JOSEPH DE FINANCE S. J. Etre et Agir dans la philosophie de Saint Thomas TROISI

JOSEPH DE FINANCE S. J. Etre et Agir dans la philosophie de Saint Thomas TROISIËME ÉDITION PRESSES DE l'UNIVERSITÉ GRÉGORIENNE DU MËME AUTEUR Cogito cartésien et réflexion thomiste (Archives de Philosophie, vol. XVI, cahier 2), Paris, Beauchesne, 1946. Existence et Liberté, Paris-LyŒi, Vitte, 1955. Essai sur l'agir humain, Rome, Pontificia Università Gregoriana, 1962. Ethica Generalis, ed. altera emendata, Rome, Pontificia Università Gregoriana, 1963. UNIVERSITE PONTIFICALE GREGORIENNE A EIRE et AGIR Dans la Philosophie de Saint Thomas PAR Joseph de FINANCE S. J. TROIS! ÈME ÉDITION revue ct corrigée 4 8 mille PRESSES DE L'UNIVERSITÉ GJltGORIENNE 4, PIAZZA DELLA PILOTTA, ROME 1965 IMPRIMI POTEST Romae, die 8 februarii 1960. R. P. PAULUS MUNOZ VEGA, S.I. Rector Universitatis IMPRIMATUR E Vicariatu Urbis, die 8 februarii 1960. t ALOYSIUS TRAGLIA Archiep. Caesarien., Vicesgerens Reproduction anastatique de la deuxième édition ROMAE • TYPIS PONTIFICIA.B UNIVERSITATIS GREGORIANAB PREFACE DE LA PREMIERE EDITION Ce livre est une victime de la guerre ... Achevé fin 1938, il devait paraître aux premiers mois de 1940. Les événements que l'on sait en ralentirent d'abord, puis en suspendirent l'impression. Un tirage re- streint, en vue de la soutenance, eut lieu en 1943. Aujourd'hui enfin, au prix de mille difficultés, l'ouvrage sort au grand jour. Il se présente en l'état même où il fut laissé il y a bientôt sept ans. Depuis lors, sans doute, des travaux ont été publiés dont l'objet re- couvre partiellement celui du nôtre: la quatrième édition du Thomis- me de M. Et. Gilson \ la thèse du P. Geiger sur La participation dans la philosophie de saint Thomas 2 et celle du P. Hayen sur L'Inten- tionnel dans la philosophie de saint Thomas s. Mais si la lecture de ces travaux nous a apporté de précieux enrichissements et une con- firmation singulièrement bienfaisante de nos propres vues, nous n'avons pas cru, pour autant, qu'un remaniement s'imposât. Peut-être cependant insisterions-nous aujourd'hui davantage sur la signification précise du mot acte appliqué à l'existence. Nous ferions remarquer plus nettement que, si l'eA.:;tence n'est pas une action, ce n'est point par défaut de richesse, mais plutôt par excès. Acte des actes, l'esse n'est pas en deçà mais au delà de l'action et, dans sa pureté, il assume en soi toutes les valeurs du dynamisme. Du reste, pourquoi rester prisonniers d'une alternative paresseuse que le langage lui- même nous invite à dépasser? Stare, !a,!Xvott, se tenir debout: tout cela dit autre chose que passivité pure; il y a comme un dynamisme immanent au statique. Exister, ce n'est pas simplement être posé, c'est, inséparablement, se poser. Penser un objet existant, c'est le penser comme se posant contre moi: l'objet n'est véritablement objet que s'il est en quelque sorte un contre-sujet. - Ainsi donc, l'existence, sans être, encore une fois, une action, n'est pourtant saisissable que par analogie avec l'action. Il serait d'ailleurs parfaitement vain de pré- tendre la définir par une catégorie quelconque de l'activité, puisque 1 Paris, 1942. Voir en particulier le très remarquable ch. 1 de la 1re partie: Existence et réalité. 2 Paris. 1942. J Paris-Bruxelles, 1942. VI PRÉFACB DE LA PREMIÈŒ JIDITION toute activité n'est qu'une variation SUT .le thème fondamental de l'exi- stence et ne se comprend que J?ar lui. On dira que l'existence est position, affirmation de soi, adhésion à l'être, inscription dans l'être: toutes ces expressions sont vraies, à condition de ne pas se donner comme des définitions. L'existence ne se définit pas. Mais, dans l'acte intime que l'esprit qui, en raffirmation, éprouve sa connaturalité avec elle, elle révèle son actualité et tout le dynamisme dont elle est pré- gnante: cette abondance, cette générosité, sans laquelle la pensée elle- même serait impensable, et aussi cette ambition infinie, cette exigence de totalité, dont l'échec trahit chez l'être la condition de créature. C'est à travers son activité affirmante, à travers cet acte d'adhésion, de « consentement à l'être », présupposé à toutes ses démarches, que l'esprit s'accorde vitalement à l'actualité de l'exister. Aussi bien, l'analogie la plus heureuse pour exprimer le rapport de l'essence à l'existence est sans doute le rapport qui, au sein de la pensée, unit ensemble et oppose les déterminations du concept à l'acte objectivant. La tension dont témoigne l'analyse réflexive entre l'idée, toujours déterminée, toujours limitée, et l'acte de pensée, dont rien ne borne l'ambition, répond à la tension intérieure à tout être fini entre les limitations de l'essence et les infinies virtualités de son acte réalisateur. Cette conception de la distinction