Emile Poulat Eliade M., Le sacré et le profane. In: Revue française de sociolog
Emile Poulat Eliade M., Le sacré et le profane. In: Revue française de sociologie. 1967, 8-1. pp. 100-101. Citer ce document / Cite this document : Poulat Emile. Eliade M., Le sacré et le profane. In: Revue française de sociologie. 1967, 8-1. pp. 100-101. http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsoc_0035-2969_1967_num_8_1_3020 Revue française de sociologie la communauté après l'étude de la société globale, fait-il perdre à l'argumentat ion quelque force, peut-être aussi l'abondance des références et l'entrelacement des thèmes nuisent-iïs quelque peu à la netteté de la progression. L'ouvrage n'en est pas moins, dans l'ensemble, très riche et très suggestif : il est complété de surcroît par une bibliographie d'une qualité exceptionnelle, où le chercheur pourrait trouver une aide précieuse. Nous ne pouvons terminer ce rapide compte rendu que par un souhait : celui d'une publication prochaine. F. Chazel. Eliade, Mircea. Le sacré et le profane. Paris, Gallimard, 1965, 187 p. 3 F. (Idées, 76) . M. Eliade a beaucoup publié. Il faut lui savoir gré d'avoir rédigé à l'intention du grand public cette « introduction générale à l'étude phénoménologique et historique des faits religieux ». Si son érudition est incontestable, sa pensée a tou jours été contestée : elle s'offre ici sous une forme ramassée, dans ses thèses essentielles, avec le souci de prévenir méprises et équivoques. Pourtant, je l'avoue, cette cause de satisfaction ne suffit pas à dissiper les résistances qu'avait pro voquées en moi la lecture du Traité d'histoire des religions (1949) qui avait imposé en France le nom de son auteur. A la suite de R. Otto (Das Heilige, 1917), M. Eliade entend étudier non les idées de Dieu et de la religion, mais les modalités de l'expérience religieuse; et en réaction contre lui, il veut saisir cette expérience non au seul plan de l'intell igence, dans son opposition à la rationalité, mais à travers la totalité de ses manif estations, dans son opposition au profane. De là, un inventaire gigantesque de tous les matériaux susceptibles d'éclairer le monde des hiérophanies, des religions les plus évoluées aux sociétés les plus archaïques : longue marche à travers l'his toire et les civilisations. M. Eliade n'ignore donc pas «les innombrables conditionnements que l'expé rience religieuse du monde a subis au cours de l'âge»; il sait le risque, où sont tombés Tylor, Frazer et tant d'autres, d'oublier que les réactions de l'homme devant la nature sont infiniment diverses et déterminées par la culture, donc par l'histoire. Mais, précise-t-il, « il importe davantage à notre dessein de faire ressortir les notes spécifiques de l'expérience religieuse que de montrer ses mult iples variations ». Pourquoi ? Parce qu'il croit à l'existence d'un homo religiosus où il pense observer une similitude de comportement que les apports successifs — la tradition judéo-chrétienne, par exemple, — n'ont pas substantiellement modifiée, mais qui, en revanche, contraste radicalement avec le comportement nouveau de l'homme non religieux; il ne s'en désintéresse pas, mais Д ne croit pas qu'elle puisse l'aider à comprendre la permanence plurimillénaire de ce type d'homme et l'unité profonde de ses conceptions du monde. La compréhension du comportement de l'homo religiosus et de son univers mental, dont M. Eliade fait « le but ultime de l'histoire des religions », implique pour lui deux postulats : 1) II faut remonter aussi haut que possible dans le passé religieux de l'humanité, non seulement pour élargir le champ de la docu mentation et se familiariser avec des sociétés très éloignées de nous, mais, plus encore, pour retrouver la primitivitě de l'expérience religieuse, au-delà des mythologies et des théologies des religions postérieures, trop marquées par le long travail des lettrés; 2) A l'autre extrémité, l'homme non religieux des sociétés modernes éprouve une difficulté de plus en plus grande à retrouver les dimens ions existentielles de l'homme religieux des sociétés archaïques : on ne peut, en effet, les découvrir que dans la