Art et Histoire: Dimension et mesure des civilisations Author(s): Pierre Franca

Art et Histoire: Dimension et mesure des civilisations Author(s): Pierre Francastel Source: Annales. Histoire, Sciences Sociales , Mar. - Apr., 1961, 16e Année, No. 2 (Mar. - Apr., 1961), pp. 297-316 Published by: Cambridge University Press Stable URL: https://www.jstor.org/stable/27575578 JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact support@jstor.org. Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at https://about.jstor.org/terms Cambridge University Press is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Annales. Histoire, Sciences Sociales This content downloaded from 222.93.149.226 on Wed, 24 Aug 2022 08:41:01 UTC All use subject to https://about.jstor.org/terms D?BATS ET COMBATS Art et Histoire : Dimension et mesure des civilisations ? T es rapports qui unissent aux autres aspects d'une civilisation l'expres M-J sion plastique sont encore trop mal connus, nous les voyons trop complexes, trop susceptibles de retardement et de divergences, pour qu'il n'ait pas fallu se r?soudre ici ? laisser de c?t? les probl?mes pos?s par des liaisons si d?licates et des contradictions en apparence si ?tonnantes. ? Ces lignes ont ?t? ?crites par Marc Bloch en 1939 dans son admi rable ouvrage sur la Soci?t? f?odale. Il ne semble pas que, depuis vingt ans, des progr?s substantiels aient ?t? faits pour ?lucider ce probl?me des rapports entre la fonction plastique et les autres formes d'une civilisation. Plusieurs articles parus dans les derniers num?ros des Annales expriment de nouveau la perplexit? et l'inqui?tude des ? historiens ? mis en pr?sence de l'art ou de la litt?rature. Mais n'est-ce pas justement parce que les historiens pensent qu'il peut exister une histoire o? la consid?ration du fait plastique puisse ?tre regard?e comme accessoire qu'ils n'ont rien fait pour d?passer la position volontairement, et provisoirement, r?serv?e de Marc Bloch ? Aussi bien qu'ont-ils trouv? en face d'eux comme secours de la part des ? historiens d'art ? et des arch?ologues, sinon l'affirmation r?p?t?e de l'autonomie essentielle, absolue, de l' uvre d'art qui mettrait l'homme en contact avec le domaine des id?es ?ternelles sans aucune servitude de l'ordre humain, temporel ? Se refusant, non sans superbe, ? polluer la mati?re de leurs ?tudes, ceux-ci affirment tant?t que l'architecture n'est pas un art parce que trop engag?e dans la mati?re ; tant?t ils se sp?cia lisent dans le g?nie et la beaut? et ils sont en flirt avec l'absolu ; ou encore ils font de l'art le royaume des satisfactions imaginaires. Certains disent que les quatre ennemis de l'histoire de l'art sont l'amateurisme, la socio logie, l'esth?tique et l'histoire ; d'autres qu'une histoire de l'art scienti fique exclut n?cessairement toute consid?ration des valeurs esth?tiques *. Puisque historiens et historiens d'art sont, en fait, d'accord pour consi d?rer qu'il n'y a gu?re de commune mesure entre l'objet et les m?thodes 1. On trouvera en particulier ces diverses assertions dans B.Berenson, Est?tica, Etica e Storia nelle arle d?lia rappresentazione visiva. Florence, Electa, 1948 ; L. R?au, Encyclop?die de Vart, Paris, Nathan, 1951 ; Murcel Aubert, Les Vitraux de Notre-Dame et de la Sainte-Chapelle de Paris, Paris, 1960. Mais ces textes ne font que r?p?ter une opinion moyenne. Pour le texte de Marc Bloch, cf. La Soci?t? f?odale et la formation des liens de d?pendance, Paris, 1939, p. 96. 297 This content downloaded from 222.93.149.226 on Wed, 24 Aug 2022 08:41:01 UTC All use subject to https://about.jstor.org/terms ANNALES de leurs ?tudes, il n'est pas surprenant que nous ayons ap choses sur ces liaisons d?licates qui retenaient Marc Bloch gration des faits artistiques ? une histoire telle qu'il la con dont il souhaitait vivement, en revanche, la mise ? l'?tude, hautement, au surplus, sa certitude de la valeur de t?moign plastique. ? L'admirable floraison artistique de l'?re f?odale... ne pas seulement, aux yeux de la post?rit?, la plus durable glo ?poque de l'humanit?. Elle servit alors de langage aux form hautes de la sensibilit? religieuse, comme ? cette interp?n?trati t?ristique, du sacr? et du profane qui n'a pas laiss? de plus n gnages que certaines frises ou certains chapiteaux d'?glises. Elle bien souvent le refuge des valeurs qui ailleurs ne parvenaie manifester. La sobri?t? dont l'?pop?e ?tait si incapable, c'est dan tectures romanes qu'il faut la chercher. La pr?cision d'esp notaires, dans leurs chartes, ne savaient pas atteindre, elle p travaux des constructeurs des vo?tes. ? Etrangers les uns aux autres dans la pratique de leurs