Chateaubriand et Madame de Custine, by E. Chédieu de Robethon and François-René

Chateaubriand et Madame de Custine, by E. Chédieu de Robethon and François-René de Chateaubriand and Marquise de Custine This eBook is for the use of anyone anywhere at no cost and with almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included with this eBook or online at www.gutenberg.org Title: Chateaubriand et Madame de Custine Episodes et correspondance inédite Author: E. Chédieu de Robethon François-René de Chateaubriand Marquise de Custine Release Date: August 24, 2007 [EBook #22384] Language: French Character set encoding: ISO-8859-1 *** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK CHATEAUBRIAND ET MADAME DE CUSTINE *** Produced by Mireille Harmelin, Eric Vautier and the Online Distributed Proofreaders Europe at http://dp.rastko.net. This file was produced from images generously made available by the Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica) CHATEAUBRIAND ET MADAME DE CUSTINE ÉPISODES ET CORRESPONDANCE INÉDITE PAR É. CHÉDIEU DE ROBETHON PARIS LIBRAIRIE PLON 1893 INTRODUCTION. En publiant, dans ce volume, les lettres inédites dont l'ensemble constitue la correspondance de Chateaubriand avec Madame la marquise de Custine, nous nous sommes proposé d'éclairer d'un jour nouveau la période très accidentée et très intéressante de leurs relations et de leur vie intime, qui embrasse près de vingt années, et s'étend même au delà, jusqu'à la mort de Madame de Custine en 1826. Cette période a fait surgir beaucoup de récits divers et d'appréciations très inexactes, où le caractère de Chateaubriand est devenu l'objet des censures les plus sévères et les moins justifiées. T rompés par des documents incomplets et tronqués, entraînés par l'esprit de parti ou par une animosité personnelle, la plupart des écrivains ont chargé son portrait des plus sombres couleurs; ils ont fait de Madame de Custine une victime de l'inconstance et d'un lâche abandon, et de Chateaubriand un froid adorateur, sans scrupule, sans remords et sans pitié. T out cela n'est pas exact. Et pourtant ces lettres inédites, destinées à faire la lumière et à rétablir la vérité, ces lettres qui empruntent une grande valeur au nom et à la célébrité de leur auteur, nous avons un instant hésité à les publier. Nous nous disions qu'elles n'ont point été destinées par Chateaubriand à la publicité, et que, toujours épris de la beauté de la forme et de la grandeur du style, il se serait refusé sans doute à placer à côté de ses autres oeuvres des pages familières et sans apprêt. Il nous semblait aussi que par un sentiment de discrétion et d'honneur dont il ne s'est jamais départi, il se serait gardé de mettre en scène une femme qu'il avait aimée. Il a toujours respecté le mystère des passions qu'il a inspirées, et si ce mystère a été quelquefois dévoilé, c'est par celles mêmes qui auraient eu le plus d'intérêt à s'en couvrir. Ne vaudrait-il pas mieux respecter sur ce point la volonté non pas certaine mais très probable de Chateaubriand, que de livrer en pâture à la curiosité publique les sentiments intimes d'une femme dont le nom n'appartient à l'histoire que par un acte de dévouement héroïque et de grand courage, et de rappeler sans nécessité l'attention sur des faiblesses auxquelles la gloire et l'amour d'un homme de génie peuvent servir d'excuse? Mais une considération domine toutes les autres: si la vie de Chateaubriand et de Madame de Custine a été présentée sous de fausses couleurs, et si nous possédons des documents qui les rectifient, nous devons les produire. La vie de Madame de Custine est, depuis longtemps, exposée au grand jour dans des oeuvres nombreuses et brillantes. La publication que nous allons faire ne saurait donc nuire à sa mémoire; tandis qu'elle disculpe Chateaubriand. Et qui sait si, en les faisant mieux connaître, elle ne les fera pas aimer tous les deux davantage? Cependant, ces quarante lettres inédites que Madame de Custine nous a conservées elle-même, seraient presque inintelligibles si on les détachait du cadre où elles se sont produites. Il fallait donc rappeler quelques- uns des antécédents de leur auteur, l'épisode de son mariage, par exemple, où la vérité a besoin d'être rétablie et dégagée des fables dont on l'entoure. Il fallait aussi mettre en scène, sans s'écarter du sujet principal, quelques-uns des personnages qui se trouvent mêlés, à des titres divers, aux relations de Chateaubriand et de Madame de Custine, comme Madame de Beaumont, M. Bertin, le duc d'Otrante, malheureusement aussi Astolphe de Custine, et d'autres encore. T el est le cadre que nous nous sommes tracé. Il est restreint, mais il suffit. Comme dit le poète: humanos mores nosce volenti sufficit una domus. CHAPITRE PREMIER. Le portrait et la légende.