1895. Mille huit cent quatre-vingt-quinze Revue de l'association française de r

1895. Mille huit cent quatre-vingt-quinze Revue de l'association française de recherche sur l'histoire du cinéma 70 | 2013 varia Colloque international « Paulo Emilio Salles Gomes et Jean Vigo : cinéphilie, littérature et patrimoine cinématographique » Montpellier-Perpignan, 28-30 mai 2013 Lilia Oliveira Édition électronique URL : https://journals.openedition.org/1895/4690 DOI : 10.4000/1895.4690 ISSN : 1960-6176 Éditeur Association française de recherche sur l’histoire du cinéma (AFRHC) Édition imprimée Date de publication : 1 juin 2013 Pagination : 180-185 ISBN : 978-2-37029-070-0 ISSN : 0769-0959 Référence électronique Lilia Oliveira, « Colloque international « Paulo Emilio Salles Gomes et Jean Vigo : cinéphilie, littérature et patrimoine cinématographique » », 1895. Mille huit cent quatre-vingt-quinze [En ligne], 70 | 2013, mis en ligne le 01 juin 2016, consulté le 16 avril 2022. URL : http://journals.openedition.org/1895/4690 ; DOI : https://doi.org/10.4000/1895.4690 © AFRHC Colloque international «Paulo Emilio Salles Gomes et Jean Vigo : cinéphilie, littérature et patrimoine cinématographique» (Montpellier-Perpignan, 28-30 mai 2013) Les 28, 29 et 30 mai 2013, s’est tenu à l’Université Paul Valéry - Montpellier 3 et à l’Institut Jean Vigo à Perpignan, un colloque international organisé conjointement par le Centre de Recherche RIRRA 21, par l’Institut Jean Vigo et par la Cinémathèque brésilienne de São Paulo. L’objectif était de mettre en évidence les échanges culturels France-Brésil aussi bien que de décrire l’univers de la cinéphilie franco- brésilienne dans une perspective socio-historique autour de l’œuvre de Jean Vigo et de son premier biographe, le critique brésilien Paulo Emilio Salles Gomes. Michel Cadé, président de la Cinémathèque Euro- régionale Institut Jean Vigo, Marie-Ève Therenty, directrice du Centre du Recherche RIRRA 21, Adilson Mendes, chercheur associé à la Cinemateca brasileira et Sebastiana Gomes Lisboa, chercheuse indépendante associée au groupe de recherche RIRRA 21, ont ouvert la discussion qui rassemblait de nombreux chercheurs de différentes domaines – cinéma, littérature, philosophie et histoire –, venus du Brésil, de Suisse, de France, de Grande-Bretagne et des États-Unis, afin de mettre en lumière les liens entre l’œuvre de Paulo Emilio (comme on dit au Brésil) et celle de Jean Vigo. C’est d’ailleurs sous le regard et l’écoute attentive de Luce Vigo, sa fille, elle aussi biographe tardive de son père, que tout le colloque se déroula. La première communication était due à Pierre Lherminier, historien du cinéma, également biographe de Jean Vigo, dont on fit la lecture en raison de son empêchement à se déplacer; elle témoigna de l’importance inaugurale du travail de Salles Gomes comme du rôle que joua la redécouverte de Vigo dans la culture cinéphilique française. Paulo Emilio Salles Gomes, le critique, le biographe, l’écrivain Quels liens établir entre Salles Gomes et Vigo, le Brésil et la France, pourquoi ce colloque conjoi- gnant deux figures et des pays si lointains et différents ? La première intervention d’Adilson Mendes, dont la thèse de doctorat était consacrée à la trajectoire intellectuelle de Paulo Emilio, a servi à la fois de «présentation du personnage brésilien» au public français présent et de compréhension des liens entre les deux auteurs. En proposant de décortiquer le «projet intellectuel de Paulo Emilio», en soulignant les différentes facettes du Brésilien (cinéphile, critique, militant, historien, écrivain), distinctes et, en même temps, complémentaires, Mendes a choisi de se centrer sur son travail critique. Il a tout d’abord mis en évidence l’in- fluence de Paul Valéry dans la prose littéraire de Paulo Emilio – ses échos pouvant être perçus dans son Jean Vigo –, tout en soulignant que c’était justement cette prose littéraire qui amalgamait le souvenir, la fantaisie et l’érudition si importants et présents dans le projet intellectuel du Brésilien. En même temps, il a relevé l’hétérodoxie théorique de Paulo Emilio, reflet direct d’un esprit libre et d’un incroyable appétit intellectuel, développé davantage lors de ses séjours à Paris où il fréquenta le Cercle du cinéma, rencontrant Henri Langlois et Georges Franju, découvrant Octobre, entre autres films d’Eisenstein, ainsi que la littérature née du débat autour du parlant. C’est grâce à ce premier séjour parisien que Paulo Emilio a pu inaugurer au Brésil, au début des années 1940, le genre de « l’essai cinématographique » avec la création de la revue Clima. Cette phase de la vie du critique brésilien fut illustrée par sa «surprenante» analyse de Citizen Kane, où, avant quiconque, il mit l’accent sur le rôle de la profondeur de champ. La découverte du «Rimbaud du cinéma», Jean Vigo, et de ses films poétiquement révolutionnaires date du deuxième séjour à Paris (1946-1954). Alliant son intuition critique, son travail d’historien, sa connaissance matérielle de conservateur de films et son esprit d’essayiste, le critique brésilien écrivit la première 180 biographie du cinéaste. Son Jean Vigo, fut publié en 1957 aux éditions du Seuil dont Chris Marker conseillait la collection cinéma. Dans un deuxième temps, Mendes mit en lumière son rôle dans la «naissance» et le développement du Cinema Novo, notamment de Glauber Rocha. Pourtant Paulo Emilio n’a jamais écrit sur aucun film de Rocha et très peu sur les films du Cinema Novo. Pour Mendes le « projet intellectuel de Paulo Emilio » était de penser une culture et ses contradictions historiques à partir du phénomène cinématographique, en utilisant différents types de savoirs, liés les uns aux autres, par une prose littéraire capable de rendre transmissible la discipline de l’histoire du cinéma. Parmi les différentes facettes de Paulo Emilio, il y a donc la littéraire. Son livre de fiction de 1977, As três mulheres de três PPP’s, (P… comme Polydore, Actes Sud, 1986), en témoigne. Composé de trois nouvelles différentes autour d’un même narrateur, Polydore (PPP), le livre raconte des histoires de couples de la bourgeoisie paulistana (de São Paulo), tout en faisant une analyse critique de cette société. José Antonio Pasta Jr., professeur de littérature brésilienne à l’Université de São Paulo, a souligné combien, grâce à son style original, le renouvellement du sens des mots et son esprit critique très aigu, le livre de Paulo Emilio avait fait date pour la critique, et fut même crédité d’ouvrir un courant historique et esthétique dépassant le modernisme. On y vit «la meilleure prose brésilienne depuis Guimarães Rosa». Pasta compara les formes – l’humour, le sarcasme, l’ironie – et les sujets de P… comme Polydore, à ceux de Machado de Assis, autre icône de la littérature brésilienne, très connu pour ses critiques sociales mordantes et actuelles. Avec cette différence que le livre de Paulo Emilio visait la bassesse d’une classe dominante en pleine décomposition dans les années 1970. Cette façon de mélanger les différents registres (haut et bas), selon Pasta, engendrait une forme littéraire hybride entre le grand art et la littérature érotique populaire, cette dernière transposée au cinéma par le genre pornochanchada, très mal vu à l’époque, mais ayant pourtant, pour Paulo Emilio, une fonction dénonciatrice. Paulo Emilio Salles Gomes, l’homme de gauche Cette fonction dénonciatrice fut l’une des ses préoccupations majeures en tant que citoyen et publiciste. Né dans une famille aisée avec un père secrétaire d’État et homme d’affaires, il s’est très tôt senti mal à l’aise dans sa condition de bourgeois. Se sentant concerné par les questions de justice et d’égalité sociales, il s’engagea très jeune dans le communisme. François Albera rappela cet aspect de l’engagement de Salles Gomes, incarcéré en 1935 après l’échec de l’Intentona Comunista, l’insurrection contre le gouvernement de Getúlio Vargas lancée par le Parti communiste brésilien. Alors qu’on ne sait pas grand-chose de son rapport au cinéma jusque-là, a fortiori s’il avait vu des films accordés à ses convictions révolutionnaires, c’est en s’évadant, en 1937, et en s’exilant en France que Salles Gomes découvrit le cinéma soviétique et le cinéma en général. Un rôle par conséquent fondateur: avec les films d’Eisenstein, Vertov, Poudovkine, etc., il découvre un cinéma qui se donne des objectifs sociaux et politiques et qui renouvelle les formes. C’est pourtant assez tardivement qu’il s’exprime sur ces films, à un moment où il a pris ses distances avec le militantisme et avec l’adhésion au communisme, après être revenu en France, y avoir fréquenté les ciné-clubs d’après-guerre et même l’Institut de filmologie. Il écrit alors dans le supplément littéraire du journal à grand tirage, O Estado de S. Paulo, et de 1957 à 1959, il commence une série d’articles sur Eisenstein suscités par la parution de la biographie de Marie Seton qui déclenche chez lui une réflexion sur les rapports de la vie privée et de l’engagement politique et lui font découvrir la dimension de penseur, de théoricien de l’auteur du Potemkine qui est près de l’emporter sur le cinéaste et qui, à ses yeux, domine le paysage: «Louis Delluc par le passé ou André Bazin actuellement font fréquemment preuve d’un grand talent, mais seuls quelques textes de Sergueï Mikhaïlovich Eisenstein donnent le sentiment d’une véritable grandeur intellectuelle», écrit-il. C’est l’occasion d’évoquer le contexte politique, la culture et le cinéma soviétiques (il a lu MacDonald, Victor Serge) mais aussi de faire cette 1 8 9 5 R E V U E D ’ H I S T O I R E D U C I N É M A n o 7 uploads/Litterature/ colloque-international-paulo-emilio-salles-gomes-et-jean-vigo-cinephilie-litterature-et-patrimoine-cinematographique 1 .pdf

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