Dissertation : Le théâtre est-il simplement un support pour la représentation o
Dissertation : Le théâtre est-il simplement un support pour la représentation ou peut-il se suffire à lui-même ? I. Le texte théâtral, un texte à jouer A. Une évidence historique 1. Les origines du théâtre (chants et danses lors des fêtes dionysiaques) l'apparentent plus au spectacle qu'à la littérature. 2. Dans l'Antiquité et au Moyen Âge, le public étant majoritairement illettré, les pièces sont diffusées par la représentation, non par la publication. B. Des effets uniquement possibles grâce à la représentation 1. La catharsis, ressort indispensable de la tragédie antique, s'effectue parce que le héros tragique, incarné par un acteur, devient un espace de projection pour le spectateur. 2. Le comique de gestes n'est possible que grâce à la représentation : dans l'extrait de la scène VI de I'lle des esclaves de Marivaux (texte A), la didascalie « À ce mot il saute de joie » n'est pas, en soi, comique, ce sont les cabrioles de l'acteur sur scène qui peuvent l'être. 3. Certains dispositifs théâtraux perdent en efficacité s'ils ne sont pas vus : scène à témoin caché dans On ne badine pas avec l'amour (III, 3) ; poubelles où sont enfermés Nell et Nagg dans Fin de partie de Beckett. C. Tout n'est pas écrit... 1. Certaines formes théâtrales reposent en grande partie sur l'improvisation des acteurs, le texte écrit se résumant à un simple canevas : soties du Moyen Âge ; pièces de la commedia dell'arte. 2. L'histoire du théâtre reste d'ailleurs en partie inaccessible, puisque, même si on peut lire le texte du Malade imaginaire, on ne verra jamais Molière jouer Argan. II. Mais également un texte à lire A. La dimension littéraire du texte théâtral 1. Même si ses origines sont du côté du spectacle, dès l'Antiquité, Aristote classe la « poésie dramatique » (le théâtre) dans les grands genres littéraires, aux côtés de la poésie épique (l'épopée), en distinguant deux sous-genres : tragédie et comédie. 2. La beauté de la langue, du style de l'auteur est depuis longtemps un critère d'appréciation d'une pièce de théâtre : l'alexandrin racinien ; le « marivaudage » ... 3. Or, si cet aspect littéraire est perceptible lors de la représentation, il ne peut réellement s'apprécier et s'analyser qu'en prenant le temps de lire et relire le texte, à son grès et à son rythme. B. La lecture : un plaisir sans fausse note 1. Qui n'a jamais été dérangé, lors d'une représentation théâtrale, par la toux, les rires ou les chuchotements d'un spectateur peu discret ? 2. De même, le plaisir de la représentation est parfois perturbé par le jeu faux d'un acteur, la laideur d'un décor, le peu d'inventivité d'une mise en scène... C. La lecture : une mise en scène imaginaire ? 1. Les didascalies permettent au lecteur de se représenter le(s) lieu(x) et l'époque de l'intrigue, de comprendre les situations, de décrypter les intentions cachées des personnages (didascalie « PERDICAN, à haute voix, de manière que Camille l’entende » dans la scène 3 de l'acte III d'On ne badine pas avec l'amour, d'imaginer les jeux de scène, etc. 2. Certaines pièces, réputées injouables, sont parfois plus accessibles par la lecture que par la représentation : Le Soulier de satin de Paul Claudel dure environ onze heures dans sa version intégrale et la pièce est, de ce fait, rarement montée. III. Le texte théâtral : plus qu'un simple support, une partition à interpréter A. Le texte théâtral appelle la scène 1. La difficulté à mettre en scène telle pièce est précisément ce qui en fait l'intérêt : dans la scène d'exposition d'On ne badine pas avec l'amour, où Maître Blazius et Dame Pluche arrivent juchés respectivement sur une mule et sur un âne, la contrainte du texte oblige le metteur en scène à trouver des solutions inventives, qui vont donner du sens à la pièce. 2. Une didascalie, même très détaillée, demande toujours une interprétation : Dans Les Bonnes, de Jean Genet, la didascalie initiale indique : « Des fleurs à profusion. » Fleurs réelles ou artificielles, coupées ou en pot, roses, lys, tulipes ? B. Une infinité d'interprétations possibles grâce à la mise en scène 1. La liberté du metteur en scène : dans le choix de la mise en scène d'époque ou moderne); dans l'interprétation du texte... 2. Une interprétation peut renouveler la vision qu'on se fait d'un personnage : lorsqu'il joue le personnage de Tartuffe, Louis Jouvet en fait un homme amoureux, prêt à tout pour séduire celle qu'il aime, prenant ainsi le contre-pied de la tradition qui ne voit en lui qu'un « porc lubrique [...] un hypocrite de la luxure » (Louis Jouvet, Pourquoi j'ai monté Tartuffe, 1950). 3. C'est finalement grâce à la mise en scène que la vision que l'on a des pièces, et en particulier des pièces classiques, peut évoluer et qu'elles continuent à vivre. uploads/Litterature/ fr-dissert-4.pdf
Documents similaires










-
29
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Aoû 27, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
- Taille du fichier 0.0471MB