M.A HADDADOU Introduction à la littérature berbère suivi d’une Introduction à l
M.A HADDADOU Introduction à la littérature berbère suivi d’une Introduction à la littérature kabyle Haut Commissariat à l’Amazighité 2009 I Nǧǧima At Uxeddal, yemma (1922-1984) I Muḥend-Ameqqran At Uxeddal, baba (1915-1988) I Faṭima U Gana, setti (1903-1991) A ma mère, à mon père et à ma grand-mère in memoriam Introduction à la littérature berbère Littérature berbère - Tasekla tamaziɣt - 7 - a littérature berbère est aujourd’hui, encore, en dépit des centaines de recueils de textes et des dizaines d’études qui lui sont consacrées, mal connue du public. Elle n’est pas enseignée dans les écoles et seuls les départements de berbère de Tizi Ouzou et de Béjaïa, lui consacrent des modules. La littérature berbère, qu’elle soit écrite en berbère ou dans d’autres langues, fait pourtant partie du patrimoine national maghrébin et certains de ses auteurs ont acquis, par leurs œuvres, une dimension universelle. Il convient, cependant, de faire une distinction entre littérature écrite en berbère et littérature produite par les Berbères : la première, comme c’est indiqué, est produite dans la langue berbère, l’autre est le fait de Berbères qui ont écrit dans d’autres langues. Les Berbères qui possèdent pourtant l’un des plus vieux systèmes d’écriture du monde, ont très peu écrit dans leur langue. En tout cas les œuvres les plus marquantes, celles qui font partie de ce que l’on appelle aujourd’hui le «patrimoine universel» ont été écrites dans d’autres langues. Un alphabet très ancien mais pas d’œuvre littéraire marquante écrite dans cet alphabet Selon les estimations les plus crédibles, l’alphabet berbère - appelé libyque dans l’antiquité- remonterait au moins au 7ème siècle avant JC. Des symboles identiques aux caractères berbères figurent même dans les peintures rupestres de la préhistoire mais on ignore s’il s’agit de graphèmes ou d’éléments décoratifs. Quoi qu’il en soit, les Berbères ont possédé très tôt un système d’écriture mais la seule littérature qu’ils nous aient léguée se résume à des inscriptions, principalement des inscriptions funéraires. Les textes les plus longs, comme celui qui figure sur le mausolée de Massinissa à Thouga (Dougga en Tunisie) n’excèdent guère quelques lignes et le plus souvent ils comportent surtout des noms propres et des formules stéréotypées, relatives notamment à la filiation des L Introduction à la littérature berbère - 8 - personnages. On ignore si des textes longs ont été rédigés mais tout laisse croire qu’il n’y en a pas eu. Aujourd’hui, on est certain que le fameux ouvrage de Juba II, Lybica, dans lesquel la plupart des auteurs grecs et romains de l’antiquité ont puisé l’essentiel de leur information sur le Maghreb, a été écrit en punique. Et, de nos jours, les Touaregs, seul groupe berbérophone à avoir conservé l’usage de l’écriture, ne possèdent pas non plus de «texte long» et chez eux, l’écriture se limite à la rédaction de courts messages. Faut-il croire que c’était là -et que c’est là, pour ce qui est des Touaregs- la fonction essentielle de l’écriture : communiquer de la façon la plus économique qui soit ? Cette fonction limitative commence à être battue en brèche aujourd’hui : des ouvrages, il est vrai encore rares, des bulletins en tifinagh sont édités par les Touaregs du Niger et du Mali où, rappelons-le, le berbère est reconnu comme l’une des langues officielles de ces pays. Parmi les productions modernes, citons le livre d’al Hadj Ahmed et Ag Ashref, Assegfer et teneqqa ed tesiway d inhitan n mehwan, Grenier de poèsies, légendes, maximes d’autrefois, publié à Paris en 1970, avec une traduction partielle en français, Tihaliwin, d’al Housein, publié en 1996, Imeccan n timakaten, buveurs de braises, publié par Hawad et Claudot- Hawad etc. Signalons que l’Evangile a été publié en touareg et en caractères tifinagh, ainsi qu’une traduction du Petit Prince de Saint Exupéry. Signalons aussi une traduction kabyle du Coran, en caractère latins et en tifinagh. Mais même dans les pays touaregs où l’écriture est encore en usage, il semble que l’on s’achemine vers des transcriptions à base latine. Le Moyen âge nous a légué des bribes d’une littérature berbère, rédigée en caractères berbères : elle provient dans sa quasi totalité des groupes schismatiques ibadhites, notamment du Djebel Néfoussa, du Mzab et de l’Oued Righ, qui ont rédigé des traités de droit ou des professions de foi en berbère. Cette tradition d’écriture en berbère de textes religieux ne s’est pas perpétuée : au Mzab comme ailleurs, on écrit directement en arabe. Les quelques textes en berbère que l’on rencontre aujourd’hui, sont des textes profanes. Ceci dit, il existe, dans toutes les régions du monde berbère, de riches littératures orales, dont certaines, notamment en Kabylie Littérature berbère - Tasekla tamaziɣt - 9 - et en