RECHERCHES AUGUSTINIENNES VOLUME V ÉTUDES AUGUSTINIENNES 8, rue François-Ier PA
RECHERCHES AUGUSTINIENNES VOLUME V ÉTUDES AUGUSTINIENNES 8, rue François-Ier PARIS (VIIIe) 1968 Supplément à la Revue des étudrs augustiniennes PL I. - LA RÉVÉLATION « TOLLE, LEGE » DE SAINT AUGUSTIN Philippe de Champa igne, toile, Pa.ris, inédite Le « Tolle, Lege » de Philippe de Chainpaigne Voici une nouvelle toile inédite du xvne siècle, après celle que nous avons déjà publiée en couleurs sous le titre : Le cc Tolle, lege )) de George Sand1 . Nous avions également signalé2 une gravure signée " Ph. Champaigne in<venit). Poilly s<culpsit) )), frontispice qui orne la traduc- tion des Confessions par Arnauld d' Andilly, Paris, r649. M. Jean Orcibal, qui a étudié naguère les frontispices gravés des Champaigne, ne mentionne pas celui-ci, mais insiste avec raison sur le fait que les frontispices de Port-Royal cc sont composés sur les indications minutieuses des auteurs et dégagent presque toujours l'idée maîtresse du livre3 )). L'on ne doit donc pas s'étonner de voir la scène de conversion par la Grâce gravée comme frontispice, au siècle du jansénisme, non seule- ment par François de Poilly, mais par Claude Mellan, Jean Mariette et Simon Thomassin. Sur la gravure de Poilly (Pl. II), Augustin est assis sous le figuier, mains jointes, le visage impérieux frappé par le rayon où est inscrit : TOLLE, r~EGR Alypius, assis à quelque distance sur le perron d'une maison, est r. Revue des études ctugitstiniennes, t. XII, 1966, p. l-7. 2. J. et P. COURCELLE, Nouvelles illustrations des ' Confessions ' augustiniennes, dans Revue des études augustiniennes, t. X, 1964, p. 349 et pl. IX (Paris, B.N., cabinet des estampes, Réserve, Ed. 49 e, in-folio.) 3. J. ÜRCIBAL, Frontispices gravés des Champaigne, dans Bulletin de la Société des amis de Port-Royal, 1952, p. 19-27. Cf. H. STEIC\', Philippe de Champaigne et ses rdations avec Port-Royal, dans R/union des Sociétés des Beaux-arts des départements. session XV, 1891, p. 630-644; H. LEMONNIER, L'art français au temps de Richelieu et de Mazarin, Paris, 1893, p. 348-356 ; A. FONTAINE, L'esthétique janséniste, dans Revue de l'art ancien et moderne, t. XXIV, 1908, 2, p. 141-155 ; H.S. EDE, The Drawings of Philippe de Champaigne, dans Art in America, t. XII, 1923-1924, p. 253-268 ; R. RosEXBERG, Zur hünstlerisc!ien Entu:ichlimg des Philippe de Cham- paigne, Berlin, 1933; J. I,AVALLEYB, Philippa de Champair;ne et l'esthétique janséniste, dans Miscellanea historica in ltonorem Alberti de Jillayer, t. II, Leuyen-Brussel, r94C, p. I09l-II06. 4 ]EANNE~ET PIERRE COURCELLE vêtu du même manteau ample que celui d'Augustin. Une rangée d'arbres et une arcature, un peu estompées, forment le fond du jardin à la française, tandis que le figuier et le personnage principal, fortement ombrés, ressortent au premier plan. Aucune toile correspondant au sujet de ce frontispice n'est mentionnée parmi les œunes conservées de Philippe de Champaigne. On sait cepen- dant que sa production fut abondante, qu'il peignit à plusieurs reprises un même sujet et que nombre de ses tableaux, encore inédits, sont conservés dans des collections particulières ou des chapelles privées. Ses toiles sont rarement signées. Or, grâce à une amicale information de M. J eau Orcibal, nous avons appris qu'un amateur d'art, M.F. Rey, de Paris, pense posséder ce tableau (Pl. I). Il a eu l'extrême courtoisie de nous autoriser à le publier pour la première fois et de nous fournir tous les renseignements qu'il possédait à ce sujet. Il l'acquit à Brive en 1940, d'un antiquaire qui lui dit le tenir d'un château de la région (Largeur 0,83 m. X 0,65). Le tableau porte au dos écrite sur l'encadrement - la mention : <<peint par Champaigne )). L'écriture, à notre avis, remonte au xvne ou au xvnre siècle, mais n'est de la main ni de Champaigne ni d'Alexandre Lenoir dont nous allons parler bientôt. En effet, cette attribution est à rapprocher de deux pièces d'archives d'époque révolutionnaire; on y trouve mentionnée l'existence d'un tableau de Philippe de Champaigne dont le sujet était : «La conversion de saint Augustin)). Voici ces pièces : I Reçu de deux tableaux: par Philippe de Champagne et d'autres objets. Je reconnais avoir reçu du citoyen Mulot, garde du dépôt de Nesle, rue de Beaune, deux petits tableaux peints par Philippe de Champagne. L'un représente la Conversion de saint Augustin et l'autre la Samari- taine conversant avec Jésus ; plus un Christ sculpté en bois, posé sur un fonds de velours noir, et un autre, plus petit, en ivoire, posé sur sa croix de bois noirci, lesquels objets ci-dessus décrits il a fait transporter au Dépôt national des Monuments. A Paris, ce 6 Nivôse, l'an II de la République [26 décembre r793] Lenoir, garde du Dépôt des Monuments'. II État des objets d'art relatifs à !'Instruction Publique, entrés dans le Dépôt provisoire des Monuments établi en la maison nationale des ci-devant Petits Augustins, depuis le 29 Frimaire jusqu'au 9 Nivôse de l'an II de la République [19-29 Décembre r793) ................. . 