--Deux camps opposés.--Le mariage de Chateaubriand.--L'émigration.--Le salon de Madame de Beaumont.--Le Génie du christianisme.-- Voyage en Bretagne. Ce n'est pas seulement par les oeuvres littéraires qu'ils livrent au public et qu'ils composent en vue de la postérité qu'il faut juger les grands écrivains. Sans doute leurs oeuvres capitales, celles dont la célébrité retentit à travers les siècles, suffisent pour faire apprécier la nature de leur talent, pour mettre en relief les qualités maîtresses de leur génie, et les classer dans l'une ou l'autre des sphères de l'intelligence, suivant que l'imagination ou le raisonnement prédomine en eux, et en fait des poètes ou des philosophes, des hommes d'État, des orateurs ou des historiens. On connaît d'eux, par leurs livres, l'homme public, au plus haut degré de puissance où ses qualités spéciales ont pu l'élever, mais son caractère, les tendances particulières de son esprit, sa nature intime, l'homme privé, en un mot, ne nous sont entièrement révélés que par les plus secrets détails de sa biographie, par sa correspondance, surtout par celle qu'il n'a point écrite pour le public. Et cette étude de l'homme intérieur n'est pas un travail de pure curiosité: combien d'erreurs ce genre de recherches ne rectifient-elles pas? Ne sont-elles pas indispensables pour bien comprendre un écrivain dans ses oeuvres, même les plus élevées? Comment fera-t-on disparaître, par exemple, si ce n'est par ces documents intimes, ce qu'il y a de contradictoire et d'inconciliable entre le portrait généralement adopté et qui devient légendaire d'un Chateaubriand dur, morose, fantasque, égoïste, et ses oeuvres empreintes d'une sensibilité si vive et de sentiments si élevés? Ceux de ses amis qui l'ont le mieux connu nous le peignent, au contraire, doué des qualités les plus charmantes, la cordialité et l'enjouement, d'une constance inaltérable dans ses engagements, d'une générosité habituellement prodigue jusqu'à l'excès, et personne plus que lui n'aurait eu le droit d'écrire, comme il l'a fait: «Mes amis d'autrefois sont mes amis d'aujourd'hui et ceux de demain.» Autour de la mémoire de Chateaubriand se sont formés deux camps opposés; dans l'un, admiration sans bornes, dans l'autre, dénigrement et implacable condamnation de l'homme et de ses oeuvres. En quoi il n'est pas probable que, d'un côté ou de l'autre, tous se trompent absolument, mais chacun examine le même sujet par un côté différent. Chateaubriand était un poète, non un penseur et un politique; aussi en littérature a-t-il donné des tableaux et des descriptions dans le style propre à la poésie, qui est le langage de l'émotion. Qu'y a-t-il d'étonnant, si l'on exige de lui la profondeur d'une savante analyse, qu'on s'aperçoive aussitôt qu'il remplace en général le raisonnement par des images? C'est en vain, par exemple, qu'on chercherait dans le Génie du christianisme une savante apologie, une démonstration théologique qui ne s'y trouve pas, et que l'auteur n'avait pas entreprise. Renfermé dans sa sphère, il est resté poète, et, dans ces limites, il a créé un chef- d'oeuvre. En politique, il en est de même. La poésie et la politique diffèrent essentiellement par leur objet et par la langue même qu'elles emploient. La poésie, peu importe qu'elle s'exprime en vers ou en prose, vit dans la sphère des idées les plus générales. La politique, au contraire, n'a pour objet que des idées particulières, et en cela, elle est inférieure à la poésie; elle ne s'exerce que sur des faits accidentels et contingents. Aussi, le poète, sortant de son domaine pour entrer dans celui de la politique, pourra bien y apporter les idées générales et les plus hautes aspirations, mais il se sentira toujours mal à l'aise dans la succession des faits variables qui forment le champ indéfini de l'expérience. Cette préoccupation des images et de la forme poétique poursuivait Chateaubriand jusque dans ses études. Il n'avait pas l'érudition d'un savant, mais il possédait des connaissances variées très étendues. Il avait beaucoup étudié les littératures antiques; il citait les poètes grecs avec une évidente prédilection, beaucoup moins souvent les poètes latins et plus rarement encore les prosateurs, les historiens ou les philosophes. C'est avec les poètes de la Grèce qu'il était en communion d'idées; c'est, auprès d'eux qu'il cherchait avec délices la beauté des formes, la variété et la magnificence des images et les secrets d'une harmonie qui n'a été surpassée dans aucune autre langue. Il puisait surtout avec amour à cette source charmante d'inspirations poétiques qui s'appelle l'Anthologie grecque. Assurément, il aurait applaudi à l'opinion exprimée uploads/Litterature/ chateaubriand-et-madame-de-custine.pdf

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