réelle comme une tension in- terne nous paraît à la fois traduire fidèlement les exigences de la réflexion intellectueHe et répondre à une difficulté que risque de provoquer la lecture de la thèse du P. Geiger. On sait que celui-ci reconnalt chez saint Thomas deux conceptions différentes de la parti- cipation : la «participation par composition », qui suppose des sujets distincts de la perfection participée et composant avec elle, et la « participation pat: similiotude », qui suppose seulement que le par- ticipant reproduit d'une manière imparfaite la perfection du parti- cipé. Le P. Geiger n'a pas de peine à montrer que la première sup- pose un schématisme néoplatonicien et aboutirait, en rigueur, à poser de part et d'autre une Existence pure sans essence et des essences clouées d'une réalité indépendante. Si l'on veut maintenir la doctrine de la création, il faut donc concevo1r la hiérarchie des êtres comme résultant, non point de la réception d'un acte, en soi identique, en des sujets inégaux, mais d'une imitation inégale d'une même per- fection. Mais dire que la participation par similitude est première et se suffit, déclarer inconciliable avec le créationisme, comme im- pliquant un dualisme radical, l'idée que toute participation suppose composition de participant et de participé: n'est-ce pas déserter la position classique et saper le fondement de la célèbre distinction? PRÉFACE DE LA PREMIDE tmiTION La conclusion nous paraît justifiée, si l'on s'arrête à certaines présentations de la thèse thomiste, dont on peut trouver la fomlll- lation verbale chez saint Thomas lui-même. Elle tombe, au contraire, si, abandonnant les raisonnements fondés sur de pures analyses lo- giques, nous nous efforçons de saisir la vie intime de la pensée dans son accord vital avec l'être, son mystérieux aliment. Alors nous éprouvons cette sorte de déchirement intérieur à la pensée et donc à l'être du fini. La distinction thomiste ne veut pas dire autre chose. On peut chicaner sur les mots: toute parole humaine est foncièrement inadaptée à la métaphysique, et «distinction réelle» ne fait pas ex- ception. Mais, sous les vocables les plus raffinés. il faudra bien tou- jours mettre cette opposition, inscrite dans l'acte même de l'être fini, dans cela même qu'atteint en lui notre activité affirmante, dans ce qui constitue sa réalité la plus authentique, s'il est vrai que l'ac- tualité des choses est leur lumière. ce par quoi elles s'offrent aux prises éle l'esprit. La distinction d'essence et d'existence n'implique donc nulle- ment la représentation d'un esse extrinsèque aux essences qu'il actue. Elle résulte de la position même de l'être fini. Il n'y a pas des esse et des essences qu'il s'agirait d'apparier: il y a des existants, dont la condition inévitable est de comporter une tension intérieure. M. Gilson parle d'une «autodétermination» de l'exister 4 • L'expres- sion est heureuse -dans la mesure où elle aide à comprendre que l'es- sence n'est pas une réalité extérieure à l'existence, que, tout en s'y opposant, elle est posée par elle. Seuil"' une telle conception permet de voir en l'Esse subsistant, non un J::!.tre coupé de toute relation avec le monde des essences et partant inconnaissable pour nous, mais Celui qui possède en indivis toute leur positivité. On le voit par ces précisions: entre les divers courants du tho- misme contemporain, notre pensée se reconnaît plus volontiers dans le néothomisme illustré en Belgique par le regretté P. Maréchal. et dont le P. Marc, il y a quelques années, nous a donné, dans son cahier si remarqué sur L'idée de l'~tre, des prolégomènes promet- teurs 5• Et nous croyons en cela ne pas être infidèle à saint Thomas. - Avouons-le: s'il y a eu, au point de départ de notre étude, un préjugé, le voici: c'est qu'une doctrine dont l'influence a été si pra- • Ibid., p. 52. 5 A. MARc, L'idée de fEtre chez saint Thomas et dans la Scolastique posté- rieure, Arch. de phil., vol. X, c. 1, 1933. - Les promesses ont été tenues depuis lors: Psvchologie réflexive, 1948; Dialectique de faffirmation, 1952; Dialectique de ragir, 1954; Raison philosophique et Religion révélée, 1955; L'Etre et fEsprit, 1958. vm PRÛACB DE LA PREMIDB tnmoN fonde et si durable doit avoir quelque intérêt pour la pensée. Et nous ne voyons guère quel serait cet intérêt en dehors de notre in- terprétation. Qu'il nous soit permis, en terminant, de présenter l'expression de notre plus sincère gratitude à MM. Etienne Gilson, Henri Cou- hier et Aimé Forest, qui ont bien voulu tour à tour accorder leur patronage à nos travaux. Avec eux, nous associons dans notre recon- naissance tous nos maîtres à uploads/Litterature/ de-finance-j-etre-et-agir-dans-la-philosophie-de-saint-thomas-1965.pdf

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