La poésie Qu’est-ce que la poésie ?  Issu du grec poiésis, ce terme renvoie à

La poésie Qu’est-ce que la poésie ?  Issu du grec poiésis, ce terme renvoie à l’idée de création, de fabrication.  Genre littéraire, sa spécificité repose sur le travail de la forme et du langage, qui implique une connaissance de la versification, de la prosodie ou de la métrique : ces termes renvoient à l’étude de la technique de l’écriture, du rythme et des sons caractérisant la poésie, qui s’oppose traditionnellement à la prose. La poésie est aussi une forme d’écriture employée dans un autre genre littéraire, le théâtre en vers.  Le langage poétique est à la fois au service de la beauté formelle et du sens, ces deux tendances étant parfois séparées dans les œuvres de certains poètes tournés vers la seule recherche de la perfection formelle.  La poésie s’inscrit dans son temps, tantôt codifiée, tantôt libérée des règles et contraintes, elle est orientée par les aspirations qui traversent les différents mouvements littéraires. Il en va de même pour son contenu : elle peut être morale et didactique au XVII° (avec les Fables de La Fontaine), ou lyrique et engagée au XIX° (avec Victor Hugo), ou encore orientée vers la seule recherche du beau formel.  Aux traditionnels poèmes en vers s’ajouteront également des poèmes en prose qui travaillent le langage de façon particulière. I. Etudier la versification 0 Comment lire les vers ? 1. Longueur des vers a) Comment compter les syllabes ? Le décompte des syllabes s’appuie sur des règles précises. La poésie se lit en fonction des syllabes que l’on prononce ; pensez à faire les liaisons.  Prononcer ou non le e ? 1 L’élision est le fait de ne pas compter un son qu’on ne prononce pas parce qu’on ne l’accentue pas. On parle de e caduc ou e muet en fin de vers, mais aussi devant une voyelle ou un h muet, devant quoi il s’élide. « Pré/ten/dai/t a/rri/ver/ san/s en/com/br[e] à/ la/ vill[e] » (La Fontaine) = 12 syllabes En revanche, le e se prononce devant une consonne ou un h aspiré. « J’im/plo/re/ ta/ pi/tié/, Toi,/ l’u/ni/que/ que/ j’aim[e] » (Baudelaire) = 12 syllabes  Diérèse ou synérèse ? Quand deux voyelles se suivent dans une syllabe, elles peuvent être prononcées de deux façons ; l’usage les prononce généralement en une seule émission de voix, dans une seule syllabe ; en revanche, la poésie peut les scinder en deux émissions distinctes, dans deux syllabes, ce qui met en valeur le mot concerné : ce procédé s’appelle une diérèse (du grec di-airesis, « division »). « Sa/ bu/r[e] où/ je/ vo/yais/ des /con/ste/lla/ti /ons » (Hugo) Le procédé inverse, qui consiste à prononcer une seule syllabe, est une synérèse (du grec sun-airesis, « rapprochement »). Blaise Cendrars, traitant avec humour et dérision son métier de poète, marque une synérèse pour ce terme habituellement prononcé sous la forme de deux syllabes, po/ète, qu’il faut alors prononcer poèt – qui évoque l’onomatopée amusante : pouet. b) Vers pairs et impairs Les différents types de vers peuvent être classés en fonction du nombre de syllabes qu’ils comportent. La longueur des vers leur donne leur nom. Vers pairs Vers impairs Nom Longueur Nom Longueur dissyllabe 2 syllabes monosyllabe 1 syllabe tétrasyllabe 4 syllabes trisyllabe 3 syllabes hexasyllabe 6 syllabes pentasyllabe 5 syllabes octosyllabe 8 syllabes heptasyllabe 7 syllabes décasyllabe 10 syllabes ennéasyllabe 9 syllabes alexandrin 12 syllabes hendécasyllabe 11 syllabes 2 Les vers pairs sont les plus employés dans la poésie classique. Les plus courants sont l’octosyllabe, le décasyllabe et l’alexandrin, qui est le vers le plus long ; il tient son nom du titre d’une œuvre médiévale en vers de la fin du XII° siècle où il est employé, le Roman d’Alexandre. Les vers impairs sont moins fréquents. L’heptasyllabe est le plus usité, notamment par Hugo au XIX°. L’ennéasyllabe (peu utilisé) et l’hendécasyllabe (devenu rare après le XIV°) sont présents dans la poésie moderne, à partir du XX°. Verlaine préconise l’usage des vers impairs dans son « Art poétique » (écrit en 1874, publié en 1882, et finalement inclus dans le recueil Jadis et Naguère, 1884) : « De la musique avant toute chose, Et pour cela préfère l’Impair Plus vague et plus soluble dans l’air, Sans rien en lui qui pèse ou qui pose. » c) Vers réguliers et vers irréguliers La longueur des vers permet de leur attribuer des caractéristiques classiques et régulières, ou modernes et irrégulières. Le vers