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85 D Da an nt te e e et t l l' 'é én ni ig gm me e d du u 5 51 15 5 A. A. Le symbolisme des nombres joue dans la Divine Comédie de Dante un rôle important qui a été reconnu de longue date et qui se manifeste d'ailleurs sous différents aspects; mais aucun nombre – à l'exception naturellement du fameux 666 de l'Apocalypse de saint Jean – n'a sans doute suscité autant de commentaires et d'hypothèses en tout genre que le nombre 515 qui apparaît au dernier chant du Purgatoire : « Car je vois à coup sûr – et je l'annonce – des astres déjà proches, sans obstacle ni résistance, nous marquer le temps où un nombre Cinq Cent et Dix et Cinq, mandé par Dieu (messo di Dio), tuera l'usurpatrice et le géant qui fornique avec elle. »72 La première chose qui frappe est évidemment le contexte eschatologique dans lequel apparaît ce nombre. L'explication la plus habituelle qui en est donnée est la suivante : en écrivant 515 en chiffres romains, on obtient DXV; en permutant les deux dernières lettres, on arrive à DVX, qui est la même chose que DUX. Il s'agirait donc d'un personnage qui, conformément aux aspirations gibelines de Dante, devrait amener sur Terre le règne 72 Purgatoire, 33, 40-46. C'est Béatrice qui s'exprime à la première personne. Pour cette citation comme pour les suivantes, nous suivons la traduction des Œuvres complètes de Dante, La Pochothèque, 1996. André Pézard (La Pléiade, Gallimard), après avoir traduit messo di Dio par « ange de Dieu » (éd. 1968), puis par « mû par Dieu » (éd. 1976), donne en note « envoyé de Dieu », qui est selon lui le sens exact et qui est le sens que nous retiendrons en effet. 86 du « Saint Empire », que d'ailleurs il faille l'entendre dans un sens immédiatement politique (et dans ce cas le DUX en question est généralement identifié avec Henri VII de Luxembourg) ou de manière plus générale comme le règne attendu de l'Esprit Saint73. L'objet de la présente étude est de proposer une hypothèse nouvelle, quoique finalement très simple, quant à l'interprétation de ce nombre. Pas plus que pour toutes les autres qui ont été avancées, il n'y a de « preuve » entièrement décisive que cette signification est effectivement celle que Dante a consciemment voulu donner à ce 515. Nous pensons néanmoins que le faisceau de présomptions que nous allons présenter dans ce qui suit rend notre hypothèse à tout le moins aussi vraisemblable que bien d'autres qui ont été formulées dans le passé ; du reste, notre propos n'est pas de prouver quoi que ce soit, mais simplement de soumettre des éléments de réflexion au lecteur. Toutefois, avant d'entrer dans le vif de la question, il est indispensable que nous précisions dans quel cadre et dans quel esprit nous entendons mener notre recherche. Dans un ouvrage bref mais fondamental pour notre sujet, précisément intitulé L'Ésotérisme de Dante74, René Guénon a attiré l'attention sur l'énigme du 515 ; ce faisant, il s'est référé à une étude de Rodolfo Benini, sur laquelle nous reviendrons dans un instant, et évoqué le DVX auquel nous avons déjà fait allusion. Mais en amont de toute interprétation particulière, il nous paraît essentiel de tout d'abord souligner deux « sources » possibles de Dante explicitement mentionnées par René Guénon. La première est la tradition pythagoricienne : 73 Aroux préfère lire IVDEX, mais cela ne change pas fondamentalement le sens. Il est hors de question de passer en revue l'énorme littérature occasionnée par ces vers. Pour André Pézard, « la lecture latine DVX est un enfantillage » et « le chiffre 515 n'est qu'une allusion exemplaire et ne cache pour le poète aucun nom contemporain ou futur » (p.1357 de l'éd. 1976). « Exemplaire » de quoi, en l'occurrence, est la question à laquelle nous tenterons de répondre. 74 La première édition date de 1925. Nous citons d'après la troisième édition (Chacornac, 1949), dernière parue du vivant de l'auteur. 87 « Nous verrons assez, par la suite, quelle importance fondamentale a le symbolisme des nombres dans l’œuvre de Dante ; et, si ce symbolisme n’est pas uniquement pythagoricien, s’il se trouve dans d’autres doctrines pour la simple raison que la vérité est une, il n’en est pas moins permis de penser que, de Pythagore à Virgile et de Virgile à Dante, la “chaîne de la tradition” ne fut sans doute pas rompue sur la terre d’Italie. » (p.13) L'autre source, qui avait été mise en avant par Miguel Asin Palacios quelques années auparavant dans un livre intitulé La escatologia musulmana en la Divina Comedia75, est la source islamique. Dans cet ouvrage bien documenté (surtout si l'on tient compte de l'époque), Asin Palacios met en parallèle de nombreux éléments