LA LANGUE HEBRAÏQUE RESTITUÉE ET LE VERITABLE SENS DES MOTS HÉBREUX RÉTABLI ET

LA LANGUE HEBRAÏQUE RESTITUÉE ET LE VERITABLE SENS DES MOTS HÉBREUX RÉTABLI ET PROUVÉ PAR LEUR ANALYSE RADICALE par FABRE-D'OLIVET LA LANGUE HÉBRAÏQUE RESTITUÉE (parties une et deux) est un OUVRAGE dans lequel on trouve réunis : 1°. Une DISSERTATION INTRODUCTIVE sur l'origine de la Parole, l'étude des langues qui peuvent y conduire, et le but que l'Auteur s'est proposé ; 2°. Une GRAMMAIRE HÉBRAÏQUE, fondée sur de nouveaux principes, et rendue utile à l'étude des langues en général ; 3°. Une série de RACINES HÉBRAÏQUES, envisagées sous des rapports nouveaux, et destinées à faciliter l'intelligence du langage, et celle de la science étymologique ; 4°. Un Discours PRÉLIMINAIRE ; 5°. Une traduction en français des dix premiers chapitres du Sépher, contenant la COSMOGONIE de MOYSE. Cette traduction, destinée à servir de preuve aux principes posés dans la Grammaire et dans le Dictionnaire, est précédée d'une VERSION LITTÉRALE, en français et en anglais, faite sur le texte hébreu présenté en original avec une transcription en caractères modernes, et accompagnée de notes grammaticales et critiques, où l'interprétation donnée à chaque mot est prouvée par son analyse radicale, et sa confrontation avec le mot analogue samaritain, chaldaïque, syriaque, arabe, ou grec. PAR FABRE-D'OLIVET. LA LANGUE HEBRAÏQUE RESTITUEE PREMIERE PARTIE [V] DISSERTATION INTRODUCTIVE § I. Sur l'origine de la Parole, et sur l'étude des Langues qui peuvent y conduire. L'ORIGINE de la Parole est généralement inconnue. C'est en vain que les savants des siècles passés ont essayé de remonter jusqu'aux principes cachés de ce phénomène brillant qui distingue l'homme de tous les êtres dont il est environné, réfléchit sa pensée, l'arme du flambeau du génie, et développe ses facultés morales ; tout ce qu'ils ont pu faire, après de longs travaux, a été d'établir une série de conjectures plus ou moins ingénieuses, plus ou moins probables, fondées en général sur la nature physique de l'homme qu'ils jugeaient invariable, et qu'ils prenaient pour base de leurs expériences. Je ne parle point ici des théologiens scholastiques qui, pour se tirer d'embarras sur ce point difficile, enseignaient que l'homme avait été créé possesseur d'une langue, toute formée ; ni de l'évêque Walton, qui, ayant embrassé cette commode opinion, en donnait pour preuve les entretiens de Dieu même avec le premier homme, et les discours qu'Ève avait tenus au serpent 1 ; ne réfléchissant pas que ce prétendu serpent qui s'entretenait avec Ève, et auquel Dieu parlait aussi, aurait donc puisé à la même source de la Parole, et participé à la langue de la Divinité. Je parle de ces savants qui, loin de la poussière et des cris de l'école, cherchaient de bonne foi la vérité que l'école ne possédait plus. D'ailleurs les théologiens eux-mêmes avaient été dès longtemps abandonnés de leurs disciples. Le père Richard Simon, dont nous avons une excellente histoire critique du Vieux-Testament, ne craignait pas, en s'appuyant de l'autorité de St. Grégoire de Nysse, de 1 Walton, prolegom. I. rejeter l'opinion théologique à cet [VI] égard, et d'adopter celle de Diodore de Sicile, et même celle de Lucrèce 2, qui attribuent la formation du langage à la nature de l'homme, et à l'instigation de ses besoins 3. Ce n'est point parce que j'oppose ici l'opinion de Diodore de Sicile ou de Lucrèce à celle des théologiens, qu'on doive en inférer que je la juge meilleure. Toute l'éloquence de J.-J. Rousseau ne saurait me la faire approuver. C'est un extrême heurtant un autre extrême, et par cela même, sortant du juste milieu où réside la vérité. Rousseau dans son style nerveux et passionné, peint plutôt la formation de la société que celle du langage : il embellit ses fictions des couleurs les plus vives, et lui-même, entraîné par son imagination, croit réel ce qui n'est que fantastique 4. On voit bien dans son écrit un commencement possible de civilisation, mais non point une origine vraisemblable de la Parole. Il a beau dire que les langues méridionales sont filles du plaisir, et celles du nord de la nécessité : on lui demande toujours comment le plaisir ou la nécessité peuvent enfanter simultanément des mots que toute une peuplade s'accorde à comprendre, et surtout s'accorde à adopter. N'est-ce pas lui qui a dit, avec une raison plus froide et plus sévère, que le langage ne saurait être institué que par une convention, et que cette convention ne saurait se concevoir sans le langage ? Ce cercle vicieux dans lequel l'enferme un Théosophe moderne peut-il être éludé ? Ceux qui se livrent à la prétention de former nos langues, et toute la science de notre entendement par les seules ressources des circonstances naturelles, et par nos seuls moyens humains, dit ce 2 Rich. Sim. Histoire crit. L. Ier, ch. 14 et 15. 