régulier : il repose sur le compte des syllabes (de une à douze) qui fixe son rythme ; c’est le vers français classique, qui obéit de plus aux règles de la rime et de la césure. Le vers irrégulier : le vers moderne est libre ; on se libère à partir de la fin du XIX° des contraintes des vers de même longueur et l’on fait se succéder des vers de longueurs différentes, mais on abandonne aussi les contraintes de la rime, voire la ponctuation. Les codes classiques impliquent une longueur de une à douze syllabes, mais l’on peut observer des variations au cours des époques. On peut trouver des vers très brefs : un vers de 3 syllabes dans « Les Animaux malades de la peste » de La Fontaine met ainsi en valeur l’élément détaché : « Même il m’est arrivé quelquefois de manger Le berger. » Notons que La Fontaine, dans ses Fables, emploie des vers hétérométriques (c’est-à-dire de longueurs différentes), mêlant octosyllabes, décasyllabes et alexandrins qui confèrent son originalité au rythme particulier de ses fables. 3 Victor Hugo utilise toutes les dimensions possibles du vers, de une à douze syllabes, dans Les Djinns. On peut également trouver des vers très longs (c’est-à-dire de plus de douze syllabes) qui ne portent pas de nom particulier dans la poésie moderne à partir du XX°, chez Guillaume Apollinaire par exemple. Le vers libre s’affranchit du décompte des syllabes et assemble des vers de longueurs variées à la fin du XIX°; cette pratique se généralisera après avoir été mise en œuvre par Arthur Rimbaud dans les Illuminations (1874). Le verset désigne un vers plus long, irrégulier, employé au XX° par Paul Claudel ou Saint-John Perse 2. Le rythme du vers a) Coupe et césure En français, la dernière syllabe non muette est accentuée. Les accents de cette nature entraînent des pauses que l’on appelle des coupes qui sont mobiles dans le vers. La place de la coupe conditionne la lecture en imposant au vers un rythme. La coupe principale s’appelle la césure (du latin : couper) et sépare les deux moitiés du vers que l’on nomme les hémistiches (qui signifie : demi-vers). La règle classique, définie par Boileau dans son Art poétique, veut que la césure survienne après un mot, et non à l’intérieur : « Que toujours dans vos vers//le sens coupant les mots Suspende l’hémistiche,//en marque le repos » Mais les poètes modernes s’en écarteront parfois, comme le fait Paul Eluard dans le premier de ces deux vers : « Avec tes yeux je chan//ge comme avec les lunes Et je suis tour à tour// et de plomb et de plume » Le premier vers pratique donc ce que l’on appelle la césure enjambante ; le second pratique la césure classique. Ce vers de Racine comporte 4 coupes, dont la césure : « Je le vis,/ je rougis,// je pâlis/ à sa vue » L’alexandrin classique est séparé par la césure en deux hémistiches et rythmé par deux accents secondaires variables : ces quatre mesures l’ont fait nommer 4 tétramètre. Dans l’alexandrin romantique se sont développées parfois, au détriment de la césure, deux coupes secondaires qui en font un trimètre. b) Enjambement, rejet et contre-rejet  L’enjambement indique que la phrase n’est pas contenue dans la limite du vers, qu’elle dépasse, et dont elle déborde sur le vers suivant,. « Tes jours, sombres et courts comme les jours d’automne, Déclinent comme l’ombre au penchant des coteaux » (Lamartine)  Si un élément qui dépend d’un vers ne peut y trouver place et est rejeté dans le vers suivant, il y a rejet. « Mais les vrais voyageurs sont ceux-là seuls qui partent Pour partir ; cœurs légers, semblables aux ballons, » (Baudelaire) « C’est un trou de verdure où chante une rivière Accrochant follement aux herbes des haillons D’argent ; où le soleil, de la montagne fière, Luit ; c’est un petit val qui mousse de rayons. » (Rimbaud) Un rejet célèbre Dans Hernani, drame romantique en vers, Victor Hugo libère l’alexandrin, ce qui constitue l’une des causes de la querelle opposant classiques et romantiques lors de la première représentation en 1830. Les deux premiers vers offrent en effet un rejet : « Serait-ce déjà lui ? C’est bien à l’escalier Dérobé. […] » « J’ai disloqué ce grand niais d’alexandrin » affirme Hugo. Théophile Gautier relate dans Victor Hugo cette bataille d’Hernani : « On casse les vers et on les jette par les fenêtres ! dit un classique », « Ce mot rejeté sans façon à l’autre uploads/Litterature/ regles-de-versification.pdf

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