mesure où l'on accepte la croyance qui les fonde. M. Eliade précise bien d'ailleurs : 1) qu'on aurait tort de chercher dans cette 100 Bibliographie disposition d'ouverture accueillante l'expression d'une nostalgie secrète pour la condition révolue de l'homme religieux archaïque; 2) et que si son analyse souligne surtout l'appauvrissement consécutif à la sécularisation, il ne méconnaît ni l'enrichissement du symbolisme religieux à mesure qu'il s'intègre dans des systèmes de pensée de plus en plus articulés, ni ce que l'homme a gagné, dans les sociétés modernes, à la désacralisation de son comportement. Bien plus, l'homme non religieux d'aujourd'hui se laisse voir, malgré qu'il en ait, comme un héritier : «Une peut abolir définitivement son passé puisqu'il en est lui-même le produit », et toutes ces situations depuis longtemps dépassées par l'Histoire font partie de notre propre histoire. Ce serait donc en rester à un « truisme » que se situer au niveau de l'histoire au lieu de s'attacher à l'invariant dont elle est le lieu. Dans cette perspective, l'histoire apparaît comme un immense et irréversible processus de sécularisation, un gigantesque accumulateur lentement vidé de son potentiel sacral, et c'est à recueillir cette substance que doit s'efforcer l'historien des religions : son but n'est pas de s'insérer dans l'histoire, mais de s'en dégager. La cueillette des faits se substitue ainsi au traitement du document, et ce parti pris méthodologique a été souvent reproché à M. Eliade. Mais il faut aller plus loin : ce comparatisme généralisé, axé sur la compréhension de l'expérience religieuse, n'est-il pas condamné à ne nous en proposer qu'un modèle intelligible de son unité ? Cette unité, acceptée comme un axiome, est-elle autre chose qu'un jeu de la pensée sym bolique dans laquelle est préalablement enfermée l'expérience religieuse ? Et si cette pensée symbolique peut se présenter comme une clé universelle, n'est-ce pas que, littéralement, elle se joue de l'histoire ? Clé universelle puisqu'elle ouvre même la psyché de l'homme moderne non religieux dont tout le comportement demeure, sans qu'il en ait conscience, religieusement orienté, en même temps qu'il a perdu, au niveau du vécu, sa dimension humaine. Car le sacré ne s'évapore pas : il s'occulte, pense M. Eliade, prêt à resurgir. L'histoire non plus, faut-Д ajouter ici, et l'auteur n'aurait pas manqué de s'en apercevoir si son ouvrage avait tenu la promesse du titre : le profane n'y tient aucune place, sinon, au terme, quand il semble l'occuper toute. Ce n'est pas un hasard, si l'homo religiosus type est celui pour qui le sacré est tout, pour qui le profane est la menace installée aux frontières de l'espace territorial et social. Aujourd'hui, le profane a tout envahi et balayé le sacré de la surface du sol. Cette façon antinomique de sentir les choses est assez courante et chacun se contente de la valoriser selon ses convictions idéologiques. Mais faut-il voir dans cette problématique un instrument de pensée ou la simple projection de nos conflits ? L'hypothèse d'un invariant ne serait- elle pas féconde dans la mesure où le changement historique demeure de faible amplitude et de grande lenteur ? En retour, dans quelle mesure l'invariant proposé n'est-il pas la dérivée d'une in terprétation de notre temps, le produit d'une situation historique colorant le loin tain passé où l'on a cru l'exhumer ? Sacré, profane, mots familiers, trop familiers, et qui, inconsciemment, nous tiennent. E. Poulat. Léon, Antoine. Formation générale eť apprentissage du métier. Paris, Presses Univ ersitaires de France, 1965, xv-396 p., fig., tabl., 24 F (Bibliothèque scientifique internationale. Section Pédagogie) . Le rôle décisif de la culture générale est presque toujours implicitement admis. Et de fait, on apprend davantage son métier « sur le tas » qu'à l'école; rares sont les connaissances scolaires qui ont une utilité pratique dans la vie. L'école devrait donc se proposer plutôt de former des hommes que de les informer : l'option est 101 uploads/Litterature/ eliade-m-le-sacre-et-le-profane.pdf
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