Texte A : Une affiche d’huissier annonce que la maison des Bovary sera mise en

Texte A : Une affiche d’huissier annonce que la maison des Bovary sera mise en vente suite à des dettes non payées ; Emma Bovary, seule responsable de cette situation, panique à l’idée que son mari apprenne cette terrible nouvelle et cherche une solution pour trouver très rapidement l’argent nécessaire. Elle se rend chez un riche voisin, Rodolphe Boulanger, qui a été son amant. Elle se demandait tout en marchant : «Que vais-je dire ? Par où commencerai-je ?» Et à mesure qu’elle avançait, elle reconnaissait les buissons, les arbres, les joncs marins sur la colline, le château là-bas. Elle se retrouvait dans les sensations de sa première tendresse, et son pauvre cœur comprimé s’y dilatait amoureusement. Un vent tiède lui soufflait au visage ; la neige, se fondant, tombait goutte à goutte des bourgeons sur l’herbe. Elle entra, comme autrefois, par la petite porte du parc, puis arriva à la cour d’honneur, que bordait un double rang de tilleuls touffus. Ils balançaient, en sifflant, leurs longues branches. Les chiens au chenil aboyèrent tous, et l’éclat de leurs voix retentissait sans qu’il parût personne. Elle monta le large escalier droit, à balustres de bois, qui conduisait au corridor pavé de dalles poudreuses où s’ouvraient plusieurs chambres à la file, comme dans les monastères ou les auberges. La sienne était au bout, tout au fond, à gauche. Quand elle vint à poser les doigts sur la serrure, ses forces subitement l’abandonnèrent. Elle avait peur qu’il ne fût pas là, le souhaitait presque, et c’était pourtant son seul espoir, la dernière chance de salut. Elle se recueillit une minute, et, retrempant son courage au sentiment de la nécessité présente, elle entra. Il était devant le feu, les deux pieds sur le chambranle, en train de fumer une pipe. G. Flaubert Madame Bovary, chap. VIII - 3ème partie 1857 Texte B : Incipit du roman Aujourd’hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. J’ai reçu un télégramme de l’asile : "Mère décédée. Enterrement demain. Sentiments distingués." Cela ne veut rien dire. C’était peut-être hier. L’asile de vieillards est à Marengo, à quatre-vingts kilomètres d’ Alger. Je prendrai l’autobus à deux heures et j’arriverai dans l’après-midi. Ainsi, je pourrai veiller et je rentrerai demain soir. J’ai demandé deux jours de congé à mon patron et il ne pouvait pas me les refuser avec une excuse pareille. Mais il n’avait pas l’air content. Je lui ai même dit : "Ce n’est pas de ma faute." Il n’a pas répondu. J’ai pensé alors que je n’aurais pas dû lui dire cela. En somme, je n’avais pas à m’excuser. C’était plutôt à lui de me présenter ses condoléances. Mais il le fera sans doute après-demain, quand il me verra en deuil. Pour le moment, c’est un peu comme si maman n’était pas morte. Après l’enterrement, au contraire, ce sera une affaire classée et tout aura revêtu une allure plus officielle. J’ai pris l’autobus à deux heures. Il faisait très chaud. J’ai mangé au restaurant, chez Céleste, comme d’habitude. Ils avaient tous beaucoup de peine pour moi et Céleste m’a dit : "On n’a qu’une mère." Quand je suis parti, ils m’ont accompagné à la porte. J’étais un peu étourdi parce qu’il a fallu que je monte chez Emmanuel pour lui emprunter une cravate noire et un brassard. Il a perdu son oncle, il y a quelques mois. J’ai couru pour ne pas manquer le départ. Cette hâte, cette course, c’est à cause de tout cela sans doute, ajouté aux cahots, à l’odeur d’essence, à la réverbération de la route et du ciel, que je me suis assoupi. J’ai dormi pendant presque tout le trajet. Et quand je me suis réveillé, j’étais tassé contre un militaire qui m’a souri et qui m’a demandé si je venais de loin. J’ai dit "oui" pour n’avoir plus à parler. A. Camus, L'Étranger 1942 Texte C : Je ne sais pas si je suis en train de me transformer en gangster, en légende, en simple rock star. Il y a cette paire de lunettes piochées dans le sac de Charlotte, j'en suis tombé raide dingue de cette paire de grosses lunettes de soleil de marque Carl Zeiss, je ne sais pas si c'est une marque célèbre, peut-être une sous-marque de station service. Ca fait deux jours que je dors avec. Je picole dès le petit déjeuner et je ne tiens pas à m'en vanter. Comme un étudiant vaseux vous