Que dit vraiment le Coran ? Dr Abou Nahla Al ‘AJAMî Entretien réalisé par la ré

Que dit vraiment le Coran ? Dr Abou Nahla Al ‘AJAMî Entretien réalisé par la rédaction de Oumma.com « Que dit vraiment le Coran » paru aux éditions Srbs est sans conteste le livre évènement de cette rentrée. Nous avons interrogé son auteur le docteur Abou Nahla Al’Ajamî théologien, de formation scientifique, spécialiste en sciences coraniques. « Que dit vraiment le Coran » un livre indispensable pour tous ceux qui souhaitent connaître la véritable position du Coran sur le voile, le djihad, la laïcité, la polygamie, la démocratie, les attentats terroristes etc… Votre livre s’adresse à tous ceux qui veulent savoir ce que dit le Coran sur plus d’une quinzaine de sujets d’actualité comme notamment le voile, le djihad, la laïcité, la démocratie etc… En tant que croyant, peut-on s’exprimer au nom du Coran en toute neutralité ? Je dirais, plus exactement, que trente des quarante questions envisagées en "Que dit vraiment le Coran" sont relatives à des points régulièrement traités ou "mal-traités" dans les médias. Conséquemment, ils ont été réactivés au sein du débat musulman ; il en est ainsi de la charia, du terrorisme, de la mixité, du mariage, mais aussi de la violence faite aux femmes, des peines corporelles, du statut exact des autres religions,etc. Effectivement, en introduction je revendique en tant que croyant la neutralité de ma démarche. Le terme "neutralité" aurait pu paraître choquant s’il avait signifié : "Ne pas avoir d’opinion sur ce que dit le Coran", être indifférent, détaché, désintéressé. Tel n’est pas le cas naturellement, il s’agissait d’indiquer précisément l’esprit de la méthode ayant présidé à cet ouvrage. Ceci dit, le croyant serait-il condamné à la subjectivité ? Devrait-il accrocher son intellect aux portemanteaux de la mosquée ? La raison s’opposerait-elle à la foi, et la foi serait-elle un obstacle à la raison ? L’argument de foi l’emporterait-il sur l’argument de raison ? Nous ne le pensons pas. Le musulman est adepte d’une voie d’équilibre, il se doit de vivre sa relation à Dieu et au monde en un perpétuel échange constructif entre ces deux pôles majeurs de sa personnalité, de son être. Le Coran n’a de cesse de le lui rappeler, ex : S3.V190-191.[i] D’autre part, on peut affirmer que la neutralité du croyant est le respect dû au texte même du Coran. En tant que croyant m’est-il demandé de sombrer dans l’irrationnel ou le mythologique ? Le Coran au contraire appelle à la réflexion et à l’analyse, à la compréhension et à la préhension intellectuelle. Mentionnons par exemple : S4.V82, S38.V29, S47.V24.[ii] En ces versets Dieu invite les croyants à examiner, réfléchir et méditer le Coran et ce, en totale intelligence et rationalité. Nous l’avons évoqué, la neutralité du chercheur est méthodologique. Nous avons refusé de compiler les avis de nos prédécesseurs ou contemporains afin de n’examiner le Coran qu’à la lumière de son contenu, le Coran par lui même. Il s’agit donc de fournir une lecture objective, dépassionnée et littérale. J’insiste sur la littéralité comme vecteur principal de sens. A cette fin, il était nécessaire de reposer la totalité du questionnement rationnellement ce qui, dans la perspective de tout musulman, implique de retourner à la source et d’examiner ce que le Coran dit réellement, textuellement. La neutralité est ici objectivité et analyse critique. La neutralité s’imposait d’autant plus que le débat, interne ou externe, est mené en mode affectif, émotionnel, mais passion et raison ne vont que rarement de pair. Ainsi, après avoir recensé thématiquement les versets, je propose une lecture directe du sens immédiat et apparent. En effet, la convergence de sens présentée alors par les versets ainsi assemblés permet instantanément et en première lecture de déterminer la signification coranique, littéralité donc. Autre nécessité de neutralité : cet ouvrage est aussi destiné au non musulmans et, sans sombrer dans l’apologie ou le simplisme, il convenait d’adopter une présentation la plus neutre et apaisée possible. En ce sens il rompt avec le positionnement idéologique qui caractérise notre époque. Loin de vouloir alimenter la polémique, de jeter de l’huile sur le feu de l’un ou l’autre camp, nous avons souhaité ouvrir le dialogue. Non pas en vendant le Coran à vil prix ou, à l’inverse, en versant dans la publicité gratuite, mais en fournissant un bagage clair et accessible uniquement argumenté par le Coran. La vérité est neutralité car, tout comme le Coran, elle n’a d’autre camp que le sien propre. Néanmoins, le résultat de cette démarche n’est pas neutre. Il m’engage en tant que croyant et engage le croyant. Je veux dire par là que les résultats de cette recherche pourront surprendre le