1 REFERENCE Titre de l'œuvre : Les Essais L'auteur : Michel de Montaigne Date d

1 REFERENCE Titre de l'œuvre : Les Essais L'auteur : Michel de Montaigne Date de publication originale : mars 1580 Éditeurs : Simon Millanges, Jean Richer, Abel L'Angelier Genre : Essai Lieu de parution : Bordeaux 2 BIOGRAPHIE . Écrivain, philosophe, moraliste et homme politique de la Renaissance, Michel Eyquem de Montaigne, dont la vie fut très aventureuse, est le fondateur de l’introspection, au travers d’un livre, les Essais , qui a fortement influencé la culture occidentale. 3 BIBLIOGRAPHIE • Essais, livres I et II, Bordeaux, Simon Millanges, 1580 • Essais, livres I et II, Bordeaux, Simon Millanges, 1582 • Essais, livres I et II, Paris, Jean Richer, 1587. • Essais, livres I, II et III, Paris, Abel L'Angelier, 1588 • Essais, Paris, Abel L'Angelier, 1595 4 RÉSUMÉ : Les chapitres « Des cannibales » et « Des coches » Dans le chapitre « Des Cannibales » (I, 31), Montaigne montre que l’on appelle « barbare » ce qui ne correspond pas à nos propres mœurs et pire encore, ce qui est proche de la nature. Or, pour lui, les civilisations dont on découvre l’existence, proches de la nature, sont des sociétés vertueuses qui connaissent le respect des anciens, de l’honneur et de la fidélité. Leurs coutumes anthropophages pour se venger de leurs ennemis peuvent sembler barbares, mais les Européens pratiquent la torture, autrement plus barbare. A la fin du chapitre, Montaigne narre sa rencontre avec trois brésiliens venus à Rouen. Ces derniers s’étonnent du système politique français fondé sur la monarchie héréditaire et sur l’acceptation par le peuple des inégalités. Le chapitre « Des Coches » (III, 6) évoque tout d’abord la peur que Montaigne éprouve dans les transports. L’auteur passe alors en revue les modes de déplacement des rois dans différentes civilisations et critique les dépenses publiques des souverains pour les jeux et les fêtes. Il en arrive à évoquer le Nouveau Monde (« Notre monde vient d’en trouver un autre »), promis au progrès selon lui alors que le nôtre est menacé de décadence. Montaigne condamne la colonisation et les massacres perpétrés contre les indigènes. Il clôt son chapitre par un bref paragraphe qui revient au sujet initial (« Et pour en revenir à nos voitures« ). 5 ANALYSE Montaigne, une première fois, de 1571 à 1580, s'enferme dans son château. Il a le goût des livres. Il lit. Et comme il va de préférence aux moralistes et aux historiens, et qu'il ne lit point passivement, l'esprit critique s'éveille en lui ; il pense, et il juge. Pour juger, il compare. Le terme de comparaison qui lui est nécessaire, il le prend en lui-même, en l'homme naturel qui est en lui. Montaigne s'engage donc insensiblement dans la rédaction de ses mémoires psychologiques, mais en « honnête homme qui ne se pique de rien », en causeur qui se défend de faire un livre. C'est ainsi que se formèrent, au jour le jour, les deux premiers livres des Essais (1580). Puis Montaigne, mûri par les voyages et par l'expérience, revient à ce qu'il a déjà écrit ; il le complète, il le fortifie, il le confirme, et il entrevoit d'autres sujets, d'autres chapitres. C'est l'édition en trois livres qui sort de cette seconde période de retraite (1588). Il reprend une troisième fois son ouvrage ; et, comme à l'approche de la vieillesse bien des choses apparaissent, auxquelles on n'avait pas songé, Montaigne ajoute encore, et prépare la nouvelle édition qu'il ne verra point (1595). Plus sceptique peut-être, mais surtout plus sage, il estime que l'on ne saurait trop prouver aux hommes la nécessité d'être modérés et tolérants. Aussi accumule-t-il les citations et les anecdotes, car il ne veut pas être cru sur parole, et il appuie ses réflexions du plus grand nombre possible de témoignages. 6 IMAGES/DESSINS/COLLAGES 7 COMMENTAIRES LITTÉRAIRES Des Cannibales Mais ces autres, qui nous viennent pipant des assurances d'une faculté extraordinaire qui est hors de notre connaissance, faut-il pas les punir de ce qu'ils ne maintiennent l'effet de leur promesse, et de la témérité de leur imposture ? Ils ont leurs guerres contre les nations qui sont au-delà de leurs montagnes, plus avant en la terre ferme, auxquelles ils vont tout nus, n'ayant autres armes que des arcs ou des épées de bois, apointées par un bout, à la mode des langues de nos épieux. C'est chose émerveillable que de la fermeté de leurs combats, qui ne finissent jamais que par meurtre et effusion de sang ; car, de déroutes et