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Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l'Université de Montréal, l'Université Laval et l'Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. Érudit offre des services d'édition numérique de documents scientifiques depuis 1998. Pour communiquer avec les responsables d'Érudit : info@erudit.org Article « De l'érudition à l'échec : la note du traducteur » Jacqueline Henry Meta : journal des traducteurs / Meta: Translators' Journal, vol. 45, n° 2, 2000, p. 228-240. Pour citer cet article, utiliser l'information suivante : URI: http://id.erudit.org/iderudit/003059ar DOI: 10.7202/003059ar Note : les règles d'écriture des références bibliographiques peuvent varier selon les différents domaines du savoir. Ce document est protégé par la loi sur le droit d'auteur. L'utilisation des services d'Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d'utilisation que vous pouvez consulter à l'URI https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Document téléchargé le 30 July 2015 04:08 228 Meta, XLV, 2, 2000 De l’érudition à l’échec : la note du traducteur jacqueline henry Université de Paris 3 Sorbonne Nouvelle, Paris, France RÉSUMÉ Une des solutions employées par certains traducteurs face à une difficulté de restitution en langue cible est la note du traducteur (N.d.T.). Cet article traite des caractéristiques de la note en général et des types d’œuvres dans lesquelles on rencontre des N.d.T. Il examine la situation du traducteur et des moyens dont il dispose pour résoudre certains problèmes, en particulier celui de l’explicitation d’éléments implicites dans l’original. ABSTRACT To cope with some difficulties in rendering an element in the source text, translators sometimes add a footnote. This article deals with the characteristics of the footnote in general and with the kind of texts in which one can find translators’ footnotes. It raises the issue of the translator’s position between the author and the reader and considers the means available to him/her in order to solve some problems, especially when some- thing implicit in the original may have to be made more explicit. MOTS-CLÉS/KEYWORDS traduction, note du traducteur (N.d.T.), intraduisible, explicitation, lecteur C’est alors que je travaillais sur ma thèse, consacrée à la traduction des jeux de mots (Henry 1993) que mon attention a été plus particulièrement attirée, pour la première fois, par la question des notes du traducteur. En effet, au cours de mes recherches, j’ai fait un détour par la traduction de la Bible et, en consultant la Traduction œcuméni- que de la Bible (1972), en livre de poche, j’ai été frappée par le grand nombre de notes signalant la présence, dans l’original hébreu, d’un jeu de mots non rendu en traduc- tion (neuf dans les onze premiers chapitres). Après quelques rappels théoriques sur les caractéristiques de la note en général, je me pencherai plus spécifiquement sur le problème de la note du traducteur (N.d.T.), en m’appuyant entre autres sur l’exemple de la traduction française de Small World, de David Lodge. Le problème de la posture du traducteur entre l’auteur et son lecteur sera développé, ainsi que celui du lecteur auquel le traducteur destine son texte. La question essentielle de l’explicitation et de ses moyens sera également posée et pour finir, il faudra bien risquer une réponse à la question implicite dans le titre de cet article : la note du traducteur est-elle admissible ou à bannir, s’agit-il d’un ajout érudit justifiable, ou d’un aveu d’échec qui jette l’opprobre sur le traducteur ? I. Considérations générales sur la note La note, en général, peut être appréhendée de différents points de vue qui apportent chacun quelques briques à l’édifice de sa compréhension. Ces éléments permettent également, me semble-t-il, de mieux cerner les enjeux de la note du traducteur. Sur le plan linguistique, Gérard Genette décrit comme suit l’élément de Meta, XLV, 2, 2000 paratexte (1982), c’est-à-dire de texte en marge, «sur le seuil», que constitue la note : c’est « un énoncé de longueur variable (un mot suffit) relatif à un segment plus ou moins déterminé du texte, et toujours disposé soit en regard soit en référence à ce segment. Le caractère toujours partiel du texte de référence, et par conséquent le caractère toujours local de l’énoncé porté en note me semble le trait formel le plus distinctif de cet élément de paratexte […] » (1987). On peut aller plus loin dans la description et la définition strictement linguistiques de cet énoncé. Pour Julie Lefèbvre, doctorante à l’Université de Paris III-Sorbonne Nouvelle qui a consacré son mémoire de maîtrise à l’Approche syntaxique de la note de bas de page (1998), la note