Ce livre est un hommage à Alain Ricard dont les recherches, menées à la croisée

Ce livre est un hommage à Alain Ricard dont les recherches, menées à la croisée de l’anthropologie culturelle, des sciences de la communication et de la littérature comparée, ont été d’un apport considérable pour une meilleure connaissance des dynamiques littéraires et artistiques sur le continent africain. La prise en compte des pratiques textuelles en Afrique est indispensable pour comprendre le phénomène littéraire. La science des textes, telle qu’Alain Ricard l’a pratiquée, passe par un travail de terrain qui permet de prendre la mesure de la vie littéraire du continent et de l’impact des littératures sur les réalités sociales et humaines. C’est en particulier le sens du combat qu’il a engagé pour faire reconnaître les littératures en langues africaines. En situant son travail à l’échelle du continent, Alain Ricard a attiré l’attention sur l’importance de la spatialité de l’Afrique. L’identification d’épicentres littéraires (Ibadan, Lomé...), d’axes de transferts culturels, de lieux de mémoire, etc., ouvre toute une géographie littéraire encore à mettre en œuvre. La science des textes est également une science de l’homme pour Alain Ricard, qui a interrogé l’acte créateur à travers la figure d’écrivains singuliers comme Félix Couchoro, Wole Soyinka ou Ebrahim Hussein. Il a su montrer comment, en jouant avec de multiples contraintes, dans le cadre d’une littérature « hors champ », de nombreux auteurs africains ont trouvé les voies de la création, de façon souvent remarquablement inventive. « Lettres du Sud » La collection « Lettres du Sud », fondée à l’origine par Patrick Mérand et reprise par Henry Tourneux en 1986, rassemble des études de niveau universitaire consacrées aux littératures du Sud ou périphériques. Ces études peuvent porter sur un thème, un pays ou un ensemble géographique, un auteur (comme Ahmadou Kourouma, Maryse Condé, Mouloud Feraoun ou Mongo Beti...). Les études comparatives y sont également les bienvenues. Un volet de la collection est consacré à la création littéraire : quelques œuvres de fiction y ont été ponctuellement publiées, comme l’œuvre théâtrale d’Ina Césaire. Couverture : « L’ivrogne dans la brousse », Rosemary Karuga, d’après Tutuola, papier collé. Collection particulière. Le format ePub a été préparé par Isako www.isako.com à partir de l'édition papier du même ouvrage. © Éditions KARTHALA, 2015 (Première édition papier, 2011) ISBN : 978-2-8111-2023-8 Études rassemblées par Virginia Coulon et Xavier Garnier Les littératures africaines Textes et terrains / Textwork and Fieldwork Hommage à Alain Ricard Introduction de János Riesz Éditions KARTHALA 22-24, bd Arago 75013 Paris INTRODUCTION Textes et terrains János RIESZ1 Le genre des Mélanges, Festschrift en allemand, n’a pas toujours très bonne réputation. On nous dit que les éditeurs ne l’aiment pas (pas plus que les actes d’un colloque) pour la raison que c’est souvent un pot-pourri, un mélange de n’importe quoi, où chacun met des textes qui n’ont pas trouvé preneurs ailleurs : fonds de tiroirs qui manqueraient souvent de cohérence et de consistance, écrits accumulés sans esprit critique et sans la discipline et le contrôle qu’exigent normalement l’admission à une publication qui se veut « sérieuse ». On nous raconte même des histoires de collègues qui auraient refusé d’accepter un tel honneur. Ceux qui se sont attelés à la tâche de la préparation et de la publication du présent volume l’ont pensé autrement. Virginia Coulon, Xavier Garnier, moi-même, nous avons pensé que le genre des Mélanges est un genre qui fait honneur non seulement à celui qu’on veut honorer, mais aussi à ceux qui – comme dit la formule consacrée – se donnent l’honneur de contribuer à l’entreprise. À condition néanmoins qu’on respecte certaines règles, certaines exigences qui excluent les dangers évoqués, à savoir la facilité, l’incohérence, le manque de discipline et de rigueur (cela sonne très allemand, j’en conviens), et dont le résultat fasse non seulement honneur, mais aussi plaisir, suscite le respect et force l’admiration de la communauté scientifique dans sa grande majorité. Il fallait donc définir un idéal du genre pour un volume de Mélanges, un Festschrift, et faire un effort pour orienter les futurs contributeurs dans le sens de cet idéal. Quel est donc cet idéal, quelles sont les règles que nous avons cru devoir respecter pour réussir notre entreprise ? Il fallait tout d’abord trouver une thématique qui soit à même d’exprimer le centre des activités du chercheur africaniste Alain Ricard et qui soit aussi au cœur, en quelque sorte, de sa pensée théorique et méthodologique. Cette thématique devait permettre en même temps aux futurs contributeurs de se rallier derrière cette bannière et d’exprimer leur rattachement