1 Cours 9 LES ANNEES QUARANTE : GUERRE ET APRES-GUERRE 1- Les écrivains et la g

1 Cours 9 LES ANNEES QUARANTE : GUERRE ET APRES-GUERRE 1- Les écrivains et la guerre : Collaboration et résistance Face aux évènements de la Seconde Guerre mondiale, les écrivains réagissent de façon très diverse. Les uns choisissent clairement le camp de la collaboration avec l’occupant : ainsi Robert Brasillach écrit jusqu’en 1943 dans Je suis partout, journal qui devient l’organe le plus lu de la presse collaborationniste et antisémite. Drieu La Rochelle accepte pour sa part de prendre la direction de la NRV. Tous deux prônent la mise en place d’un système politique régénéré qui serait fondé sur le modèle fasciste. Quant à Céline, il participe, par ses écrits (pamphlets, lettres ouvertes) aux compagnes idéologiques menées contre les communistes et les juifs. A la libération, Brasillach sera fusillé, Drieu se suicidera et Céline s’enfuira en exil. D’autres écrivains (plus nombreux) entrent dans la résistance. Le 15 mai 1941 se crée un Comité national des écrivains (CNE) à l’initiative de Jacques Decour (qui sera fusillé par les allemands l’année suivante). Le CNE rassemble les intellectuels qui veulent marquer leur opposition à l’occupant et au régime de Vichy : y adhéreront, au fil des mois, des écrivains participant à des activités de résistance (Aragon, Eluard, Camus, Malraux, Char, etc.)ou apportant simplement leur soutien (Valéry ou Sartre). En liaison avec cet organisme sont fondées une revue clandestine Les lettres françaises (Mauriac, par exemple écrira sous le nom de Forez), ainsi qu’une maison d’édition, elle aussi clandestine, les Editions de Minuit :celles- ci publieront une vingtaine de livres pendant l’occupation :c’est ainsi que paraît L’Honneur des poètes, anthologie de poèmes de résistance, où l’on trouve les nom de Ponge, Eluard, Desnos. 2- Les écrivains et la politique : la libération et les débuts de la IVe république : À la libération, apparaît un phénomène qui n’est pas nouveau mais qui prend une ampleur et une vivacité particulières : les prises de position publiques des intellectuels en matière politique. Les premiers grands débats ont lieu à propos de « l’épuration » (pratique visant à faire passer en jugement tous ceux qui étaient soupçonnés de collaboration). Camus réclame à cet égard une grande intransigeance, cependant que Mauriac appelle à la modération. Le premier évoluera finalement dans le sens du second : par hostilité à la peine de mort, il signera avec Mauriac la pétition demandant la grâce Brasillach condamné à mort (grâce qui sera refusée par le général de Gaulle). 2 Nombre d’écrivains s’engagent ensuite de façon plus concrète dans la politique. Plusieurs d’entre eux sont alors séduits par le parti communiste, qu’ils en soient des adhérents ou des « compagnons de route ». Cet attrait des intellectuels pour le parti communiste constitue une caractéristique de la période. Mais certaines grandes voix se déterminent d’une tout autre manière : Mauriac exprime son soutien au M.R.P1. , parti qui met en avant valeurs chrétiennes et préoccupations sociales. Malraux participe en 1947 à la mise en place du R.P.F2 « mouvement crée par le général de Gaulle. Sartre devient un animateur du R.D.R3, petit parti fondé par des intellectuels qui souhaitent trouver une « troisième voie », refusant le soutien à l’URSS aussi bien que l’alliance avec les États-Unis, après l’échec de ce regroupement, Sartre deviendra vers 1951 « compagnon de route » du parti communiste. Camus, enfin, exprime sa sympathie pour le R.D.R, mais conserve une indépendance d’esprit qu’il conservera, malgré l’isolement qu’elle lui valut, jusqu’à sa mort. Maîtres à penser d’une partie de l’opinion publique, Mauriac, Malraux, Camus, Sartre, Aragon sont sans doute les derniers écrivains à tenir ce rôle, dévolu davantage par la suite à des spécialistes de sciences humaines ou à des savants. 3- L’existentialisme L’immédiat après-guerre a été marqué par le succès de ce qu’on a appelé l’existentialisme. Sous ce mot, l’opinion publique rangea, à cette époque, un groupe d’artistes et d’écrivains fréquentant à Paris le café de Flore en compagnie de Sartre et Simone de Beauvoir. En fait, l’existentialisme est une attitude de pensée incarnée par Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir camus refusera cette étiquette. Quant au groupe qui fréquente Saint- Germain des prés, il se caractérise par une sensibilité originale : sur le plan littéraire, Vian et Queneau réagissent aux angoisses de l’époque (découverte des camps de concentration, guerre froide, etc.) par la fantaisie et par une vision poétique du quotidien qui se situent aux antipodes de l’engagement sartrien. Pour le reste, l’histoire du roman pendant cette décennie est marquée par une relative pauvreté. Certes Aragon et Giono poursuivent leurs œuvres ; mais d’autres se sont tus : Nizan a été tué en 1940, Brasillach et Drieu La Rochelle ont payé de leur vie leurs errements 1 Mouvement républicain populaire. 