Du même auteur La Formule de Dieu, Éditions Hervé Chopin, 2012 À Florbela, ma f
Du même auteur La Formule de Dieu, Éditions Hervé Chopin, 2012 À Florbela, ma femme, et à Catarina et Inês, mes filles. « Demandez et l’on vous donnera ; Cherchez et vous trouverez ; Frappez et l’on vous ouvrira. » JÉSUS-CHRIST Avertissement Toutes les données historiques et scientifiques ici présentées sont vraies. Prologue Un bruit étouffé attira l’attention de Patricia. – Qui est là ? Ce bruit semblait provenir de la salle d’inventaire, tout près de la salle de consultation des manuscrits, où elle se trouvait ; mais elle ne remarqua rien d’anormal. Les livres étaient là, alignés sur les rayons richement ornés de cette aile de la Bibliothèque vaticane, ils étaient comme assoupis dans l’ombre que la nuit projetait sur leurs reliures poussiéreuses. C’était sans doute la plus ancienne bibliothèque d’Europe, et peut-être aussi la plus belle, mais, le soir, il s’en dégageait une atmosphère inquiétante. – Mon Dieu… murmura-t-elle pour chasser la peur irrationnelle qui venait de l’envahir. Je regarde trop de films ! Sans doute était-ce l’employé de nuit, pensa-t-elle. Elle consulta sa montre ; les aiguilles indiquaient presque 23 h 30. D’ordinaire, la bibliothèque n’était pas ouverte au public à cette heure-ci, mais Patricia Escalona était devenue une amie intime du prefetto , monseigneur Luigi Viterbo, qu’elle avait accueilli à Saint-Jacques-de-Compostelle lors du jubilaire de 2010. En proie à une crise mystique, monseigneur Viterbo avait décidé de suivre les Chemins de Saint-Jacques et, par le biais d’un ami commun, il avait fini par frapper à la porte de l’historienne. Elle l’avait hébergé chez elle, un bel appartement situé dans une ruelle juste derrière la cathédrale. Lorsqu’elle était arrivée à Rome pour consulter ce manuscrit, Patricia n’avait pas hésité à solliciter le prefetto , qui avait aussitôt accédé à sa demande et, en remerciement de l’accueil qu’il avait reçu à Compostelle, il avait ordonné l’ouverture nocturne de la Bibliothèque vaticane. Mais il fit encore davantage. Le prefetto exigea qu’on mît l’original à la disposition de Patricia. Bonté divine, il ne fallait pas ! avait répondu Patricia, un peu gênée. Les microfilms auraient amplement suffi. Mais monseigneur Viterbo tenait à la choyer. Pour une historienne de son envergure, avait-il insisté, seul l’original pouvait convenir. Et quel original. La chercheuse galicienne effleura de ses doigts gantés les caractères bruns, tracés par la main scrupuleuse d’un pieux copiste, et les pages de vieux parchemin maculées par le temps et soigneusement protégées par des films transparents. Le manuscrit était composé d’une manière qui lui rappelait le Codex Marchaliamus ou le Codex Rossanensis . Sauf que celui- ci avait bien plus de valeur. Elle inspira profondément et en huma l’odeur singulière. Elle adorait ce parfum de poussière exhalé par le vieux papier... Elle contempla d’un regard amoureux les caractères menus et soigneusement alignés, sans ornements ni majuscules, du grec rédigé en lettres rondes et régulières, aux mots liés, comme si chaque ligne n’était en réalité qu’un seul et même verbe, interminable et mystérieux, un code secret chuchoté par Dieu au commencement des temps. La ponctuation était rare, ici et là apparaissaient des espaces en blanc, des abréviations de nomina sacra , et des guillemets inversés pour les citations de l’Ancien Testament, tout comme elle en avait vu dans le Codex Alexandrinus . Mais le manuscrit que Patricia avait sous les yeux était le plus précieux de tous ceux qu’elle avait pu approcher. Son seul titre imposait le respect : Bibliorum Sacrorum Graecorum Codex Vaticanus B . Le Codex Vaticanus . Cette relique du milieu du IV e siècle était le plus ancien et le plus complet manuscrit en grec de la Bible, ce qui en faisait le plus important trésor de la Bibliothèque vaticane. C’était inimaginable. Personne, à l’université, ne la croirait. L’historienne tourna la page avec une infinie précaution, comme si elle craignait de profaner le parchemin, et se plongea aussitôt dans le texte. Elle parcourut le premier chapitre de l’épître aux Hébreux ; l’objet de sa recherche se trouvait par là, non loin du début. Elle suivit les lignes des yeux, en murmurant les phrases grecques comme si elle entonnait une comptine, jusqu’à ce qu’elle découvrît le mot recherché. – Ah, le voilà ! s’exclama-t-elle. Phaneron . Bien sûr, on lui avait déjà parlé de ce vocable ; mais c’était une chose de l’évoquer à la table du réfectoire de l’université, c’en était une autre de l’avoir sous les yeux, au sein de la Bibliothèque vaticane, écrit par un copiste du IV e siècle, époque où l’empereur Constantin adopta le christianisme, dont l’orthodoxie de la