Littérature Principes fondamentaux de l'histoire de l'art de Wölfflin et L'Arch

Littérature Principes fondamentaux de l'histoire de l'art de Wölfflin et L'Architecture du drame shakespearien de Walzel Anne Guillemin, Christine Fourreau Abstract Heinrich Wolfflin's Principles of Art History (1915) and Oskar Walzel's Shakespeare's Dramatic Structure (1916) Walzel's essay is one of the first to transfer Wölfflin's visual concepts into literature, allowing him to see Shakespearean art as baroque. Citer ce document / Cite this document : Guillemin Anne, Fourreau Christine. Principes fondamentaux de l'histoire de l'art de Wölfflin et L'Architecture du drame shakespearien de Walzel. In: Littérature, n°105, 1997. pp. 78-82; doi : https://doi.org/10.3406/litt.1997.2433 https://www.persee.fr/doc/litt_0047-4800_1997_num_105_1_2433 Fichier pdf généré le 02/05/2018 ■ ANNA GUILLEMIN, université de Princeton Principes fondamentaux de l'histoire de l'art de Wôlfflin et L 'Architecture du drame shakespearien d'Oskar Walzel n 1915, l'historien de l'art Heinrich Wôlfflin (1864-1945) publia Principes fondamentaux de l'histoire de l'art (1), ouvrage dans lequel il expliquait les différences de style entre l'art baroque et celui de la Renaissance en recourant à cinq catégories élémentaires de composition. Cette étude formelle eut une grande influence sur la critique littéraire. Les théoriciens tentèrent d'adapter ses termes visuels à la littérature et son interprétation du baroque comme un style caractérisé par le mouvement, l'asymétrie et la dissonance entraîna une vague d'études de cette période (2). Oskar Walzel (1864-1944), célèbre germaniste de Dresde et d'origine viennoise, fut le premier à appliquer les termes de Wôlfflin à un texte littéraire dans son essai « L'Architecture du drame shakespearien » (3). Cet article suscita un grand nombre d'imitations entraînant des interprétations de styles littéraires, s'ins- pirant de Wôlfflin, allant du classicisme et du romantisme à l'expressionnisme moderne (4). Wôlfflin considérait que ses cinq catégories formelles étaient des « formes de représentation universelles ». Selon lui, les différences de style d'une période à une autre devaient être expliquées à travers l'étude du « mode de perception » d'une époque donnée, qui limitait les choix de représentation qui 1 Heinrich Wôlfflin, Kunstgeschichtliche Grundbegriffe, Munich, 1915 ; Principes fondamentaux de l'histoire de l'art, trad. Claire et Marcel Raymond, Paris, Pion, 1952. 2 Voir l'étude de René Welleck, « The Concept of the Baroque in Literary Scholarship », dans Concepts of Criticism, New Haven, Yale University Press, 1963 , pp . 69- 127. Voir aussi Jost Hermand, Literaturwissenschaft und Kunstwissenschaft : Methodische Wechselbeziehungen Seit 1900, 2., verbesserte Auflage, Stuttgart, J.B. Metzlersche Verlagsbuchhandlung, 1971. 3 Oskar Walzel, « Shakespeares dramatische Baukunst », jahrbuch der Shakespearegeselhchaft, 52, 1916, pp. 3-35, repris in Das Wortkunstwerk, Mittel seiner Erforschung, Leipzig, 1926, pp. 302-25. •yo 4 Voir par exemple Fritz Strich, « Der Lyrische Stil des 17. Jahrhunderts », dans Abhandlungen zur deutschen I O Literaturgescbichte, festschrift fur FranzMuncker, Munich, 1916, pp. 21-53, Theophil Spoerri's « Vom Wesen des Romantischen » in Wissen und Leben, 1918, Strich Deutsche Klassik und Romantik; oder Vollendung und LITTÉRATURE Unendlichkeit, Munich, 1922, et Spoerri, Renaissance undBarock beiAriost und Tasso : Versuch einer Anwendung n° 105 - mars 97 WolffUn 'séer Kunstbetrachtung, Bern, Haupt, 1922. WÔLFFUN, WALZEL ■ s'offraient à l'artiste. En défendant cette thèse Wôlfflin voulait dépasser ce qu'il appelait une analyse de style fondée sur l'expression, qui examinerait, par exemple, les différences dans les amplitudes de mouvement ou dans les palettes entre une Assomption de Rubens et un tableau de genre de Vermeer. Il pensait que sous des apparences différentes, de telles œuvres partageaient des similarités fondamentales dans le contour, les ombres et la composition. Pour Wôlfflin, le style de chaque période était comme une langue « dans laquelle tout peut être dit ». En définissant le style comme un mode de perception et son étude comme rien de moins qu'« une histoire du développement de la vision de l'Occident », les travaux de Wôlfflin rejoignaient ceux de l'École d'histoire de l'art de Vienne, où les théoriciens essayaient de décrire une histoire du style du point de vue de la perception. Wôlfflin, tout comme l'influent historien de l'art viennois Alois Riegl, admirait le théoricien Adolf von Hildebrand qui avait introduit dans Le Problème de la forme dans la peinture et la sculpture ( 1 893 ) (s) , l'idée de Fernbild (image éloignée) pour expliquer la découverte de la distance et de la perspective. Riegl avait à son tour développé les notions de « mode tactile » et de « mode optique » dans les Arts appliqués de la période romaine tardive (1901) (ô) pour établir la distinction entre une forme d'art destinée à être vue de près, de manière presque tactile et une