n° 146 avril 2012 Annexes Bibliographie / Sitographie [page 31] Biographies [pa
n° 146 avril 2012 Annexes Bibliographie / Sitographie [page 31] Biographies [page 31] Un groupement de textes sur la mélancolie [page 32] Note d’intention [page 35] Entretien avec Alexandra Rübner [page 37] Édito Un homme qui dort est la troisième œuvre publiée, en 1967, de Georges Perec. C’est l’histoire d’un étudiant qui traverse une période de désintérêt total pour le monde, une sorte de dépression, et dont on suit l’évolution, l’enfermement et les errances, jusqu’à l’éclaircie finale. C’est un récit de Georges Perec qui n’est pas écrit pour le théâtre et dont les particularités posent de multiples questions quant au passage à la scène : une narration atypique à la deuxième personne ; une interaction entre l’espace intérieur, sensoriel du personnage, celui de la chambre avec ses objets, et celui de la ville où il déambule ; l’exploration d’un sentiment qu’on peut nommer mélancolie. C’est un spectacle du théâtre de la Demeure, mis en scène par Alexandra Rübner qui jusque-là s’est consacrée à l’univers baroque. Son projet, à travers l’adapta tion scénique d’Un homme qui dort, est de mettre au jour une expérience extrê mement aiguë à laquelle nous pouvons tous être assujettis. Pour cela, elle crée un langage théâtral dont le champ d’exploration est celui de l’intime. Les propositions de travail avant le spectacle amèneront donc les élèves à s’in terroger activement sur ces enjeux. Comment raconter au théâtre ? Comment représenter les espaces hétérogènes où évolue le personnage ? Comment repré senter une expérience intime ? Après la représentation, d’autres activités les feront réfléchir aux choix de la compagnie concernant la scénographie, le jeu et la mise en scène. Avant de voir le spectacle : la représentation en appétit ! Un homme qui dort : un texte à dire ? [page 2] L’espace [page 6] Raconter ou incarner ? [page 8] Un langage scénique pluriel [page 11] Après la représentation : pistes de travail Pour commencer [page 13] Une scénographie riche et complexe, à se remémorer et à interpréter [page 13] Les personnages, êtres vivants ou présences mortes ? [page 19] Des objets et des hommes [page 26] Un parcours initiatique [page 28] Un homme qui dort Texte de Georges Perec Mise en scène d’Alexandra Rübner au Trident, scène nationale de Cherbourg-Octeville, du 3 au 12 mai 2012 Les dossiers pédagogiques « Théâtre » et « Arts du cirque » du réseau SCÉRÉN en partenariat avec le Trident, scène nationale de Cherbourg-Octeville. Une collection coordonnée par le CRDP de l’académie de Paris. © REBECCA GUIBERT Retrouvez sur http://www.cndp.fr/crdp-paris/ l’ensemble des dossiers « Pièce (dé)montée » 2 n° 146 avril 2012 Avant de voir le spectacle La représentation en appétit ! UN HOMME QUI DORT : UN TEXTE À DIRE ? b On demande aux élèves de réfléchir au titre du roman, qui est aussi celui du spec tacle, en leur donnant cette consigne : for mulez des hypothèses sur le sens du titre ; que vous laisse-t-il attendre concernant le spectacle ? Il paraîtra peut-être d’abord paradoxal aux élèves de représenter « un homme qui dort » : comment représenter l’inactivité ? Peut-on jouer le sommeil ? Il faut alors s’interroger sur le verbe « dormir », qui renvoie à « rêver », peut-être. On peut envisager la représentation des rêves d’un personnage, rêves du sommeil ou rêves de la fantaisie… Dormir, c’est peut-être aussi être passif, ne pas prendre en charge sa vie… Par ailleurs, le titre n’identifie pas de person nage : l’article indéfini généralise. Le spectateur pourra être invité à partager une expérience commune. Pour enrichir les hypothèses, on peut demander aux élèves de terminer la phrase, d’adjoindre un groupe verbal à « un homme qui dort », qui devient alors le sujet d’une phrase. Ce titre est inspiré de Marcel Proust, qui déve loppe au début de Du côté de chez Swann, des observations sur le rapport entre l’état de veille et le sommeil : « Un homme qui dort tient en cercle autour de lui le fil des heures, l’ordre des années et des mondes ». Le roman de Georges Perec développe souvent les sensations du personnage au moment de l’endormissement ou du réveil, ou une sorte de confusion entre veille et sommeil, rêve et réel. Le titre est repris plusieurs fois dans l’œuvre, ce qui fait du sommeil un motif. La phrase « Tu dors » revient régulièrement. Le thème du sommeil importe parce que le personnage y passe du temps, qu’il s’agisse d’un véritable sommeil ou d’un sommeil éveillé, d’une