d'effroi, ils ne savent que c'est. Chacun rapporte pour son trophée la tête de l'ennemi qu'il a tué, et l'attache à l'entrée de son logis. Aprés avoir longtemps bien traité leurs prisonniers, et de toutes les commodités dont ils se peuvent aviser, celui qui en est le maître, fait une grande assemblée de ses connaissants ; il attache une corde à l'un des bras du prisonnier, par le bout de laquelle il le tient éloigné de quelques pas, de peur d'en être offensé, et donne au plus cher de ses amis l'autre bras à tenir de même ; et eux deux, en présence de toute l'assemblée, l'assomment à coups d'épée. Cela fait, ils le rôtissent et en mangent en commun et en envoient des lopins à ceux de leurs amis qui sont absents. Ce n'est pas, comme on pense, pour s'en nourrir, ainsi que faisaient anciennement les Scythes ; c'est pour représenter une extrême vengeance. Et qu'il soit ainsi, ayant aperçu que les Portugais, qui s'étaient ralliés à leurs adversaires, usaient d'une autre sorte de mort contre eux, quand ils les prenaient, qui était de les enterrer jusques à la ceinture, et tirer au demeurant du corps force coups de trait, et les pendre après, ils pensèrent que ces gens ici de l'autre monde, comme ceux qui avaient sexué la connaissance de beaucoup de vices parmi leur voisinage, et qui étaient beaucoup plus grands maîtres qu'eux en toute sorte de malice, ne prenaient pas sans occasion cette sorte de vengeance, et qu'elle devait être plu.s aigre que la leur, commencèrent de quitter leur façon ancienne pour suivre celle-ci. Je ne suis pas marri que nous remarquons l'horreur barbaresque qu'il y a en une telle action, mais oui bien de quoi, jugeant bien de leurs fautes, nous soyons si aveugles aux nôtres. Je pense qu'il y a plus de barbarie à manger un homme vivant qu'à le manger mort, à déchirer par tourments et par gênes un corps encore plein de sentiment, le faire rôtir par le menu, le faire mordre et meurtrir aux chiens et aux pourceaux (comme nous l'avons non seulement lu, mais vu de fraîche mémoire, non entre des ennemis anciens, mais entré des voisins et concitoyens, et, qui pis est, sous prétexte de piété et de religion), que de le rôtir et manger après qu'il est trépassé. Chrysippe et Zénon, chefs de la secte stoïque ; ont bien pensé qu'il n'y avait aucun mal de se servir de notre charogne à quoi que ce fut pour notre besoin, et d'en tirer de la nourriture ; comme nos ancêtres, étant assiégés par César en la ville de Alésia, se résolurent de soutenir la faim de ce siège par les corps des vieillards, des femmes et d'autres personnes inutiles au combat. “ Les Gascons, dit-on, s'étant servis de tels aliments, prolongèrent leur vie. ”. 8 Et les médecins ne craignent pas de s'en servir à toute sorte d'usage pour notre santé ; soit pour l'appliquer au-dedans ou au-dehors ; mais il ne se trouva jamais aucune opinion si déréglée qui excusât la trahison, la déloyauté, la tyrannie, la cruauté, qui sont nos fautes ordinaires. Nous les pouvons donc bien appeler barbares, eu égard aux règles de la raison, mais non pas eu égard à nous, qui les surpassons en toute sorte de barbarie. Extrait de : Des Cannibales - Montaigne, Les Essais Introduction Ce texte est un extrait du chapitre « des cannibales » des Essais de Montaigne écrits au XVIème siècle, en plein milieu des guerres de religion et de l’expansion de l’Europe vers le nouveau monde. Il montre la relativité des jugements et critique l’ethnocentrisme européen. Il observe, compare leurs mœurs et tente d’acquérir une objectivité optimale et de se libérer de ses préjugés. Comment lorsqu’on est sensible aux barbaries sévissant dans son pays peut on considérer celles que l’on considère être le fait des barbares ? L’expression « l’autre monde » place le débat du coté des barbares. Cette fois ci, ce sont les conquis qui affublent les Portugais de cette appellation. Montaigne déplace le problème de l’ethnocentrisme : le regard part des Barbares vers les Européens. Nous étudierons en premier lieu la description au service de l'argumentation, l'illustration de la relativité des jugements, puis le paradoxe du jugement humain, l'intervention de Montaigne et sa prise de position. Développement C’est une description diptyque ou comparative des deux pratiques guerrières. La première partie permet à Montaigne d’asseoir sa thèse. La barbarie est là pour représenter une extrême vengeance. Aucun modalisateur n’est uploads/Litterature/ les-essais.pdf

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