saoûlerait de vieilles théories vaseuses sur le monde tel qu'il ne tourne pas rond, l'époque telle qu'elle se débine en tous sens. Je ne rends pas les armes, je ne cherche pas à jouir, à m'habiller, à vous trahir. De la puissance esthétique qu'impose un tel état. Je pourrais profiter, je pourrais en jouer, je pourrais en faire une religion. Johannes l'autre jour me disait, toi Lionel, je te verrais bien en gourou. Les gens fondent à tes pieds. Tu devrais recréer un monde et nous le jeter à la face et il nous apparaîtrait beau. En tout cas, il serait différent. Alors on serait attirés. Tu aurais des adhérents. Je suis sérieux. Ton avenir à toi, tout tracé, Lionel. Tu as ce pouvoir de séduction. Tu ne te rends pas compte à quel point tu fascines. Tu n'imagines même pas ce que tu représentes pour nous. Pour Charlotte et moi, pour Jules, pour Laura cela va sans dire, et puis alors pour Diane... Lionel tu as un truc. Attends un peu, Tout va te tomber sur le nez, Lionel, Tu vas tout récolter. Je passe la journée à tracer dans le champ, les filles se sont barrées on ne sait pas où, Johannes pète des câbles et moi je m'en fous. Moi j'enchaîne les tours de champ. Mes lunettes de soleil. Moi j'écoute du rap. Mais le rock'n'roll me va si bien. Je suis dans le Jura. Mais je suis la classe mondiale. Et vous vous moquez de moi et je vous comprends. Polichinelle, Pierric Bailly, P.O.L 2008 Texte D : La narratrice se souvient du moment où, jeune fille, elle a été renversée par un équipage à la sortie d’une messe ; elle s’était engagée sur la voie sans prendre garde tant elle avait été émue par l’effet que lui avait fait un jeune homme aperçu dans l’église. Or, le même jeune homme propose au cocher que l’on transporte la blessée dans sa demeure qui est toute proche. De mon côté, je parlai aux autres, et ne lui dis rien non plus: je n'osais même le regarder, ce qui faisait que j'en mourais d'envie: aussi le regardais-je, toujours en n’osant, et je ne sais ce que mes yeux lui dirent; mais les siens me firent une réponse si tendre qu'il fallait que les miens l'eussent méritée. Cela me fit rougir, et me remua le coeur à un point qu'à peine m' aperçus-je de ce que je devenais. Je n'ai de ma vie été si agitée. Je ne saurais vous définir ce que je sentais. C'était un mélange de trouble, de plaisir et de peur; oui, de peur, car une jeune fille qui est là-dessus à son apprentissage de sait point où tout cela la mène; ce sont des mouvements inconnus qui l'enveloppent, qui disposent d'elle, qu'elle ne possède point, qui la possèdent, et la nouveauté de cet état l'alarme. Il est vrai qu'elle y trouve du plaisir; mais c'est un plaisir fait comme un danger, sa pudeur même en est effrayée; il y a quelque chose qui la menace, qui l'étourdit, et qui prend déjà sur elle. On se demanderait volontiers dans ces instants là: que vais-je devenir? Car, en vérité, l'amour ne nous trompe point : dès qu'il se montre, il nous dit ce qu'il est, et de quoi il sera question : l'âme, avec lui sent la présence d'un maître qui la flatte, mais avec une autorité déclarée qui ne la consulte pas, et qui lui laisse hardiment les soupçons de son esclavage futur. Voilà ce qui m'a semblé de l'état où j'étais, et je pense aussi que c'est l'histoire de toutes les jeunes personnes de mon âge en pareil cas. Marivaux, La Vie de Marianne , deuxième partie (1731-1741) Question : Dans les extraits choisis, comment le personnage se dessine-t-il entre récit et éléments d’analyse ? Dans les extraits choisis, comment le personnage se dessine-t-il entre récit et éléments d’analyse ? Les quatre textes sont extraits de romans montrant l’évolution de ce genre, du XVIIIème au XXIème siècle. Chaque passage présente le héros à un moment particulier de son histoire et il s’agit de déterminer comment ces personnages nous sont révélés, tant à travers leurs actions constitutives du récit, qu’à travers les éléments psychologiques indiqués en commentaires. Si on isole le texte de Flaubert, comme étant le seul où e récit est pris en charge par un narrateur omniscient, nous observons que dans les trois autres textes, narration et commentaire introspectif se font à la première personne. Du point de vue de l’action, l’extrait de uploads/Litterature/ bac-blanc-g 1 .pdf

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