lecteur musulman qui sera parfois confronté à une nouvelle donne. Le Coran n’a pas à être conforme à nos habitudes, nos croyances, nos acquis superficiels, nos raccourcis faciles, mais il a pour fonction et mission de nous interpeller. A nous, foi et raison, de tendre vers la voie qu’il indique. Vous appelez les musulmans à se ressourcer par le Coran en redécouvrant les définitions fondamentales de leur texte sacré « ensevelies sous la poussière des siècles et des traditions ». Il ne s’agit pas de rejeter globalement notre héritage ni de critiquer les efforts de nos prédécesseurs, mais de déterminer précisément la nature du lien que les musulmans actuels peuvent ou doivent avoir avec le Coran. Le Coran est la référence majeure et incontournable de tout musulman. Par définition, pour remplir cette mission le texte coranique est nécessairement intangible et permanent, mais le rapport au Texte varie selon le temps. Qu’il n’y ait pas méprise, je ne vise pas ici l’opposition entre exégèse classique et exégèse moderne, ce distinguo nous le verrons n’a pas de fondement. Mais, afin de bien entendre ce que signifie exactement cet appel, l’on se doit d’établir la constatation suivante : la relation au Coran suit schématiquement une genèse à quatre temps. • La première génération eut un rapport particulier avec la Révélation, un vécu quasi instantané. Le sens, pour eux, n’était ni passé ni à venir mais pleinement présent. La langue était leur, les événements mentionnés constituaient leur propre vécu, les comportements stigmatisés leur étaient personnels, les recommandations morales touchaient directement leur tissu social, etc…le message coranique était donc direct. Le Coran surgissait en leur réalité intime et de ce fait ne se posait pas pour eux la question de la marche à suivre. Conséquemment, prétendre que les compagnons firent l’interprétation de la totalité du Coran est un non sens et une affirmation idéologique sans preuve[iii]. • Les suivants eurent une relation à la Révélation différente. Le Texte sacré leur était déjà antérieur. S’imposa alors à partir des IIème et IIIème siècles de l’Hégire l’exigence d’une exégèse, c’est-à-dire la nécessité de donner sens aux versets par des développements intellectualisants et non plus par l’immédiateté. Le processus fut progressif, et de ce fait l’interprétation du Coran a une histoire. Elle suit l’évolution culturelle des musulmans, leurs progrès intellectuels, les controverses judéo-chrétiennes, les apports de la logique d’Aristote, l’âpre débat de la scolastique (le Kalâm), les développements du Droit musulman (le Fiqh), les prises de position théologiques de divers califes, etc. L’essentiel à comprendre est que l’interprétation du Coran n’est pas de nature révélée, il n’y a pas en Islam de continuum entre la Révélation et les hommes par l’intermédiaire de l’Esprit Saint ! Tout effort de compréhension est ijtihâd et tout jihâd connaît victoires ou défaites. Ainsi notre passé nous a-t-il légué une pluralité d’interprétations dont la validité est relative. Ceci signifie que toute proposition d’interprétation doit être réexaminée et non acceptée par un a priori béat. Encore une fois, non un acte de foi mais un acte de raison. • Nous ne pouvons ici qu’évoquer la période de sclérose qui fit suite à l’expansion intellectuelle du monde musulman. Toujours est-il que le débat cessât faute de combattants, l’on ferma point les portes de l’ijtihâd mais nul plus jamais ne les emprunta. Concurremment, l’on se contenta de reproduire ou commenter les écrits de la période précédente. Conséquence attendue de ce conservatisme stérile, une nette tendance à sacraliser les textes des anciens exégètes. Au point qu’aujourd’hui encore, lorsque question est posée par rapport au sens d’un verset coranique on répond : "Considérons ce que les prédécesseurs en ont dit" ! • Au temps présent, une telle attitude est inacceptable à double titre. D’une part, n’est de sacré que le Coran. D’autre part, un tel conformisme anti- intellectuel est la pire des méthodologies ou, en réalité, les stigmates d’une absence de méthode de lecture du Coran actuelle et adéquate. Serions-nous devenus aveugles ou analphabètes ? Les évolutions du monde actuel, les connaissances multiples, les acquis scientifiques et méthodologiques auraient-ils comme seule conséquence de rendre les musulmans déficients ? La force des uns serait-elle le poison de notre faiblesse ? Il faut cesser de s’imposer par piétisme de ne pas être, c’est-à-dire de ne pas penser notre Livre. Quoiqu’il en soit des poussières d’antan que nous venons d’évoquer, le point commun entre toutes les lectures, passées et à venir, est ce que nous avons nommé uploads/Litterature/ que-dit-vraiment-le-coran.pdf

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