léthargie. Le titre peut donc passer pour une métaphore de son état intérieur. À la der nière page, la phrase « Cesse de parler comme un homme qui rêve » est mise en évidence, seule dans un paragraphe. b On propose aux élèves une première confrontation avec le texte pour mettre en évidence une particularité, la narration à la deuxième personne, qui soulève des ques tions quant au passage à la scène. On distribue à des groupes de deux, trois ou quatre élèves de courts extraits du texte de Georges Perec et on leur demande d’en préparer une lecture orale et une mise en espace. Il est intéressant de donner le même extrait à plusieurs groupes, afin de comparer les propositions. Pour mettre en évidence un enjeu essentiel, pour ce texte, du passage à la scène, on insiste sur les consignes suivantes, que l’on précise selon le degré d’aisance des élèves. – Les lecteurs doivent adresser clairement le texte (à eux-mêmes, aux autres acteurs- lecteurs, aux spectateurs, au-delà de la salle où on se trouve). – Les lecteurs doivent décider de leur position dans l’espace de jeu et de leur rapport au public (le pronom « tu » peut inviter à s’adresser aux spectateurs, mais ce n’est qu’une possibilité ; le choix de la proximité ou de l’éloignement, de Le titre Qui parle ? À Qui ? Pour cette création, le théâtre de la Demeure a choisi un texte qui n’est pas au départ destiné à la scène. Il est bien sûr très intéressant de faire lire et étudier Un homme qui dort, en vue de sa confrontation avec l’adaptation scénique ; c’est l’occasion d’explorer l’univers de Georges Perec d’une part et, d’autre part, de se poser des questions essentielles sur ce que c’est que raconter au théâtre. Mais sa lecture intégrale n’est pas indispensable. 3 n° 146 avril 2012 Extraits pour les lectures la dispersion ou du regroupement produira des effets différents). – Le groupe doit réfléchir à la prise en charge du texte par ses différents membres (la lecture peut être faite par un lecteur ou en chœur ; que font ceux qui ne lisent pas ?…). Après chaque présentation, on demande aux élèves spectateurs qui parle à qui, et qui le pronom « tu » représente. Il est probable que parmi les propositions, on trouvera : un double (on peut même envisager l’idée d’un double corps), un personnage recevant des indications d’un donneur d’ordres (un acteur d’un metteur en scène…), le public… On cherche aussi à formuler l’intention du ou des lecteurs. On ana lyse les effets liés à la place et à la position des lecteurs. L’exercice gagnera à être retravaillé avec des conseils des autres élèves et de l’en seignant, si ces points ne sont pas précisément perçus par le public, ou si des idées émergent au cours de l’analyse. Tu es assis, torse nu, vêtu seulement d’un pantalon de pyjama, dans ta chambre de bonne, sur l’étroite banquette qui te sert de lit, un livre, les Leçons sur la société industrielle, de Raymond Aron, posé sur tes genoux, ouvert à la page cent douze. C’est d’abord seulement une espèce de lassitude, de fatigue, comme si tu t’apercevais sou dain que depuis très longtemps, depuis plusieurs heures, tu es la proie d’un malaise insi dieux, engourdissant, à peine douloureux et pourtant insupportable, l’impression d’être sans muscles et sans os, d’être un sac de plâtre au milieu de sacs de plâtre. Le soleil tape sur les feuilles de zinc de la toiture. En face de toi, à la hauteur de tes yeux, sur une étagère de bois blanc, il y a un bol de Nescafé à moitié vide, un peu sale, un paquet de sucre tirant sur la fin, une cigarette qui se consume dans un cendrier publicitaire en fausse opaline blanchâtre. Georges Perec, Un homme qui dort, Gallimard, coll. « Folio », 1990, p. 17-18. © Éditions Denoël, 1967 L’utilisation de la deuxième personne semble inspirée de Franz Kafka dont une citation est mise en exergue d’Un homme qui dort. Georges Perec parle de « la lecture, à outrance » de cette œuvre pendant qu’il écrivait Un homme qui dort, dont elle a donc pu inspirer la deuxième personne insolite. On voit bien une parenté de thème : solitude, dédoublement, rapport diffi cile au monde. Chez Franz Kafka, il ne s’agit pas d’un récit, et la deuxième personne est d’emblée comprise comme le dédoublement de l’émetteur qui s’adresse à lui-même. Chez Georges Perec, le statut du uploads/Litterature/ george-perec-un-homme-qui-dort 1 .pdf
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- Publié le Jan 01, 2023
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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