Littératures européennes Les fondements de l’édifice littéraire européen 1. LES

Littératures européennes Les fondements de l’édifice littéraire européen 1. LES TRADITIONS JUIVE ET CHRÉTIENNE. 1.1. Introduction. 1 Il faut tout d’abord différencier la fondation de la tradition. La première est une réalité vivante, appartenant au monde savant ; la seconde produit des effets de vivacité créatrice. Au point de vue littéraire, la Bible est une véritable bibliothèque dont le contenu change en fonction de la religion que l’on pratique. Ainsi, les juifs ne reconnaissent que l’Ancien Testament ; les chrétiens, l’ancien et le nouveau testament datant du Concile de Trente ; les protestants, les testaments réformés. Les différentes religions donnent un statut différent à la Bible. Elle prend une dimension sacrée pour les juifs, ce qui signifie qu’elle ne peut être traduite. A l’inverse, il s’agit d’un livre saint pour les chrétiens et il doit être traduit, puisqu’il s’adresse à tout le monde. Notons que les musulmans considèrent la Bible comme le deuxième livre saint après le Coran. Nous comprenons donc pourquoi les traditions juives et chrétiennes sont interprétées et lues différemment. Il y a réellement continuité et rupture entre le christianisme et le judaïsme. Le Christ, les apôtres, Marie, et tous les premiers chrétiens étaient juifs. Il faut attendre l’opposition entre Pierre et Paul pour qu’il y ait scission. Quand on considère les textes, ceux établis par les chrétiens n’ont pas de valeur sacrée alors que les juifs pensent que toutes les vérités sont contenues dans leur Bible. Ces différences de perception ont des conséquences dans le monde savant, le monde religieux et dans les mœurs. 1.2. La Bible. Établissons d’abord une chronologie, laquelle est la ligne de fuite de toute perception intellectuelle. La Bible a été écrite en quelques siècles. C’est pourquoi on retrouve des conceptions et des formulations différentes : elle est rédigée du 10°s. av. n.è. au 1°s. ap. J.-C. dans des lieux et dans des langues différents. L’ancien testament, celui des juifs, a été écrit en hébreux et le nouveau testament était rédigé en grec. - Introduction aux principales littératures européennes - 1.2.1. L’ancien testament. 2 Écrits. L’ancien testament est divisé en trois parties : la Thora (loi), les Prophètes et les 1.2.1.1. La Thora. La Thora, partie fondatrice de la Bible, est elle-même divisée en cinq livres : la Genèse, l’Exode, le Lévitique, les Nombres et les Deutéronome. C’est avant tout un texte juridique, se situant dans une histoire allant de la Genèse à la mort de Moïse. Le Lévitique est bourré de lois nous informant sur le droit administratif et canonique. Mais le récit de l’exode a, quant à lui, des allures de vraie chronique. La Thora comporte donc une série de textes d’une grande diversité. Approfondissons un peu le livre de la Genèse. Il est formé de mythes1 , de légendes et de chroniques légendaires. Le monde n’est pas éternel puisqu’il a été créé. Le livre de la Genèse répond aux questions du sens du monde et de l’existence humaine liés par la création de Dieu. Dieu n’est pas le monde et le monde n’est pas Dieu. L’homme a été créé par Dieu pour dominer le monde. C’est le début de l’histoire de la destinée providentielle de l’humanité. La destinée est prédestinée. Le Déluge voit l’anéantissement de la vie, mais aussi l’apparition d’une nouvelle humanité grâce à la foi de Noé, qui a construit l’arche, par foi, allant à l’inverse du bon sens. De nos jours, on pense que le Déluge aurait pu exister réellement. Des archéologues en auraient retrouvé la trace probable. Noé fait donc partie de la légende, puisqu’une légende tient toujours une part de vérité. La foi et l’obéissance d’Abraham ont fait de lui le père des croyants. Il est chargé de trouver la Terre Promise, accepte que sa femme de 90 ans ait un enfant que Dieu lui demandera de sacrifier à l’âge de 12 ans2. Toute cette précision au niveau des dates fait que son histoire peut être qualifiée de chronique légendaire. Adam et Eve sont un mythe : ils n’existent qu’en ayant le statut de premier homme et de première femme. Ce sont des héros mythique, au même titre que ceux de l’antiquité grecque. 1 Récit mettant en scène des situations qui touchent l’origine absolue d’un être, d’un fait ou d’une norme (comme la création du monde). 2 Isaac ne sera finalement pas sacrifié sur l’autel, puisqu’un ange a arrêté le geste de son père. Cette expérience n’était qu’un test. - Introduction aux principales littératures européennes - 1.2.1.2. Les Prophètes. 