de la littérature du mi`râj (l'Ascension céleste du Prophète), mais aussi certains passages des Futûhât d'Ibn Arabî, avec le poème de Dante, et arrive à la conclusion que ce dernier a pour partie puisé son inspiration dans des œuvres d'auteurs musulmans. Le livre en question fut à la source d'une longue polémique entre érudits, pas toujours exempte de passion (et même parfois de passion « nationale ») ; il n'entre pas dans notre propos d'en relater les détails, mais deux mots à ce sujet ne seront peut-être pas inutiles. Le point faible de la démonstration d'Asin Palacios était évidemment la question de la manière dont Dante avait pu prendre connaissance des œuvres avec lesquelles on constatait par ailleurs des similitudes frappantes. Il n'est pas très vraisemblable que Dante ait connu l'arabe, surtout au point de pouvoir lire un ouvrage comme les Futûhât dont aucune traduction latine n'existait, à supposer qu'un manuscrit ait pu en arriver jusqu'à lui. Certains intermédiaires, tels Brunetto Latini, avaient bien été suggérés, mais les liens éventuels étaient fragiles et peu convaincants. Cette difficulté fut utilisée par de nombreux « spécialistes » de Dante pour mettre en doute le bien-fondé des rapprochements proposés par Asin Palacios. En 1949 toutefois, la publication par Muñoz Sendino en Espagne et par Cerulli en Italie 75 Madrid, 1919. Une traduction française est parue chez Archè (suivie de « Histoire et critique d'une polémique »). 88 du Livre de l'Échelle de Mahomet, d'après un manuscrit français d'Oxford et un manuscrit latin de la Bibliothèque Nationale, modifia profondément la donne76. L'existence de ces manuscrits prouvait qu'une certaine littérature eschatologique d'origine musulmane était effectivement connue dans le monde occidental à l'époque de Dante et obligeait donc à reconsidérer la question. D'un autre côté, le Livre de l'Échelle, dont la source principale est le hadith, est en l'état davantage un témoignage de littérature quasi populaire qu'une œuvre relevant de l'ésotérisme islamique. Peut-être cela le rendait-il moins gênant pour certains; quoi qu'il en soit, devant l'évidence, une sorte de consensus s'établit pour admettre que le milieu dans lequel Dante avait évolué avait effectivement pu être imprégné d'éléments islamiques, mais que des emprunts directs à Ibn Arabî étaient probablement à exclure. Bien entendu, il s'agit là de querelles se fondant uniquement sur les textes connus : ce qui n'a pas laissé de trace écrite n'existe pas pour les érudits, et par conséquent leurs conclusions sont toujours susceptibles d'être renversées le lendemain par la découverte d'un nouveau manuscrit; mais plus fondamentalement, il est clair que les méthodes de la critique littéraire et historique, quelle que puisse être leur utilité dans leur domaine propre, ne peuvent rendre compte de la transmission de données ésotériques au sein de certaines organisations initiatiques. Voici d'ailleurs ce qu'écrivait René Guénon au sujet des recherches d'Asin Palacios : « De telles coïncidences, jusque dans des détails extrêmement précis, ne peuvent être accidentelles, et nous avons bien des raisons d’admettre que Dante s’est effectivement inspiré, pour une part assez importante, des écrits de Mohyiddin ; mais comment les a-t-il connus ? (...) Mohyiddin fut tout autre chose que le “poète mystique” qu’imagine M. Asîn Palacios ; ce qu’il convient de dire ici c’est que, dans l’ésotérisme islamique, il est appelé Esh-Sheikh el-akbar, c’est-à-dire 76 Le Livre de l'Échelle de Mahomet, Le Livre de Poche, collection « Lettres gothiques », 1991. Pour un résumé de la question, voir : Maxime Rodinson : « Dante et l'Islam d'après des travaux récents », Revue de l'histoire des religions, 1951, p. 203-236. 89 le plus grand des Maîtres spirituels, le Maître par excellence, que sa doctrine est d’essence purement métaphysique, et que plusieurs des principaux Ordres initiatiques de l’Islam, parmi ceux qui sont les plus élevés et les plus fermés en même temps, procèdent de lui directement. Nous avons déjà indiqué que de telles organisations furent au XIIIe siècle, c’est-à-dire à l’époque même de Mohyiddin, en relation avec les Ordres de chevalerie, et, pour nous, c’est par là que s’explique la transmission constatée ; s’il en était autrement, et si Dante avait connu Mohyiddin par des voies “profanes”, pourquoi ne l’aurait-il jamais nommé, aussi bien qu’il nomme les philosophes exotériques de l’Islam, Avicenne et Averroès ? uploads/Litterature/ dante-515.pdf
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- Publié le Apv 26, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
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