1 2 Bernard Werber LE PERE DE NOS PERES ROMAN Albin Michel 3 À Barnabé. 4 « Ent
1 2 Bernard Werber LE PERE DE NOS PERES ROMAN Albin Michel 3 À Barnabé. 4 « Entre Ce que je pense, Ce que je veux dire, Ce que je crois dire, Ce que je dis, Ce que vous avez envie d’entendre, Ce que vous croyez entendre, Ce que vous entendez, Ce que vous avez envie de comprendre, Ce que vous comprenez, Il y a dix possibilités qu’on ait des difficultés à communiquer. Mais essayons quand même… » Encyclopédie du savoir relatif et absolu EDMOND WELLS. 5 PREMIÈRE PARTIE LE CHAÎNON MANQUANT 6 1. LES TROIS QUESTIONS Qui sommes-nous ? Où allons-nous ? D’où venons-nous ? 2. UNE BOUTEILLE À LA MER Paris. De nos jours. Le Pr. Adjemian venait de sa cuisine. Il s’assit à son bureau, s’empara d’un stylo noir et écrivit sur un bloc-notes : « Ça y est. J’ai enfin trouvé. Je sais quoi répondre à l’une des trois questions fondamentales que doit se poser tout être humain : « D’où venons-nous ? » » Il hésita un instant sur la meilleure façon de poursuivre, puis il se mit à noter à toute vitesse : « Je sais à quel moment est apparu le premier homme. Je sais pourquoi, un jour, un animal s’est mué en un être à l’esprit tellement complexe qu’il est capable désormais de faire l’amour le sexe enveloppé de plastique, de regarder la télévision quatre heures par jour et de s’entasser volontairement avec des centaines d’individus dans des rames de métro sans air. » Il étira ses lèvres en un sourire sans joie, respira un grand coup et continua : « Je sais pourquoi et comment est née l’humanité. Je connais l’identité de celui que, faute de mieux, on a coutume de nommer « le chaînon manquant ». » Un tic nerveux déforma sa joue. « C’est un terrible secret. Le monde sera frappé d’étonnement lorsque je le livrerai. C’est pour cela que j’ai besoin de ton aide, toi qui me lis. Tu ne dois absolument pas me laisser tomber. » Son stylo ne fonctionnait plus. Il s’empressa d’en chercher un autre dans un tiroir. « Ma découverte est certaine, mais tu connais 7 les gens. La plupart n’entendent rien. Les rares qui entendent n’écoutent pas. Les rares qui écoutent ne comprennent pas. Quant à ceux qui pourraient comprendre… ils s’en fichent. Dévoiler le secret de l’humanité, à quoi bon si personne n’est prêt à le recevoir ? Il ne suffit pas d’offrir. Il faut préparer les gens à recevoir le cadeau. L’information que la terre est ronde ne s’est répandue que très progressivement. Et c’est progressivement aussi qu’il importe de répandre le secret du chaînon manquant. Sans heurter quiconque. Simplement en réveillant une vieille curiosité depuis trop longtemps endormie, et seulement ensuite en l’assouvissant. » Le Pr Adjemian relut le paragraphe puis reprit : « C’est un secret déconcertant. Avant d’entamer mes recherches sur le continent africain, jamais je n’aurais pu me douter de ce que j’allais y découvrir. Mais je t’en supplie, crois-moi. J’ai trouvé la vérité, la vérité vraie. J’en ai les preuves. » Il essuya de la main la sueur qui perlait à son front. « Sans toi, sans ta confiance, sans ton crédit, sans ton soutien, tout mon labeur n’aura servi à rien. Aide-moi, je t’en prie. Le temps est venu de révéler la réponse à la grande question : « D’où venons- nous ? » » 3. SAUVE QUI PEUT Quelque part en Afrique de l’Est. Il y a 3,7 millions d’années. IL vient de surgir entre deux mamelons du terrain. IL court à perdre haleine. Tout près de lui, il perçoit le souffle rauque de son frère. Moment délicat. Lui et son frère se sont approchés d’un groupe de hyènes. Ils les ont provoquées en grognant et en gesticulant. Elles n’ont pas tardé à les prendre en chasse. Habituellement, c’est censé être un piège. Leur tâche est d’appâter une hyène pour l’attirer vers le grand arbre. Là, ceux de leur horde dissimulés dans les branches basses lui tomberont dessus et profiteront du nombre pour écraser le fauve. 