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24/03/2020 Correction de la dissertation https://www.ralentirtravaux.com/lettres/lycee/premiere/lettres-persanes/correction-de-la-dissertation.php 1/4 RT Actu Blog Manuels Liens  Correction de la dissertation (introduction & première partie) Vous êtes ici :  > Lycée > Séquences (première) > Les Lettres persanes > Correction de la dissertation Introduction Les Lettres Persanes, la traduction des contes des Mille et Une Nuits par Antoine Galland en 1711 ou encore la parution de Zadig ou la Destinée de Voltaire en 1748 sont la preuve de l'intérêt pour les cultures d'Afrique du Nord, turque et arabe ainsi que de toutes les régions dominées par l'Empire ottoman. Mais force est de constater qu’à travers la fable orientale, c’est l’occident que l’on regarde. C’est vrai du conte de Voltaire, cela l’est aussi du roman montesquivien. « Les Lettres persanes racontent la visite de deux Persans à Paris », écrit Tzvetan Todorov qui fait un résumé on ne peut plus concis de ce roman. Et l’auteur et critique bulgare d’ajouter : « On aurait pu croire que leur vision du monde occidental serait superficielle et partiale ». Ce double conditionnel fait état des doutes qui s’emparent du lecteur. En effet, de prime abord, on pourrait se demander ce qu’un visiteur Persan du XVIIIe fraîchement débarqué peut comprendre aux coutumes françaises. Qu’est-ce qui pourrait amener à penser qu’il puisse comprendre quoi que ce soit, si tant est que la barrière de la langue ne soit pas un problème ? Ne pourrait-on pas se dire qu’il ne percevrait qu’une faible partie de nos institutions, de nos habitudes, de nos mœurs, de nos coutumes ? Ou que sa vision des choses seraient inévitablement partielle. Et quand bien même la durée du séjour des Persans serait suffisante pour embrasser la totalité de la société française, ne peut-on estimer qu’ils verraient nos usages par le prisme de leurs propres habitudes et préférences et que cette vision serait de fait partiale ? Or la conjonction de coordination « mais » annonce un renversement de situation : « Mais c’est le contraire qui se produit ». Il s’avère ainsi que ces Persans sont « lucides ». Le comparatif « plus... que » indique même qu’ils le sont davantage que les Français et qu’ils nous permettent alors de découvrir ce qui nous était à un tel point familier que nous ne pouvions plus le percevoir. Le fait est qu’on ne voit plus ce qui est quotidien, ce qui nous est familier et ce qui est donc devenu banal. On ne se voit pas ! « L'œil ne peut pas se voir lui-même », disait La Rochefoucauld. Au reste, il y a dans les propos de Todorov un paradoxe intéressant : les Persans nous font découvrir ce qui nous est connu. Mais comment découvre-t-on ce qui est familier ? Dès lors, on se demandera de quelle lucidité les Persans font preuve et quelles sont ces « réalités » qu’ils exposent. On verra alors que cette lucidité ne signifie pas que l’on soit aveugle sur ses propres habitudes. Mais tout d’abord nous montrerons par quels procédés cette lucidité est possible et donc comment Montesquieu réussit ce tour de force qui consiste à ce que l’on s’étonne à nouveau de ce qui ne nous étonnait plus. Première partie La lucidité, apanage de l’étranger La lucidité du Persan est cette capacité à faire la lumière (lucidité ➝ lux) sur ce qu’il observe et ainsi jeter un regard perçant (pardon pour ce jeu de mots éculé) sur l’objet de son attention. Et il n’est pas grand-chose qui échappe à sa curiosité. La lettre 48 en témoigne : « Je passe ma vie à examiner : j’écris le soir ce que j’ai remarqué, ce que j’ai vu, ce que j’ai entendu dans la journée : tout m’intéresse, tout m’étonne : je suis comme un enfant, dont les organes encore tendres sont vivement frappés par les moindres objets » (Rica à Rhédi). Comme le montre la répétition du pronom indéfini « tout », c’est l’ensemble de la société qui va être passé en revue. Et de fait, tout étonne les Persans, d’où l’abondance du lexique de l’étonnement, du bizarre : « C’est un grand spectacle pour un mahométan, de voir, pour la première fois, une ville chrétienne. Je ne parle pas des choses qui frappent d’abord tous les yeux, comme la différence des édifices, des habits, des principales coutumes : il y a, jusque dans les moindres bagatelles, quelque chose de singulier, que je sens, et que je ne sais pas dire. » (lettre 23) É 24/03/2020 Correction de la dissertation