foi fut établie par le concile de Nicée. Elle était en extase. Un nouveau bruit la fit sortir de ses pensées. Effrayée, Patricia revint à elle et regarda à nouveau fixement la salle d’inventaire des manuscrits. – Il y a quelqu’un ? demanda-t-elle d’une voix tremblante. Personne ne répondit. La salle paraissait déserte, mais elle ne pouvait en être sûre, il y avait tant de recoins. À moins que ce bruit ne vînt de la salle Leonina ? Elle ne pouvait le vérifier, car ce grand salon hors de son champ de vision, plongé dans l’obscurité, lui donnait la chair de poule. – Signore ! appela-t-elle à voix haute, dans son italien à l’accent hispanique, cherchant l’employé que le prefetto avait mis à son service. Per favore, signore ! Le silence était complet. Patricia considéra un temps la possibilité de rester assise et de poursuivre son étude du manuscrit dans la lourde atmosphère du lieu, mais les bruits et le mutisme qui les enveloppait l’avaient perturbée. Où diable était passé l’employé ? D’où venaient les bruits ? S’il s’agissait de l’employé, pourquoi ne répondait-il pas ? – Signore ! Assaillie par une inquiétude inexplicable, l’historienne se leva brusquement, comme pour conjurer sa propre peur. Elle se jura de ne plus jamais s’enfermer seule dans une bibliothèque la nuit. Noyé dans l’ombre, tout lui semblait sinistre et menaçant. L’historienne fit quelques pas et franchit la porte, décidée à retrouver l’employé. Elle entra dans la salle d’inventaire des manuscrits plongée dans l’obscurité, et aperçut une tache blanche à ses pieds. Elle se baissa. Il s’agissait d’une simple feuille de papier posée sur le sol. Intriguée, elle s’agenouilla et, sans y toucher, se pencha puis l’examina d’un air perplexe. – Qu’est-ce que c’est ? s’interrogea-t-elle. Au même instant, elle vit une silhouette qui, émergeant de l’ombre, se jeta sur elle. Son cœur bondit, elle voulut crier, mais une grosse main se plaqua sur sa bouche et elle ne parvint qu’à émettre un gémissement de terreur, rauque et étouffé. Elle essaya de s’enfuir. Mais l’inconnu, robuste, bloqua ses mouvements. Elle tourna la tête pour identifier son agresseur. Elle ne parvint pas à distinguer son visage, mais aperçut vaguement quelque chose qui brillait dans l’air. Au dernier moment, elle comprit qu’il s’agissait d’une lame. L’historienne n’eut pas le temps de réfléchir à ce qui lui arrivait, car une douleur lancinante lui déchira le cou. Elle voulut crier, mais l’air lui manquait. Elle attrapa l’objet froid qui lui transperçait le cou, s’efforçant désespérément de l’arrêter, mais il s’enfonçait trop puissamment, et ses forces commençaient à l’abandonner. Un liquide chaud se répandit sur sa poitrine et, dans son dernier râle, Patricia prit conscience qu’il s’agissait de son propre sang. Ce fut la dernière chose qu’elle pensa, car aussitôt après sa vision s’emplit de lumière, puis ce fut l’obscurité. I Le pinceau balaya la terre qui s’était accumulée sur la pierre tout au long des siècles, s’insinuant dans les pores les plus minuscules. Lorsque le nuage de poussière brune se dissipa, Tomás Noronha approcha ses yeux verts de la pierre, tel un myope inspectant son travail. – Quelle corvée ! Il soupira profondément et passa le dos de la main sur son front, s’efforçant de reprendre courage. Ce n’était décidément pas le genre de tâche qu’il appréciait, mais il se résigna. Avant de se remettre à l’ouvrage, il s’offrit quand même une courte pause. Il tourna la tête et admira la pleine lune qui enveloppait d’un halo argenté la majestueuse colonne Trajane. La nuit était sans doute le moment qu’il préférait pour travailler ici, dans le centre de Rome ; le jour, la clameur des klaxons et le ronflement furieux des bulldozers étaient proprement infernaux. Tomás consulta sa montre. Il était déjà une heure du matin, mais il était résolu à profiter du sommeil des automobilistes romains pour avancer dans son travail. Il ne repartirait d’ici qu’à six heures, lorsque les voitures se remettraient à encombrer les rues et que le vacarme de la vie romaine retentirait à nouveau. Alors seulement il irait se reposer dans son petit hôtel de la via del Corso. À sa grande surprise, son portable sonna. Qui donc pouvait l’appeler à une heure pareille ? La voix de sa mère résonna dans l’appareil, inquiète comme toujours. – Mon chéri, quand rentres-tu à la maison ? Il se fait tard ! – Mais, maman, je t’ai déjà dit que j’étais à l’étranger, expliqua Tomás, en s’armant de patience ; uploads/Litterature/ dos-santos-jose-rodrigues-l-x27-ultime-secret-du-christ-pdf.pdf
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Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Aoû 10, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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