s’inscrit dans un ensemble qui rassemble diverses formes de langue à l’origine de «subversions de la linéarité du signifiant». En effet, une des caractéristiques de la note, en langue, est qu’elle met en cause la linéarité des signifiants graphiques, laquelle matérialise la succession des signifiants dans le temps. Il y a, physiquement, «décrochement » et éloignement de la note par rapport au corps du texte, avec re- cours à un appel de note (astérisque, chiffre ou lettre en exposant, etc.) qui signale une opération d’ajout ou, pour citer J. Lefèbvre, une « opération de greffe typogra- phique ». La note se trouve ainsi considérée comme un « greffon», et donc comme un élément étranger. Il convient également de rappeler que spatialement, ou typographiquement, la note peut occuper différentes positions : il est arrivé, jusqu’au Moyen Âge, qu’elle soit placée dans le cadre même du texte. Elle était alors le plus souvent signalée par des caractères plus petits (corps plus petit) ou différents (autre police). Ensuite, au xvie siècle, sont apparues des notes situées en marge du texte, les notes marginales, ancêtres de la note de bas de page, ou note infrapaginale, que l’usage a consacrée au xviie siècle. De nos jours, outre les notes marginales et infrapaginales, on trouve également des notes regroupées en fin d’article ou de chapitre, en fin de volume, voire formant un volume spécial. Les textes de recherche peuvent même comporter un système à double niveau, avec des notes de bas de page indiquant un nom d’auteur ou une date qui renvoient à leur tour à un appareil de notes bibliographi- ques plus complet en fin d’article ou de livre. Et l’on rencontre aussi, dans la presse, des notes entre parenthèses à l’intérieur du texte des articles. Autre interrogation possible concernant la note : par qui a-t-elle été écrite ? De ce point de vue, les deux principales catégories de notes sont la note auctoriale, note de l’auteur qui vient ajouter une ou des donnée(s) dans un espace décroché, et la note allographe, c’est-à-dire rédigée par un tiers, éditeur (au sens anglais du terme, c’est-à- dire de celui qui publie et/ou de celui qui relit et révise le texte), traducteur, ou encore glossateur ou critique. À propos de la note d’auteur, Genette évoque en particulier la question de l’évolution d’un livre dans le temps, de sa première édition à celles qui peuvent suivre, évolution susceptible de faire apparaître ou disparaître des notes. Dans le cas des œuvres littéraires, il mentionne aussi les notes qu’il qualifie d’ «actoriales», qui sont ajoutées par la personne dont traite un livre (on peut pen- ser, par exemple, au cas de la biographie d’un auteur contemporain), ou par un per- sonnage (la note est alors fictive). Enfin, dans un article de journal, on peut trouver, dans le corps du texte, une ou des Note(s) de la rédaction (N.d.l.R.), équivalent pour la presse de la note d’éditeur pour les livres. Il convient ensuite de se demander à quoi sert une note, autrement dit, quelle est sa fonction. La note auctoriale peut être un ajout métalinguistique, comme une défi- de l’érudition à l’échec: la note du traducteur 229 230 Meta, XLV, 2, 2000 nition, l’explication d’un terme, ou la traduction d’une citation produite en langue étrangère dans le texte ; il peut s’agir de divers types de compléments: précision sur un point non développé dans le texte, mention d’une motivation de l’auteur, apport d’informations biographiques ou encore digression pure et simple. Mais aussi d’un véritable commentaire, par exemple en réponse aux critiques des éditions antérieures. En fiction, elle peut éclairer le contexte historique ou géographique de l’intrigue ; dans ce cas, elle documente, donc, plus qu’elle ne commente. La note allographe, elle, ressortit le plus souvent au commentaire critique; de nos jours, les commentaires portant une appréciation morale et esthétique ont le plus souvent disparu au profit de commentaires d’éclaircissement encyclopédique et linguistique ou d’information sur la genèse du texte, sur les sources de l’auteur, sa vie, etc. En ce qui concerne mon propos, la note actoriale présente peu d’intérêt ; si elle est signée par le sujet de l’ouvrage, elle se rapproche de la note allographe, dont elle peut reprendre les fonctions documentaires, et si elle est écrite par un personnage du livre, elle est fictionnelle et donc faussement paratextuelle. Il s’ensuit des considérations qui précèdent que les types de textes dans lesquels peuvent apparaître des notes sont variés: les textes pragmatiques, d’une part, que Genette qualifie de « discursifs», qui incluent la catégorie des essais uploads/Litterature/ la-note-du-traducteur.pdf

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