L'antiquité classique Le roi Hiempsal II de Numidie et Rhodes Vassa N. Kontorin
L'antiquité classique Le roi Hiempsal II de Numidie et Rhodes Vassa N. Kontorinis Résumé L'auteur publie une inscription inédite de Rhodes par laquelle le peuple honore le roi de Numidie Hiempsal II (c. 88-60 avant J.- C). Elle étudie la généalogie de cette famille royale et reprend une inscription de Syracuse (Notizie degli Scavi, 1956, p. 96), qui, malgré ses mutilations, permet de mieux fixer la succession chronologique des différents rois. Citer ce document / Cite this document : Kontorinis Vassa N. Le roi Hiempsal II de Numidie et Rhodes. In: L'antiquité classique, Tome 44, fasc. 1, 1975. pp. 89-99; doi : https://doi.org/10.3406/antiq.1975.1766 https://www.persee.fr/doc/antiq_0770-2817_1975_num_44_1_1766 Fichier pdf généré le 06/04/2018 LE ROI HIEMPSAL II DE NUMIDIE ET RHODES 1 Pendant les travaux2 exécutés dans l'église byzantine Panagia tou Kastrou, située dans la vieille ville de Rhodes, en 1969, on a découvert à 1,50 m du sol, une inscription qui est encastrée à l'envers sous le crépi du pilastre nord de l'arc central. C'est une base rectangulaire en marbre de Lartos dont la hauteur est 0,30 m, la largeur 0,68 m et la hauteur des lignes 0,02 m. Elle porte le texte suivant (voir planche I) : Ό δΰμος ο Ψο$ίω\> έτίμ,ασε Βασίλη Ίνμψύα βασιλέως Γάου του εκ βασιλέως 5 Μαστανάβου τοΰ εχ βασιλέως [Mac 3]αννάσα. Il s'agit sans aucun doute d'une base de statue élevée par les Rhodiens en l'honneur du roi de Numidie Hiempsal II (88-60 av. J. C. environ) 4, déjà connu par les inscriptions latines et par la littérature grecque et 1 Un court rapport préliminaire a été donné dans les Archaeologika Analekta ex Athinon, VII (1974), fasc. 2, p. 213. 2 Je tiens à remercier le foui Heur M. Elias Kollias, qui m'a permis de publier cette le Service Archéologique du Dodecanese, ainsi que M"e Eos Zervoudaki pour ses indications. Au cours de ce travail, mon maître, M. Louis Robert, m'a aidé de ses conseils ; je lui exprime ma profonde gratitude. 3 Sur la signification de cette lettre pointée à l'intérieur des crochets droits, v. Jeanne et Louis Robert, La Carie, II, p. 11. On distingue assez faiblement sur la pierre la barre horizontale supérieure du Σ et son apex extérieur. 4 C'est la situation politique très troublée du royaume numide à cette époque qui nous oblige à dater très approximativement le règne d'Hiempsal II en utilisant le premier et le dernier texte où on le mentionne comme roi : Plutarque, Marius, 40, qui raconte que le jeune Marius s'est réfugié en Afrique, auprès de lui, en 88 av. J. C. et Cicéron, In Vatinium, V, 12, qui rappelle que Vatinius, en 62, passa de son territoire pour se rendre en Espagne. Nous discutons ce point de vue un peu plus loin. 90 V. Ν. KONTORINI latine, mais qui apparaît ici pour la première fois dans l'épigraphie grecque. L'inscription soigneusement gravée en beaux caractères du ier s. av. J.-C, ornés d'apices, est dans l'ensemble bien lisible sur la pierre et sur l'estampage. Le texte ne pose pas de problèmes de restitution et l'établissement du nom de Massinissa5 à la dernière ligne est certain selon le stemma de la famille qui ressort de l'inscription. La transcription des noms des rois numides mérite d'être notée en premier lieu. A la 1.2 on lit : Ίυμψύα. La présence assez curieuse de deux Y donne une nouvelle forme du nom du roi Hiempsal, tout à fait différente de celles que nous offrent les nombreuses variantes dans la tradition manuscrite des auteurs grecs : on a ainsi dans Plutarque 6 Ίεμφάλας, Ίεμφάλ, Ίαμφά, Ίάμφα et Ίάμφας. Chez Dion Cassius 7, on lit Ίεμφοΰ et chez Diodore 8 Ίάμφαμος. Dans Appien9, on trouve Ίεμφάλας et, dans Joannes Malalas, dit d'Antioche 10, Ίέμψαλος et Ίέμ- φαδω. Par contre, la tradition latine, épigraphique " et littéraire 12, donne presque unanimement le type Hiempsal, sauf quelques variations comme Hiemsal, Hiensal 13 et Hyempsal u, assez proches d'ailleurs. 5 L'étude de G. Camps, Massinissa, ou le début de l'histoire, dans Libyca, VIII (1960), p. 187, a montré qu'il fallait adopter comme orthographe du nom la forme Massinissa, et non Masinissa etc. En effet, la seule inscription libyque (J. B. Chabot, Recueil des inscriptions libygues, n° 2), qui mentionne le nom de Massinissa, l'écrit IXIX (MSNSN), c'est-à-dire qu'elle donne la même valeur aux sifflantes de la deuxième et de la dernière syllabe. 6 Les quatre premiers types dans Pompée, 124 (éd. Teubner 1973 ; v. l'apparat critique) et le dernier dans Marins, 40, 4 et 10 (éd. Teubner 1971). 