Lire les Manuscrits de 1844 Actuel Marx Confrontation Sous la direction de Jacq

Lire les Manuscrits de 1844 Actuel Marx Confrontation Sous la direction de Jacques BIDET Gérard DUMÉNIL Emmanuel RENAULT Jacques TEXIER ACTUEL MARX CONFRONTATION Lire les Manuscrits de 1844 sous la direction de EMMANUEL RENAULT Publié avec le concours du Centre national du livre P R E S S E S U N I V E R S I T A I R E S D E F R A N C E M a q u e t t e d e c o u v e r t u r e p a r M u r i e l B o u r e t ISBN 978-2-13-056837-7 Dépôt légal — 1 " édition : 2008, novembre © Presses Universitaires de France, 2008 6, avenue Reille, 751014 Paris TABLE DES MATIÈRES E. Renault : Introduction - Comment lire les Manuscrits de 18441 7 Première Partie : Marx entre Hegel, Feuerbach et Hess Jean-Michel Buée : Les critiques de Hegel entre 1843 et 1845 35 Jean-Christophe Angaut : Un Marx feuerbachien ? 51 Franck Fischbach : « Possession » versus « expression » : Marx, Hess et Fichte 71 Deuxième Partie : Langages et formes de l'aliénation David Wittmann : Les sources du concept d'aliénation... 91 Gautier Autin : Religion et économie 111 Stéphane Haber : « Le naturalisme accompli de l'homme » : travail aliéné et nature 129 INTRODUCTION Comment lire les Manuscrits de 1844 ? Par Emmanuel RENAULT Si les études qui suivent sont réunies sous le titre « Lire les Manuscrits de 1844», c'est que le texte portant ce nom fait de différentes manières obstacle à la compréhension. Trois sources principales de difficultés peuvent être distinguées. Une première tient au statut des textes de Marx en général. Doivent-ils être lus comme des textes philosophiques, économiques ou politiques ? Étant donné que les textes théoriques de jeunesse adoptent un style philosophique alors que l'œuvre de la maturité tourne autour du thème de la critique de l'Économie politique, cette question pose le problème de l'unité de l'œuvre : faut-il admettre que le jeune Marx (de 1841 à 1846) élabore les intuitions philosophiques qui sont ensuite appliquées dans l'étude de l'Économie politique, ou au contraire que la période de maturité se caractérise par une rupture épistémologique avec les préoccupations et les thèses philosophiques de la période de jeunesse ? Ces interrogations, qui concernent au premier chef les Manuscrits de 1844 puisque ceux-ci sont parfois considérés comme l'expression la plus développée des intuitions philosophiques de l'œuvre marxienne et comme la première critique de l'Économie politique, ont souvent conduit à plaquer sur eux une grille de lecture trop générale au lieu de prêter attention aux problématiques spécifiques qui s'y élaborent. Une seconde source de difficulté tient à l'hétérogénéité de ces manuscrits. Les Manuscrits de 1844 (parfois intitulés « Manuscrits économico-philosophiques » ou « Manuscrits parisiens ») ne sont pas un 8 EMMANUEL RENAULT livre de Marx, mais la compilation posthume (en 1932)' d'un ensemble de textes non destinés à la publication : notes de lecture et extraits développés dans différents cahiers. Le destin politique de l'œuvre de Marx a conduit à leur donner le statut de livre majeur, sans suffisamment prêter attention au fait que c'est surtout à une pensée qui se cherche que nous avons affaire ici, à une pensée qui par ailleurs s'élabore en poursuivant des objectifs distincts et dans le cadre de polémiques de différents ordres. Les Manuscrits de 1844 constituent un texte saturé d'enjeux divergents et de lignes d'argumentation indépendantes. Ils se caractérisent par une complexité que l'on a trop souvent cherché à réduire en leur attribuant le type d'unité, de simplicité et de systématicité qui revient aux « livres ». Une troisième source de difficulté tient à l'instabilité de la pensée de Marx à cette époque. Même s'il existe une continuité entre La Question Juive et VIntroduction à la critique du droit politique hégélien (textes rédigés à l'automne et l'hiver 1843-1844 et publiés au printemps 1844 dans les Annales franco-allemandes, préparées avec la collaboration de Ruge), les Manuscrits de 1844 et La Sainte Famille (rédigée avec Engels lors de l'hiver 1844-1845), chacune de ces étapes formule une position théorique (et parfois politique) nouvelle, et il est tout aussi difficile de faire la part des nouveautés que d'évaluer leurs significations et leurs enjeux. Plus que comme le déploiement d'une thèse philosophique bien déterminée, les Manuscrits de 1844 doivent plutôt être considérés comme un équilibre instable d'orientations théoriques en cours de transformation sous l'effet de contraintes internes (leur cohérence théorique et politique) et externes (les conflits théoriques et politiques traversant l'école Jeune-Hégélienne, l'étude de l'Économie politique et la découverte « réelle », et non plus seulement « spéculative », du communisme français). Face à cette accumulation de difficultés, on pourrait douter que le jeu vaille la chandelle : faut-il vraiment prendre la peine de chercher à restituer leur sens si le statut de ces Manuscrits de 1844 est aussi indécis ? On peut certes considérer que « les Manuscrits de 1844 n'existent pas »2 : il ne s'agit pas d'un livre mais d'un ensemble disparate, destiné à un usage personnel (ou à être transmis à des collaborateurs proches3), d'extraits ou de tentatives 1. Sur l'histoire de ces manuscrits, de leurs différentes éditions et traductions françaises, on se référera à la « Présentation » par F. Fischbach de sa propre traduction : Manuscrits économico-philosophiques de 1844, Vrin, Paris, 2007, tout particulièrement p. 11-14. 2. Pour reprendre le titre de l'article de G. Bensussan, « Les Manuscrits de 1844 n'existent pas », in G. Labica, 1883-1983 : L'œuvre de Marx, un siècle après, PUF, Paris, 1985. 3. J. Grandjonc a ainsi montré que des thèses, des arguments, voire des formulations contenus dans ces manuscrits se retrouvent dans les articles publiés par Georg Weber dans Vorwârtz au même moment (voir J. Grandjonc, Marx et les communistes allemands à COMMENT LIRE LES MANUSCRITS DE 1844 ? 9 d'appropriation et de clarification ; il s'agit d'un texte écrit avec des sous- main (des manuels d'Économie politique qu'il fallait étudier, les articles conjoncturels de Ruge et de Bauer qu'il fallait réfuter, des ouvrages de Feuerbach et de Hegel qu'il fallait relire à la lumière de thèses originales avancées par exemple par Hess, afin de clarifier une position philosophique et politique personnelle en cours de transformation) - sous-main ensuite occultés sous la forme posthume du « livre », comme souvent avec les textes dont l'incertaine matérialité n'a pas résisté à la canonisation de « l'auteur » Marx". Mais si les Manuscrits de 1844 ne sont le grand li\re philosophique dont on crédite parfois leur auteur, ils témoignent cependant d'un état de la pensée de Marx qui est tout aussi décisif dans la genèse de l'œuvre que riche pour ses percées philosophiques et ses clarifications politiques (certes indissociables de vides et d'obscurités). Il n'est donc pas sans intérêt de relever le défi de l'interprétation de ces percées et de ces clarifications tout en cherchant à identifier les processus de reformulation qu'elles signalent. Les études réunies dans ce volume constituent autant de tentatives visant à surmonter les obstacles à la lecture de ces Manuscrits de 1844 en restituant leurs problématiques, arguments, thèses et enjeux spécifiques. La démarche adoptée est à la fois génétique et contextuelle5. Une première partie s'efforce d'expliciter le sens de la confrontation avec les interlocuteurs philosophiques majeurs des Manuscrits de 1844. Trois articles tentent à cette fin d'identifier les spécificités, les fonctions et les enjeux des (re-)lectures de Hegel (J.-M. Buée), de Feuerbach (J.-Ch. Angaut) et de Hess (F. Fischbach). Les deux premiers s'efforcent de préciser la spécificité du rapport à Hegel et à Feuerbach en comparant les Manuscrits de 1844 aux étapes précédentes de l'évolution rapide de Marx à l'époque. Le troisième tente, quant à lui, d'expliciter les enjeux de la philosophie marxienne de l'appropriation en interprétant le troisième manuscrit à la lumière de la théorie hessienne de l'argent et de la définition fichtéenne de la propriété. Une seconde partie porte sur ce qui constitue le centre de gravité de la position théorique et critique que Marx cherche à élaborer : la question de l'aliénation, question transversale parcourant la lecture critique de Paris, Vorwàrts, 1844, Maspéro, Paris, 1974, où l'on trouvera également la traduction des articles en question). 4. P. Loraux, Les sous-main de Marx, Hachette, Paris, 1986. 5. Les textes réunis dans ce volume sont le résultat d'une recherche collective développée dans le cadre d'un séminaire tenu à l'ENS LSH durant quatre années (2000- 2001, 2001-2002, 2007, 2008 ; en collaboration avec J.-M. Buée pour l'année 2001-2002, J.-Ch. Angaut pour l'année 2007 et avec J.-Ch. Angaut et D. Wittmann pour l'année 2008) et d'un atelier du Congrès Marx International m (Septembre 2001). Nous exprimons collectivement tous nos remerciements aux différents intervenants dans ces séminaires et cet atelier, ainsi qu'aux étudiants qui s'y sont associés activement et à A. Bidet Mordrel, M. Bouret et M. Heurtematte pour l'aide apportée lors du travail d'édition. 10 EMMANUEL RENAULT l'Économie politique, la discussion des différentes formes de uploads/Litterature/ lire-les-manuscrits-de-1844-by-emmanuel-renault.pdf

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