pays chleuh, ont été transcrites, en caractères arabes ou latins, et sont donc disponibles sous formes de fascicules et d’ouvrages. Il faut ajouter, à ces œuvres, la riche littérature ethnographique, description de la vie quotidienne, rites, récits divers, recueillie à l’occasion d’études linguistiques et sociologiques. On citera, entre autre, les Textes touaregs en prose, de Charles de Faucauld, Mots et choses berbères d’Emile Laoust, pour les dialectes chleuhs du Maroc, les Textes chaouias d’André Basset etc. Une riche littérature orale, aujourd’hui en grande partie transcrite Dans son histoire des Berbères, Ibn Khaldoun écrit que les Berbères racontent tellement d’histoire qu’on pourrait en remplir des livres entiers. Contes, légendes, mythes sont en effet nombreux, ainsi que les poésies, les proverbes, les devinettes, connus pour être des genres littéraires oraux par excellence. Il y a aussi les œuvres religieuses, généralement des récits sapientiaux ou des poèmes moraux, composés directement en berbère ou alors traduits de l’arabe. C’est le cas de la célèbre pièce d’Al Busrî, la Burda ou Manteau du Prophète, déclamé à l’occasion des veillées funèbres. Il existe aussi des compositions en berbère chez les communautés juives du Maroc : la plus connue est la Haggadah de Pessah, poème sur la pâque juive, recueilli, transcrit, traduit et annoté par P. Galand-Pernet et H. Zafrani et publié, il y a quelques décénies. Dans le domaine kabyle on citera les contes recueillis, transcrits et traduits en allemand par L. Frobenius, Volksmärchen der Kabylen, réédité depuis en kabyle et en version française, L’Essai de contes kabyles de Leblanc et Prébois, récits provenant la région des Ath Abbas, en Petite Kabylie, les Fourberies de Si Djeha, anecdotes recueillies par Moulièras et réeditées en 1987, Les légendes et contes merveilleux de Grande Kabylie du même auteur, recueillis chez les Ath Djennad n Lbh’ar. Le Fichier de Documentation berbère, fondé à Fort National (aujourd’hui Larbaa Nath Iraten), au début des années 1940 par les Pères Blancs, a publié, jusqu’en 1975, date de sa Introduction à la littérature berbère - 10 - suspension par les autorités algériennes d’alors, des dizaines de contes de toutes les régions de Kabylie : les auteurs les plus prolifiques sont incontestablement J.M. Dallet (par ailleurs, auteur du Dictionnaire kabyle-français) et J. L. Degezelle. On note aussi la contribution d’auteurs algériens dans cette œuvre de collecte, comme B. Zellal, auteur d’un Roman de Chacal (sur le modèle du Roman de Renard ), fables recueillies dans la région des Ouadhia et publiées en version originale et en traduction française. Dans d’autres dialectes berbères algériens, on note quelques recueils de contes mais il s’agit, le plus souvent de textes isolés, de quelques pages, insérés dans des études linguistiques ou ethnographiques : ainsi des fables et des légendes chaouias figurent dans Le Chaouia de l’Aurès de Mercier, des fables chenouies sont annexées à l’Etude de la zénatia de l’Ouarsenis de R. Basset, textes transcrits en caractères arabes et latins, avec une traduction française, des contes mozabites sont cités dans la Zénatia du M’zab et de l’oued Righ etc. Notons tout de même qu’on dispose d’un important recueil de contes ouarglis, Contes et légendes berbères de Ouargla, publiés en 1989 par J. Delheure, auteur par ailleurs, de deux dictionnaires, mozabite- français et ouargli-français. Au Maroc aussi, on dispose d’un important corpus de contes et de récits, pour la plupart en version originale et en traduction française ou espagnole (notamment pour ce qui est du Rif). Ici aussi, on a des recueils anciens, comme les Märchen der Sluh’ von Tazerwalt, de Stumme (1895), textes chleuhs transcrits en caractères latins et traduits en allemand. Mais les recueils les plus importants ont été publiés ces dernières décennies : c’est le cas des contes berbères de l’Atlas de Marrakech de A. Leguil, des Contes berbères du Grand Atlas du même auteur et des Récits, contes et légendes berbères en tachelhait de A. Roux, ce dernier étant en version berbère seulement. Il faut citer aussi l’important receuil de Contes berbères du Maroc de E. Laoust, avec notamment des contes du Maroc central (domaine de la tamazight). Comme pour d’autres dialectes, beaucoup de textes sont éparpillés dans des études linguistiques et ethnographiques. On pense, pour le rifain, à l’ouvrage de Renisio, Etude sur les dialectes berbères des Beni Iznacen et des Senhadja de Srair, avec, en annexe, des contes, des fables et des Littérature berbère - Tasekla tamaziɣt - 11 - poèsies, uploads/Litterature/ introduction-a-la-litterature-berbere-mohand-akli-haddadou.pdf
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- Publié le Jul 17, 2021
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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