à la personne et à l’œuvre d’Alain Ricard, tout en présentant un aspect significatif de leurs propres travaux. Vous allez dire que c’est la quadrature du cercle. Nous nous sommes dit que c’est un idéal et qu’il fallait essayer de lui rester fidèle. C’est donc dans cet esprit que nous avons formulé et envoyé aux intéressés un texte d’invitation à la collaboration au volume. Le titre proposé fut « Textes et Terrains d’Afrique »/ « Textwork / Fieldwork in Africa » que nous avons expliqué ainsi : L’évolution actuelle des recherches sur l’Afrique permet d’envisager de nouveaux types de rapprochements entre l’anthropologie et les études littéraires, qui prennent en compte le travail textuel dans une perspective à la fois philologique et anthropologique. Le travail d’Alain Ricard a cherché la rencontre entre les anthropologues qui s’intéressent à la question de la production de textes en Afrique et les chercheurs en littérature, philologues et comparatistes, qui travaillent à mettre en relation les œuvres et les territoires, dans une perspective naguère sociologique, aujourd’hui « géocritique ». Y a-t-il un sens à prendre en compte une territorialité des textes littéraires ? Comment articuler textes et terrains, écrits et lieux ? Théâtre et nationalisme ? Voyage et conversion ? Poétique et politique ? La pratique du terrain ouvre la perception des territoires à la complexité des réalités locales, moins envisagées comme « données » que comme expérience. La littérature, comprise comme une façon de lire et de recevoir les textes, n’est pas étrangère à cette expérience. C’est ce lien entre une expérience du terrain et une expérience des textes que nous nous sommes proposés de mieux cerner dans leurs multiples dimensions dans ce volume. En réponse à notre invitation, nous avons reçu pas moins de trente contributions dont les auteurs figurent parmi les meilleurs spécialistes en littératures africaines. Ces trente contributions se répartissent sur quatre ensembles thématiques qui correspondent également à quatre domaines du travail d’Alain Ricard : (1) Le Concert et les arts de la performance ; (2) Des langues aux livres ; (3) Voyages et explorations ; (4) Terrains africains, horizons mondiaux. Les contributeurs viennent de France et d’Afrique, d’autres pays de l’Europe et de l’Amérique du Nord et illustrent ainsi non seulement l’étendue des relations amicales et professionnelles d’Alain Ricard, mais en même temps la dynamique des échanges et le réseau de coopération internationale qu’il a su créer et nourrir avec son élan et sa créativité. Les contributeurs ont tous, chacun à sa façon, fait leur la thématique de « Textes et Terrains d’Afrique » (qui est donc un « bon » titre, selon Adorno : « le microcosme de l’œuvre »). Ce qui nous a surpris c’est que tous, également, ont pu établir un lien direct avec la personne et l’œuvre d’Alain Ricard. Son nom est comme le centre de gravitation (ou de magnétisme ?) autour duquel tournent les contributions. Les rapports des contributeurs avec Alain Ricard et son œuvre, exprimés par la plupart dans les textes mêmes, se situent à plusieurs niveaux : ils vont d’une approche analogue, semblable ou parallèle (souvent par référence directe au modèle fourni par Alain) dans leur travail sur le terrain et sur les textes, via l’inspiration émanant des travaux d’Alain, à des relations plus personnelles, des biographies et des parcours qui doivent leur orientation et leur inspiration en bonne partie à la rencontre de leurs auteurs avec Alain Ricard. Permettez-moi de l’illustrer à partir des contributions. Dans la première partie (huit contributions) sur le « Concert-party et les arts de la performance / Concert-Party and Performance Arts », il y a des contributions qui se situent dans la droite ligne des travaux d’Alain, datant des années 1970, sur les arts populaires du théâtre et du spectacle, ses effets libératoires et émancipateurs, telle l’étude d’Omofolabo Ajayi-Soyinka : « Performing Liberation. Performing Identity : the Theatre of Ogunde 1944- 1946 » ; ou bien les contributions de Sophie Moulard-Kouka et de Birgit Englert, la première traitant « Du concert-party au Rap – Quarante ans de pratiques performatives en Afrique subsaharienne » et l’autre présentant des « Réflexions sur les jeunes musiciens inconnus au sud de la Tanzanie ». Bernth Lindfors établit un parallèle historique entre les travaux d’Alain sur le théâtre et le rôle qu’a joué au XIXe siècle le comédien africain-américain Ira Aldridge sur les scènes de l’Europe pour promouvoir une autre image des Noirs et leur apport à la vie culturelle. C. F. Swanepoel, à partir d’une recherche sur le terrain des Sesotho, présente les textes qui naissent autour des rites uploads/Litterature/ les-litteratures-africaines.pdf

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