activ riens et historiens d'art constituent, au fond, les uns comme le les derniers repr?sentants d'une civilisation du livre, tout en la consid?ration des faits du langage, voire de l'?criture. Les plu esth?ticiens eux-m?mes ne prennent en consid?ration que les va dans l'art, lui sont communes, soit avec la litt?rature, soit a sophie. Ils ram?nent son ?tude ? un type de significations, illus valeurs qui se forment en dehors de lui. Et, comme les artistes pr?cis?ment en termes d'objets figuratifs, et non en terme de qu'ils ont ? dire, le malentendu n'a aucune chance de se dis contradictions n'ont aucune possibilit? de se r?soudre. L'art, cependant, ne fait de difficult? pour se m?ler aux a vit?s de la soci?t? contemporaine que pour une petite minorit? qui font profession d'une ?rudition aussi ?troitement li?e ? exclusive d'activit? et de pens?e. Il est vrai que c'est ? l'arch nous devons une grande partie de ce que nous avons appris lisations tr?s anciennes ou lointaines. Mais on ne recourt volont que lorsque les autres sources de documents manquent, on ne ch cette synth?se des sources ? laquelle aspirait Marc Bloch. En les documents de l'arch?ologie, on cherche toujours ? r?duir et le type de nos connaissances ? l'information qu'auraient pu nou des textes s'ils avaient exist?. Toutefois, c'est dans le domaine de des soci?t?s r?centes que le plus grand effort reste ? faire en vue per une connaissance m?thodique des sources non ?crites de l'his civilisations ; au nombre desquelles, naturellement, les arts f premier rang. Je prendrai pour point de d?part de cette confrontation le r?cent article de Roland Barthes : Histoire et litt?rature, apropos de Racine K II s'agit ?vi 1. Roland Barthes, ? Histoire et litt?rature : ? propos de Racine ?, Annales E.S.C., mai-juin 1960. Le livre de R. Picard est : la Carri?re de Jean Racine, Paris, 1956. 298 This content downloaded from 222.93.149.226 on Wed, 24 Aug 2022 08:41:01 UTC All use subject to https://about.jstor.org/terms ART ET HISTOIRE demment de litt?rature, c'est-?-dire d'un art qui utilise le langage comme instrument ; mais l'article met en relief avec tant de nettet? les pr?sup positions ? absolument gratuites ? qui s'opposent au progr?s d'une r?flexion historique sur le r?le des arts dans la soci?t? qu'on ne saurait d?sirer un terrain de discussion plus net. L'article de Roland Barthes repose sur quatre hypoth?ses : 1? Les visions du monde. L'artiste est une main qui ex?cute. Peu importe si le produit est un livre ou un objet. Ce qui compte, c'est le rap port entre ce produit, l'artiste et la collectivit?. L'artiste prend des valeurs dans le milieu ambiant. Il les traduit, les transpose, leur donne corps. La facture renvoie ? l'artiste, la signification ? la soci?t? qui l'a form? et instruit. 2? L'histoire de l'esprit. L' uvre d'art est le lieu de certaines pens?es collectives, moyennes, de groupes humains ? d?terminer et dont les contours ne se confondent pas avec la totalit? d'une soci?t?. Les artistes vivent souvent ? cheval entre plusieurs groupes et entre plusieurs formes de pens?e. Ils ne sont pas vraiment ? purs ?. Barthes dit, parlant d'un de ses r?cents historiens : Racine g?ne Picard. Je dirai plut?t qu'il g?ne Barthes ; car Picard, lui, s'en est parfaitement accommod?. C'est m?me le principal grief de Barthes ? son ?gard. Dans sa perspective ? lui, l'artiste n'est que l'interpr?te occasionnel d'une pens?e en puissance. Refusant de voir dans l' uvre autre chose que son aspect institutionnel, consid? rant que l'histoire de la litt?rature, ou de toute autre forme d'art ? archi tecture, peinture, musique, ? consiste dans la relation des circons tances ? autrement dit dans le mode d'apparition et de pr?sentation d'id?es form?es, il ne nous dit pas tr?s pr?cis?ment comment, au sein d'une communaut?, ? o? se sont manifest?es des uvres que les artistes n'ont fait que porter temporairement en eux, il en d?duit n?cessairement l'existence et la possibilit? d'une histoire de l'esprit. Le moins qu'on puisse dire c'est que l'id?e n'est pas nouvelle. Mais toutes les Geistgeschichte et les histoires sans nom de W?lfflin et de Dvorak ? bien qu'historiens d'art ? ont fait l'objet de nombreuses analyses assez cri tiques, sans parler de leurs f?cheux apparentements. Ce ne sont pas seulement les morts, mais les id?es incarn?es qu'il faut parfois, semble-t-il, tuer plusieurs fois. 3? L'institutionnel. Aux yeux de l'historien, l'?v?nement, la mode, c'est l'?ph?m?re. Seul compte et seul t?moigne uploads/Litterature/ pierre-francastel-art-et-histoire-dimension-et-mesure-des-civilisations.pdf

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