https://www.ralentirtravaux.com/lettres/lycee/premiere/lettres-persanes/correction-de-la-dissertation.php 2/4 « Étant l’autre jour dans ma chambre, je vis entrer un dervis extraordinairement habillé. Sa barbe descendait jusqu’à sa ceinture de corde : il avait les pieds nus : son habit était gris, grossier, et en quelques endroits pointu. Le tout me parut si bizarre, que ma première idée fut d’envoyer chercher un peintre, pour en faire une fantaisie. » (lettre 49) « Je trouve les caprices de la mode, chez les Français, étonnants. » (Lettre 99) « Voilà des bizarreries que l’on ne voit point dans notre Perse. Nous n’avons point l’esprit porté à ces établissements singuliers et bizarres ; nous cherchons toujours la nature dans nos coutumes simples et nos manières naïves. » (lettre 73) « Je ne finirai pas cette lettre sans te faire remarquer la bizarrerie de l’esprit des Français. On dit qu’ils ont retenu, des lois romaines, un nombre infini de choses inutiles, et même pis ; et ils n’ont pas pris d’elles la puissance paternelle, qu’elles ont établie comme la première autorité légitime. » (lettre 129) « Tout ceci produit souvent des choses bizarres. » (lettre 138) Pourquoi cet étonnement ? Pourquoi tout est-il si bizarre ? Parce que Rica et Usbek sont des étrangers que tout étonne. Tout est nouveau : « Étranger que j’étais, je n’avais rien de mieux à faire que d’étudier cette foule de gens qui y abordaient sans cesse, et qui me présentaient toujours quelque chose de nouveau » (lettre 48). Or « les habitudes rendent les choses banales et par là les soustraient à l’examen critique » écrit Todorov (1). Les Français ne voient donc plus ce que voient les Persans. Mais la lucidité, pour être l’apanage de l’étranger, doit s’accompagner d’un désir de savoir et de vouloir savoir. Et c’est bien ce que font les Persans (remarquez le mot « étudier » dans citation ci-dessus). Ainsi Montesquieu va révéler ce qui est fait sans qu’on y pense, c'est-à-dire nos habitudes : « Le pape est le chef des chrétiens. C’est une vieille idole, qu’on encense par habitude » (lettre 29). Le regard naïf, rendre étonnant ce qui est familier Pour ce faire, il va jeter un regard naïf sur les choses, les résumant dans leur plus simple expression. Ainsi des questions financières comme la capacité de battre la monnaie ou la réévaluation sont présentées comme de la magie : « D’ailleurs, ce roi est un grand magicien : il exerce son empire sur l’esprit même de ses sujets ; il les fait penser comme il veut. S’il n’a qu’un million d’écus dans son trésor, et qu’il en ait besoin de deux, il n’a qu’à leur persuader qu’un écu en vaut deux ; et ils le croient. » Et juste après : « S’il a une guerre difficile à soutenir, et qu’il n’ait point d’argent, il n’a qu’à leur mettre dans la tête qu’un morceau de papier est de l’argent ; et ils en sont aussitôt convaincus ». La (fausse) naïveté nous invite à reconsidérer ce qui nous est familier. Un billet de banque est « un morceau de papier ». La périphrase simplifie les choses réduisant la notion à un essentiel déconcertant. On pourrait multiplier les exemples notamment en puisant dans la célèbre lettre 24 où les mystères de la trinité et de la transsubstantiation dont l’objet de la même simplification comique : « Ce magicien s’appelle le pape : tantôt il lui fait croire que trois ne sont qu’un ; que le pain qu’on mange n’est pas du pain, ou que le vin qu’on boit n’est pas du vin ; et mille autres choses de cette espèce ». Ce regard ingénu sur les mœurs françaises se fait également en soulignant nos contradictions. De Louis XIV, Usbek écrit « J’ai étudié son caractère, et j’y ai trouvé des contradictions qu’il m’est impossible de résoudre : par exemple, il a un ministre qui n’a que dix-huit ans, et une maîtresse qui en a quatre-vingts : il aime sa religion, et il ne peut souffrir ceux qui disent qu’il la faut observer à la rigueur » (lettre 37). Ainsi, le regard candide, ingénu, faussement naïf de l’étranger découvrant la France, de l’orient découvrant l’occident nous amène à redécouvrir ce qui nous était familier notamment en renommant les choses ou en soulignant nos contradictions. Mais c’est aussi en exprimant le choc ressenti par les Persans pour ce qui diffère de leurs coutumes que l’on ait amené à saisir la spécificité de la nôtre voire à la uploads/Litterature/ correction-de-la-dissertation-lettres-persannes.pdf

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