3 Diod. Sic. L. II. 4 Essai sur l'origine des Langues. "At varios linguae sonitus natura snbegit Mittere, et utilitas expressit nomina rerum". Lucret Théosophe 5, s'exposent de leur plein gré à cette objection terrible qu'ils ont eux-mêmes élevée ; car qui ne fait que nier ne détruit point, et l'on ne réfute point un argument parce qu'on le désapprouve : si le langage de l'homme est une convention, comment cette convention s'est-elle établie sans langage ? [VII] Lisez avec attention et Locke et Condillac, son disciple le plus laborieux 6 ; vous aurez, si vous voulez, assisté à la décomposition d'une machine ingénieuse, vous aurez admiré peut-être la dextérité du décompositeur ; mais vous serez resté aussi ignorant que vous l'étiez auparavant et sur l'origine de cette machine, et sur le but que s'est proposé son auteur, et sur sa nature intime, et sur le principe qui en fait mouvoir les ressorts. Soit que vous réfléchissiez d'après vous-même, soit qu'une longue étude vous ait appris à réfléchir d'après les autres, vous ne verrez bientôt dans l'habile analyste qu'un opérateur ridicule, qui s'étant flatté de vous expliquer et comment et pourquoi danse tel acteur sur le théâtre, saisit un scalpel et dissèque les jambes d'un cadavre. Socrate et Platon vous reviennent dans la mémoire. Vous les entendez encore gourmander les physiciens et les métaphysiciens de leur temps 7 ; vous opposez leurs irrésistibles arguments à la vaine jactance de ces écrivains empiriques, et vous sentez bien qu'il ne suffit pas de démonter une montre pour rendre raison de son mouvement. Mais si l'opinion des théologiens sur l'origine de la Parole choque la raison, si celle des historiens et des philosophes ne peut résister à un examen sévère, il n'est donc point donné à l'homme de la connaître. L'homme, qui selon le sens de l'inscription du temple de Delphes 8, ne peut rien connaître qu'autant qu'il se connaît lui-même, est dort, condamné à ignorer ce qui le place au premier rang parmi les êtres sensibles, ce qui lui donne le sceptre de la Terre, ce qui le constitue véritablement homme ; la Parole ! Non, non cela ne peut être, parce que la Providence 5 St.-Martin, Esprit des choses, T. II. p. 127. 6 Lock. an Essay concern. human. Underst. B. III, Condillac, Logique. 7 Plat. dial. Thett. Phedon. Cratyl. 8 Cette fameuse inscription connais-toi toi-même, était, selon Pline, du sage Chicon, célèbre philosophe grec qui vivait vers l'an 560 avant J.-C. Il était de Lacédémone, et mourut de joie, dit-on, en embrassant son fils, vainqueur aux jeux olympiques. est juste. Un nombre assez considérable de sages parmi toutes les nations a pénétré ce mystère, et si malgré leurs efforts, ces hommes privilégiés n'ont pu communiquer leur science et la rendre universelle, c'est que les moyens, les disciples ou les circonstances favorables leur ont manqué pour cela. [VIII] Car la connaissance de la Parole, celle des éléments et de l'origine du langage, ne sont point au nombre de ces connaissances que l'on transmet facilement à d'autres, ou qu'on démontre à la manière des géomètres. Avec quelque étendue qu'on les possède, quelques racines profondes qu'elles aient jetées dans un esprit, quelques fruits nombreux qu'elles y aient développés, on n'en peut jamais communiquer que le principe. Ainsi, rien dans la nature élémentaire ne se propage ni tout de suite, ni tout à la fois : l'arbre le plus vigoureux, l'animal le plus parfait, ne produisent point simultanément leur semblable. Ils jettent, selon leur espèce, un germe d'abord très différent d'eux, qui demeure infertile, si rien d'extérieur ne coopère à son développement. Les sciences archéologiques, c'est-à-dire toutes celles qui remontent aux principes des choses, sont dans le même cas. C'est en vain que les sages qui les possèdent s'épuisent en généreux efforts pour les propager. Les germes les plus féconds qu'ils en répandent, reçus par des esprits incultes, ou mal préparés, y subissent le sort de ces semences qui, tombant sur un terrain pierreux, ou parmi les épines, y meurent stériles ou étouffées. Les secours n'ont pas manqué à nos savants ; c'est l'aptitude à les recevoir. La plupart de ceux qui s'avisaient d'écrire sur les langues ne savaient pas même ce que c'était qu'une langue ; car il ne suffit pas pour cela d'avoir compilé des grammaires, uploads/Litterature/ langue-hebraique-restituee-pdf.pdf

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