forme d'art reposant sur la perspective, appréciée à distance. Le premier couple de catégories définies par Wôlfflin dans Principes de l'histoire de l'art, le linéaire et le pictural, est proche des termes employés par Hildebrand et Riegl. Wôlfflin met en contraste la manière dont les artistes des deux périodes rendent le contour des formes, soit en soulignant méticuleuse- ment les lignes et les détails, soit en estompant les limites dans un jeu de lumière et de couleurs destiné à créer l'illusion de formes vues à distance. Pour Wôlfflin, le style linéaire se voit suivant des lignes, le style pictural selon des masses. Le second couple, qui oppose plans et profondeurs, se rapporte à la disposition des objets dans un espace à deux dimensions, selon qu'ils sont présentés suivant des plans statiques, parallèles à l'observateur ou en profondeur par un raccourci qui entraîne un mouvement des yeux de l'avant vers l'arrière du tableau. Le troisième couple de catégories, le fermé et l'ouvert, ou tectonique et atectonique, concerne le cadre ou les bords de l'œuvre d'art. Une forme fermée s'ajuste à ses limites, s'efforçant à la symétrie alors qu'une forme ouverte cherche à suggérer à travers l'asymétrie un monde se prolongeant au-delà du cadre — elle regarde au-delà d'elle-même et à dessein apparaît sans limites. 79 5 Das Problem der Form in der bildenden Kunst (1893), 3e éd., 1901, Strasbourg. LITTÉRATURE 6 Die Spàtrômische Kunstindustrie, Vienne, 1901. n° 105 - mars 97 ■ QUESTIONS DE STYLE Le quatrième couple de catégories, pluralité et unité, étudie le rapport des parties au tout. Wôlfflin affirme, de manière un peu surprenante, que la Renaissance a saisi une unité multiple alors que le baroque a créé une unité indivisible. Une œuvre d'art baroque privilégiait un élément unique à l'intérieur d'une composition, mis en relief par le raccourci, la lumière et l'absence de verticales et d'horizontales. Elle racontait un moment particulier à son sommet. Le style classique, symétrique, de présentation par plans permettait qu'une histoire soit rendue d'une manière plus large. Wôlfflin conclut avec son cinquième couple de catégories, clarté et obscurité, que le style baroque offrait au regard une image plus riche. Cette fuite de la clarté constituait plus qu'une tendance maniériste à compliquer des solutions artistiques suivant une formule préétablie. Avec le baroque, il reste toujours quelque chose qui n'a pas été résolu : l'obscurité laissait au bout du compte une tache d'indétermination. Alors que les travaux de Riegl passèrent presque inaperçus en dehors de sa discipline, le renouvellement de la vision du baroque apporté par Wôlfflin suscita un fort engouement. Admiré par les expressionnistes, le livre de Wôlfflin entraîna une vogue spectaculaire d'études baroques, d'abord en Allemagne puis bientôt dans toute l'Europe. Oskar Walzel en 1917 exhorta la critique, dans un essai élogieux, à appliquer les travaux de Wôlfflin à la littérature. 11 employa lui-même largement ses termes théoriques dans l'ouvrage de critique qu'il écrivit par la suite, Gehalt und Gestalt (7). Dans les pays francophones, Wôlfflin fut découvert à travers l'École de Genève : Marcel Raymond traduisit Principes de l'histoire de l'art et Jean Rousset écrivit une importante étude sur le baroque dans la littérature française (s). Le premier exemple d'une lecture de la littérature s'inspirant de Wôlfflin est l'essai de Walzel, « Shakespeares dramatische Baukunst » (1916), dont on trouvera ci-après la traduction. Il s'agit d'une tentative de rendre compte du style du dramaturge, si peu conforme à l'esprit classique. Selon Walzel, de nombreux critiques avaient reproché aux pièces de Shakespeare de manquer de symétrie, de négliger les personnages principaux et de mêler indifféremment tous les genres. Après avoir présenté une liste de spéculations sur la méthode d'improvisation et le manque d'organisation de Shakespeare, Walzel cite un passage de Wôlfflin qui explique que l'esthétique baroque, loin de négliger le développement équilibré de l'intrigue et des personnages, visait à créer une impression de tension, de mouvement et d'absence de règles. L'affirmation selon laquelle « la forme est nécessaire dans tout art », mais que « le baroque se plaît à dissimuler la règle », « introduit la dissonance et, dans OU 7 Voir « Wechselseitige Erhellung der Kùnste: Ein Beitrag zur Wùrdigung kunstgeschichtlicher Begriffe», Philosophische Vortràge von der Kantgesellschaft, 15, 1917, pp. 5-88, et Gehalt und Gestalt im Kunstwerk des LITTÉRATURE Dichters, Berlin, Neubalbelsberg, 1929. n° 105 - mars 97 8 Jean Rousset, La Littérature de l'âge baroque en France : drcé et le Paon, Paris, José Corti, 1953 . WÔLFFLJN, WALZEL ■ la décoration, [...] frôle l'impression du hasard » (9) confirmait ses propres intuitions sur le style apparemment désordonné de uploads/Litterature/ principes-fondamentaux-de-l-x27-histoire-de-l-x27-art-de-woelfflin-et-l-x27-architecture-du-drame-shakespearien-de-walzel.pdf

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