8 Mais aujourd’hui, il y a quelques problèmes. Problème numéro un : ce n’est pas une hyène mais trois, et de forte taille, qui se sont ruées à leur poursuite. Problème numéro deux : dans la panique de leur course effrénée, lui et son frère ont perdu leurs repères et, à présent, ils sont complètement désorientés. Où peut bien se trouver le grand arbre où sont cachés les leurs ? Ils galopent. Devant eux, s’étale une large flaque de boue. Ils n’hésitent pas une seconde à s’y engager. La boue est un excellent ralentisseur de hyènes. IL et son frère savent alternativement courir sur quatre ou deux pattes. Les hyènes, elles, n’ont pas ce choix. Ils se redressent, passent donc en mode bipède et s’élancent au travers de la flaque. La boue colle un peu à leurs deux pattes mais elle les ralentit à peine tandis que les quatre pattes des hyènes s’y enlisent. Ils sont convaincus qu’elles vont renoncer à la chasse, mais, au contraire, s’étant péniblement extirpées de la flaque de boue, elles s’élancent vers eux avec une rage décuplée. IL et son frère détalent. La plus rapide des hyènes les rejoint presque et IL sent son haleine fétide et chaude sur ses mollets. La règle de base dans les courses-poursuites, c’est de ne jamais se retourner. Quoi qu’il arrive. Cependant, la curiosité l’emporte. IL veut savoir si la hyène menace de l’attraper. IL tourne légèrement la tête et aperçoit une mâchoire béante, sur le point de lui enfoncer une canine effilée dans la chair. 4. DANS LA BAIGNOIRE Une blessure profonde lui faisait un vilain sourire au-dessous du nombril. Quelque chose de pointu avait frappé le Pr Adjemian au ventre. Il ne bougeait plus. Il était tout raide, assis, comme hébété au milieu de son sang. La porte d’entrée joua sur ses gonds. Sa femme de ménage fut la première personne à le découvrir. Elle avait entrepris de nettoyer l’appartement en sifflotant une comptine portugaise quand elle aperçut le corps du savant, rigide dans sa baignoire. Elle poussa un cri strident, se signa rapidement et s’enfuit quérir son mari qui officiait en tant que gardien au rez-de- 9 chaussée. L’homme monta, émit une série de jurons évoquant des instants méconnus de la vie sexuelle de certains saints portugais et téléphona à la police. S’ensuivit sur le palier un attroupement formé par quelques voisins attirés par le tapage mais qui restèrent prudemment sur le seuil. Puis : trois policiers qui prirent officiellement le contrôle des lieux. Puis : un jeune inspecteur blasé à l’air épuisé. Puis : un journaliste d’agence de presse qui avait capté l’appel de la police sur la radio de sa voiture. Puis : deux journalistes de quotidiens, l’esprit encore embrumé par le bouclage tardif de la veille. Puis encore des voisins badauds interpellant les premiers avec des : « Qu’est-ce qui s’est passé ? » Puis : une journaliste d’hebdomadaire qui se trouvait habiter par hasard à l’étage au-dessus et qui, en descendant tranquillement l’escalier, avait été intriguée par tout ce remue- ménage. Le policier de faction la laissa passer quand elle exhiba sa carte de presse. Puis : des mouches. Puis : des acariens nécrophages. Mais ces derniers (vu les distances à leur échelle) furent les plus longs à approcher du corps. Le jeune inspecteur examina attentivement le lieu du crime en le parcourant en tous sens et délivra ses conclusions aux journalistes présents. Selon lui, on se trouvait en présence d’un crime commis probablement par un serial killer en maraude. Il y en avait déjà eu plusieurs dans le quartier. Chaque fois, les circonstances étaient identiques. Le tueur rôdait dans les couloirs des immeubles en quête d’une porte laissée entrouverte par un locataire insouciant. Dès qu’il en repérait une, il pénétrait dans l’appartement, s’emparait du premier objet à portée de main susceptible de faire fonction d’arme et frappait à mort. — Il s’agit du cinquième crime du même genre depuis le début du mois. Tout coïncide parfaitement. Aucune trace, pas d’effraction, la porte n’a pas été forcée. Une arme de fortune empoignée sur la scène même du crime, en l’occurrence un des piolets de paléontologie qui traînent dans le bureau. L’assassin a dû l’emporter après son forfait et s’en débarrasser plus tard dans une poubelle quelconque. Si une benne ne les a pas déjà enlevées, il suffira probablement de sonder les ordures du coin pour retrouver l’objet. A peine commencée, l’enquête était close. Le jeune policier demanda aux journalistes de ne pas omettre de rappeler à leurs 10 lecteurs qu’il faut toujours veiller à bien refermer sa porte derrière soi. Surtout dans les grandes villes où il vaut mieux se méfier de tout le monde. Les journalistes ne se donnèrent pas la peine de consigner cette recommandation civique. Déjà, ils brandissaient leurs appareils photo pour tâcher de ramener le meilleur cliché des lieux. L’inspecteur observa de loin la journaliste d’hebdomadaire. uploads/Litterature/ les-aventuriers-de-la-science-1-le-pere-de-nos-peres.pdf
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- Publié le Nov 09, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
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