2 Rassemblement du peuple français. 3 Rassemblement démocratique populaire. 3 politiques. Malraux renonce à sa carrière de romancier. Martin du Gard ne publie plus. Mauriac se tourne vers une intense activité journalistique : bref, la génération de l’entre-deux guerres ne s’exprime plus guère par la fiction. 4- Une coupure au début des années cinquante : Dans le domaine de la littérature, les années cinquante correspondent à une rupture sur trois plans :au théâtre de Camus et de Sartre, succède en effet ce qu’on a appelé le « nouveau théâtre » ou le « théâtre de dérision » l’un de ses représentants, Ionesco, fait jouer sa première pièce, La Cantatrice chauve, en 1950. (En attendant Godot de Becket sera représentée en 1953). Par ailleurs les écrivains lassés par la littérature de réflexion sur la condition humaine qu’ont pratiquée leurs aînés, vont se distinguer par un type de récit empreint de désinvolture. Enfin et surtout, la décennie qui commence en 1950 voit l’émergence de ce qu’on appellera le « Nouveau Roman », qui se situe en rupture totale avec les pratiques romanesques observées jusqu’alors : Un barrage contre le pacifique de Marguerite Duras parait en 1950, Les Gommes d’Alain Robbe-Grillet en 1953. 4 Cours 10 LITTERATURE ET ENGAGEMENT Revendiqué avec véhémence par Jean-Paul Sartre à partir de 1945 dans sa revue Les Temps modernes, l’engagement politique des écrivains n’est pas une nouveauté absolue. Pendant tout le XXe siècle se développe en effet, une littérature spécifiquement idéologique, qui se reconnaît à l’emploi des formes d’expression et de genres particuliers, dont le didactisme constitue le dénominateur commun. Le pamphlet Forme par excellence de l’engagement, ce genre littéraire se rattache à l’essai. Il s’en distingue cependant par : - Une (relative) brièveté qui donne au texte une grande force d’impact. Le lecteur peut en effet en mémoriser l’essentiel, tant pour le style que pour le contenu. - Une implication directe de l’auteur. L’usage de la première personne, fréquent donne à cet écrit de combat le ton d’un témoignage passionné. - Une volonté de convaincre, alliée à une grande liberté de forme : raisonnements construits et mouvements d’humeur peuvent coexister. Historiquement, c’est J’accuse d’Émile Zola, célèbre éditorial de L’Aurore du 1er janvier 1898, qui au cœur de l’affaire Dreyfus, relance ce genre. Dans la sensibilité dite de gauche, le marxisme sert de caution au Second manifeste du Surréalisme d’André Breton en 1930. Avec Aden-Arabi et Les chiens de garde, le militant communiste Paul Nizan dénonce avec violence, en 1932, les maîtres à penser de l’éducation bourgeoise et le système colonial. André Gide recense avec plus de mesure les injustices de l’impérialisme dans son Voyage au Congo et son Retour du Tchad. À droite, le pamphlet sert principalement à l’expression du nationalisme et de l’antisémitisme. C’est le cas de d’Edouard Drumont et des autres écrivains liés à l’action française. Après une attaque contre le communisme, en 1936 (Mea Culpa), Louis-Ferdinand Céline publie en 1937 Bagatelles pour un massacre où il pourfend « le péril judéo- bolchévique ». Le roman à thèse 5 En se faisant le véhicule d’une idéologie, le roman s’ouvre aussi à l’engagement. Des critères formels distinguent ce roman à thèse du roman réaliste traditionnel : - Une histoire exemplaire : l’auteur, plutôt qu’un récit ordinaire écrit une parabole. L’apprentissage du héros a toujours un sens, celui de la révélation de l’idéologie qui inspire le livre et de la validité de celle-ci. - Un message compréhensible : le narrateur tire la leçon des évènements, énonce les valeurs dont ceux-ci illustrent la vérité. Cette « leçon » peut être tirée aussi par les personnages. Le genre ne se refuse pas la répétition. - Un jeu d’opposition : le roman à thèse cultive le manichéisme, l’opposition entre ceux qui sont dans l’erreur (souvent caricaturée) et les héros positifs qui incarnent le vrai. Ecrivains de droite et écrivains de gauche se retrouvent dans la pratique de ce genre, comme pour le pamphlet. Dans les années trente, le roman à thèse est plutôt le fait des écrivains communistes. Dans Les Beaux Quartiers Aragon dessine les trajectoires opposées de deux frères Barbentane. Sartre et la théorie de l’engagement « Nous n’avons pas envie de parler pour ne rien dire », affirme Sartre dans sa Présentation des Temps modernes en 1945. Il s’explique longuement sur cette théorie de l’utilité politique uploads/Litterature/ cours-lf-9-10-11.pdf

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