7 XLI, 41, 3 (éd. Boissevain, vol. II, p. 24). s XXXIV/XXXV, 35, 1 (éd. Loeb, 1967, p. 134). Ici il s'agit de son homonyme, fils de Micipsa. 9 De bello civili, I, 62 et 80 (éd. Em. Gabba, Florence, 1958). 10 Chronographia, fr. 64. 11 Dessau, 840, 3. — Gsell, Inscriptions latines de l'Algérie,!, 1242, 1. 12 Salluste, Bellum Jugurthinum, V, 7 (éd. Budé, 1941). Il s'agit ici aussi de l'homonyme Iempsal I — Ciceron, In Vatinium, V, 13 (éd. Loeb, 1958) et De lege agraria, oral, I, 4, 10 et 11 ; oral, II, 22, 58. 13 Ce sont deux types proches donnés par différents manuscrits pour le même passage de Salluste de la note (12). L'inscription CIL, VIII, 8834, 1, provenant de Tubusuctu, de Mauretania Sitifensis, fournit aussi la forme Hiemsal. 14 Tite-Live, Periochae ex libro LXII (éd. Teubner 1910 ; voir l'apparat critique). Ici c'est le remplacement de iota par / grec qui fait la différence. De toute façon, un autre manuscrit fournit pour le même passage la forme courante Hiempsal, que l'éditeur a préférée. LE ROI HIEMPSAL II DE NUMIDIE ET RHODES 91 L. 4, Γάος, est encore une nouvelle forme. Jusqu'à présent les textes épigraphiques et littéraires grecs et latins gardaient constamment la diphtongue -AY. On avait ainsi Γαϋος à Syracuse 15, Γαύδας dans Dion Cassius 16. Les Latins 17 ne connaissent qu'un seul type : Gauda. L. 4 et 5 : του έχ βασιλέως. L'emploi de la préposition èx + génitif au lieu du simple génitif d'origine pour désigner l'ascendance royale est courant 18 à l'époque hellénistique avancée 18a. Au contraire, on y recourt très rarement dans le cas de particuliers 19. Dans le coin du Γ, on distingue20 une petite barre oblique qui marque l'association d'un Κ au Γ. Peut-être voulait- on garder les deux graphies EK et ΕΓ (ΕΓ est très fréquent devant un bêta, par ex. έγ βασιλέως). L. 6. [Μασ]αννάσα. Quoique le début du nom manque, on le restitue ici sans hésiter21 tel qu'il nous apparaît dans les inscriptions délien- nes, où on a toujours le forme avec un redoublement du Ν " : cf. la dédicace du roi Nicomède, de Bithynie 23 [Βασιλείς Νιχομήδης Έπι- [φ]ανής/ [βασιλέως] Προυσίου Ι β[ασιλέα Μα]σαννάσαν βασιλέως Γαία ···, celle du Rhodien Charmylos, fils de Nicarchos 24, Βασιλέα Μασαννάσαν βασιλέως Γαία/Χαρμύλος Νιχάρχου 'Ρόδιος ... et du Délien Hermon, fils de Solon 25, [Β]ασιλέα M ασαννά[σαν]/ βασιλέως Γαία "Ερμων Σόλωνος τον αύτοϋ φίλον. Dans les comptes des hiéropes Inscr. Délos 442 A, le roi numide est mentionné plusieurs fois, à l'occasion soit de son couronnement26 par les Déliens εις τους στεφάνο[υς] τώι βασιλει " C'est une inscription de Syracuse, Notizie degli Scavi, 1956, p. 96. Cf. notamment les remarques dans le Bulletin Epigraphique, 1958, 561. Je reviendrai sur cette : ci-dessous, p. 95 sq. 16 Dion Cassius, frg. 89, 4 (Ed. Boiss. vol. I, p. 333). 17 Dessau, 840, 3; Gsell, I.e., I, 1242, 2. — Salluste, U, LXV, 1. 11 Cf. les nombreux exemples dans OGI, Index VI. Ila Une inscription inédite découverte récemment dans la ville de Rhodes offre un autre exemple de cette tournure ; Τον έγ βασιλέως Άριαράθου. 19 L. Robert, BCH, 1933, p. 483. 20 Surtout à la 1.5 qui est mieux conservée. Sa répétition prouve qu'elle n'est pas due au hasard. 21 Les traces sur la pierre ne permettraient pas la répétition d'un sigma. 22 Sur l'orthographe du nom en général, cf. Durrbach, Choix d'inscriptions de Délos, p. 158. V. aussi Gsell, Histoire ancienne de l'Afrique du Nord, III, p. 178. " Inscr. Délos, 1577. 24 IG, XI, 4, 116. " IG, XI, 4, 1115. 26 L. 43 et 67. 92 V. Ν. KONTORINI Φίλίππωί χαί τώι βασιλεϊ Μ[α]σ[α]ννάσαι, soit d'un chargement de blé envoyé par lui et qui fut vendu au profit du temple 27 : την τιμήν του σίτου τοΰ παρά τοϋ βασιλέως Μασαννάσα. L'intérêt de ce document unique ne consiste pas seulement dans la graphie particulière de noms indigènes. C'est en effet le seul texte épigraphique grec qui présente le stemma d'une grande partie (202-60 av. J. C. environ) de la famille royale de Numidie ; pour cette raison il nous permet surtout de compléter ou de corriger quelques points de vue sur l'histoire de cette famille. Connu comme un roi cultivé 28, Mastanabal, fils 29 de Massinissa, vainqueur aux Panathénées εν τ[ώι ί]/πποδρόμωι. fèjx πάντων [συν- ωρίδι] / πωλίχεϊ Μαστανάβας [βασ]ιλέ/ως Μασανάσσου 30, a été omis dans l'inscription31 de la nouvelle Carthage, uploads/Litterature/ hiempsal-persee.pdf
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- Publié le Jul 02, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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