4. Inventaire général des richçsses d'art de la France, Archives du JI.fusée des monu- n·ients français, t. II, Paris, r886, p. ro7, n° LXXXVI. - - ----- - ·-- - - ---- - ·----· Pl. II. - LA RÉVÉLATION «TOLLE, LEGE» DE SAINT AUGUSTIN Philippe de Champaigne, gravure, Paris, 1649 LE " TOLLE, LEGE i) DE PHILIPPE DE CHAMPAIGNE 5 Le 6 dudit [Nivôse]. Le citoyen Mulot, garde du Dépôt des Émigrés, m'a remis deux petits tableaux peints par Philippe Champagne savoir: La Conversion de saint Augustin et la Samaritaine. Un Christ sculpté en bois, posé sur un fond de velours noir, plus un plus petit en ivoire, posé sur une croix de bois noirci. J'ignore où ces objets ont été pris'. Une toile de Champaigne représentant la Samaritaine est bien connue, et son histoire a pu être reconstituée. Elle se trouvait à la fin du xvne siècle dans le chœur de l'église de Port-Royal de Paris, passa du fait de la Révolution au Dépôt des Petits Augustins, y fut choisie le 17 avril 1793 par les conservateurs du Museum Central pour leur établissement, leur fut remise par Lenoir le 24 juillet de la même année, puis expédiée le II plu- viôse an XII au Musée de Caen, où elle est encore conservée de nos jours. 1\1. Dorival ne croit pourtant pas que la toile circulaire du Musée de Caen, de l,13 m de diamètre soit l'un des cc deux petits tableaux l> dont parle ici Lenoir; il suppose que Philippe de Champaigne traita deux fois le même sujet6 . Nous pensons qu'il a raison, non à cause des dimensions du tableau - car la notion de petitesse est relative et Champaigne a peint des toiles de plusieurs mètres carrés - mais du fait des dates : une toile entrée dans un dépôt le 26 décembre 1793 ne peut en avoir été distraite le 24 juillet de la même année. Ainsi, l'histoire des cc deux petits tableaux >l nous échappe. Champaigne possédait à sa mort un livre in-4° intitulé Vie de saint Augidin, et un tableau cc Saint Augustin >J, peint par lui-même 7• Cette mention désigne- t-elle notre toile : cc Conversion de saint Augustin » ? Rien ne permet de l'assurer. D'autre part, la toile fut probablement mise en vente en 17948, mais on ignore qui l'acheta. La facture est belle ; les couleurs dégradées et rares vont du bleu ciel au turquoise, et au bleu soutenu des collines qui s'aperçoivent à travers les arcades du fond. Augustin se détache à droite, le visage resplendissant de l'éclat des rayons qui viennent en biais du coin supérieur gauche ; parmi 5. Ibid., p. IIO, n° LXXXVIII (établi par Alexandre Lenoir). 6. B. DORIVAL, Philippe de Champaigne et Port-Royal, Paris, 1957 [Catalogue de l'exposition du Musée national des Granges à Port-Royal], n° 57, p. 56-57. 7. J. GUIFFREY, Les peintres Philippe et jean-Baptiste de Champaigne, dans Nouvelles archives de l'art français, 3• série, t. VIII, Paris, 1852, p. 184 et 217. 8. Inventaire des richesses d'art de la France, Archives du Musée des monuments français, t. I, 1, Paris, 1883, p. 17, n° XVIII : «Récolement et vente des objets déposés aux Petits-Augustins ... Le 6 pluviose an II [25 janvier 1794], il se fait au Dépôt un récolement général de tous les objets qu'il renferme, par le commissaire du département Thuret et les membres du Comité révolutionnaire de la section de l'Unité, Sauvage et Drays. A la suite de ce récolement, une seconde vente est ouverte; elle se continue plusieurs mois. La décharge s'opère comme à la précédente, par la signature donnée chaque jour au procès-verbal de vente ». L'acquéreur ou le précé- dent propriétaire plaça la toïle dans un cadre estampillé C. PÉPIN, il s'agit de Claude Pépin, maître - menuisier à Paris de 1775 à 1785. Cf. F. de SAI,VER'I'E, Les ébénistrs du XVTTI 0 siècle, leurs œmms et leurs marques, 3• éfl, Paris, r934, p. 240. 6 JEANNE ET PIERRE COURCELLE eux sont peintes en jaune les capitales TOLLE, LEGE, lisibles à l'œil nu, mais évanescentes ; car le tableau, qui a uploads/Litterature/ recherches-augustiniennes-volume-v-1968.pdf
Documents similaires
-
20
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Oct 22, 2022
- Catégorie Literature / Litté...
- Langue French
- Taille du fichier 11.8366MB