3 Cette partie de l’Ancien Testament est très caractéristique des récits juifs. C’est un genre à part entière, absolument déterminant de l’entité juive. Un prophète est un homme à travers lequel Dieu parle. Sa parole ne lui appartient pas, il prête sa voix. Les prophètes disent l’esprit et la finalité de la loi de Moïse. Ils ont une charge d’explication. Les trois grands prophètes sont Isaï, Jérémie et Ezéchiel. En dessous d’eux se trouvent douze petits prophètes. 1.2.1.3. Les Écrits. Cette partie comporte des chroniques, des poèmes, des récits utilisant des genres variés allant du conte au roman. La prose, la poésie, le récit, la narration,… sont très différents. 1.2.2. Le Nouveau Testament, Bible des chrétiens. Le Nouveau Testament est un facteur de sainteté et ne contient que peu de sacré. Il est composé de quatre évangiles (selon Marc, Mathieu, Luc et Jean), des Épîtres de St Paul (50 ap. J.-C., les Épîtres des autres apôtres sont postérieurs), et de l’Apocalypse. Son écriture s’achève en 70 ap. J.-C. et son ensemble ne représente qu’un dixième de l’Ancien Testament. Les trois premiers évangiles sont synoptiques : ils racontent à peu près les mêmes épisodes. L’évangile selon St Jean est différent au point de vue théologique. Il raconte surtout les grands événements de la vie du Christ. Le juif doit être juste pour être sauvé, et donc se conformer aux lois. Pour être sauvé, le chrétien doit être saint et donc avoir la foi. Ces traditions juive et chrétienne ont encore une grande influence sur nos vies actuelles. Elles sont à la base de nos cultures. Nos convictions sur la liberté de l’homme viennent du judéo-christianisme - “L’homme a été créé à l’image de Dieu”. Ancien et Nouveau Testaments sont fondamentaux pour notre civilisation occidentale. La solidarité devient pour nous une obligation : nous sommes tous égaux. Le sens de la Bible est le dialogue établit entre Dieu et le peuple élu. Tout être humain, quel qu’il soit, est personnellement en dialogue de salut avec Dieu. - Introduction aux principales littératures européennes - 1.3. Les traductions de la Bible. 4 Pour les chrétiens, l’humanité tout entière est élue, et il n’existe pas de langue sacrée. La Bible doit être traduite3 puisqu’elle doit s’adresser à chacun dans sa langue maternelle. Ce n’est pas le vecteur du message, mais bien la finalité de celui-ci qui est décisive. La Bible est traduite pour la première fois bien avant l’ère chrétienne : au 3°s av. n.è. Cette commande fut établie par le pharaon Ptolémée qui voulait connaître la loi des juifs et que la communauté juive hellénisée ne comprenait plus l’hébreu. Des juifs vont donc traduire la Bible en grec. La légende de cette traduction se retrouve dans la lettre d’Aristée à Philocrate. Elle raconte que 70 rabbins se sont réfugiés pendant sept ans sur l’île de Pharos (celle sur laquelle se trouvait le phare d’Alexandrie) pour traduire la Bible. Ils se sont isolés, et quand ils eurent terminé leur travail, ils constatèrent que leurs traductions étaient absolument identiques. Est- ce un miracle? Nul ne le sait. C’est ce que l’on a appelé la “Traduction des Septante” Alexandrie possède à l’époque une gigantesque bibliothèque (qui sera détruite par les flammes) et abrite également une école supérieure de philosophie produisant une élite. Après la constitution apostolique, les chrétiens ont besoin d’avoir une version latine4 de la Bible. Cette traduction se fait dès le 1°s. ap. JC., mais on n’a jamais retrouvé l’intégralité de cette première version, même si de très grands fragments nous sont parvenus. La “vieille latine” n’est pas intégrale mais a circulé largement auprès des Pères de l’Eglise. A la fin du 4°s. ap. JC., le christianisme a une place très importante dans l’empire romain ; place qu’il a pu se faire grâce à l’édit de tolérance de Constantin et de l’oeuvre d’Auguste qui l’utilisa pour cimenter son peuple. Le christianisme se développe en orient et en occident. Damase, le Pape de Rome, demande à un érudit chrétien, Jérôme, de traduire la Bible intégralement en latin. Il décide de traduire l’ancien testament à partir des textes hébreux et se rend donc en Palestine, dans des écoles rabbiniques, accompagné d’un monastère d’hommes et d’un monastère de femme. En effet, la traduction du livre saint ne pouvait s’envisager sans la dimension mystique. Après 20 ans de travail, Jérôme aboutit à la Vulgate, version de la Bible destinée au peuple. Mais la diffusion de son œuvre sera faible à l’époque à cause du saccage et de la chute de Rome. Cette dernière perd son uploads/Litterature/ littacratureseuropacennes 1 .pdf

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