la montagne de de l’université ». S’en suit la caricature de ces hommes « suants, toussant, crachant et hors d’haleine ». L’accumulation des participes présent entretient la satire des premiers précepteurs de Gargantua (H et T) qualifiés de « vieux tousseux » au chapitre 14. La toux et les crachats de ces hommes ont une portée symbolique. Non seulement ces derniers ne profèrent que des paroles intelligibles mais leurs pensées s’apparentent également à un mal dont il convient de s’en débarrasser. A l’instar des soldats de Picrochole dans le chapitre 27, les soldats implorent des Saints inconnus au nom fantaisiste comme « Sainte Mamie » ou profèrent des formules magiques empruntées à la farce du maître Patelin : « carimari, carimara ». Ceci confère une dimension comique à ce passage. 3 ème MOUVEMENT : A nouveau le récit laisse place au commentaire explicatif comme le souligne la tournure « voilà pourquoi ». Le narrateur parsème son explication de références farfelues. Selon lui, le nom de la ville de Paris viendrait de la parole des fuyards « arrosé par ris ». Ce calembour évidemment grotesque laisse transparaître la jouissance verbale de l’écrivain et fait penser aux « propos » des biens ivres du chapitre 5, qui multipliaient les jeux de mots. On peut également penser à l’étymologie de la plaine de la Beauce dans le chapitre précédent. Néanmoins, le narrateur adopte un point sérieux, il s’appuie sur un argument d’autorité pour donner l’illusion que cette étymologie est vraisemblable. Selon lui auparavant la ville se nommait Lutèce « comme le dit Strabon » au livre 4 c’est-à-dire blanchette à cause des blanches cuisses des dames du lieu or, si Strabon a véritablement existé (géographe grec du 1er siècle), il n’a jamais donné une étymologie si fantaisiste dans son ouvrage. Le seul fait exact est qu’en grec le mot « leucoce » veut dire blanc. La collision entre la référence à une autorité reconnue et l’interprétation fantaisiste du narrateur relève de l’héroïcomique. L’imagination du narrateur culmine en fin de phrase avec l’allusion héroïcomique des cuisses blanches des parisiennes. La seconde explication se veut tout aussi fantaisiste, selon le narrateur le nom « parisien » tirerait son origine du grec « parrhésien » qui signifie « hardie ne parole ». Rabelais pointe ici du doigt la prétention des habitants de Paris et leur insolence. Le commentateur évoque ici l’autorité de Johaninous de Barranco, auteur inventé par Rabelais. Cette étymologie se range du côté de la satire puisque non seulement les parisiens parlent trop, mais qu’ils sont également impies « ils jurèrent chacun au sein de leur paroisse ». La paronomase (polyptote) « bon jureur et bon juriste » tend à confondre deux univers : celui du blasphème avec le jureur et celui du droit parachevant ainsi la satire des habitants de la capitale. Conclusion : Le rire occupe ainsi une fonction très importante tout au long du passage. L’épisode incarne une vision comique du déluge à travers un géant qui, pour se venger vide sa vessie et noie des gens. Rabelais l’indique dans son adresse aux lecteurs : il vaut mieux écrire du rire que des termes parce que le rire est le propre de l’ironie. uploads/Litterature/ analyse-lineaire-2-gargantua-rabelais-chap-15.pdf

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